Lesson One [pv Ernest]

putdown the playbook

Elle se plie à ses règles puisqu’il lui accorde un peu de temps quelques fois au milieu de son emploi du temps de ministre. Euh… non de super movie-star. C’est la seule raison qui explique sa présence ici au milieu des miroirs. Alors qu’elle les déteste tous. Tous ces reflets. Les siens. L’image et les formes qu’elle y voit abandonnées. Alaska avait bien raison. Mais c’est l’une des premières choses qu’il tient à lui enseigner au fil du temps : dealer avec son image. Les stars des grands et petits écrans, ne serait-ce que pour le coeur même de leur métier sont observés constamment. “Tourne-toi plus vers la caméra.” “Le visage dans cet angle.” “Le regard plus expressif.” Ils sont épiés par leurs propres collègues, leurs paires, cette communauté de professionnels qui les entourent. Et puis il y a les médias et leurs flash incisifs. Puis, le grand public dont on ne commentera pas le comportement. Ceci n’est pas un essai comportemental. Ou du moins pas tout à fait.

Dans tous les cas, accepter et apprendre à faire face à son image était la plus grosse partie de cet apprentissage dispensé par Ernest à la petite Chloé. Au-delà de la pratique en elle-même de la comédie pour, un jour, fouler les planches de Broadway. Son objectif insensé du moment. Sa distraction lorsqu’elle doit tirer le rideau sur ce qui lui abîme le coeur comme les attaques d’Alaska et Hadès.

Studieuse et consciencieuse, elle étudie plus que ce qu’il demande et tente tant bien que mal de relever les défis lancés par le D lors de leurs entrevues. Elle le fait avec beaucoup de fierté, c’est peut-être bien grâce à ça que lentement, elle parvient à sortir des sentiers battus. Par esprit de contradiction en quelque sorte. Pour lui montrer et leur montrer à tous qu’ils se trompent sur elle -même si elle aussi a tort. Mais il faut reconnaître que c’est difficile.

Déjà, leur association dénote totalement. Autant physiquement que moralement. C’est une combinaison des plus improbables qui se joue là. Ils surprennent dans les couloirs. Ils se sont jugés lui franchement, elle, du coin de l’oeil. Lui à l’allure si défaite, elle si soignée. Il se tient mal et porte ses succès avec fierté. Elle se tient droite, mais est toute recroquevillée sur elle-même, n’ayant rien accompli jusque-là. Mais au moins, ils ont un point commun, qui mettrait peut-être un jour leurs proches d’accord : avec eux, on ne peut pas se fier aux apparences. Prédiction et anticipation sont aussi à exclure. Les premières heures de méfiance et de doute passées, tout s’est enchaîné. Après tout c’est elle qui lui à demander de lui donner des cours. Il fallait bien assumer son choix.
Bref. Pour résumer, la combinaison d’Ern’ et Chlo’ est juste surprenante sur et sous tous les aspects. Et pourtant, étrangement, cela fonctionne plutôt bien. Elle ne l’avouera pas de sitôt, mais elle éprouve un certain respect pour cet énergumène épatant. Si seulement il était un peu plus raffiné ou stylisé dans les mots qu’il emploie. Remarque, ça serait moins drôle. Parce que oui, intérieurement, elle rigole beaucoup.

Mais aujourd’hui, il faut se dire qu’elle est un peu distraite. La raison est multiple. Un baiser qu’elle n’oubliera jamais. Son premier. Celui de Zephyr. Puis une discussion avec Mack. À propos d’une première fois douloureuse où il fallait être like a warrior. Celle la très grande rousse et de l’ancien démon de la bande. Inquiétant tout cela, alors ça avait été si doux avec Zeph’... Difficile à concevoir. Donc tout ceci avait soulevé tellement d’interrogations internes que Chloé avait même fait des recherches. Semant encore plus la confusion vu les résultats dégotés. Seulement il y avait bien entendu une partie technique qui nécessitait un feedback réel et expérimenté. Et c’est à ce moment-là qu’à la fin de leur cession de pratique que la miss se lança, le dos encore plus droit, les jambes serrées, chevilles croisées, main serrée autour de sa briquette au lait framboise.

