Objectif : Faire des courses... Oh regarde un ballon ! [PV Curtis]

Les yeux verts clairs de Lana se levèrent en direction du ciel, jusqu'à ce qu'ils croisent des décorations lumineuses accrochées aux lampadaires de la rue. Elle sourit, comme attendrie. Les fêtes de fin d'année la mettaient toujours de bonne humeur. Et pourtant, depuis qu'elle ne vivait plus en France, elle ne les fêtait plus vraiment... Ou bien, seule. Bien sûr, elle avait des amis, mais Noël était avant tout une fête de famille. Pourquoi aurait-elle voulu priver ce bonheur d'être tous réunis autour d'une table et d'un bon repas, juste pour qu'elle ne se retrouve pas seule ? Quel en aurait été l'intérêt ? Excepté se faire plus d'ennemis que d'amis. C'est juste qu'elle aussi, voulait festoyer, autour de bonnes choses, rire, s'amuser, offrir. Pour faire plaisir. Mais elle préférait encore le fêter dans son coin, et envoyer juste des cadeaux à sa famille, qui lui en envoyaient en retour. Les cadeaux n'avaient jamais été à ses yeux la chose la plus importante, mais c'était une occasion de garder contact avec ses parents, son frère et sa soeur. Elle repensait au sapin décoré, aux nombreuses fois où elle portait sa petite-soeur Garance afin qu'elle y dépose l'étoile dorée au sommet. Celle qui couronnait le sapin, celle qu'on appelait aussi la cerise sur le gâteau. Elle repensait aux plats que l'on mangeait en France comme le saumon fumé, le foie gras, les huîtres, beaucoup de crustacés principalement. Lana n'aimait pas les huîtres, mais elle raffolait du saumon, à la crème fraîche et au citron. Comme c'était bon. Oh oui du saumon, elle avait hâte de se mettre également à la préparation de son plat ce soir qui en serait constitué. Mais en attendant, elle était occupée à autre chose.

Curtis venait de lui dire qu'il en s'inquiétait pas plus que ça pour ses études, et que ses absences régulières ne l'empêchaient pas d'avoir de bonnes notes. Et bien, voilà qui est rassurant. Lana aussi, aurait aimé avoir la science infuse, aussi facilement. Mais ce ne fut pas le cas, à la place, elle avait connu le monde du travail bien plus tôt que ses camarades de classe. Un mal pour un bien, au final. Heureusement que ses parents n'étaient pas plus autoritaires que ça sur le niveau scolaire... En revanche, elle explosa de rire quand le jeune homme lui avoua que s'il avait raté son examen, c'est tout simplement parce qu'il avait la flemme de faire bouger son stylo. Lana n'avait jamais entendu pareille excuse, et pourtant, elle était certaine qu'il disait la vérité, cela lui correspondait bien, sans être méchante ou sans avoir une autre arrière-pensée!

"Tu es fâché avec les stylos, habituellement, ou ça dépend des moments ?" osa-t-elle demander, le sourire aux lèvres

Peu de temps après, elle venait de lui proposer de déjeuner avec elle. Oui, effectivement, elle l'avait invité. Non, cela n'avait rien de très romantique, certes, mais c'était tout à fait amical. Lana aimait faire plaisir aux gens qu'elle appréciait, et bien qu'elle ne connaisse pas Curtis depuis longtemps, elle se dit qu'elle pourrait probablement lui faire confiance. Et puis Lana n'est pas la meilleure pour déclarer ses sentiments ou dire ce qu'elle pense. Elle préfère alors prouver sa gratitude en offrant des petits cadeaux par ci par là. Peu importe si la personne les garde ou non. Il paraît qu'il est plus beau d'aimer sans être aimé. L'amour, Lana ignore encore ce que c'est... Mais qui sait ?

