SAUVONS JEAN LUC PUTAIN (PV SULLY)

▬ TA MÈRE !!!

Ce furent les mots de Shun avant qu’il ne balance la manette de sa console contre son armoire. Il n’aimait pas perdre. Il n’aimait pas les bugs, il n’aimait pas jouer quand il perdait, bref, il jouait pour la victoire, parce que le divertissement était trop mainstream, trop raisonnable pour quelqu’un d’aussi instable que lui, parce qu’il était incapable de réagir normalement après un jeu. Il en était conscient, on le lui disait, mais la nature était ainsi faite. C’était un rageux. Il ramassait les miettes restantes de son instrument de jeu, le posa sur la table et fit volte face vers la console qui n’avait pas moins subi que la manette. Même en défonçant les os de son index en spamant le bouton d'allumage de l'objet électronique, ce dernier ne répondait pas, ce qui, au bout de la 130ème tentative, commença à l'inquiéter.

Il serra sa console - nommée Jean Luc depuis le jour de sa rencontre avec - dans ses bras en signe de deuil et prit une résolution : Jean Luc allait vivre. Jean Luc se tirerait de cette terrible situation. Jean Luc ne pouvait faillir. Et aussitôt, Shun reprit espoir. Il se dirigea vers la salle informatique où l'unique personne, l'Élu de la Prophétie censée rétablir l'équilibre dans la Force (autrement dit la vie électronique de ce petit chinois) pouvait euh, donc, rétablir l'équilibre. Et l'aider à réparer sa console entre autres. Il poussa la porte de la salle où en effet, conformément à son instinct instinctif, il croisa la prof d'informatique, Sully au nom commençant par O' trop swagg. Il posa délicatement Jean Luc - drapé dans un voile noir comme les morts en fait - sur le bureau devant la professeur d'informatique.

▬ SAUVEZ MON AMI JE VOUS EN SUPPLIE.

Il se serait bien incliné mais il avait mal au dos, et ça ne pardonne pas. Il se serait bien mit à genoux, mais le sol était crade, et il y avait des limites à ce qu'il pouvait bien faire pour son ami. Entre sa fierté et sa console, il n'y avait pas photo. Il choisissait la fierté.

Sauvons Jean-Luc Putain! [Shun]

T'avais campé la salle d'info ces derniers jours. L'idée de refaire une peau neuve à l'intranet t'avais prise comme une envie de pisser après avoir bu la bière de trop. Bien installée sur le fauteuil de bureau, tu t'étais isolée pour avancer ton code en paix. Tu avais beau adorer sentir la présence de gens autours de toi, ce genre d'activité nécécitait rigeur et surtout silence. Le genre de silence absolu que l'on ne trouve que dans le labo d'info en plein week-end. Comme personne ne s'amusait jamais à venir se balader dans ta salle (ce n'étais pas vraiment la tienne, mais soyons honnête, c'était tout comme) tu t'étais laissé aller à sortir comme tu ne te serais jamais laisser sortir à l'accoutumée. Vieu sweat-shirt vert forêt décoré d'une grande triforce dorée, shorts en jean sur collant jaune converses délavées et surtout, chignon difforme que ta chevelure cuivrée refusait d'accepter. Tu avais tout ce dont tu avais besoin pour être productive, c'est à dire le confort d'un pyjama et un pack de 6 litres de Dr Pepper.
Cela ne t'empêchais pourtant pas de rencontrer certain problèmes, mais il ne te fallait jamais trop longtemps pour les résoudre. Cependant, tu t'étais rendu compte un peu tard que malgré l'absence de réseau mobile sur l'île, un certain nombre d'élèves avait tout de même conservés leurs mobile ce qui te forçait à repenser l'architecture du site en profondeur pour qu'il puisse s'adapter à ce genre d'écran. La tâche n'était pas spécialement compliquée mais particulièrement fastidieuse quand une bonne partie du site était déjà mise en place.
Mais alors que tu semblais arriver au bout de ton calvaire, un bruit de pas pressé attira ton attention. On ne cours pas dans les couloirs On t'avais tellement rabâché cette ligne quand tu étais plus jeune que tu prenais un malin plaisir à faire la réflexion à ton tours. Mais tu ne t'attendais pas à ce que cet agité déboule subitement face à ton bureau, implorant une sorte d'intervention divine de ta part.  