- Ernest, tu vas dire que je passe du coq à l’âne, mais j’ai vu un porno hier., dit-elle le plus sérieusement du monde. Elle lève sa briquette en carton et chope la paille entre ses lèvres comme si elle venait de dire “oh regarde, un chat.” Est-ce que tu en regardes toi aussi ?
Elle aspire son lait d’une traite et le scrute simplement, ne se rendant pas vraiment compte de son manque de discrétion.
- Bref. J’ai une question. Elle marque un temps. Plusieurs en réalité de façon générale, mais d’abord… Est-ce que les filles… et les garçons font vraiment ces bruits au lit ?, demanda-t-elle sérieusement comme si il s’agissait d’un sujet d’études très important. Lukas et Mack ont fait ça ? Elle ferme les yeux. Genre “oh, oh, oui, donne-moi ta bite.” et “plus fort, plus fort, oh mon Dieu, baise-moi mon gros lapin”, etc. Sa voix est douce, elle respire lourdement et elle a conservé son flegme de bonne élève en disant cela. Puis elle éclate de rire. C’est ridicule !

À cet instant, on pourrait la voir confiante dans des domaines dans lesquels on peut suspecter qu’elle n’a que peu d’expérience. Mais elle n’est pas aussi innocente qu’il n’y paraît. Bon d'accord. Sur ce sujet-là si. Sinon elle ne chercherait pas à en savoir plus auprès d'Ernest. Mais elle vient peut-être tout juste de désarçonner par le mélange subtil de naïveté et d'extravagance qui fait sa personnalité.

- Ernest, tu vas dire que je passe du coq à l’âne, mais j’ai vu un porno hier.
- Ok mais j’te préviens si c’est l’but de ta carrière va falloir chang...
- Est-ce que tu en regardes toi aussi ?

Ernest, assit en train de se masser le pieds, se leva doucement en la fixant avec de grands yeux, comme soudainement transcendé par une force cosmique.

- Non. Et je ne suis pas Terrien. Je viens de l’hyper-espace.... Expulsé par un trou noir, reprit-il avec sa voix plus grave, bien à lui, acquiesçant soudainement avec sa bonne tête de pervers. Un bon gros trou noir.
- Bref. J’ai une question.
- Balance la sauce.
- Plusieurs en réalité de façon générale, mais d’abord… Est-ce que les filles… et les garçons font vraiment ces bruits au lit ?

Ernest croisa les bras, la regardant simuler des gémissements sans l’once d’une réaction, comme si elle était en train de réciter un poème.

- C’est ridicule !
- C’est stimulant., réctifia t-il presque sur un ton de reproche en décroisant les bras pour joindre ses mains dans son dos.

Il entama les cent pas, une chaussure et une chaussette en moins.

- Est-ce que les sportifs sont obligés de beugler sur le terrain dès qu’ils renvoient une balle ou sautent vers un panier ? Non. Mais ça leur donne plus d’intensité dans l’action. Est-ce que c’est nécessaire de gueuler quand t’es dans un manège à sensations ? Nan, mais tu l’fais par euphorie. Et est-ce que c’est nécessaire de gémir quand tu t’allonge après une longue marche ou mange un gâteau délicieux ? Non, c’est la satisfaction.

Il cessa de marcher pour la regarder, très sérieusement.

- Faire l’amour c’est pas juste glisser une bite dans un trou. C’est tout un exercice, et tout un langage. Tu gémis pour dire à l’autre que c’est bon, pour lui faire comprendre de faire ci ou ça. Des fois tu gémis parce-que c’est juste tellement bon que tu peux pas t’en empêcher, c’est naturel, c’est ton corps qui l’fait. Quand on nique faut exciter l’autre constemment, pendant l’acte, et tous les moyens sont bons. Gémir c’est comme te tripoter les seins devant son nez, ça maintient l’excitation, ça peut l’accentuer si y’a un coup d’mou. Et dans l’cas des pornos, tout est cent fois exagéré de sorte à ce qu’en huit minutes tu gicles. En tout cas, même de base, c’est la jauge d’appréciation pour ton partenaire. Si tu couche avec un mec - ou une fille - qui reste stoïque et silencieux, tu t’fera chier. Si il gémit, tu verras que c’est toi qui est en train de lui procurer cette sensation. Ca booste ton égo et te pousse à continuer l’effort et tout donner. Le but c’est l’plaisir, et le gémissement c’est l’moyen de montrer à l’autre que t’en as.