Le fait qu'elle reste dans ses pensées trop longtemps venait pourtant de mettre à l'eau son invitation. Effectivement, une gaufre couverte de Nutella se trouvait à présent sous son nez. L'odeur de la noisette la fit sourire, montant dans ses petites narines. Sans plus attendre, elle prit la sucrerie entre ses doigts, recouverte d'une serviette, avant que celle-ci de lui échappe des mains. Comme il serait triste qu'une si belle chose tombe par terre, du côté de la garniture en plus, elle l'aurait parié! Mais elle ne préféra pas essayer. Elle imaginait le petit enfant qui dévorait sa gaufre rapidement, quitte à avoir mal au ventre, jusqu'à s'en mettre davantage autour de la bouche que ce qu'il semblait y avoir dessus, pendant que maman l'essuyait aussi bien qu'elle pouvait en riant.
Soudain, la réalité sembla frapper Lana.

"Eh! Je t'avais dit que JE t'invitais. Je sais ce que c'est la galanterie mais tout de même..." dit-elle d'un ton assez haut

Mais elle n'avait pas à se plaindre! Elle allait manger une délicieuse gaufre! A, presque midi... Un petit sourire narquois se dessina sur ses lèvres.

"Les mélanges ne te font plus peur ?" demanda-t-elle malicieusement

Elle lui proposa ensuite de s'assoire sur un banc pour déguster tout ça. Oui car manger une gaufre pleine de Nutella debout, ça ne devait pas être très pratique. De plus, les marchands ne les laisseraient sûrement pas rentrer dans les boutiques avec une arme aussi redoutable en main, surtout pour les magasins de vêtements. Et Lana n'avait en aucun cas, envie de rembourser quoi que ce soit, bien que sa générosité paraisse sans limite.
Elle croqua sans plus tarder dans la gaufre, en prenant soin de ne pas se mettre du chocolat partout, comme si elle avait 4 ans et demi. Elle était en présence d'un jeune homme après tout, et comme dit sa mère, en présence d'un homme, on se comporte comme une femme. Enfin pas trop non plus. Lana n'était pas du tout le genre de femme aguicheuse, collectionneuse, qui draguait à la va tout va. Bien au contraire, en ce qui concerne les flatteries, elle restait plutôt dans son coin en attendant que le bel homme se décide à l'approcher. Malheureusement, il faut croire que cette attitude introvertie les faisait plus fuir qu'autre chose car jusqu'ici, la jeune femme n'a pas encore eu d'aventure amoureuse! Mais elle ne s'en soucie pas tellement à vrai dire, comme toujours. Elle se contenta alors d'apprécier le moment présent, en savourant sa bonne gaufre sucrée.

"C'est délicieux... Merci beaucoup." lui dit-elle, sans pour autant le regarder dans les yeux

Elle finit par murmurer doucement

"Mais je t'offrirai quelque chose en retour, que tu le veuilles ou non... Et puis, tu n'as pas à me remercier! Ce n'était qu'une spatule de chocolat!" enchaîna-t-elle

Son regard se leva de nouveau vers le ciel bleu... Comme si elle était une nouvelle fois rêveuse.

"Tu crois qu'il va neiger ?" demanda-t-elle soudainement, sans aucune raison particulière, non, juste pour parler. Parce qu'elle avait envie de parler de tout et de rien. C'est tout.

Tout à coup, un coup de vent brutal survint. Lana frissonna, avant de basculer, ne me demandez pas comment ni quand, le nez le premier, sur la gaufre de Curtis. En clair, la tête dans le Nutella. Lana se releva doucement, avant de réaliser ce qui venait de se produire. Quelle idée d'être aussi légère, de basculer comme ça! Elle ne savait que dire, ni quoi faire. Elle devait s'excuser, c'était certain. Elle regarda Curtis, dans les yeux... Comme il était drôle de la voir avec du Nutella sur le nez, les joues, le front... Heureusement, ses cheveux roux avaient été épargnés. Elle se sentait tellement honteuse. Et en même temps, elle avait envie de rire. Rire car le ridicule n'avait jamais tué personne. Sans même lui demander sa permission, elle échangea alors sa gaufre avec la sienne, oui par mesure d'hygiène en fait... Elle arracha tant bien que mal un morceau de celle dans laquelle elle avait plongé sa tête, car Curtis n'avait pas encore croqué dedans. Histoire de bien partager comme il faut...
Elle prit alors sa serviette, et s'essuya tant bien que mal. Si seulement elle savait, qu'elle étalait le Nutella plutôt que de le faire disparaître de son visage. Non, Lana ne souhaitait pas spécialement devenir métisse. Tandis qu'elle s'enfonçait encore plus dans sa bêtise, elle lui présenta ses excuses, platement.