- Sauvez mon ami, je vous en supplie!

Pourtant, semblait seul. Avait-il assisté à l'un de ces combats de coq organisé par Hadès? Ce pourrait-il qu'un peu plus loin ou dans leur arène invisible, deux élèves se soient battus à sang? Pourtant, tu monitorais toute activité de la page Vendetta. Tu avais mis en place un système d'alerte à chaque requête pour pouvoir intervenir en cas d'incident. Mais peut-être… peut-être que ta mise à jour de l'intranet avait perturbé ce système. Après réflexion, tu avais bien  dû modifier les droits d'écriture du blog du démon rouge… En avait-il profité pour empêcher ton analyse de trafic? Tu accours vers la portes, observant le couloir avec une expression grave. Tu as peut-être fait une terrible erreur.

- Où?

Tu ne veux pas perdre la moindre seconde en mots inutiles. Tu es tellement pressée que tu ne remarques que maintenant le paquet sur ton bureau. Et tu commences à comprendre que la situation n'est peut-être pas si grave que ce que tu l'avais imaginé. Tu soupires, retournant derrière ton ordinateur d'un pas lent.

- Oh… C'est ton ami n'est-ce pas? Demandes-tu en posant tes doigts sur le paquet.

Tu observes le drap noir, tentant de comprendre ce qui peut bien ce cacher dessous. Luke aurait compris en un clin d'œil. Il fait toujours ça. Impressionnant, mais agaçant. Ton regard remontes lentement vers l'étudiant. Son ami… est là-dessous Alors deux options se dessinent dans ton esprit : un élève a été transformé en quelque chose (animal ou objet, mais s'il vient vers toi, c'est plus probablement la deuxième option), soit il ne s'agit pas d'une personne. Il n'y avait pas trente-six façon de le savoir. Tu soulèves lentement le morceau de tissus,  révélant les lignes d'une console récente, loin des inquiétudes que j'avais donc pu me faire.

- Oh boy. J'aime l'esprit. C'est quoi son petit nom? Et surtout... C'est quoi son petit problème?

MAIS TU T'ATTENDAIS À QUOI PUTAIN furent les pensées de Shun à l'instant même où la professeur le regarda avec un regard inquiet. Il faut dire que Shun n'était pas des plus tolérants lorsqu'il perdait des parties, sa mauvaise humeur devenait hautement contagieuse et il avait tendance à perdre de vue les évidences de ce monde comme le fait qu'il n'était qu'un petit élève de merde en face d'une prof avec dix mille fois plus de connaissances que lui, mais que voulez-vous, l'univers est souvent plein de surprises, mais d'un côté TU T'ATTENDS À QUOI SOUS UN DRAP DE 30 CENTIMÈTRES BORDEL LOL ET C'EST ÇA UNE PROF était une pensée bien trop tentante pour qu'elle ne vienne pas polluer son cerveau. Certes il avait qualifié sa console "d'ami" mais ça puait l'évidence qu'il ne s'agissait pas d'un être humain à moins que cette prof ait une passion secrète pour les Schtroumpfs ça doit sûrement être ça MDR quelle déduction de dingue ce Shun est vraiment incroyable.

▬ C'EST JEAN LUC IL S'ALLUME PLUS PUTAIN JE SAIS PAS QUOI FAIRE JE PANIQUE.

Il parla tellement vite que Sully dut difficilement comprendre ce qu'il venait de dire, à moins qu'elle trouve excitant le fait qu'il déballe sa pensée aussi rapidement, après tout on trouve toutes sortes de fantasmes en ce bas monde. Quoi qu'il en soit sa voix était si désespérée que le gros mots n'avait pas l'air agressif après tout il n'allait pas insulter une prof il avait juste cette mauvaise habitude d'être vulgaire à force de traîner dans la rue et surtout il gueulait en permanence ce qui est très mauvais pour les tympans, encore que là il a modéré son volume étant donné sa proximité dangereuse avec Sully. Était-elle en train de lui faire des avances ou avait-elle grillé qu'il avait piqué le parfum de l'un de ses colocataires, il n'en savait encore rien mais tel un héros, il se promit de découvrir la vérité.