Et ajouta, posant sa main sur son épaule et plongeant son regard dans le sien comme si il s'apprêtait à lui donner le sens de la vie:

- Crois-moi, si tu veux réussir ta vie, ne crois pas les pornos. La vie ça s'explique pas en 8 minutes.

Il croisa de nouveau les bras, levant le menton et les sourcils.

- D’autres questions ?

Fevrier

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- Crois-moi, si tu veux réussir ta vie, ne crois pas les pornos. La vie ça s'explique pas en 8 minutes.
- Hm… D’accord. Donc tu veux aussi dire que la plupart des hommes n’ont pas un tube de Pringles dans le pantalon. Noté.
- D’autres questions ?

Elle le jauge une seconde, puis acquiesce vivement du menton. Les réponses de tout à l’heure ont été plutôt instructives. Presque rassurantes. Même si elle n’était pas du tout certaine de savoir, un jour, être aussi à l’aise avec quelqu’un. Elle se penche pour chuchoter alors qu’il n’y a personne d’autre dans cette pièce. Comme si elle se rendait compte seulement maintenant que cette discussion était bien outrageuse. Mais elle allait tout de même les poser ses questions très ou trop crues. Ernest n’allait pas s’offusquer, ça c’était déjà certain.

- Les garçons aiment vraiment l’enculade, n’est-ce pas ? Il la corrige sur le terme approprié, mais elle insiste. N’est-ce pas ?, répète-t-elle.
- Tu l’as déjà fait ? Une lueur d’intérêt soudain passe dans ses grands yeux bleu. Et tu ne penses pas tu es dans… Il la coupe sur le fil. Tu ne sais même pas ce que j’allais dire ! Elle fait une grimace et regarde le reflet d’Ernest dans le miroir d’à côté. Un bon gros trou noir..., gloussa-t-elle.

Chloé termina son lait-framboise et décroisa ses chevilles pour balancer ses pieds dans le vide. Elle réfléchissait au porno puisque c’était sa seule référence. Mack n’avait pas été dans les détails de sa première fois avec Lukas. C’était bien compliqué tout ça.

- Tu sais le film ne durait pas 8 minutes, c’était plus long que ça. Et ils faisaient des choses vraiment… étranges. Ils racontaient même des poèmes. Elle marqua une pause pour river son regard dans celui d’Ernest. C’était quelque chose comme… “Il était une fois un homme qui venait de Nantucket. Sa bite était si longue qu’il pouvait la sucer tout seul. Il s’exclame, le menton dégoulinant de foutre : si mon oreille était une chatte, je pourrais la baiser. Et malgré le fait que ce soit elle qui vient de réciter ces mots, elle reste encore très interdite. C’est vulgaire. Mais dans son regard, il y a toujours cette lumière curieuse. Tu te sucerais la bite si tu pouvais ?... Tu avalerais ? Elle déglutit à ce moment-là. Et nous les filles… On doit avaler ?

La voilà la vraie question. Elle réfléchit encore. Écoute tout ce qu’il dit avec peut-être trop d’attention et de sérieux.

- Je crois que je ne saurais pas faire une pipe à un garçon. D’un côté, ça a l’air simple. Faire des va-et-vient et c’est plié. Mais comment le faire tout en respirant, et sans le mordre ? Tu ne t’es jamais promené dans le rayon porcelaine d’un magasin chic en paniquant parce que tu as l’impression que tu vas briser toute la vaisselle ?

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S’entrainer ? Ew. Avec un gode ? Double-ew. De toute façon, elle ne saurait même pas où trouver ça.

- T’a qu’à demander à Olive Cruz j’suis sûr que c’est une suceuse de compét ahah.

Chloé vrilla son visage vers Ernest en haussant un sourcil. La marraine de Lukas ? Elle ne voyait pas comment il pouvait émettre une telle certitude. Et encore moins comment elle irait demander cela à une étrangère. De toute façon, ce n’était que de la curiosité.

