Allez Campbell, il est l’heure. Ça fait littéralement 5 minutes que t’es devant cette porte, sans bouger. Cherche pas, j’ai chronométré. Dis-moi, ça fait longtemps que t’as pas eu… comment ça s’appelle déjà ? Le trac ? Ouais c’est ça, le trac. De mémoire, tu l’a même jamais eu. C’est ça le problème avec toi mon pote, la vie est pour toi comme une pièce de théâtre, chaque matin tu te jettes sur les planches, tu joues du plus bel art dans ton propre rôle, et peu importe les critiques, peu importe le public, tu continuera, parce que putain la vie t’aime ça.
Tu prends dans ta main ta cravate violette et la regarde longuement, sans vraiment savoir comment réagir. Puis tu souris, légèrement. Campbell en A. Ouais. Ça c’est quelque chose que t’aurai jamais cru voir un jour. Personne n’aurait cru le voir un jour. Et pourtant, c’est arrivé. De toute façon, c’est pas pour prouver quoi que ce soit à qui que ce soit que t’as changé de classe, mais bien pour toi-même. Ton pouvoir, et surtout sa maîtrise, c’est ça qui est important. Il faut t’améliorer. « Mente sana in corpore sano » pas vrai ? Ça s’applique aussi aux dons. Pour être au meilleur de ta forme, au plus haut de tes capacités, tu dois t’entraîner mon pote, t’entraîner et progresser, pour que plus jamais n’arrive…
Tu mets ton casque sur tes oreilles, ton sac sur l’épaule et sors finalement de ta chambre. Tu traverses le salon, et à peine tu pousses la porte du bungalow, que tu vois quelqu’un arriver du coin de l’œil. Sans regarder, ni même savoir qui c’était, tu lui fais un doigt, et t’échappes vers l’extérieur. On est en septembre, mais il fait encore bon dehors. Et surtout jour. Ça ne va plus durer longtemps, cette lueur matinale, alors toi qui est du genre lève-tôt, tu en profites tant que tu peux. Une main sur la anse de ton sac à dos, l’autre au fond de ta poche, tu te diriges vers cette fameuse école, celle qui est devenu ta vie depuis maintenant trois ans.
Petit à petit tu te mélange à la masse d’élèves qui, comme toi, vont déjà en cours. Tu croises certains regards « familiers », qui sont soit surpris, soit moqueurs. Tu leurs réponds du doigt levé. Parce qu’à un moment ou à un autre, il faudrait bien qu’ils aillent se faire foutre non ? En tout cas je suis avec toi mon pote, t’en fais pas.
Une à une, tu grimpes les marches, et traverse les étages, jusqu’à te retrouver au luxueux étage n°4. Bleu et violet, moquette, satin, technologie. Tu étais déjà venu ici quelques fois, pour rencontrer des professeurs, lorsqu’on t’avait expliqué le fonctionnement avant ton changement de classe, mais de le voir rempli d’élèves et pourtant si calme, si rangé, ça te surprends.
Tu croises de nouveau des gens que tu connais, au moins de vue. Certains s’écartent, mais ici c’était leur ter-ter maintenant, celui de l’élite, du talent, de l’inné, la classe supérieure, l’argent, la bourgeoisie et la noblesse de cette école. T’avais beau être connu pour ta tendance à faciliter le contact physique entre tes poings et la gueule d’autrui, ils ne la ramenaient pas moins. Mais grâce à la musique, t’entendais rien, donc tu continues ton chemin vers… « plus loin », là où t’aura suffisamment de place.
Puis, sans t’y attendre, mais un peu quand même parce que t’étais pas complètement con, tu l’as vue. ELLE. Selina. T’as un peu frissonné en la voyant. Mais t’as un peu souri aussi, un beau sourire moqueur. Tu fais un pas vers elle et retires ton casque.