▬ Bref sinon vous pouvez m'aider ? Je sais pas comment faire et je suis un peu désespéré donc voilà je demande à une pro.

Sauvons Jean-Luc Putain! [Shun]

Dans le flot incroyable de parole du chinois, tout ce que tu arrives à comprendre, c'est Jean-Luc. C'était de loin le nom le plus ridicule que t'avais entendu pour une console (si tant est que nommer sa console ne soit pas déjà ridicule). Parmi toute les possibilités de noms géniaux mais importables, faire s'appeler une console Jean-Luc, ça devrait être puni par la loi. Ton regard blasé par la nouvelle se pose naturellement sur le gamin, tandis que ton petit sourire en coin se transforme en grimace de déception.  Jean-Luc quoi. Ça te coupe presque l'envie de soigner la pauvre chose.

- Bref, sinon, vous pouvez m'aider? Je sais pas comment faire et je suis un peu désespéré donc voilà je demande à une pro.

"Une pro". Ça te fait presque marrer. C'était un truc que les élèves n'arrivaient pas à comprendre : être prof d'info ne te rends pas capable de régler n'importe quel problème lié à toute technologie du XXIème siècle.

- Tu as tout faux, gamin. J'suis pas pro en élec'. A vrai dire j'suis même une vraie brêle dans le domaine.  Cependant…

Tes doigts poussent la console de quelques centimètres et tu te laisses tomber dans ton fauteuil, prenant un malin plaisir à regarder le visage décomposé de cet étudiant en détresse. Pourtant, tu n'es pas vraiment le genre de personne à prendre plaisir dans la souffrance des autres, au contraire. Mais ça fait tellement d'heures que tu te noies dans ces lignes de codes pour ce foutu intranet que tu en profites pour t'amuser un peu.

- Il y a peut-être quelque chose que je pourrais faire pour disons… lui sauver la vie. Lui donner la vie même. Enfin la lui rendre? Hm. Difficile à dire, elle n'a jamais été en vie après tout. Lui donner ? Lui rendre? Bref, je te laisse choisir.

Tu te rapproches d'un coup de la console, posant délicatement ta main droite sur l'objet, lui adressant un regard maternel. C'est ton truc, ça, de trop t'attache aux objets. Après on se demande pourquoi tu collecte autant de bazar dont tu n'arrives plus à te séparer : tu rencontres à peine une PlaySation que tu as de la peine pour elle à cause de son prénom.

- Il y aura par contre deux conditions. Mais rien de bien compliqué. Déjà : plus de maltraitance. Cette pauvre chose ne s'est sûrement pas cassée toute seule. Si j'apprends que c'est le cas, et je n'aurais aucun mal à le savoir, je t'affligerais exaaactement le même sort que celui que tu auras réservé au pauvre Jean-Luc.

Plutôt évident : en t'approchant de l'objet, un certain nombre de rayures avaient attiré ton attention. Et c'est le genre de chose que tu ne laisserais jamais arriver à un objet que tu as animé.  

- Ce qui m'amène à la condition numéro deux … Jean-Luc c'est pas possible pour une Play. Renomme-là, et je te la répare.

▬ RENOMMER JEAN-LUC ?

RENOMMER JEAN-LUC ? Mais elle a craqué mdr genre il va renommer sa console au nom si parfait, sa console qu'il chérit depuis toujours et qui prend si cher avec tant de plaisir. Les consoles masochistes existent et dès qu'il l'a vu en vitrine, Shun a su que c'est celle-ci qu'il lui fallait. Bon, cette belle histoire d'amour n'est pas tellement vrai puisqu'il a simplement embarqué la console chez le vieux qui l'a récupéré et donc le narrateur a déjà oublié le nom malgré les huit heures passées sur l'histoire de son personnage, mais l'alchimie est tout de même présente entre ces deux êtres.

Quelqu'un pouvait-il vraiment priver Jean Luc de son nom ? Quelqu'un pouvait-il remettre en question ce patronyme chéri et si bien réfléchi ? Quelqu'un pouvait-il affirmer que Jean Luc n'était pas un bon nom pour une console et qu'il faille absolument le renommer ? Quelqu'un pouvait-il ôter ce prénom tant de souvenirs et de sentiments ? On est du même avis, personne ne peut. Cette professeur d'informatique commet un acte terrible, du même calibre que les pires crimes de ce monde. Jamais Shun ne se soumettra à cette tyrannie. Jamais il n'abandonnera les souvenirs de tout un...

