Ton regard froid t'es renvoyé par le miroir en face de toi. Une semaine. Aucune larme.
T'as des cernes. Habituellement camouflé par une couche de maquillage parfaitement appliqué, tu ne peux pas te le permettre cette fois-ci. Par alors que t'as l'impression d'être dans un brouillard complet.
T'as ton pouvoir au bout des doigts, les émotions à fleur de peau.
Et pourtant, ton visage n'en montre rien.
Frustration.
T'as presque envie d'être de nouveau cette gamine qui pleure pour un rien. Pourtant, aucune émotion autre que ce satané sourire sarcastique et faussement agréable ne trouve place sur ton visage.
Dans ton dortoir explosif, on peut soudainement entendre un hurlement bref. Condensé de rage et de haine envers une cible inconnu. Rapidement suivit par un bruit de verre brisé. Miroir explosé par ton pouvoir. T'aurais pu te crever un oeil, mais tu t'en sors avec seulement quelques cheveux en moins. Une chance.
Et finalement.
Finalement, tu te décide à agir. Impossible de continuer comme cela. Tu as horreur de cela. T'as l'impression de l'utiliser, alors que ce n'est absolument pas le cas. C'est juste que... Que vous vous êtes éloignés sans le vouloir.
Entraînée par ce nouveau souffle, tu te rends enfin présentable, ne prenant pas le temps de retirer les débris de verre du sol. Défense naturelles contre les autres imbéciles du dortoir. C'est pas comme si t'avais une dent contre les S.
Une salopette short en jean clair est enfilé par dessus tes jambes fines, preuve de tes impardonnables erreurs face à un pouvoir bien trop gourmand pour ton corps déjà frêle de naissance. Tu te tourne un instant vers la vitre, t'en servant de miroir provisoire.
Uh.
Associé à ton crop top noir un peu trop large, ça ne rend pas trop mal. Tu enfiles tes converses de la même couleur sans plus réfléchir, sortant de ta chambre en furie. Tu croise un de tes colocataires mais n'y fait pas plus attention. Tu vérifies que Neo est bien dans la poche de ta salopette.
Check.
Ton lézard t'accompagne partout ces derniers temps. Un peu comme une ligne de vie pour toi. Alors que tu marche, tu utilises l'élastique autour de ton poignet pour te faire une queue de cheval haute, tes longs cheveux dorés ne te permettant pas une grande fraîcheur par ces chaudes journées d'été.
Ainsi libérée, tu repris ton avancée vers le bungalow 12. Celui hébergeant Othello. Car c'est lui que tu allais rejoindre. Vous n'étiez plus aussi proche. Du moins, c'est ce que tu te plaisais à penser. En réalité, vous aviez tendance à évoluer dans des cercles différents. Et en aucun cas, il ne s'associerait à celle que tu étais devenue.
Co-capitaine des Prismver All-Stars, réputée pour son excellence scolaire mais aussi ses fréquentations peu recommandables, qu'elles soient passées où actuelles. Hadès, Karma, parfois quelques murmures citaient Faust. Que des personnes semblant vouloir le bien du pensionnat, n'est-ce pas ? De plus, tu étais soupçonnée pour avoir été amie avec d'autres personnes encore plus extrêmes lors de tes jeunes années. Après tout, comment l'ex-amie, presque grande soeur, de Warren Andersen, pouvait ne pas avoir été en contact avec le ranker. Mais c'était avant les S. Alors tu ignorais les rumeurs. On jalousait les élites, tu ne le savais que trop bien.
Tes disparitions, de plus en plus régulières, et réapparition en A, ne semblait plus surprendre personne. Sauf peut-être Aiden, qui, bien qu'ayant eu un premier contact chaotique avec toi, c'était avéré être un allié dans ta croisade imaginaire.
Tu soupires, agacée. Depuis quand tu étais aussi indépendante ? Tu avais fait le choix de ne plus choisir ta voie et avait finit par faire plus de choix que tout ceux t'entourant. Hadès avait perdu la mémoire, disparu puis était revenu comme une fleur. Tu ne lui avait d'ailleurs pas vraiment encore adressé la parole plus que quelques gestuelles habituelles.