« Évidemment, maintenant que je suis en A, va falloir que je m’habitue à croiser les êtres humains les plus détestables du bahut. »
Cette remarque a rapidement été suivi par d’autres remarques, venant de tes nouveaux camarades de classe, comme un râlement généralisé autour de toi. « He ho, calme-toi Campbell », « Ferme-la pouilleux », « Retourne d’où tu viens, y’a pas de place pour les rouges ici ». Tu regardes autour de toi le visages des contestataires, et souris d’autant plus. Finalement, tu te dit que tu aura de quoi t’amuser ici. Ton plonges ton regard dans les yeux couleur océan de ta meilleure amie, et te rapproches jusqu’à n’avoir plus qu’une dizaine de centimètres qui vous sépare.
« Je sens que ça va être… explosifen disant ce mot tu prends subitement feu cette année... »
8h15. Le réveil de son colocataire sonne. Elle ne lève pas les yeux de son livre. Elle tient à finir ce chapitre. Il lui semble entendre son voisin de chambrée se débattre avec sa couette puis finir par se lever. Elle ne cille pas, elle connaît cette routine par cœur. Elle est réglée comme du papier à musique. A 7h30, elle avait déjà pris son petit déjeuner. A 8h20, elle sera sous la douche. A 8h55 très précisément, elle se trouvera au quatrième étage, attendant que le premier cours de l'année débute. Elle ferme enfin son livre et l'aiguille de l'horloge poursuit sa route. D'une certaine manière, Selina maîtrise le temps, maîtrise son temps.
Elle s'arrête devant le miroir, réajuste une mèche de cheveux et attrape son sac. D'un claquement de doigt, elle arrive devant la salle de cours. Elle fait sursauter certains de ses camarades, notamment les nouveaux. Les anciens eux sont habitués à son mode de déplacement, et même si quelques uns se laissent encore surprendre, ils savent qu'il ne peut s'agir que d'elle. D'un signe de tête, elle salue ses camarades de promo, en tout cas ceux qu'elle se sent susceptible de supporter dès le matin. Elle prend place dans un fauteuil de velours rouge, s'accordant aux rideaux et à la moquette. Elle croise ses jambes, s'accoude au bras droit du fauteuil et pose sa tête sur la paume de sa main. La majorité des A sont déjà là, aucun ne se permettrait d'être en retard. Un peu plus loin, certains élèves de la classe B patientent eux aussi devant leur salle. Ils ne se mélangent pas. La salle des grandeurs et celle des quatre saisons les séparent, et cet espace se comble rarement. Il s'agit d'un des rares moments de l'année où le quatrième étage est presque plein. Le premier jour de cours est symbolique. Dès demain, le calme sera revenu, chacun silencieusement attablé son bureau.
C'est sa neuvième année, son avant dernière. D'ici deux ans, elle quittera cet environnement studieux pour devenir traqueuse. Il lui faudra certainement encore une année de perfectionnement, notamment aux côtés de son professeur de maîtrise de pouvoir, mais ensuite, elle pourra se lancer. Elle a encore appris beaucoup de choses cet été et le contexte actuel, malgré la cacophonie qu'il entraîne parfois, lui permet de compléter sa base de données. Cet après-midi, à la fin des cours, Chan la rejoindra pour lui faire un bilan de cette journée de reprise. Il y a toujours des éléments à retirer de ces circonstances. Si au début elle déplorait la dimension humaine de ses recherches, il était certain qu'aujourd'hui cela la mettait en position de force. On peut assimiler toute la richesse d'un don sans connaître le possesseur. Un sourire sarcastique orna son visage lorsqu'elle vint à penser qu'elle était devenue une sorte d'informateur. On en viendrait presque à se croire dans une organisation mafieuse à certains moments. Il y a tellement de choses se déroulant dans l'ombre actuellement.
Toutes à ses pensées, Selina ne prit pas garde au léger brouhaha qui s'était élevé. Quelques minutes plus tard, elle se retrouva nez à nez avec son poison personnel.