▬ Ok il s'appelle Eminem maintenant.

Jean Luc ou Eminem, quelle différence, Eminem ne sera qu'un pseudonyme et Jean Luc son prénom. Ce qui mettait Shun dans l'embarras, c'était la seconde obligation - et il dût se faire violence pour ne pas lâcher un cri d'impuissance digne de celui de Dark Vador. C'était terriblement cruel. Il allait essayer, bien entendu, mais quand à la réussite de cette condition... OH MAIS. OUI. IL ALLAIT LE FAIRE. Il se défoulerait sur autre chose, c'était aussi simple que ça.

▬ Promis, je vous enverrai des photos de la console de temps en temps. Je sais pas faire mais je le ferai.

Sauvons Jean-Luc Putain! [Shun]

Tes conditions semblaient poser problème à l'asiatique qui ne cacha pas son état de choc. Sourcils froncés, il avait l'air de chercher une échappatoire à tes exigences. Le fait est que tu ne le laisserais pas s'en sortir sans qu'il les accepte. Tu avais déjà du mal à te convaincre de réparer une console abîmée appartenant à quelqu'un qui violentait le pauvre objet, alors si c'était pour que ces maltraitances recommencent, ce n'était même pas la peine. Et l'appeler Jean-Luc, entrait dans cette catégorie de choses que tu ne laisserais plus lui arriver.

- OK, il s'appelle Eminem maintenant.

Tu lança un regard pas très convaincu au brun, mais fini par te convaincre de ne pas faire plus de réflexion que ça. Eminem, c'était déjà mieux que Jean-Luc. Puis il avait réussi à faire son petit bout de chemin dans la vie. Et au pire des cas, il suffirai de demander à la principale concerné ce qu'elle en pensait. Peut-être que si sa propre Play lui disait en face à face que c'est ridicule, il finirait par l'écouter. Même si quelque chose te disait que le personnage était bien trop têtu pour se laisser faire sur ce sujet. Qui sait, peut-être que son amour pour les jeux lui ferait prendre la bonne décision.

- Promis, je vous enverrai des photos de la console de temps en temps. Je sais pas faire, mais je le ferai.
- Pas la peine, je m'informerais avec les moyens du bords.

T'avais toujours cette habitude de t'informer d'à peu près tout ce que tu voulais auprès des murs et des portes. Gamine, ça te permettait d'être au courant de tous les commérages possibles et imaginables. Et même si aujourd'hui tu étais toujours aussi friandes de petites histoires dans ce genre, tu préférais te servir de ton pouvoir de façon plus raisonnée. Enfin, en général.

- Bien, en tout cas, si tout ceci est réglé, on va pouvoir passer à la phase de sauvetage alors.

Tu attrapais alors ta bouteille de Dr Pepper entamée et en descendit un bon quart avant de te faire tourner sur ta chaise. Un petit sourire aux lèvres, tu donnais deux petits coup de tes ongles bien manucurés sur 'Eminem'.

- Coucou toi, je m'appelle Sully O'Meara, mais tu peux m'appeler Maman c'est plus causy. Je viens essayer de te réparer.

Ni une ni deux, la console tourna sur elle-même et fit face à son propriétaire. Les LED de son lecteur CD se mirent à clignoter à une allure qui te semblait tout sauf naturel avec d'éjecter le jeu en plein sur le jeune garçon. Fortuitement, l'appareil manqua sa cible et le disque rejoint non sans une certaine douleur évidente liée à son éclatement, le mur de l'autre côté de la salle. Tu regardes la scène déconcertée. Tu n'avais pas vu quelque chose de si énervée depuis la fois où tu avais essayé de te réconcilié avec ton smartphone tombé dans une canalisation à Houston un jour de pluie.

- C'est pas la peine de me remettre en marche si c'est pour me remettre dans les mains de ce démon ! Beugla la machine d'une voix grave.

Mâle. Une femelle n'aurait pas un ton pareil. 

- Plutôt être recyclé en brosse à chiotte électrique que de retourner avec cet abrutit. Non seulement il joue qu'à des jeux de merde, mais en plus il y joue comme une merde, et il met ça sur mon dos!

