[FINI] DON'T TOUCH HIM ft. killiam

Il relève les yeux vers toi, te regarde, enfin. Tu lui souris légèrement, un peu tristement quand même, parce que c'est loin d'être bien de parler de ce genre de choses, c'est loin de faire plaisir. Alors ton sourire n'est pas entièrement lumineux, ou entièrement tendre, ou entièrement heureux, c'est juste... juste le genre de sourire que l'on fait lorsqu'on est là, mais qu'on ne peut pas agir, lorsqu'on est là, mais qu'on ne peut rien faire à part... être là.

— Merci... ça veut dire... qu'on est... mh.. amis ? Il y a encore quelques semaines, tu m'aurais dit ça, je ne t'aurais pas cru...

Le mot semble bizarre entre ses lèvres et tu fronces les sourcils sans comprendre. A vrai dire, tu n'avais jamais eu besoin de mettre des mots sur ce que tu étais ou sur ce que les gens étaient pour toi. Et qu'il dise ce mot, pour vous définir, te gênait un peu, parce que non, vous n'étiez pas vraiment amis, c'était un peu plus bizarre que ça, un peu plus unique que ça... et en même temps, il n'y avait aucun autre mot pour définir ce que vous étiez.

— Bah.. ouais ? Enfin j'dis pas ça à n'importe qui. Puis tu te serai rappliqué dans ma piaule à trois heures du matin y'a quelques semaines je t'aurai pas mis dehors non plus, j'suis pas un monstre quand même.

Tu aurais râlé, clairement, et tu aurais voulu le mettre dehors s'il était juste venu pour rien... et encore peut-être pas. Mais dans tous les cas, s'il était pas bien et qu'il était venu te voir, même à trois heures du matin, tu l'aurais pas envoyé péter. Tu le regardes et un rire t'échappe quand il reprend que même pour tabasser Jack, il serait là. Et ça te fait rire, un peu, doucement, tendrement.

— J'éviterai de t'appeler pour venir tabasse Jack, j'me suis mis dans la merde tout seul, j'vais pas t'embarquer avec moi là-dedans.

Tu restes un moment silencieux, essaies de trouver quoi lui dire, quoi rajouter pour ne pas partir directement, immédiatement. Parce que tu sais qu'au moment même où tu te détourneras, tu te poseras des dizaines et des dizaines de questions qui ne te feront que le faire fuir. Alors tu attends un peu, encore un peu, pour profiter de cette ambiance, pour profiter de ton esprit vide de toutes questions trop insupportables pour toi et tu reprends ensuite, te décalant, prêt à partir :

— Bon bref, voilà, hésite pas, c'est tout.

Et pourtant, tu ne bouges pas. Un seul pas était suffisant, et maintenant, tu restes juste là, les mains dans les poches de ta veste trop large, à ne rien faire, et à attendre.  

— Si tu t'énerves pour un petit con pro-nazi qui dit des conneries, il prendra son pied... so, calme, okay ?
— Je suis toujours calme, répliques-tu en détournant les yeux.

Non, vraiment, tu avais été plutôt calme finalement, quand tu avais mis ton poing dans la gueule de Jack. Tu n'avais pas trop perdu ton calme, au contraire, tu étais parfaitement maître de toi et de tes actions. C'était ça qui était d'autant plus jouissif. Mais déjà, il te coupe et reprend la parole, cherchant un peu ses mots et tu le regardes faire, un léger sourire aux lèvres qui se transforme en rire quand il te parle de ta main et qu'il insulte Jack. Ça te fait rire, ça fait du bien. Et au fond de toi tu as envie de lui dire merci, mais tu t'en empêches.

Tu l'écoutes attentivement, cherchant son regard, le fuyant ensuite, le cherchant de nouveau. Tu hausses doucement les épaules avant de t'appuyer de nouveau contre le mur.

— Je pense pas pouvoir soigner ça plus vite, enfin, mettre un peu de pommade peut-être ? Mais sinon y'a rien à faire... puis ouais. J'veux bien. T'es pas un spectateur si énervant que t'en as l'air, le taquines-tu.

Tu abandonnes le mur de nouveau, parce que tu ne sais pas quoi faire, parce que tu es un peu gêné, sans savoir pourquoi, un peu embêté, sans pouvoir te contrôler. Et tu l'observes, regardes autour. Personne. Tes yeux s'abaissent de nouveau vers lui...

— Je vais y aller, j'ai deux trois trucs à faire.

Menteur Killiam. Menteur. Oh quel menteur tu fais. Mais il faut que tu partes, tu as besoin de partir, parce que tu te sens peut-être un peu trop bien pour te sentir vraiment bien ? Ça te dérange, ça te gêne, il faut que tu partes avant de te laisser totalement aller. Tu recules, lui fais un signe de la main, déjà sur le départ :

— C'était cool de te voir. Hésite pas si t'as besoin, ou envie, enfin voilà.

Et tu fais volte-face. Et tu fuis. Tu fuis, peut-être en marchant trop vite. Tu fuis, parce que ton cœur tambourine si fort que tu as l'impression qu'il pourrait l'entendre. Tu fuis parce que tu commences à te rendre compte de ce qu'il se passe et tu ne veux pas, t'es pas prêt pour ça. Alors tu fuis. Tu le fuis. Mais surtout, tu fuis ce que tu commences à ressentir toi.