"Je suis vraiment désolée! Le coup de vent devait être un peu trop fort pour moi, et je ne voulais pas laisser échapper ma gaufre il faut croire..." dit-elle avant de rire de bon coeur

Vu la situation actuelle, Lana devait bien sentir la noisette au niveau du visage. Ses baisers auraient sans doute un arrière-goût praliné... Mais ça, c'était un tout autre contexte. Pendant qu'elle riait d'elle-même, Curtis lui, semblait rester stoïque. La jeune femme se demanda alors ce qu'il devait penser d'elle... Se retenait-il de rire, lui aussi ? Ou la trouvait-il réellement ridicule ? Il faut avouer que durant ces secondes, cela l'importait peu. Elle savait que le beau jeune homme ne se serait pas enfuit, suite à un évènement pareil. Il en fallait certainement plus pour qu'il s'échappe. Du moins, c'est ce qu'elle espérait secrètement! Lana avait tellement l'habitude de rire de son malheur... Comme de celui des autres. Avouez-le. Un jour, vous vous ramassez sur le sol en pleine rue, alors qu'il n'y a ni cailloux, ni trottoir. Vous explosez de rire. Ou votre ami se met à rire! L'un fait rire l'autre, et cette chute devient alors un bon souvenir et un moyen de se rappeler une scène qu'on n'oubliera jamais, parce que finalement, c'était drôle. Elle avait donc appris à pleurer juste en cas ultime, enfin presque.

C'est alors qu'il arrêta son mouvement qu'elle était en train d'exercer depuis un petit instant déjà. Il attrapa son poignet. Pourquoi donc ? Pour pouvoir se moquer encore un peu plus d'elle ? Pour lui dire que la couleur Nutella lui allait à merveille ? Loin de là... Il lui conseilla d'arrêter de s'essuyer, car notre malheureuse ne faisait qu'empirer la chose. Au lieu de faire le disparaître, elle ne faisait que s'en éparpiller davantage sur le visage. Mince, alors.
Lana n'eut même pas le temps de rire une nouvelle fois de la situation que Curtis était déjà parti en lui demandant de ne pas bouger. Elle ne risquait pas d'aller très loin, déguisée comme ça... Quelques passants la regardait, comme si quelque chose clochait. Il faut dire qu'on ne croise pas tous les jours une jeune fille tartinée de pâte à tartiner sur le visage. Si la jeune fille avait voulu partager cette scène avec eux, elle leur aurait fait croire qu'il s'agit d'une technique de rajeunissement encore plus efficace que le masque d'argile et les tranches de concombre sur chaque oeil. Mais elle n'en fit rien.
Elle se contenta de lever une nouvelle fois les yeux vers le ciel, en repensant au ciel blanc qui indiquait qu'il neigerait prochainement. Elle repensait également aux nombreuses joies de la neige. Faire un bonhomme de neige, une bataille de boules de neige, faire un ange dans la neige, y dessiner des choses. Tout ce que l'on réalisait avec cet élément disparaissait au bout d'un court moment. Probablement ce qui en faisait son charme et sa magie, cette idée qu'il faut en profiter tant qu'elle était là, vite! Que de souvenirs, une fois de plus.