Tu lèves tes mains au niveau de tes épaules pour signifier ton innocente au chinois, une tentative de pokerface sur le visage. Le fait est que tu n'es pas mécontente de la situation. Sans que tu n'ait vraiment eu envie de l'insulter comme le faisait 'Eminem' mais c'était plutôt agréable de savoir que ses agressions envers la pauvre console n'allaient pas restées impunies.

- Je crois qu'on va devoir négocier un peu tous ensemble…


Tu agites tes doigts vers la console, invitant Shun à prendre place à côté de celui qu'il croyait être son ami depuis si longtemps, le regard du "mais qu'est-ce que tu attends, installe toi bordel de merde" dans les yeux.

▬ Ok vas-y on négocie., conclut-il en s'asseyant devant la console.

Il la fixa. Et la console le fixa.
Du moins, il le supposa puisque la console n'avait pas de yeux, mais cette tentative de meurtre rattrapait toutes les fois où Shun s'était énervé. Il avait peut-être cogné sur lui, mais lui avait manqué de le rendre aveugle avec son propre CD. Sans compter qu'il lui devait un jeu FIFA. Mine de rien, même si la console était présentée comme une victime, Shun avait également son mot à dire. Il n'était pas innocent dans cette affaire, c'était sûr et certain, mais il n'aimait pas qu'on se moque de lui et cette console aimait le faire assez régulièrement, et ce, avant même qu'il ne commence à s'énerver.

▬ T'avais des bugs avant que je te frappe, et t'étais neuve.
▬ Le vieux m'entretenait pas.
▬ Comment tu peux bug si tu restes sans bouger ?
▬ La vie de console. Très difficile.

Pause. Shun roula des yeux. Il était peut-être de mauvaise foi quand il s'agissait de jeux, mais cette console n'arrangeait en rien les choses. Insupportable, têtu et incapable de reconnaître ses erreurs à présent qu'il avait la protection de la prof d'informatique... si Shun avait su, il se serait contenté de la donner à tonton, qu'il la répare en échange d'un service. Shun se moquait bien de devoir quelque chose à quelqu'un, et ce, malgré les rumeurs qu'il y avait sur ce type.

▬ FIFA marche pas chez toi mais marche chez la console d'Orion.
▬ Je lirai pas ce jeu pourri.
▬ T'es chiant !
▬ Aussi chiant que toi quand tu chialais en parlant de cette Li...
▬ Ferme ta gueule. Ou je te balance par la fenêtre.

Sa voix était devenue froide sur cette dernière phrase. Il avait perdu la moindre trace d'humour, il ne s'était même pas soucié d'être en présence d'une prof. Il se retourna, passa la porte de la salle informatique qu'il claqua sans se retourner. Quelle connerie. Quelle situation de merde. Elle n'avait qu'à garder cette console.

Sauvons Jean-Luc Putain! [Shun]

Shun tira la chaise et s'installa devant la console, un air presque sérieux sur son visage. Si lui acceptait d'écouter ce que la console avait à dire, ça ne pouvait pas mal se passer. Tête comme il semblait être, c'était déjà une avancée. Petit temps mort, tu regardes les deux "amis" les uns en face des autres en descendant un peu plus de Dr. Pepper, un regard amusé sur le visage. Bug, histoires de consoles, vie compliquée. On imagine pas la vie intérieur des objets avant de discuter avec eux. Un simple miroir pouvait à lui seul vivre des choses incroyable. Il t'étais arrivé de discuté avec l'un d'entre eux qui avait été traversé par un élève. Rhode, mais l'objet n'en avait aucune idée. Ca t'avais fait esquissé un sourire d'entendre son point de vue sur le don de ton élève.
Nouvelle discussion. FIFA, jeu de merde, insulte, menace. Tu reposes ta bouteille de soda sur le bureau brusquement. On ne menace pas un objet que tu as animé aussi facilement. Le chinois se lève, tu le toise aussi sérieusement que ton visage enfantin te le permet, mais ça ne l'empêche pas de quitter la pièce en claquant la porte. Tu le suis d'un pas déterminé. Il faut croire que tout ce que tu lui avais dit était entré par une oreille et sortie par l'autre. Pas franchement étonnant vu le personnage. Tu ne tardes pas à rattraper le brun par la capuche de son jogging, affrichant cette mine renfrognée que tu ne gardes que pour les jours où tu es vraiment en colère.