« Évidemment, maintenant que je suis en A, va falloir que je m’habitue à croiser les êtres humains les plus détestables du bahut. »
Elle se contenta d'un haussement de sourcil significatif. Déjà, s'élevait dans le couloir des murmures désapprobateurs venant des élèves de sa classe. Il place son visage à une dizaine de centimètres du sien.
« Je sens que ça va être explosif...cette année. »
Il était vraisemblablement ravie. Cet homme semblait être tout le temps en représentation. Il n'avait aucune mesure. Il en devenait irritant. Pour autant, elle n'esquissa pas le moindre mouvement de recul.
« Campbell. J'avais presque oublié ton récent transfert. Je ne te souhaite pas la bienvenue, rien n'est encore joué. »
A ses mots, elle tourna son regard vers le reste de l'assemblée. Selina savait par expérience que même si le transfert de Duncan parmi eux avait été officialisé, les A ne manqueraient pas de le forcer à faire ses preuves. Certains d'ailleurs, n'étaient jamais véritablement intégrés. Chez les A, on ne pardonne pas l'échec, encore moins la faiblesse ou le moindre écart. Elle vrilla son regard au sien et ajouta de manière audible :
« Pour information, tu es mon cadet. Tu es donc prié d'éviter les familiarités, encore plus avec les dernières années. »
Elle esquissa à son tour un sourire moqueur et posant sa main contre l'épaule du jeune-homme, elle le repoussa brutalement, se dressant face à lui.
« Merci de garder tes distances. » Elle s'avança, frôla son épaule de la sienne et termina : « Tu ne feras pas long feu. »
Selina lui adressa un dernier regard évocateur, et sous les regards approbateurs de ses camarades alla s'appuyer contre un mur, les bras croisés sur sa poitrine.
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Sujet: Re: Suck it and see Sam 3 Sep 2016 - 18:03
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« Campbell. J’avais presque oublié ton récent transfert. Je ne te souhaite pas la bienvenue, rien n’est encore joué.
-Oh tu as raison, la partie vient de commencer, mais j’osais espérer que tu aurai apprécié que ton partenaire favori se joigne à votre petite sauterie. »
Tu sens quelques regards sur toi. La majorité des A sont concentrés, et commencent déjà à travailler de leur propre chef, mais certains profitent un peu du spectacle avant que les cours ne commencent. Et puis ça fait de l’animation pour les nouveaux de cette année. Fais-toi un nom Duncan, c’est le plus important. Dès que tu sera suffisamment ancré dans l’esprit de chacun, le reste coulera de source.
« Pour information, tu es mon cadet. Tu es donc prié d’éviter les familiarités, encore plus avec les dernières années. »
Tu es sur le point d’exploser de rire, regarde autour de toi, les paumes tournées vers le plafond, comme pour lui montrer quelque chose.
« Ton… cadet ? Tu te crois où, au Japon ? Je croyais qu’ici, chez vous les A, le respect se gagnait. Je te connais trop bien pour savoir que tu ne mérites pas ce que tu demandes, jeune fille. »
...Les A ne sont pas vraiment des mecs drôles. Ils réagissent plutôt négativement à tout ce que tu dis, à tout ce que tu es, donc attends-toi à recevoir très peu de support cette année. En tout cas pour l’instant. Mais tout ça ne rend les choses que bien plus intéressantes.
« Merci de garder tes distances. Tu ne feras pas long feu. »
Tu te retournes vers elle, un large sourire affiché sur ton visage. Je te connais depuis quelques temps déjà mon pote, et je sais ce que ça veut dire. T’as déjà prévu ton coup, et t’es très fier de ta connerie.
« Ne me dis pas que tous mes efforts vont… partir en fumée ? »
Ton corps devient soudainement brumeux, translucide, et l’instant d’après semble exploser, comme la fumée d’un feu qui serait soufflée par un coup de vent. Les plus jeunes sont impressionnés, mais les plus vieux lèvent les yeux au ciel. Ils connaissent tes tours de passe-passe, ça ne marche pas sur eux. Tu réapparais quelques secondes plus tard, tel un nuage de gaz grisâtre tourbillonnant au milieu de la salle. Tu reprends forme humaine, dans un silence le plus total. Décidément, personne n’a ton sens de la théâtralité ici. Que des cœurs froids, des esprits complètement régis par la rationalité, la logique, l’efficacité. Aucune place pour l’improvisation chez eux.