Son regard se porta ensuite sur sa gaufre, enfin, celle de Curtis dans laquelle avait plongé. Elle n'avait pas encore pris le temps de la finir. Elle attendait patiemment le retour de sa charmante compagnie, n'osant pas bouger, comme un enfant qui attend son parent bien gentiment. Pourtant, Lana aurait pu s'en aller. Mais elle n'en avait pas envie. Elle osa se l'avouer, elle voulait rester avec lui.
Ah tiens, en parlant du loup! Le voici qui revient à toute vitesse, des petites gouttes glissant de ses mains tendues. Il semblait presque maladroit, ce qui fit sourire Lana au loin. Sa douce voix lui demanda ensuite de fermer les yeux, si elle le voulait bien.
Sans rouspéter, elle s'exécuta. Elle se doutait de ce qu'il allait faire. C'est alors que de grandes mains vinrent caresser son visage. Chose que Lana n'avait encore jamais subi. De grandes mains gelées, qui eurent pour effet de tout de même la surprendre.

"Aaaaah c'est froid!" dit-elle d'un petit ton strident, comme une enfant

Certes, c'était logique. Il n'était sûrement pas allé jusqu'au robinet d'eau chaude le plus proche, ou bien c'est qu'il était la réincarnation d'un guépard. Elle se laissa faire. Ses petites joues rosirent au contact du froid sur sa peau. La jeune femme marquait très facilement. Mais était-ce là, un rose causé par le froid, ou par la sensation d'avoir des mains au contact de sa peau ? Mystère. Elle souriait pendant que le jeune homme prenait soin d'elle, alors qu'elle ne lui avait rien demandé. Peu avant qu'il termine, elle osa prononcer un "Merci beaucoup.". Il le méritait après tout. Elle ouvrit légèrement ses yeux. Il souriait. Elle rougit, brusquement. Que lui arrivait-il, à notre cuisinière ? Il était temps qu'elle se ressaisisse.
Après ça, Curtis essuya ses mains, recouvertes de Nutella. Lana les observa silencieusement. Elle se permit de prendre une grande bouchée de gaufre, avant que le chocolat ne refroidisse. Elle se débrouilla de façon à ne pas s'en mettre une seule trace autour des lèvres, histoire de ne pas imposer le même sort une fois de plus à son ami.

Elle décida ensuite de prendre un peu la parole.

"Tu sais ce que tu veux faire plus tard, ou pas encore ?"

Il s'agissait là d'une question que beaucoup d'enfants se posaient entre eux. On avait alors droit à tout. Pompier, chanteur, danseuse, vétérinaire... Lana avait toujours aimé poser cette question, car elle savait parfaitement que la réponse qu'allait donner son interlocuteur serait différente de toutes celles qu'elle avait entendu jusqu'ici. En revanche, elle n'aimait pas tellement se poser cette question car elle réalisait le métier dont elle rêvait depuis toute petite. Il n'y avait donc là plus de suspens!
C'est alors qu'une phrase parvint à son oreille, juste après qu'elle ait posé sa question.

"En tout cas, tu étais plutôt mignonne, recouverte de Nutella. On aurait pu te manger."

Ses yeux croisèrent les siens. Un immense sourire se dessina sur ses lèvres, comme si on venait de lui faire le plus beau compliment de la terre. Sans même hésiter, elle frotta son index sur le Nutella qu'il restait sur le morceau de gaufre, avant de le faire glisser sur la joue droite du jeune homme. Son visage se trouvait à quelques centimètres du sien tandis qu'elle réalisait ce geste, avant de rire, fière de sa bêtises.

"Toi aussi, tu es plutôt craquant avec du Nutella sur la joue. Je t'ai fait des peintures de guerre!" lui dit-elle en lui adressant un clin d'oeil malicieux

Effectivement, elle lui avait fait deux traits horizontaux parallèles sur chaque joue, comme les indiens, ou les militaires, à vous de voir.

Pourquoi écourter un moment si...

"OH REGARDE! Un flocon de neige!" lança-t-elle soudainement brusquement

Malheureusement pour elle, ce n'était qu'une goutte de pluie, notre cuisinière avait mal vu. Elle n'avait même pas remarqué que le ciel avait perdu de son éclat. Deux gouttes tombèrent sur sa peau blanche, comme deux larmes qui venaient de perler de ses yeux. Elle fit un grand sourire à Curtis, une fois de plus.

"Ah non, en fait il pleut."