- Toi, là.

Le fait est que tu ne connais même pas son nom, mais ça t'empêche pas de le traîner jusqu'à la salle de classe.

- Tu vas m'écouter très attentivement gamin : que t'ai des histoire avec n'importe quelle meuf de Prism, j'en ai littéralement rien à battre. Cependant, si ça fait que quand je te dis de rester calme avec un objet que j'anime pour toi, tu fais de la merde, ça devient mon problème. Mon pouvoir, mes règles. Donc tu t'assoie sur cette chaise et crois-moi, tu ne sortiras pas de cette pièce dans que cette histoire ne sera pas résolu.

Tu pousses l'étudiant vers la console et tire une chaise à proximité face à la porte sur laquelle tu t'assoies, jambes croisées, bras contre ta poitrine. Dire qu'aujourd'hui devait être plutôt calme, cet idiot avait réussi à te gâcher ta bonne humeur.

- Ok, Eminem, on se met d'accord. Tu fais un effort sur FIFA, et Shun te frappe pas. C'est un deal correcte, ça non ?  

▬ J'veux pas qu'il soit animé., répondit-il sans gêne. C'est bien mieux quand il ferme sa gueule.

Affalé sur la chaise où elle l'avait ramené, il regardait la console de ses yeux bleus glaciaux, dénués de toute compassion et de cet humour qui le caractérisait d'ordinaire. S'il avait été gentil à l'égard de sa console au tout début de cette discussion, elle avait franchi la limite. Ce n'est pas que Shun se montrait irrespectueux ou insolent, il en avait simplement oublié sa position. Il observait la console sans même songer qu'il était un élève à la limite de se prendre une punition monumentale. Mais Shun n'y pensait pas. Il mit un moment avant de se redresser, tournant la tête vers l'adulte qui le surveillait.

▬ J'ai pas demandé à faire chouiner cette daube et je me tape personne ici. Ni nulle part ailleurs. Si vous pouvez m'envoyer 400 ans dans le passé, vous pouvez aider. Sinon vous pouvez pas.

Son ton n'était clairement pas agressif ni accusateur, simplement neutre. Les choses étaient ainsi. Alors ainsi étaient les choses. Il n'en voulait à personne si ce n'était la console qui n'avait rien dit depuis la menace de tout à l'heure. Tout comme elle était consciente du sérieux du sujet qu'elle avait évoqué pour avoir vu les réactions de Shun, elle savait qu'il ne rigolait plus. Il était bien trop inoffensif pour faire du mal à quelqu'un, mais ce n'était qu'un objet... et son don était tellement aléatoire...

Son don. Il réfléchit un instant. C'était un bon moyen de se venger. Cette seule pensée le réconforta et le calma - si bien qu'il adapta un ton plus posé pour la question suivante :

▬ Ma veste, quand vous lui avez tiré dessus, c'était pas votre problème ? Ou bien le respect dépend des objets ? Il s'appelle Jean-Paul si jamais y'a besoin.

Il finirait bien par l'écouter une fois sa crise de colère passée, mais même calme, il était hors de question de se laisser abuser.

Sauvons Jean-Luc Putain! [Shun]

- Grand bien te fasse ton absence totale de vie sexuel mon grand, mais j'en ai vraiment rien à battre.

Tu lui répondais sur le même ton, sans agressivité ni énervement apparent. Tu te contentais de faire part de ton manque d'intérêt pour le C qui avait peut-être un peu été blessé par ta remarque précédente. Même si l'idée de l'avoir agacée ne te faisait en soit ni chaud ni froid.  Le dos contre la porte, tu le jaugeais, sans la moindre expression, songeant que tu aurais dû aller t'installer au fond de la pièce qu'une fois assurée d'avoir le stock suffisant de Dr Pepper pour tenir le temps qu'il faudrait pour que la situation s'arrange.

