Picorer des paroles et échanger des miettes. | Homère

La rentrée. Un mot que tout le monde avait à la bouche aujourd'hui. Une plainte pour laquelle Kamyl n'échappait pas. Voilà qui allait bien perturber son rythme de vie. C'est qu'il s'y était habitué à ses vacances. Comme tous les étudiants en fait. Comme tout le monde. C'est donc en reculant qu'il s'était de nouveau rendu en cours. Qu'il s'y était fait chier comme un rat mort. Comme d'habitude. Néanmoins, miracle, il n'a pas dormi. Ce n'est pas tant un exploit que ça, mais ça valait le coup d'être signalé. Il n'en doutait pas. Sa classe n'avait pas changé. Il y avait retrouvé les mêmes personnes. Notamment Naomi, sa voisine de table. Les mêmes professeurs à quelques exceptions près. Qu'il n'avait pas pris la peine d'écouter.

C'est donc de son habituel pas nonchalant qu'il reprit sa routine habituelle. Sortir de la salle de classe des E. Saluer quelques camarades qu'il laissait là. Passer par leur couloir. Croiser des connaissances à lui. S'arrêter quelques minutes pour discuter. Se rendre à son casier, l'ouvrir pour y poser son sac qui l'encombrait déjà alors qu'il n'y avait que des stylos et des feuilles dedans. Quoique non, il y a glissé quelques outils. Ça peut toujours servir. Sa mère se serait insurgée devant le poids inutile, pour elle, qu'il se trimballait. Surtout devant l'inutilité des objets pour ses cours. S'il avait des cours de mécanique, rien ne serait inutile. Loin de là. Il ne garda que son portable dans sa poche. Bien qu'il ne l'utilisait plus tant que ça. Le mode de communication archaïque de l'école avait eu au moins le mérite de le désintoxiquer des nouvelles technologies.

À son rythme, il marcha en direction du réfectoire. De toute façon, ça ne servait à rien de se presser. Même dans le cas où il crèverait de faim, il devrait attendre son tour pour avoir accès à la cantine. Parce qu'il y avait un ordre de passage bien spécifique. Et totalement inégalitaire. Comme il fallait s'en douter, les E n'avaient le droit de manger qu'en dernier. Ils avaient déjà le droit de manger. C'est une victoire. Ironie bonjour. Le choix était donc nettement plus restreint par ce fait. Quand il était chez les bleus, il avait au moins l'avantage de passer dans les premiers. Pas qu'il mangeait plus ou mieux, mais au moins, il n'attendait pas trop longtemps. Ça lui manquait presque.

Finalement, il arriva suffisamment tard pour ne pas avoir à attendre trop longtemps. Il prit son plateau et chercha des yeux un endroit où s'installer. Un rictus satisfait marqua son visage quand il vit que Homère se retrouvait seul à une table. Kam s'y dirigea, posa tout naturellement son plateau sans aucune délicatesse et s'installa en face du brun. Il tendit son poing pour que son camarade vienne le checker en guise de salutation. Puis vint un grand moment. Il lui fallait trier la nourriture qu'il avait dans son plateau maintenant. Oui, il est chiant question bouffe. Et alors ? Il est bon cuisinier, ça compense. Très largement même. C'est ainsi que les tomates et autres légumes se retrouvèrent sur le bord de son assiette alors qu'il mangeait tranquillement son steak. Ne voulant absolument pas entendre un mot de plus sur la rentrée pour aujourd'hui, il préféra amener un sujet qui lui plaisait plus. « Bon alors, c'est quand que tu nous le fais ce rap ? » Parce que Kamyl savait reconnaître que son ami avait de bonnes punchlines. Et qu'il serait marrant de le voir à l’œuvre derrière un micro. Pas besoin de savoir chanter, ça n'en sera que plus marrant.