Lana avait à présent terminé de manger sa gaufre, enfin, avant que celle-ci soit détrempée par la pluie et tombe en morceaux par terre. La jeune femme avait beau aimer la nourriture, elle ne se serait tout de même pas jetée dessus. Mais comme c’était Curtis qui les avait payées, il valait mieux en faire bon usage.
Elle était cependant un peu déçue qu’il pleuve, plutôt qu’il neige. Son enthousiasme lui avait fait perdre l’espace d’une fraction de seconde la notion de réalité, si bien qu’elle avait confondu une goutte de pluie avec un flocon de neige. Si Curtis avait voulu se moquer d’elle, il aurait pu lui dire de porter des lunettes, très prochainement. Mais il faut savoir que Lana en porte, des lunettes ! Uniquement au cinéma. Car elle est un peu myope. Alors est pratiquement toujours rangée sa petite paire de lunettes rouge rectangulaire, dans le tiroir de sa table de chevet. Elle n’en parle à personne, bien que celle-ci finira par découvrir peut-être un jour son secret, si la personne l’invite au cinéma. Non pas que Lana se trouve moche avec. Oui car c’est le motif de beaucoup de filles qui refusent de porter les leurs. Mais simplement, elle ne trouve pas ça du tout pratique. Pluie, buée, choc. Il faut faire attention à tout. C’est comme si vous aviez une mini-voiture sur le bout du nez. Bon j’exagère peut-être un peu mais c’est pas donné les lunettes non plus hein…

Quoi qu’il en soit. Notre cuisinière attendait patiemment que Curtis réponde à ses questions tandis que la pluie, encore douce, tombait sur eux. Il répondit alors que son avenir ne le tracassait pas plus que ça. Cela fit sourire Lana. Elle aurait aimé lui dire qu’à son âge, c’étaut compréhensible, mais elle aurait eu l’impression d’avoir dix an de plus que lui alors qu’elle n’en avait que quatre. Elle décida donc de ne rien ajouter. Certaines personnes allaient bien faire face à un délic, un jour ou l’autre. Il faut avouer que ça n’a rien de facile, la recherche d’un métier. Lana n’avait jamais vraiment fait face à ce problème puisqu’elle ne s’était que très rarement posée la question. Mais il fallait en vériter réunir plusieurs éléments, dont principalement ce qu’on aime, et ce qu’on déteste. Dit comme ça, ça paraît facile, et pourtant sachez que c’est tout le contraire, quand on prend le temps d’y réfléchir. Mais à cet instant, la jeune femme ne semblait pas s’inquiéter pour son ami, vu que son attitude d’élève absentéiste ne lui avait encore jamais valu de vraies mauvaises notes ou un renvoi. C’était déjà ça.

La voix du jeune homme la sortit en revanche de ses pensées. Il lui suggéra alors d’aller s’abriter au plus vite. Pendant cela, il lui prit la main. Lana n’était pas du tout habituée à ce genre de choses… Et pourtant, elle ne réagit pas de manière excentrique. Cette main qui avait nettoyé son visage était à présent un peu plus chaude. C’était agréable, mais elle n’allait pas le crier sur les toits au risque qu’il la prenne pour une folle ou qu’il la trouve ridicule, une fois de plus. Elle observa alors ses joues. Le Nutella était presque totalement parti, suite à la pluie. Dommage, pensa-t-elle en souriant discrètement.
Par la suite, il l’aida à se lever. Lana se laissa faire, tranquillement, sans même s’opposer à lui. Son conseil était fort judicieux. Il ne valait mieux pas attraper froid. Elle s’en serait voulue, car tout aurait été à cause d’elle, vu que l’invitation pour aller en ville, c’était elle qui l’avait lancée. Pour l’instant, son interlocuteur ne semblait pas avoir la goutte au nez ou quelque chose de ce genre. Tant mieux. Elle lui répondit alors, calmement.

"Je te suis, Curtis."

Elle se rendit compte alors que son prénom était court, plutôt cool. Un peu comme sa personnalité de garçon qui n’aimait pas se prendre la tête. Elle en rit, elle-même, aussitôt.