- Cependant, même si je ne peux pas te faire retourner quatre cents ans en arrière, je peux te faire regretter pour les quatre cents prochaines de m'avoir mis  en rogne. C'est tellement simple de s'assurer que rien ne fonctionne quand on contrôle les objets, tu n'as pas idée. Tu pourrais resté coincé dans les toilettes à chaque fois que tu y vas, ne plus jamais pouvoir aller en cours sans qu'il ne te manque tes stylos, rentrer un jour dans ta chambre et découvrir que ton lit est parti en balade… et je ne suis même pas encore au summum de mon agacement.

Plus t'imaginais ce que tu pourrais lui infliger s'il continuais à t'agacer, plus tu souriais malicieusement. Tu avais fait déjà pas mal de ces petits tours aux filles qui trainaient un peu trop autours de Luke quand tu avais à peu près l'âge du chinois. Aujourd'hui, tu aurais aussi pu t'amuser à enchanter deux craies de sa salle de classe pour qu'elle lui saute dessus dès qu'il y entre. Cependant, ça pouvait abîmer les craies, et bien que l'idée en soit pouvait s'avérer plutôt marante, tu t'abstiendrait pour cette raison.

- Ma veste, quand vous lui avez tiré dessus, c'était pas votre problème ? Ou bien le respect dépend des objets ? Il s'appelle Jean-Paul si jamais y'a besoin.
- Je ne crois pas avoir animé ta veste, à ce que je sache. Sous cette forme, elle ne ressent rien. Elle n'a pas de conscience, pas de problèmes. Ca me paraît la réponse à ta question me paraît plutôt évidente. Par contre, une fois que je lui ait donné vie, c'est une autre histoire. Pas uniquement parce qu'il peut alors souffrir et avoir des problèmes, mais parce que le fait que j'utilise mon pouvoir a des conséquences autrement plus dérangeantes que de simples maux de têtes.

Instinctivement, mes bras se décroisèrent pour laisser tes mains se poser sur ton ventre alors que ton sourire malicieux s'évanouissait en une moue renfrognée. Tu préférais éviter le sujet, de manière générale, et bien que tu restais très vague, te remettre cette idée dans la tête ne te plaisais pas.

- Alors fais-moi le plaisir de régler ce truc avant que je ne perde patience.  

Il s’autorisa un maigre sourire après le long discours de la professeur d’informatique. S’il aurait aimé répondre du tac au tac et se lâcher autant qu’elle l’avait fait mais il savait que ce serait stupide. Étant donné leurs deux positions respectives, il serait perdant au change - et il n’était pas assez stupide pour agir avec témérité, même si ses crises de colère pouvaient le laisser à croire. Il avait bien trop vécu pour être aussi enfantin - mais ça, personne ne voudrait y croire, et viendrait un jour où sa situation d’ancien sans-abri dénué d’éducation ne suffirait pas à excuser ses quelques écarts. Avec elle, c’était déjà le cas - et cette cruauté était ce qui l’avait amusé en second lieu.

Il n’y avait pas mieux pour lui. Il savait qu’il ne pouvait pas passer sa vie à réclamer l’exception du fait de son expérience unique - et quand bien même ce serait le cas, il se savait capable d’en abuser.

▬ Vous vous en foutez des gens qui vous contrarient, pas vrai ? Mais vous faites bien. J’agirai de la même façon si j’étais prof.

Plus respectueux qu’auparavant, Shun se permit un instant de réflexion durant lequel il resta silencieux. Il lui fallait agir avec précaution mais bien qu’il ne veuille pas chercher les problèmes, il n’était pas dans son caractère de se laisser faire par autrui. Il se refusait à reculer sur son point de vue, mais en y réfléchissant plus calmement, il pouvait trouver un compromis à négocier.

▬ Vous avez raison, je me suis emporté alors que cette console est l’unique fautive. Je suis désolé et je promets de ne plus faire de mal à un objet animé. Comme ça, tout est réglé.

Il s’avança en direction de la console qui poussait un cri de satisfaction et posa sa main dessus.
Alors que sa voix s’élevait, elle s’éteignit brusquement comme si quelqu’un avait pressé le bouton OFF. D’un certain point de vue, c’est ce que Shun avait fait : en insérant le pouvoir d’annulateur au sein de la console, il en coupait l’animation. Il était le contre parfait à l’insertion de vie au sein d’objets - et il venait de s’en rendre compte.

▬ Merci pour votre aide., conclut-il avant de quitter la salle.