Tu détestais les fêtes de fin d’années. À chaque fois, tu décomptais les jours qui restaient avant le début du nouvel an, car chaque personne qui te parlait revenait avec ces mots-là à la bouche : “Alors, qu’as-tu prévu pour Noël ? Tu vas avoir des cadeaux ? Tu vas à une fête ?“ Tant bien que cela te cassait les pieds au point de pestiférer contre le moindre incongru qui t’interrogerait là-dessus dans les derniers jours précédent la naissance du Christ (fabuleuse invention). Oui, ton humeur supportait très mal ces effusions de joie et la seule entité considérée nuisible par tes soins risquait de se prendre des coups de chevrotine dans la figure (et ça n’a jamais été très agréable). La réponse coulait pourtant d’elle-même à ces questions rhétoriques, absconses de sens par le simple fait d’observer ta situation. Tes parents vivaient en plein cœur de Londres, dans un magnifique appartement surplombant Westminster, alors pourquoi penserait-on que tu n’aurais pas de cadeaux ? Quid des responsables de cette mascarade ? Sur ces promptes pensées, tu commençais en tous cas ce beau dimanche, vite terni par l’impertinence de certains de tes camarades. Comme chaque jour, tu te levais aux aurores, aux alentours de six heures du matin. Tu faisais ton sac, tu te brossais les dents, tu t’appliquais tes divers crèmes aux visages, et tu prenais ta bouche afin de mettre ton uniforme scolaire, bref, rien de très extravagant.
La matinée se passa normalement, cours de français, et d’autres langues intéressantes, de la pratique, et surtout la pause déjeuner. Peut-être le seul moment de la journée que tu trouvais supportable, tant ton alliage avec la nourriture te rendait plus souriant. Cela te permettait de supporter ce qui pouvait te miner le moral, même si, d’accord, tu te contrefichais totalement des gens tant qu’ils ne te parlaient pas. D’ailleurs, cela te donnait un air plutôt rustre. Un genre d’ermite ronchon qui ne parle à personne et qui jette quiconque se met en travers de sa route. Un peu comme le Ranke en plus modéré. Cette image, tu ne l’appréciais pas spécialement, surtout répandue dans la classe E. Au contraire, chez les A, tu étais quelqu’un d’apprécié, et tu parlais à pas mal de monde, mais il n’était pas mensonge de dire que tu évitais comme la peste les “cas sociaux“ de cette subdivision. En clair, tu les snobais. Tu ne leur parlais pas, car déjà, ça t’emmerdait, mais surtout car la discussion provoquait souvent ton ire. Ils étaient suffisants, et chiants. Toi, tu avais des raisons de l’être, tu étais en A et tu maîtrisais de surcroît un pouvoir rare. Mais eux, quand bien même ils en avaient la maîtrise, leur talent se proportionnait à leur part de débilité. Soit très grande. En clair, pas mal d’idées arrêtées des deux côtés de la barrière. Tu notais que cela n’était pas forcément productif mais que de toute façon, personne ne te demandait ton avis.
En tous cas, cette journée pouvait bien se dérouler. Mais le ciel était d’humeur joueur. Dans la cour intérieure commune à tous les élèves pendant les pauses, tu marchais en direction des toilettes à cause d’une pressente envie que rien n’allait retenir, quand tu marchas par mégarde sur le pied d’un élève. De ta cravate violette bien représentative de ton niveau, tu te retournas avec agilité pour ne pas perdre l’équilibre, alors que tu aperçus avec difficulté la victime de ta maladresse.
► ARNOLD . « Euh, désolé. » Une phrase concise mais simple rapidement prononcée. Tu ne voulais pas trop t’appesantir à friquailler avec la moindre personne que tu bousculais. Tu espérais juste qu’il ne s’agisse pas d’un timbré comme certaines classes pouvaient contenir.
« Abandonner ? Il n’est pas question d’abandonner. » ► THATCHER.
Encore une journée de merde. Comment je le sais ? Ha ha, mystère. C'est un de mes nombreux pouvoirs secrets, ouais, parce que j'en ai des tas, normal, je suis over-trop-cool. Bref, ça sentait l'embrouille à plein nez. Comme chaque jour en fait.