"Je trouve que ton prénom te correspond vraiment bien, il est sympa à prononcer" avoua-t-elle alors, toujours souriante

Ils marchaient à présent main dans la main, comme deux amoureux, l’air de rien. Lana se retint de rougir et ne prit pas compte des autres idées qui pourraient se mêler à la situation. Curtis n’était sûrement pas le genre de garçon à la plaquer contre un mur et à l’embrasser langoureusement dans quelques minutes.
Alors qu’elle commençait à imaginer une scène pareille, -petite coquine va !- la pluie commença à tomber de plus en plus fort, faisant vasciller son béret.

"Mince" dit-elle tout haut en commençant à frissoner

La seconde qui suivit, Curtis lâcha la main de Lana, retira sa veste pour la mettre au-dessus d’eux, à la façon d’un parapluie, bien que ce soit plus difficile pour lui, le pauvre. Ils marchèrent à présent l’un à côté de l’autre, sous son manteau, presque collés l’un contre l’autre. Lana avait froid pour lui. C’est alors qu’elle osa lâcher :

"Si tu tombes malade, tu as intérêt à me laisser être ton infirmière à domicile !"

Bah oui, après tout, elle se sentirait fautive si ça serait le cas. Et non elle n’avait pas dit ça avec une seule arrière pensée, alors n’imaginez pas Lana dans sa petite tenue sexy d’infirmière, petit(e)s pervers(e). Après avoir marché pendant plusieurs minutes, ils arrivèrent enfin à un abris plus ou moins assez grand pour les protéger. Elle retira alors son béret, pour caresser ses cheveux humides, qui étaient malgré la pluie, restés brillants et lisses. Oui car des cheveux roux ça s’entretient ! Une fille qui hurlait en voyant ses cheveux boucler à la moindre présence d’humidité, serait verte de jalousie en voyant que les cheveux de Lana n’avaient pas bougé. Elle s’en fichait bien qu’on critique sa couleur de cheveux, poil de carotte. Elle, elle les aimait, alors qu’importe.

"Manquait plus que ça sérieux… Tu n’es pas trop mouillée j’espère ?" demanda soudainement Curtis

Elle fit mine d’essorer le bas de sa robe.

"Si, je suis trempée !" dit-elle d’un air contrarié avant de sourire, finalement

"Mais non, ne t’en fais pas pour moi… En tout cas, merci de m’avoir protégée avec ta veste. C’était vraiment gentil de ta part !" ajouta-t-elle

Soudain, un bruit de porte l’interpela. Elle s’écarta. Deux personnes venaient de sortir de l’endroit qui se trouvait, juste derrière eux. Lana tourna la tête avant de se rendre compte qu’ils s’étaient alors arrêtés sous une sorte de petite bache, devant un restaurant. C’est alors qu’elle prit Curtis par le bras, afin de l’entraîner à l’intérieur.

"On y entre ? On aura sûrement plus chaud qu’en restant ici."

Et sans même attendre une réponse de sa part, elle tira la porte du restaurant afin d’y aller, sans pour autant lâcher le bras de Curtis, qu’elle avait prit sans trop réfléchir, à vrai dire. Les couleurs du restaurant étaient plutôt chaudes. Du jaune, du orange, du crème, du marron. Des lumières un peu tamisées. Lana sentait tout son corps se réchauffer rien qu’après avoir fait quelques pas en ce lieu.
Une serveuse les accosta. Elle était blonde, une longue queue de cheval descendait le long de sa nuque. Elle était vêtue d’une robe noire et blanche, le bas se terminant en jupe crayon. Elle faisait plutôt chic, comparé à la petite robe bleu ciel de Lana, toute simple.
Notre jeune cuisinière lui indiqua alors qu’ils n’étaient que deux, avant que la serveuse les place dans un petit coin tranquille ou aucune autre table n’était collée à la leur. Avait-elle pensé que Lana et Curtis étaient en couple ? Nana sourit à cette idée.

Ils avaient à présent une carte du menu, dans chaque main, chacun. Avant de commander quoi que ce soit, elle regarda Curtis qui avait encore les cheveux un peu mouillés. Elle espérait pour lui que ça allait vite sécher. Elle décida de prendre un peu la parole, en espérant qu’il ne la trouvait pas non plus trop bavarde.