Méfiante.
Méfiante car tu ne comprenais plus rien au pensionnat. Tu ne comprenais pas pourquoi ils se souciaient autant de l'extérieur quand la majorité allait finir leur vie sur cette même île, trop peureux ou trop habitués , qui sait.
Soudainement, tu te rends compte de la colère qui bouillonne de nouveau sous ta peau.
Vraiment ? C'est dans ce genre de circonstance que je me pointes finalement. Pathétique.
Tu serres des dents et décide finalement de pénétrer dans le bungalow sans frapper. Après tout, la majorité des personnes présentes ne te connaissais qu'en apparence. Excepté Leann. Mais elle saurait qu'aujourd'hui n'était pas un bon jour, comme tout ceux des derniers mois.
Tu ouvres et referme la porte du blond, sans gêne, habituée par les années, tombant facilement dans une routine confortable.
Tu l'observes avec un regard indéchiffrable. Comme toi. T'es illisible Allyson ces derniers temps, et ça te fait chier autant que ça fait chier les autres. Quand tu souris, ça sonne faux. Poli, mais faux.
Alors tu ne lui souris pas. Tu plonges simplement ces yeux dans les siens. Tu fixes. Tu fixes jusqu'à obtenir ce que tu veux. Tu lui vole une chips, savourant le craquement qui brise le silence inconfortable que tu as soudainement installé avec ton propre mutisme.
Tu lui jettes un dernier coup d'oeil, lèchant le sel sur tes doigts.
Oh, ça fait un bail que t'as pas manger de ce genre de truc.
Finalement, tu ouvres tes lèvres rosées pour secouer un peu les choses.
“J'ai cassé avec William.”
Car c'est vrai. C'est toi qui à été forcée de le dire à voix haute. Car le garçon que Hadès avait torturé en ton nom, pour t'avoir blessé, t'avais blessé une fois de plus, souhaitant mettre fin à votre relation toxique mais ne trouvant pas les mots. Mots que tu avais arraché de ta propre bouche.
Tu pivotes sur tes talons, suivant son manque de réponse, et quitte la chambre d'Othello, comme un frère mais pas tant, car tu as un frère et tu sais ce que c'est. Aron, t'aurais pas eu besoin de lui dire ça comme ça. Othello, tu as besoin de lui différemment. Différemment, mais surtout dans ce genre de moment. Quand t'es perdue et que tu ne sais plus comment faire face à tes actes, comment garder la tête haute alors que tu suffoques sous le poids de tes responsabilités.
Reste à savoir si tes erreurs peuvent encore te permettre d'être pardonnée.
Et t’es partie sans un mot de plus après lui avoir balancé ça comme si tout allait bien. Il a pas vraiment fait attention à tout ton cirque juste avant, cette porte que t’as ouvert sans frapper et ses chips dans lesquels tu as pioché comme s’ils t’appartenaient -et c’était un peu le cas, il avait pas calculé parce qu’il s’en fichait totalement Allyson. Avec lui tu faisais bien comme tu voulais, avec ses affaires aussi, fais ce qu’il te chante mais pas ça. Pas comme ça, après tout ce temps où il cherchait dans son coin comment te récupérer, vous vous étiez éloignés sans qu’il ne comprenne trop comment mais il n’avait rien dit. Rien du tout, pas qu’il n’en avait pas le droit, mais il n’en avait pas compris l’intérêt. Ça n’est que maintenant, alors qu’il se lève précipitamment pour te courir après qu’il réalise qu’il aurait sans doute mieux valu arrêter ça plus tôt.
Toute cette mascarade. Tout ce qui ne vous reliait plus, tous les deux.
— Allyson arrête toi !