Un des gars assis au premier rang se retourne et commence à te parler, mais sur un ton frôlant l’insulte.
« Eh Campbell… arrête tes conneries, t’es en A maintenant, alors ferme-la et assis-toi.
-Bah ! Vous ne comprendrez jamais. »
D’un mouvement du bras, accompagné d’une légère moue, tu lui dit de laisser tomber l’affaire. Tournant des talons, tu fait face à Selina, et d’un coup de fumée, tu te retrouves les bras croisés, accoudé au mur, juste à sa gauche, lui faisant face.
« Tu sais très bien comme moi que je suis bien plus tenace que tu ne veuilles publiquement l’admettre, et bien plus que ne le saura jamais le moindre de ces connards tu balayes l’assemblée de la main, désignant tes camarades de classe de A, suivi de près par quelques désapprobations, et je pense même que tu commences à avoir peur de moi, comme vous autres d’ailleurs! Tu t’écartes du mur, et te tournes cette fois pleinement vers tous ces élèves venus profiter de quelque chose de surprenant pour cet étage :… quelque chose. C’est ennuyant à mourir, et nombreux sont les B qui apprécient un peu d’animation, quelle qu’elle soit. Cette cravate était le dernier rempart auquel vous pouviez vous rattacher, mais maintenant que j’empiète sur votre territoire, on verra si vous arrivez à rester serein dans votre tour d’ivoire! Tu te retournes une dernière fois vers Valentyne. J’espère que tu pourra la tenir, la distance, parce que je ne ferai aucun cadeau. »
Tu pivotes, fais quelques pas, et t’assoies bien confortablement dans le premier fauteuil qui se présente à toi, et lâche sans la regarder:
« Mais ça ne fait aucun doute que tu réussira, pas vrai ? Après tout t’es une A, tu vaux bien mieux que cette brute qui a été transférée le mois dernier... »
C'était prévisible. Elle le connaissait assez pour savoir qu'il lui répondrait par une démonstration de force. Les réactions des nouveaux élèves ne se sont pas fait attendre. Il est vrai que son don était tout ce qu'il y a de plus spectaculaire. D'aussi loin qu'elle se rappelait le connaître, passer inaperçu n'était pas dans ses habitudes. Il fallait toujours qu'il en fasse trop. Avait-il seulement conscience que cette exubérance le mettait à nu pour qui sait voir ?
Elle secoua la tête, légèrement exaspérée par son attitude. S'il continuait comme ça, il ne parviendrait jamais à trouver sa place parmi les A. Dans cette classe, il n'est pas seulement question de réussite et de talent, mais aussi de contrôle et de présentation. Celui qui sait garder son sang-froid gagne. Sans en avoir encore conscience, ses préjugés sur les A déteignaient dans son comportement. Même si elle comprenait pourquoi, et qu'elle n'ignorait pas aussi que certains stéréotypes sur sa classe étaient vrais, ça ne reposait pas que sur ça. Selina le laissa faire son show et écouta sa diatribe sans sourciller.
« Sache cela, j'ai peur de très peu de choses. Quant aux personnes que je suis susceptible de redouter, tu n'en fais pas partie. » Elle prononça ces mots d'un ton calme, sans appel.
Alors que certains élèves s'apprêtaient à aller dans son sens, elle les fit taire d'un regard. Ce n'était pas un spectacle et en outre, elle n'aimait pas attirer l'attention sur elle. Alors que chacun retournait à ses affaires, elle avisa de nouveau Duncan.