- Tu veux pas que je t’apprenne sinon ? J’ai l’matos hein.

Elle rit avec lui tout en rejetant proprement l’offre d’un signe de tête. Étrangement, elle n'est pas mal à l'aise quand Ernest l'observe. Elle le regarde droit dans les yeux. Son regard est intelligent et complice. Ses yeux sont deux diablotins. Elle a certes manqué de discrétion et de retenue sur le coup, mais si il y a bien quelqu’un pour qui ça n’a pas d’importance, ça doit être lui. Elle le considère comme quelqu’un d’expérimenter dans beaucoup de domaine et surtout la vie. Et même si parfois, elle peut être aussi sérieuse que étourdie, parler avec la petite rouquine peut être aussi dangereux qu’échanger avec Cruz.

- T’a une gueule de sainte, j’me fais pas de soucis pour toi. Tu vas devenir une vraie cochonne et ça s’fera tout seul alors t’angoisse pas.
- Une gueule de sainte m’assure d’être une vraie cochonne… ?, répéta-t-elle en papillonnant des cils. Donc toi avec ta gueule de délinquant t’es pas du tout cochon ?

Redoutable candeur dont elle joue en suivant sa logique un tantinet ridicule. Elle lui sourit de toutes ses dents. Mais un jour, dans un avenir lointain, peut-être même dans un monde parallèle ou une autre réalité, il y a une probabilité pour que Chloé White devienne la femme fatale la plus vulnérable de la planète. Juste parce qu’elle sait trop bien cacher son jeu.

- Pourquoi, t’a l’intention d’passer à l’acte bientôt ? Si c’est un puceau tu peux être rassurée, ça sera trèèèèèèèèès loin du porno.
- Non. Je n’ai aucune intention de ce type. Pourquoi j’en aurais ? Pourquoi quelqu’un aurait cette intention avec quelqu’un comme moi ? Son visage ne rit plus. Il n’y a même plus une seule trace de sourire sur ses traits qui se reflètent dans ces miroirs. Et le regard qu’elle jette dessus rapidement est plein de dégoût, de mépris. J’étais juste curieuse. Même si l’idée du sexe m’amuse, je pense plutôt que ça ne me conviendra pas. C’est trop intime.

Elle dit ça pleine d’assurance, alors que son coeur tremble. Elle dit ça presque avec fantaisie, comme si cette conversation n’avait été au final que fantaisie. Jamais elle n’aurait pu tenir cette conversation avec sa marraine Sarah. Même si la meilleure amie de celle-ci -et accessoirement la marraine de Zephyr- semble plus accessible et ouverte, c’est la même histoire. La même sensation. Quand Sarah et Charlie prêtent attention à quelqu’un, l’observent… Il est facile de trembler sous leurs regards. Et Chloé est assez intelligente pour les craindre. Si Chloé suppose qu’elle serait plutôt transparente sous les yeux caramel de Charlie, elle imagine aussi très bien les mots implacables de Sarah, du type “quand un mec rencontre une fille, il la met dans une catégorie : “amie pour toujours” ou “potentiellement baisable”.” Et à ce moment-là, White réaliserait avec désespoir qu’elle ne rentre dans aucune de ces cases.

- Mais c’est bien de désacraliser le truc. Le sexe… Ce n’est pas si important que ça en fait. Je suis sûre que je saurais même faire des blagues maintenant !

Petit à petit, elle retrouve son étincelle, sa flamme qui vacille. Ses lèvres se pincent, ses pieds se balancent dans le vide et sa tête dodeline de gauche à droite. Elle cherche justement quoi dire pour que cela reste léger, puis pose soudainement son regard sur Ernest, avec malice.

- Que dis-tu de… “Quelle est la différence entre une bite et une carte de crédit ?” … “Une femme ne refusera jamais de la prendre.” C’était bof au vue de la réaction d’Ernest, alors que elle retente le coup. ”Quelle est la différence entre une marée noire et une mini-jupe ?” … “Dans tous les cas, la moule est en danger.” Elle sourit et décide d’en essayer une dernière. ”Qu’est-ce qui vient après le 69 ?” … “BAIN DE BOUCHE !”, s’exclama-t-elle, trop fière d’elle.