Parce qu’il n’est pas certain que tu l’écoutes, il bloque la porte, use de son pouvoir pour réduire tes chances de réussir à tourner la poignée. Il n’avait pas à trop en faire, elle était déjà à moitié défoncée de toute façon et ça ne lui donnait qu’une raison de plus d’aller rendre visite à Miss Schneider pour qu’elle accède à sa demande sans broncher -hors de question qu’il mette de son argent là-dedans. Mais là n’est pas la question.
Il s’arrête, immobile et en retrait à quelques pas de toi à peine, le visage crispé. Perplexe, étonné, toujours incapable de savoir ce que tu penses et ce qui t’a fait changer à ce point. Incapable de te comprendre, ça le frustre à un point que tu n’imagines même pas.
— T’es sérieuse quand tu m’annonces un truc pareil pour t’enfuir juste après ?”
Pas qu’il veuille tourner ça en drama sentimental -et en plus il n’y connaissait rien sur ce sujet- mais la situation le troublait vraiment et il ne comprenait pas.
— T’as oublié tes manières ou quoi ? Bonjour, au revoir. Oh tien, comment tu vas Othello ça fait longtemps qu’on s’est pas vu ! Ah, pardon. Longtemps que je t’ai éloigné de moi serait plus juste.
Il craque et son discours qu’il ponctue de grands mouvements de bras se termine sur cette dernière phrase pleine de regrets. Parce qu’il ne dit pas que de son côté il n’avait pas cherché à t’empêcher de partir, du moins qu’il avait essayé de trouver comment mais en vain. Il ne te dit pas que malgré tout, d’aussi loin qu’il était il continuait à veiller sur toi, à t’observer, parce qu’il ne faisait que ça Allyson. Il tentait au mieux de veiller sur toi tout en se rendant compte qu’il n’y parvenait pas. Vous n’en seriez pas là autrement.
Il n’avait pas pour habitude de laisser ses émotions sortir ainsi, mais c’est bien parce que c’est toi qu’il ne se permet aucune barrière. Parce que tu en as besoin autant que lui finalement, de ces explications maladroites avant une possible réconciliation. Et pourtant on ne pouvait pas dire que vous vous étiez brouillés, n’est-ce pas ?
— Je sais pas… Installe-toi, prends un verre et laisse-nous au moins le temps de discuter avant de retourner t’cacher je sais pas où. Je pense qu’on en a besoin.
Il soupire, sent la tension redescendre de quelques crans avant de se rendre compte qu’il était en serviette -il adorait passer du temps comme ça lorsqu’il était seul. Pas que ce soit gênant, c’était Allyson après tout. Mais bon. Quand même.
— Je vais m’changer, n’en profite pas pour te barrer.
S’il te plaît. Et sans un mot de plus il retourne à sa chambre.
C’est le cri d’Othello qui ralentit ta démarche, avant que tu ne sois complètement stoppée par la poignée restant dans ta main. Tu jettes un regard abasourdi au garçon, avant de rouler les yeux, l’air de dire "Sérieusement mec ?", mais tu n’ouvres pas les lèvres, attendant la suite. T’avais envie de te défouler mais son regard, définitivement perdu t’en empêcha. Tu n’avais rien contre lui, alors il ne fallait pas que tu t’acharnes sur lui. Ce que tu venais de faire, ce n’était déjà pas réglo.
Il te le fait d’ailleurs remarquer et tu te tends par réflexe, prête à bondir si jamais un coup vient, oubliant que tu n’es pas dans ton environnement habituel de violence et qu’Othello ne lèverait jamais la main sur toi.
Et sa voix se brisant te fait baisser les yeux, alors que tes lèvres demeurent closes. Tu serres les poings un instant, voulant soudainement lui balancer ses quatre vérités au nez, voulant lui faire remarquer que Monsieur le donneur de leçon n’a pas cherché à initier le contact non plus alors qu’il était assez évident que tu étais dans une merde plus haute que toi. Seul Hadès et quelques rares autres personnes t’avaient offert un soutien utile.