« Je reconnais que tu es tenace. » Elle s'empressa d'ajouter : « D'une manière fatigante en ce qui me concerne, c'est vrai. Pour autant, ici, personne ne remettra en cause ce trait de ta personnalité. Pas moi en tout cas. »
Il ne manqua pas de lui lancer une nouvelle pique, tout en prenant place sur un fauteuil.
« Mais ça ne fait aucun doute que tu réussira, pas vrai ? Après tout t’es une A, tu vaux bien mieux que cette brute qui a été transférée le mois dernier... »
Elle se pinça l'arrête du nez. Comme d'habitude, il parvenait à la faire réagir assez pour qu'elle rentre de son jeu.
« Je ne réussis pas parce-que je suis en A, mais parce-que je m'en donne les moyens. » Elle se redressa un peu plus, réaffirmant sa posture. « A vouloir penser comme tous ces autres, qui croient que notre classe ne se résume qu'à une élite arrogante et favorisée, ça prouve que tu ne fais même pas l'effort de comprendre ce qu'être un A, implique. »
Ce n'était pas son genre. Elle était loin de vouloir se comporter comme le porte-drapeau de sa classe, elle laissait ça aux délégués. Mais elle était trop investie personnellement pour accepter le dénigrement facile de la majorité. Sans qu'elle ne l'ait voulu vraiment, sa voix monta d'une octave et elle enchaîna :
« Les personnes qui sont ici travaillent. Les personnes qui sont ici donnent tout ce qu'elle ont pour réussir. Ils suivent assidûment les cours, s’entraînent, connaissent les allées de la bibliothèque par cœur, et ils pratiquent. Ils pratiquent en sacrifiant forcément quelque chose. Si certains d'entre nous ont des facilités, on est tous ici parce-qu'à un moment ou à un autre, on s'est bougé le cul. Comme tu le dirais si bien. »
Selina sentit bien le regard de l'assemblée sur elle. Même si elle n'était pas une A acharnée, elle ne cracherait jamais dans la soupe. Elle choisit d'ignorer l'attention qu'on lui portait pour calmer ce soudain élan de presque passion. A son sens, n'est pas doué qui veut. Tout ce mérite. Le système a des failles, mais ses fondations ne sont pas aussi mauvaises qu'on le prétend. Finalement, elle haussa les épaules, désireuse de passer à autre chose. Elle ouvrit ses yeux couleur orage et disparut brusquement.
Quelques instant plus tard, les deux mains appuyées sur chaque accoudoir du fauteuil, elle faisait face à son interlocuteur. Elle arrondit son dos et esquissa un sourire.
« Duncan. » Elle prononçait son prénom que rarement, et même malgré les années qui passaient. « Je ne te prends pas pour une brute, juste une tête brûlée qui me file des maux de tête. » Son visage se trouvait à quelques centimètres du sien. Une minute sembla s'écouler. Elle recula un peu et dit à haute voix :
« Bienvenue chez les A. Bienvenue chez ceux qui gagnent. »
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Sujet: Re: Suck it and see Sam 3 Sep 2016 - 22:04
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T’es assis dans ton fauteuil grand luxe, plus avachi qu’assis d’ailleurs, le pied droit posé sur le genou gauche, en train d’enflammer et d’éteindre ta main, à tour de rôle, pour passer le temps. Puis Valentyne te sors la meilleure réplique qui puisse être de toute la matinée.
« A vouloir penser comme tous ces autres, qui croient que notre classe ne se résume qu’à une élite arrogante et favorisée, ça prouve que tu ne fais même pas l’effort de comprendre ce qu’être un A implique »
Subitement tu t’arrêtes dans ton petit jeu de feu, et lève les yeux comme pour regarder vers sa direction, toujours avec un large sourire qui déformerait presque ta bouche, à la manière du Joker.
