InvitéInvité | Sujet: Re: Monster. Mer 9 Avr 2014 - 22:44 | |
I'LL GET MY REVENGE ON THE WORLD OR AT LEAST 49% OF THE PEOPLE IN IT AND IF I END UP WITH BLOOD ON MY HANDS WELL, I KNOW THAT YOU WILL UNDERSTAND 'CAUSE I FIGHT LIKE A GIRL Ca ne m’avait même pas surpris. Au fond, ça devait être quelque chose de normal. Il fallait bien que toute cette violence éclate un jour où l’autre. Trop de poison, de mots, de jeux – trop de contrôle pour deux êtres calcinés par la passion.
Premier coup – mon sang s’accélère, mon sang crie, mon sang bat à mes tempes comme un marteau frappe l’enclume. Mon souffle se coupe sous la douleur qui monte, délicieux incendie.
Douleur. Douleur. Douleur.
Et ma conscience part et revient, disparait, se déforme, nait et meurt. Je suis les ongles plantés dans la commode la plus proche, je suis à son contact, je suis sur le sol – et j’ai mal mal mal. Au moins aussi mal que lorsque Marwin m’avait frappée, quelques semaines plus tôt. Pourtant, tout est différent. Dans mon corps, dans ma tête, quelque chose a changé – quelque chose s’est détruit, s’est transformé.
Il veut frapper ? Qu’il frappe, le pauvre chéri. C’est simpliste, décevant. Je pourrais en rire, je pourrais m’en moquer. Drew, l’ange déchu, Drew, le manipulateur d’esprit, toujours si habile dans ses mots - intouchable. Mécanicien de l’âme. Le voilà réduit à sa véritable apparence – chien enragé mordant avec violence pour exprimer son mécontentement. J’en rirais presque. J’en rirais si ma gorge n’était pas bloquée – étouffée par mon propre sang. Vraiment, tout ça est bien dommage, Drew. Tu as beau frapper, tu ne pourras pas me briser. Je suis déjà en morceaux.
Le craquement de mon nez sur son genou retentit, et je lâche prise, n’ayant même plus la décence de retenir les gémissements de souffrance qui viennent de mes entrailles, hurlements à la Lune. Poupée désarticulée dans ses mains. Ses paroles parviennent à moi à travers les cognements de mon pouls qui s’affole. Coup au ventre, coup au visage.
Et je souris, encore, entre deux cris – mon corps a cessé d’agir. Seules mes pensées restent – mélange chaotique de douleur colère douleur dégoût et plaisir. Sûrement l’adrénaline, sûrement ma fierté, sûrement sa seule présence sont ce qui me forcent à rester les lèvres tirées, ensanglantées, engourdies.
Il y a un moment où tout brûle tellement que plus rien ne fait mal.
Moment de clarté – je rencontre mon reflet. Pauvre créature que tu es Sarah, te voilà vraiment laide, toute peinte de ton propre sang. Mes yeux morts et pourtant si ardents rencontrent les siens alors qu’il continue à parler, admirant, découvrant sûrement sa propre folie. Je reste silencieuse, respectant ce moment – le meilleur. Celui où l’on croit que tout nous est ouvert, tout nous est possible parce qu’on est ça, malade, dément, dérangé. Juste avant de lentement se faire emprisonner.
Il me parle de sa douleur. Ah oui, la fameuse douleur du pauvre Drew – qui ne la connait pas ? Il l’a étalée depuis que j’ai lâché sa main, sur son visage, ses gestes, ses mots. Drew souffre. Je souffre. Sa souffrance est plus violente que la mienne ?
Mais qu’en sait-il ? Rien rien rien rien.
Il n’a jamais rien su Drew. Il n’a jamais rien voulu savoir. Pourquoi je l’avais aimé, pourquoi je l’avais quitté, pourquoi je l’avais détesté, pourquoi il m’avait manqué. Rien de rien. Mais il compare – parce qu’il est devenu comme moi, grand, théâtral, dramatique. Dans ses cris, pleurs, gestes, coups. Au fond qu’est ce qu’on est Drew ? Toi, juste un adolescent qui a subi un chagrin d’amour, et moi, juste une gamine qui n’a pas su gérer ses sentiments. C’est faible. Risible. Inintéressant. Regarde jusqu’où notre goût de l’excès nous a mené. Miroir, beauté brisée, haine – ils sont là, tous les éléments de notre tragique histoire. Qui sait, peut être qu’un jour elle deviendra une légende qu’on racontera dans les murs de Prismver, pour faire peur aux jeunes amants.
Tellement ironique, tu ne trouves pas ? Et voilà que tu continues, menaçant de t’en prendre aux autres – te complaisant dans l’ostentation de ta petite personne. Un rire sort de ma gorge, faible, éraillé – mais vibrant de répulsion. Et lentement, je reprends le contrôle de mon corps. Y sentant chaque bleu et ecchymose. Feu battant à mes tempes. Tâches blanches dans mes yeux. Sang dans ma gorge.
Il menace Jim, il menace les personnes qui me sont proches. L’ancienne Sarah s’en serait sûrement griffée de terreur, préférant se cacher pour éviter que cela se produise. Pour éviter d’être la cause d’autres drames. Elle aurait cillé, se serait débattue de ses dernières forces pour s’enfuir, et se serait enfermée. Pour ne plus ressortir. Tremblante, convulsante, se tuant elle-même par culpabilité chronique.
Mais c’est fini. Cette Sarah est poussière. Soufflée au loin par ses paroles pleines de vice. Je combattrai.
Pas avec mes poings, ni avec mes pieds, ni avec mon corps qui se démantèle au moindre coup. Je n’ai pas la force d’un homme comme toi. Mais je combattrai. Combattrai comme la jeune femme que je suis. Mon cœur, ma voix, mes yeux seront mes seules armes – j’obtiendrai ma revanche. Sur toi, et sur le monde. Ce sera inutile de fuir ou de se cacher – car si nous n’avons plus d’honneur, nous n’avons plus de honte.
Dans le brasier de mon corps roué – une détermination grandit en silence, allumant mon regard d’un feu nouveau. Tu m’as montré qui tu étais vraiment Drew, je t’ai regardée. Je t’ai accueilli, toi et tes coups qui sont allés pourfendre ma chair. Maintenant, c’est à ton tour.
Mon visage se tourne lentement vers lui – et j’inspire une dernière fois son odeur. Je crache. Tourne la tête, et crache. Ce dégoût, cette haine – je la postillonne à son visage. Aussi simplement que cela.
M’éloignant ensuite, pressée et vacillante – tenant à peine sur mes jambes, valsant avec toute l’arrogance qu’il peut me rester vers la sortie. « J’ai gagné. Je gagnerai. Encore. Toujours. » Ma main vient tourner la clé sans trembler, et j’ouvre la porte, redressant les épaules. Puisant dans mes dernières forces pour le dévisager.
A deux doigts te tomber en pièces et pourtant plus forte que jamais. « Alors ne sois pas mauvais joueur. »
Je pars. Brûlée, déchirée, cassée. Physiquement ravagée, mentalement anéantie. Mais mon sourire toujours en place. A maintenant et à jamais.
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