Pourquoi t’étais là déjà ? Ah oui, car t’es comme un gentil chien qui retourne vers son maître quand ça ne va pas.
T’es dure envers toi-même, tu en as conscience. Mais les paroles d’Othello te vont toujours droit au cœur, et il devrait le savoir depuis le temps.
Finalement, tu l’écoutes et le laisse s’éloigner, tentant de faire redescendre ta tension à toi aussi. Olé, c’était caliente pour une retrouvaille. Tu n’avais même pas remarqué qu’il était en serviette, mais étais habituée. Puis, tu traînes en majorité avec des garçons qui te traite comme une enfant et pas comme une fille pouvant les lorgner. Tu n’étais pas immunisée, non. Tu n’allais juste pas t’attarder comme le faisait certainement Joy sur le torse de son copain – Colton tu crois ? Elle avait dû t’en parler durant l’une de vos conversations LMS.
Tu observes autour de toi mais n’a pas envie de t’installer dans un bungalow qui n’est pas le tient. Personne n’est présent et n’a donc pu observer votre échange dramatique. Tu rougirais presque de ton comportement puéril mais te ravises fortement. Ce n’est pas comme si c’était la première fois que tu te comportais ainsi. Tu avais d’ailleurs fait bien pire. En détruisant la salle des A sur un simple caprice par exemple. Ou en participant aux activités de la Ligue Chaos.
Les deux fois, tu étais restée anonyme (car tu es intelligente, merci bien), mais tu savais que certains de tes proches avaient eu des doutes. Pas que cela t’intéresse. Tu étais une jeune femme indépendante. Mais tout de même. Cela n’aiderait sûrement pas à ta réconciliation avec Othello. Car c’est pour ça que tu es là, non ? Tu soupire, estimant qu’il a largement eu le temps de se rhabiller, attrapant deux canettes d’un soda divers et te dirigeant vers la chambre du A. Il n’avait pas pris la peine de fermer la porte, et tu l’aurais sûrement taquiné si tu n’étais pas occupée à être assez discrète pour lui coller la cannette glacée dans la nuque. C’était ta façon de lui dire que tu lui en voulais pour ce qu’il t’avait dit, et que tu ne comptais pas laisser passer ça en prenant tout sur toi comme tu l’aurais fait avec quelqu’un d’autre.
Mais sa réaction t’arracha tout de même un léger rire, déliant finalement tes lèvres.
"Désolée, désolée. C’était trop tentant."
Tu décapsule ta boisson, en prenant une rasade pour dénouer ta gorge. Peine perdue, il semblerait que le chat a eu ta langue et que toute tes convictions viennent de s’envoler. Alors tout ce que tu trouves à dire, c’est cette phrase un peu bateau, qu’il te proposait un peu plus tôt.
"Et toi ? Tout va bien ? Ce n’était pas trop dur les examens ?"
Les examens, c’était il y a deux mois. Mais, voyez-vous, mademoiselle Grímurdóttir est enfin à court de mot ! Où est la pluie de météorites ?
Un frisson qui parcourt son échine et glace son sang si rapidement que qu’il croit mourir l’espace d’un centième de seconde, il se crispe instantanément avant que la réalité ne reprenne doucement le dessus et que la sensation de froid disparaisse pour se faufiler entre ses doigts. Tu as l’air fière Allyson lorsque qu’il se retourne pour te regarder d’un air mauvais. Un regard noir parce que tu sais qu’il déteste ça, et il croit comprendre dans ton geste que ses précédentes paroles ont fait mouche. Ça n’est pas une raison, non non définitivement pas une raison pour lui faire ça. Mais bon, c’est de toi dont on parle Allyson, sa princesse et celle qui a su le faire baisser les armes avec le temps. Tu avais cette faculté là, celle de lui faire pardonner même les choses les plus graves, du moins il y croit.