« A vouloir penser comme tous les autres, qui croient que la classe des E ne se résume qu’à un groupe de brute écervelée et de bons à riens, ça prouve que vous ne faites même pas l’effort de comprendre ce qu’être un E implique. »
Ça a jeté un blanc dans le rang des spectateurs. La Guerre des Classes te passait plus ou moins au-dessus de la tête, mais ces A tenaient particulièrement à leurs privilèges, et leur renvoyer leur propre comportement en pleine face, celui-là même que certains dédaignaient de la part des autres classes, et des gars comme Duncan, ça a dû les surprendre un peu. T’aimes la rhétorique mon pote. Mais la vraie, celle de la Grèce antique, celles des philosophes et politiciens, « l’art de parler ». T’aimes le spectacle, t’aimes parler, et on t’offre cette scène sur un plateau d’argent. Que demander de plus ?
Après c’est devenu un peu moins drôle, un sorte d’élan de nationalisme envers la classe A. Bla bla bla, c’était des gars qui travaillaient, bla bla bla. Décevant. Elle pouvait faire mieux, et tu le savais. Mieux que défendre sa classe, mieux que participer à cette piteuse guerre. Mieux que tout ça, mieux que les A. Puis elle disparu. Ah c’est vrai qu’elle avait un sacré don. Et elle savait l’utiliser, de surcroît. Elle était en A depuis son arrivée, y’a plusieurs années de ça. Elle s’est entraîné tous les jours pour le maîtriser. On pouvait pas lui retirer ça : elle avait le talent, et la volonté pour travailler. Depuis qu’elle est toute jeune en plus. Mais tu sais très bien que ce genre de combat ne se joue pas uniquement sur le terrain des dons. C’est un combat constant, où chaque rencontre est une bataille, où chaque mot, chaque geste, est une arme. Et t’as pas dit ton dernier mot.
Mais elle te surprend et réapparaît devant toi, quasiment sur toi, penchée en appui sur ton fauteuil.
« Duncan »
T’as eu une seconde de surprise. C’est pas souvent qu’elle t’appelait par ton prénom. Ça faisait même tellement longtemps que c’était pas arrivé que tu t’étais habitué au son de sa voix prononçant « Campbell », avec un mélange de mépris, de malice, de séduction, et un peu d’arrogance. Mais ce « Duncan »… ça t’a fait frissonner.
« Je ne te prends pas pour une brute, juste une tête brûlée qui me file des maux de tête. Bienvenue chez les A. Bienvenue chez ceux qui gagnent. »
Hmmm… « Tête brûlée ». T’as saisi ? Tout le monde a saisi, Duncan, tout le monde. Et ils attendent de toi qu’une chose, qu’une seule : que tu te brûles la tête. Mais tu l’a vu venir ça. Et c’est pas drôle si eux aussi. Le gag a déjà été fait, deux fois. Une troisième fois serait celle de trop. Alors tu regardes Selina droit dans les yeux, avec un léger sourire en coin.
Soudainement, tu glisses ta main dans la nuque de la jeune femme, et approches ton visage vers le sien, sans briser le contact oculaire. Puis, tu fermes les yeux, et juste avant le contact entre vos lèvres, tu pars en fumée. Tu sembles comme l’envelopper, toute entière, d’un nuage transparent. Tu restes là quelques secondes, puis reprend forme humaine derrière elle. Tu te diriges vers un autre fauteuil, et t’y assieds en regardant Valentyne, de l’autre bout de la classe.
« Tu as raison, vous êtes ici ceux qui gagnent. Mais moi je fais partie de ceux qui jouent, et là où vous vous exposez au risque de perdre, mon contrat est rempli dès lors que la partie a commencé. »
Dans un sens, c’étaient là deux mondes qui s’opposaient. Il y avait d’un côté le tiens, qui ressemblait pas mal à celui des E, et de l’autre côté le sien, qui ressemblait pas mal à celui des A. Deux mondes opposés, qui ne pouvaient totalement se comprendre, mais qui ne pouvaient exister l’un sans l’autre. Tu t’es remis à jouer avec le feu sur ta main, quand le prof est entré dans la salle, pile pour la sonnerie.
