L'appel de la faim !

S’il y a bien une chose que je retiens ce soir, c’est qu’il faut toujours écouter maman quand elle me dit que si je ne mange pas correctement au dîner, je risque d’avoir faim durant toute la nuit.
Aujourd’hui à la cantine, les dames elles ont distribué des carottes. Et moi, je n’aime pas les carottes. C’est pas bon, et puis c’est tout. Alors, je n’ai pas mangé la viande qui était mélangée avec ces légumes-beurk-beurk non plus. J’ai rangé mon plateau et je suis retournée dans ma cabane m’amuser avec Faith.

Mais à présent, je commence légèrement à regretter mon geste purement enfantin parce que mon estomac lâche des gargouillis sonores comme tout et qui me semblent en plus de ça, interminables. Je me tourne, me retourne, me re-retourne dans mon lit mais rien n’y fait : je n’arrive plus à dormir. Il y a comme un vide intersidéral dans mon pauvre estomac et ça me fait vachement mal. Et j’ai envie de gerber aussi. Je tends la main vers ma table de nuit parce qu’il me semble que j’y avais laissé un paquet de Granola. En effet, le paquet de biscuit est bien à sa place… à la différence qu’il est complètement vide et que seules quelques miettes en sortent. Je lâche un juron inaudible.

« Oh merde ! Pourquoi j’ai tout mangé ? »

Je me résigne donc. Tant pis. J’essaierais quand même de dormir même le ventre vide. J’ai fermé les yeux et l’image du réfectoire m’est apparue. Je ris sournoisement mais silencieusement, me couvre de ma robe de chambre et m’échappe de la cabane comme une voleuse. J’espère juste que le réfectoire n’est pas fermé. Et puis, au pire, j’entrerai par effraction par l’une des fenêtres. Oui, c’est ce que je vais faire. Parce que c’est beaucoup plus marrant et que ça fait comme dans les films policiers.

Je traverse donc l’extérieur du pensionnat, discrète comme une voleuse, silencieuse comme les nuages qui cachent la lune ce soir et rapide comme l’ombre de Lucky Luke. J’ai même l’air d’une super-héroïne avec ma robe de chambre rose pâle qui flotte au gré du vent, rythmée par le balancement de mes cheveux bruns totalement lâchés et décoiffés. Je contourne le bâtiment principal en mode ninja, rasant les murs de très près – parce que j’ai quand même peur qu’un fantôme m’attaque par derrière -, levant mon bras droit, je tâte avec précaution la fenêtre située au-dessus de ma tête et tente de l’ouvrir. Elle s’ouvre.

« Bingo ! »

Je vais enfin pouvoir goûter aux joies du grignotage nocturne ! Laissant un petit rire victorieux s'échapper, je grimpe laborieusement, j'entre furtivement et j’essaie de repérer les lieux malgré la pénombre dans laquelle le réfectoire est plongé. La cuisine, la cuisine, la cuisine… c’est par là-bas ! Sauf que, je fais à peine un pas et je me cogne les orteils contre un pied de table. Je tente d’étouffer un grognement de douleur et retiens ma respiration. Saleté de table ! J’espère que ça n’a réveillé personne…