Réveil aux aurores avec une gueule plutôt effrayante, je dois bien l'avouer. Petit-déjeuner composé d'un verre de lait et d'une pomme plutôt juteuse, tout ceci en silence pour éviter de déranger les autres, même si l'envie de réveiller Curtis d'une façon plutôt désagréable m’effleura l'esprit une demie seconde. Laissant mes envies diaboliques de côté, j'allais me laver les dents et me laver tout court, avant d'enfiler l'uniforme. Ha ha. L'uniforme. Quelle idée merdique. Comment osent-ils me faire porter un truc aussi laid ? Pfff. Ce n'est pas comme si j'avais le choix en même temps. Je décidais donc de laisser mes goûts vestimentaires de côté et me coiffer, prenant mon épaisse chevelure entre les mains avant de l' attacher avec un joli noeud rouge, arborant fièrement les couleurs de ma classe. C'est alors que, sac armé, je me dirigeais vers la porte, en direction de mes futurs cours.
Pourtant, je n'aime pas apprendre, je n'aime pas les gens, je n'aime pas écouter. Je n'aime pas aller en cours. C'est genre... Trop barbant. Désolée hein, mais écouter un professeur déblatérer des trucs incompréhensibles pour tout élève un peu en difficulté (comme moi) et tout ça pour quoi ? Pour mon soi-disant "avenir", heu, nan, j'm'en passerais, mais c'est quand même gentil de proposer. T'façon, j'ai pas besoin d'apprendre avec des mots moi, y'a que la pratique qui me branche, c'est pourquoi en travaux pratiques, j'excelle, parce que ça, au moins, ça ne m'endors pas. Si je vous dis ça, c'est parce que, bien sûr, je n'eus pas vraiment le choix et fus obligée d'aller en cours. Et bien évidemment, je n'ai presque rien écouté. Les mathématiques, c'est barbant. Le français, c'est chiant. L'anglais, c'est le seul truc un peu intéressant, mais malheureusement, je ne suis pas très douée. Et les autres langues, j'vous en parle même pas. bref. Journée de merde. Alors, pour passer le temps, j'ai dessiné. J'ai sorti mon cahier de brouillon, commencer mes exercices, histoire de faire genre que je travaillais comme l'excellente et bonne élève que je ne suis absolument pas et attrapais mon crayon de papier toujours taillé à la perfection avant de commencer à laisser mon imagination s'exprimer. Le dessin est un des rares domaines où je suis douée, avec le combat et d'autres trucs du genre. Peut-être parce que, hm, depuis que je suis petite, c'est le seul moyen que j'ai pour imaginer ce que j'ai toujours désiré, et ce qui me passe par la tête. La mine de mon crayon se baladait sur la petite feuille à carreaux, esquissant quelques courbes maladroites. Je balayais ensuite de mon souffle chaud les quelques restes de ma gomme. Tandis que je jetais souvent quelques coups d'oeil vers mon professeur, repassant aux exercices lorsque celui-ci s'avançait d'un peu trop près.
Entre deux cours, j'allais discuter avec les autres E. Ils sont sympas, même si certains sont pires que cons. J'avoue que les intellos, la plupart du temps, ça me gonfle. Toujours à étaler leur savoir, à se prendre pour des êtres supérieurs et tout, sérieux, qu'ils la ferme un instant quoi. En plus, ils la jouent trop en mode "personnel", c'est chacun pour sa pomme et ils s'entraident même pas. Enfin, chez les E, c'est pas non plus le travail d'équipe qui règne, mais au moins, ici, on se marre bien et les cours passent plus vite, les pitreries des uns font rire les autres, même s'il arrive que toute cette bonne ambiance finisse en bagarre générale, dont je suis souvent la première à réclamer. Enfin, je l'aime bien ma classe.
Bref. La journée de merde continua. Je dus me retenir durant tout un cours avant de pouvoir aller aux toilettes, me tortillant sur ma chaise pour me retenir. Sortant de celles-ci, soulagée, je marchais tranquillement quand soudain je sentis une douleur, au niveau du pied. JAEIHIHEIAHIOHIEOAROAR. QUI. QUI DONC. Qui donc pouvait oser ME MARCHER SUR LE PIED. Mon regard se dirigea vers sa cravate, qui bien sûr, me révéla une petite part de son identité. GRRR. Un violet. Un mec. Un intello. Sale petit... GRRRR. Me connaissant, il risquait de le regretter amèrement.
ARNOLD ▬ Euh, désolé.
Ha. Ha ha. Désolé ? C'est tout ? Quand on tient à s'excuser auprès de moi, on se met à genoux et on me supplie. c'est une règle d'or pour ne pas avoir trop de problèmes avec moi. Et, comme d'habitude, je n'allais pas mâcher mes mots pour lui répondre, surtout avec un homme de son espèce.
NYX ▬ Eh ! Tu peux pas regarder où tu marches, p'tit con ?! Et c'est tout c'que t'as trouvé pour t'excuser ? Tu viens de salir MES chaussures là !