« Campbell, éteignez-moi ce feu, ou vous pouvez retourner directement d’où vous venez.
-Monsieur.
-En tant que professeur je suis ravi qu’un élève de E puisse faire preuve d’autant de détermination, et réussisse à remonter jusqu’en A. C’est un exemple qui en inspirera beaucoup, j’en suis certain. Mais ici, c’est le travail qui prime. Le travail, et la discipline. Jusqu’à ce que vous fassiez vos preuves, je vous garderai à l’œil.
-C’est légitime.
-Je ne vous ai pas demandé votre avis. »
Ah faut t’y faire, ici c’est plus la classe E. Ici c’est presque comme une vraie école, va falloir t’adapter mon pote. Tu sens quelques regards se porter sur toi, de ceux qui se moquent intérieurement, parce que tu t’es aplati devant un prof alors que quelques secondes auparavant tu faisais le malin. Mais tu t’es contenté de les regarder, avec toujours cette moue souriante qui te caractérise.
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Une journée de cours plus tard, t'es enfin libéré. Nouvelle classe, nouveau rythme. Ça va te demander un petit temps d'adaptation, mais t'as carrément kiffé le cours de maîtrise de pouvoir, et ça c'est le plus important. En sortant de la salle de classe, quelques A te balancent des remarques à la gueule. "Alors Campbell, pas trop dur?", "Pas trop fatigué?", "T'as tout compris j'espère? C'est que le début là!", "Au pire, si tu redescends en E, personne t'en voudra, on fera comme si t'étais jamais venu". Ils perdaient rien pour attendre ces p'tits cons. Un week-end, une soirée en ville, et c'est une patate qui part sans prévenir.
Puis tu aperçois Selina, en train de marcher dans le couloir, comme tout le monde. Tu "fumée-saute" jusqu'à son niveau, et lui mets la main sur l'épaule.
« Hep hep hep! Tu crois quand même pas qu'on en a fini?
-Oh bordel Campbell laisse tomber! Ou apprends à draguer au moins, là c'est pathétique!
-Eh mon pote si t'as pas envie de te nourrir par intraveineuse pour le reste de ta vie tu ferai mieux de la fermer! ... Laisse-moi te défier. Au billard par exemple! Je sais que t'as pas envie de refuser, alors fais-moi plaisir.»
HRP : Du coup j’ai fait avancer le temps (parce qu’au départ c’est quand même censé être juste avant un cours X) ), le rp se poursuit après le cours.
« Ça nous donnera l’occasion de discuter. Vraiment j’entends. En échange, essaye d’être sérieux pour une fois. »
Wow. Elle a soufflé tes ardeurs mon pote. Sèchement. Et avec une froideur que tu voyais pas souvent. Lui était-il arrivé quelque chose ? Avait-elle pris une décision particulière, durant ces dernières semaines ? Tu ne savais pas, mais quelque chose, quelque part, te chiffonnait. Tu te surprends même à… t’inquiéter ? Pourquoi, pour elle ? Arrête tes conneries mon pote. Tu t’inquiètes surtout pour toi, pour ce que vous avez.
Parce que de toi à moi, c’est l’une des personnes avec qui tu t’amuses le plus. À ses dépends, peut-être, des fois, oui, mais tu t’amuses quand même. Elle sait répondre, elle sait te parler, elle sait donner les répliques pour que tout se passe pour le mieux. Avec elle, même pas besoin de violence, pas besoin de pousser à bout, les mots suffisent.
Les mots… elle les manie comme toi. Elle peut jouer avec, les manipuler, utiliser une palette large d’émotions et les transmettre juste par la parole. Contrairement aux autres elle comprend ce que tu veux dire, quasiment tout le temps. Alors t’essayes de la tromper, de la piéger, mais t’y arrives pas. Et ça te rend fou ! Fou parce que tu veux trouver la faille et t’y engouffrer, fou parce que tu te dis que tout le monde a des limites, mais les siennes te sont encore inconnues. Comme les tiennes en fait. Si t’apprécies autant ces quelques interactions avec elle, c’est parce que de bien des égards, elle est ton reflet Campbell, elle est comme toi sur certains points.