D’un mouvement résigné il se laisse tomber sur ton lit après un soupir, ses avant-bras croisés sur son torse et ses coudes posés sur la couette de chaque côté de son corps. Il lève les yeux au plafond, et pour une fois semble chercher ses mots. C’est difficile de ne pas te vexer mais il se dit qu’en même temps tu y arrives parfaitement avec lui. Vous étiez tous les deux beaucoup trop honnêtes l’un envers l’autre pour votre propre bien, et c’était souvent compliqué à gérer -du moins quand ça n’allait pas. Et aujourd’hui ça n’allait pas, malgré tes bonnes intentions ça n’allait pas. Malgré ta tentative, faible mais louable, de renouer la conversation. C’était difficile d’agir comme si rien n’était arrivé si tant est qu’il ait une idée précise de ce qui a bien pu arriver, ce qui n’était pas le cas.
Un rire lui échappe, un peu amer une nouvelle fois alors qu’il se redresse sur ses coudes pour te regarder dans les yeux. Tu as de si jolis yeux Allyson.
Un murmure qui sort du bout des lèvres… Triste comme rarement il avait su l’être auparavant.
— Où est passée cette couleur qu’ils avaient avant… ?
Un murmure plus pour lui-même que pour toi, qui se demande quand est-ce qu’il s’est foiré pour que les choses tournent comme ça ? Dans ses yeux qu’il porte sur toi se voit un brin de tristesse éphémère qui s’envole dans un nouveau soupir tandis qu’il se force un sourire pour te répondre.
— Les examens ? Je les ai survolés, c’était bidon. Et les tiens ?
Et il soupire. Finalement.
Se redresse pour s’assoir sur son lit et prendre une gorgée de sa canette.
— Ah. ...En fait ça va pas. Ça va pas Allyson, qu’est-ce qu’on est en train de foutre ?
Tu es tendue Allýson. Car si il ne te reconnaît pas, il n'est pas le seul. Tu ne le connais pas, ce visage fatigué, ce visage triste qu'il ne devrait jamais avoir dépeint sur son si joli minois.
Son sourire forcé te dégoûte et le tiens disparaît alors que tu lui dévoiles un jugement sans pitié. Tu as changé, lui aussi. Etait-ce une raison pour que vos chemins se séparent ? Avais-tu seulement bien fait d'essayer de vous rafistoler comme une vieille peluche à laquelle on s'est attaché ?
Et tu n'as pas vraiment le temps de lui répondre alors qu'il prononce les mots que tu redoutes. Alors comme ça, ça ne lui va pas ? Il ne veut donc pas parler d'un sujet bateau ?
Puis tu réalises que, inconsciemment, tu avais peut-être fait exprès de vous lancer sur ce sujet. Car finalement, il n'est pas si anodin. Alors tu fais fi de sa phrase, toute gentillesse perdue alors qu'une rage certaine rallume la flamme de tes yeux de braises.
"Les miens ? Quels miens Othello ?"
Rire tendu, les yeux secs. Car tu n'as plus la force de faire semblant Allýson. Tu n'as plus la force de lui mentir en le regardant droit dans les yeux. De lui dire que ça va. Alors, tu décides de lui mettre le nez dans la merde dans laquelle tu es. Histoire qu'il en ai un aperçu. Même si c'est mal.
"Est-ce que tu te moques de moi là ?"
Vos visages sont proches, ta voix tremblant d'une colère à peine contenue. Hell Hell Hell-
"J'ai vécu un enfer ! Merde Othello mais réalise quoi !"
Inspiration brutale, tu le pousses sur son lit, le prenant par surprise. Colère sourde.
"J'ai galéré comme une merde avec mon pouvoir, j'ai été forcé de rompre les liens avec la majorité de mes potes à cause de ça, parce que j'étais une putain de bombe à retardement !"
Tu as du mal à reprendre ta respiration, mais c'est superflu. Car il est ta victime parfaite. L'air crépite à cause de ta haine. Ou est-ce de la détresse ?
"Et t'étais pas là."
Plus fort.
"T'étais pas là !"
Plus fort.
"T'étais pas là !!"
