Fantome du passé qui revient hanté les plus profonde pensé. [PV Jor']

Look who's here...

Jor’ est assis, il lit le serpent. Ou plutôt, il en a les airs. Il s’agit de ses dernières heures de cours, il s’agit d’une fatalité, d’une illustre coïncidence qui le fait sourire, qui lui fait battre son cœur froid. Non d’un sentiment chaud, mais bien d’un sadisme invétéré. Pour le moment, son cœur bat normalement, morne, irrégulier. Jor’ ne lit pas, il réfléchit. A tout, à rien, à son apogée, à sa chute. Oui, quand va-t-il chuter ? Jor’ se pose la question, Jor’ profite de ses heures de gloire.

Sur le côté, derrière son bureau, accoudé à ce dernier d’une main, l’autre tenant le bouquin, un dénommé Freud. Jor’ exècre Freud, il le trouve inutile et faux, il trouve sa philosophie de vie plus spectaculaire que celle de l'écrivain. Jor’ a étendu ses jambes croisées, ses cheveux coiffés en arrière. Le reptile reste immobile, il ne se soucie pas de la classe E, des élèves qui arrivent, qui se préparent. Jor’, il attend l’heure, le présent, le début, la fin. Le serpent doit glisser dehors ce soir, il a une proie en vue, il a une idée en tête. Une mince idée, sombre, bien maigrelette. Jor’, il fait avec. Il n’a pas le choix, les grandes idées, les grands évènements, les surprises invétérées semblent tentées à le fuir. Jor’ plisse ses iris. Il voudrait bien de la difficulté, de la complexité, n’importe quoi pour l’amuser.

Le saurien tourne une page, il ne l’a pas lu, il est dans ses pensées. Il trouve ses dernières bien plus intéressantes. Quel enfoiré. La porte claque. L’aiguille de sa montre glisse au point culminant. Deux instants. Seulement deux instants en un. Un moment, mince, où le temps à l’air de s’arrêter, où il est tenté de sourire. Ses yeux se lèvent, doucement, vers cette porte fermée, bloquée par une chevelure qu’il a ô combien caressé. Il plonge dans tes abîmes, tes deux iris qu’il n’a cessé de fixer. Un vert marécageux qui s’étincelle et s’éclaircit au contact de ce saphir intense. Aussi intense que vos ébats. Oui, il s’en souvient. Pourtant, il ne sourit pas. Peut-être car il garde cet élément pour la fin. Pauvre belle, tu as tout l’intérêt du Jor’. Le saurien penche la tête de côté, inflexible, fermant son bouquin d’une main pour le poser sur son office. Sa voix est d’une neutralité presque effrayante. Pourquoi ne jubile-t-il pas Jor’ ? Pourquoi se retient-il ? C’est son moment, l'un de ces grands évènements si rares dans une vie. La confrontation de l’enfoiré et de la blessée. Tu as changé, il le pense, il n’hésitera pas à le dire. D’un coup, dans sa tête, le cours change, il diverge. Oui, sa voix est neutre, aussi morte que sa générosité.

« Eh bien, Mademoiselle Scott, on dirait que vous venez de voir un fantôme. »

Sarcasme. Personne ne peut comprendre, sauf vous. Il le sait, il manie ses mots en fonction. Juste pour que tu sois visée, juste pour t’effleurer sans te toucher. Ses yeux te quittent, ils ont fini d’enregistrer chaque détail de ton être. Il continue.

« Allez vous asseoir, Mademoiselle Scott. »

La Classe E, il ne la porte pas dans son cœur, comme toutes les classes. Sauf la classe S, il l’exècre. Jor’, il remarque qu’il y a des absences, mais il s’en fiche, il ne fait pas l’appel. Pourquoi ? Tout simplement car ce sont les problèmes des élèves. Jor’, il attend que tu prennes place, il calcule son chemin durant ces deux belles heures, durant lesquelles il sent qu’il va s’amuser, un trajet répété, ni trop, ni assez. Il jubile, Jor’, il jubile. Sa voix s’extirpe, suivie de quelques plaintes d'élèves.

« Contrôle surprise. Notez les questions que je vais vous dicter. Il durera tout le cours. »

Un motif aussi pour le Jor’, afin de réfléchir, afin de te laisser cogiter. Il sait que tu es perturbée, on ne trompe pas le Jor’. Ce reptile aussi, est dérangé par ta présence, ne le crois pas monstre. Seulement…Il est dérangé d’une excitation si rare à ses yeux. Sa voix dicte, susurre. Il reste assis, les mains croisées devant ses lèvres. Il t’observe, sans se cacher, ni trop, ni assez. Pas trop pour éviter les questions. Assez pour croiser ton regard. Il a l’air de s’ennuyer ferme, comme d’habitude. Mais en son peu d'âme, sa langue pourlèche ses lèvres, sa mémoire le fait jubiler. Il adore cette situation, il adore te voir dans cet état. Le Jor’ termine sa diction, il rouvre son livre, reprenant son ancienne position. Pourtant, dès que tu lèves les yeux, si rarement, si souvent ? La probabilité que les siens se plantent dans les tiens est si infime…Il triche. Il triche pour rendre cette probabilité absolue. Oui, la moitié du temps, si tu lèves les yeux, il est là, il les fixe sans qu’aucune émotion se peignit sur son visage. Une émotion ? L’ultime jubilation.