Alors, pendant un instant, tu as un peu peur. Peur de perdre « ça ». Sans votre petit jeu la vie à Prismver te sera moins agréable.
« C’est noté ! Allez, on n’a qu’à dire ce soir, 20h. Je connais un pub dans le quartier ancien, ça va être parfait. Hé, je compte sur toi pour bien t’habiller. »
T’as accompagné ces mots d’un clin d’œil, avant de sauter dans les escaliers en bousculant tout le monde.
« Poussez-vous bande de con ! »
Puis t’as sauté comme un débile dans le centre de la cage d’escalier, le creux qu’il y avait entre les marches en colimaçon. Transformé en fumée, t’es arrivé jusqu’en bas, repris ta forme normale, et c’est le casque sur les oreilles que t’a prit la direction de ton bungalow. Même si cette soirée s’annonçait intéressante, d’une manière ou d’une autre, t’étais maintenant en A mon pote, et dès le premier jour t’as du taff. Sans parler du retard à ne pas prendre.
Il avait été surpris, ne serait ce qu'un instant. Cependant, il avait rapidement repris contenance. Il était plus apte qu'elle a laisser parler ses émotions. Duncan était tout ce qu'il y avait de plus naturel. Il n'étouffait pas sa colère ou son mécontentement, il clamait sa joie ou son enthousiasme haut et fort, et il lui arrivait de se montrer touché. Il ne s'embarrassait pas de faux-semblants ; il était honnête et franc à sa manière. Il ne se paraît d'aucun voile pour se dissimuler. Tout ce qu'elle n'est pas en fait, et ce qu'elle ne sera sans doute jamais. Elle tient à son contrôle, à ce collier qu'elle a elle-même serré autour de son cou. Elle ignore ce que signifierait être elle-même. Selina lui enviait cela, ce naturel désarmant que possèdent les personnes pleinement en vie. Son cœur à elle ne s'emportait plus pour grand chose. Puis cette foutue mélancolie, devenue avec le temps, une caractéristique de sa personnalité. Qu'attendait-elle enfin pour se libérer ? Et se libérer de quoi au juste ?
Elle chassa ses pensées en secouant la tête. Elle ne pût s'empêcher d'esquisser un sourire léger, toujours un peu moqueur, goguenard, en le voyant dévaler les marches et bousculer tout ce qui s'y trouvait. Il ne s'arrêtait jamais décidément. Elle poussa son énième soupir en savant par avance qu'elle regretterait d'avoir accepté cette invitation. Avoir une discussion sérieuse supposait mettre les choses à plat, ce qui impliquait de parler sentiments et c'était loin d'être une chose pour laquelle elle était douée. Pour le coup, elle avait d'elle-même tendue le bâton pour se faire battre. Il faudrait qu'elle parle à Joshua. Son ami saurait trouver les mots. De plus, c'était bien la seule personne avec laquelle, elle se sentait d'aborder des sujets...disons plus émotionnels.
Vingt heures, dans le quartier ancien, rendez-vous au pub. Longue soirée en perspective. C'était la rentrée, le premier jour de cours. Il lui restait deux années, deux ans qu'elle aurait souhaité passer sans encombre. C'était raté. Voilà qu'elle s'impliquait émotionnellement. Il n'y avait rien de pire pour elle. Si le chaos devait régner au pensionnat, ce ne devrait pas être le cas pour elle. Jamais.
Elle regarda une dernière fois l'escalier où venait de disparaître Duncan. Quelques secondes plus tard, elle se téléporta dans son bungalow. Dans le couloir résonna un simple et sec : « Je déteste la rentée. »
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Je viens de me rendre compte que mon précédent post avait sauté...-- Je sais même pas comment c'est possible. J'ai pas fait de sauvegarde, désolé.
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Suck it and see
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