Murmure silencieux, perdue dans l'immensité de ta haine et de ta détresse. Tes yeux accusateurs rivés sur lui alors que t'es toujours debout, comme une idiote, tentant de retenir cette tristesse que tu sens monter en toi. Pas maintenant. Pas maintenant.
Il avait été trop loin, trop égoïste, trop lui à croire finalement que tout était de ta faute. Parce qu’il avait essayé et n’avait pas réussi, il avait foiré et c’est sur toi que ça retombait. Sur toi Allyson. Et il en était désolé. Alors qu’il te fixait sans savoir quoi dire, à vouloir te consoler sans que les mots ne parviennent à sortir, il t’écoutait. Il te laissait parler, t’énerver, il te laissait pleurer ces larmes qui ne sortaient pas, le pousser sur son propre lit avec cette violence qui ne te ressemblait pas. Cette violence qui ne lui fit pas mal mais qui le surprit, celle-là même qu’il avait tenté encore et encore d’apaiser, d’endormir au plus profond de toi pour que jamais elle ne sorte.
Et encore une fois il avait tout foiré. Et, encore une fois, il ne le remarquait que beaucoup trop tard.
Othello était un idiot et il en était désolé, si tu savais seulement Allyson à quel point il en était désolé. À quel point il s’en voulait encore et encore, à quel point il aurait voulu que tout ceci ne finisse jamais. Et une fois encore les efforts venaient de toi mais il ne remarquait pas. À trop savoir l’importance que tu avais à ses yeux il en avait oublié l’importance qu’il avait aux tiens. Mais c’était de ta faute Allyson, pourquoi tu t’étais éloignée comme ça ? Pourquoi t’étais partie ? Tu sais, dans ses rares cauchemars parfois il te voit au loin, seulement il ne parvient pas à attraper ta main alors que tu cours devant. Il est derrière toi à te hurler de t’arrêter mais tu ne t’arrêtes pas Allyson, tu continues d’avancer, de courir, de fuir encore et encore sans jamais te retourner.
Il aurait tellement voulu que tu te retournes tu sais, alors peut-être aurait-il pu croire qu’il n’était pas innocent à cette situation. Au fond il le savait. Coupable il l’était, et à chaque mot que tu prononces férocement c’est comme un coup au coeur qu’il se prend. Détestable Othello.
Il se redresse à peine, le regard plus peiné que jamais. Il avait toujours détesté te voir comme ça.
— Allyson je-
Tu lui coupes la paroles et tu exploses, ne cesse de répéter cette phrase plus fort encore à chaque fois. T’étais pas là. C’est vrai. C’est vrai Allyson il n’était pas là. Il se l’était juré pourtant, de toujours l’être pour toi. Il s’en veut et brutalement il prend conscience des choses, c’est une nouvelle claque qu’il se prend dans la gueule sans bouger pour l’esquiver. Il l’aura bien mérité celle-ci, elle était justifiée ta colère tu sais. Allyson.
Sans un mot, alors que tu sembles totalement brisée, il s’assoit sur son lit et t’attire à lui. Et c’est tendre comme geste, c’est simple ses bras qu’il referme autour de toi, c’est un peu tard mais c’est sincère. C’est qu’il est désolé et il te le murmure à l’oreille, c’est qu’il t’aime si fort, qu’il s’en veut mais qu’il ne te le dit pas. Ce sont ses larmes qu’il ne veut pas faire couler et qu’il retient, dans cette étreinte c’est un lien presque déchiré qu’il voudrait recoller. Il ne te lâche pas. Le visage enfoui dans le creu de ton cou, courbé malgré sa position assise, il t’enserre comme jamais il ne l’avait fait avant pour tenter au moins quelques instants de t’épargner toute l’horreur de ce monde et de ces gens.
— Je déteste te voir comme ça Ally, par pitié calme toi...
Je suis là. J’te laisse pas, j’te laisse plus. Je suis là Ally.
Pour réparer mes erreurs et reconstruire ce nous qui nous tient tant à coeur. Trop sans doute.