"J’espère que tu ne m’en veux pas de t’avoir entraîné ici ?"

Oui car Lana avait un minimum de cœur tout de même. Elle jeta un coup d’œil à sa carte.

"Tu as plutôt faim ou soif ?" demanda-t-elle, calmement avant de sourire

"Les deux peut-être… Ah, j’allais oublier ! Cette fois, c’est moi qui t’invite. Ne cherche même pas à négocier quoi que ce soit" finit-elle, fière de ce qu’elle venait de dire

Lana était assise, souriante. La serveuse venait à présent de leur donner la carte des menus. Alors qu’elle l’ouvrit, elle se rendit compte que Curtis parlait un peu moins qu’auparavant. Son regard se déplaça un peu partout dans le restaurant. Il est vrai qu’il faisait plutôt chic. Il n’y avait qu’à observer le plafond haut et les quelques lustres qui y étaient suspendus. Ses pupilles étincelaient, grâce au reflet de ces derniers. Elle avait toujours aimé tout ce qui brillait un peu. Mais plutôt que de rester bouche entrouverte à regarder le plafond, elle baissa la tête avant de réfléchir à ce qu’elle allait commander.
Il fallait l’avouer, Lana ne regardait pas les prix. Elle s’en fichait. Bien sûr que non, elle n’est pas riche. Ses parents ne tiennent pas une entreprise internationale. Son nom n’est pas connu dans le monde entier. Mais elle n’avait pas vraiment à se soucier de ça. Enfin, elle ne faisait pas des restaurants toutes les semaines donc elle savait que ça n’allait pas être celui-ci qui allait lui prendre la plus grosse partie de son salaire mensuel. Malheureusement, Curtis n’avait pas l’air de l’entendre de cette oreille. Pourtant, ce n’était pas lui qui payait. Lana fut vraiment surprise de le voir mal à l’aise à cause de ça.
Il faut dire qu’elle était habituée à voir des lieux pareils, ne serait-ce que grâce aux relations de son père dans le secteur de la cuisine, bien qu’elle ait plus visité de boulangeries que de restaurants. Car à la base, elle n’aimait pas ces endroits. Ce genre d’endroit calme, voir silencieux. Pas convival, cher. Mais là, Lana n’était pas vraiment dans cette optique. Elle y allait, juste histoire de passer un bon moment, une fois de plus, et de prolonger sa balade en ville, avec Curtis à ses côtés.

Finalement, après plusieurs minutes, il osa dire qu’il allait simplement demander de l’eau. Lana rit à sa remarque.

"Arrête de regarder les prix, détends-toi. Prends ce que tu veux." lui dit-elle

Il céda finalement en prenant des spaghettis bolognaises, suivi d’un café. Avait-il l’intention de mélanger les deux ? Si c’était le cas, alors Lana apparaissait presque comme une petite joueuse par rapport à lui en qui concerne les mélanges. Notre jeune cuisinière demanda une salade accompagnée de petits lardons, de dés de chèvre et d’olives noires, avec juste un perrier. Non, Lana ne faisait pas spécialement attention à sa ligne, mais elle adorait tout ce qui se rapportait au chèvre. Elle raffolait du mélange chèvre-lardon. Elle se souvient encore de la salade Berrichone qu’elle mangeait régulièrement quand elle était en vacances, en camping, dans le Berry avec sa famille. Elle aurait donné n’importe quoi pour en manger une, alors elle prit quelque chose qui y ressemblait. Oui parce que Lana a beau maîtriser de nombreuses recettes, elle apprécie également celles qu’on lui sert. Elle avait toujours aimé les plats légers, qui ne lui pesaient pas sur l’estomac et ne l’empêchaient pas de sautiller dans tous les sens après. Surtout lors d’un repas de famille, lors d’un réveillon, ou encore un anniversaire. Beaucoup de personnes ont tendance à se jeter sur l’apéro. Si Lana est dans cette situation, elle sait alors parfaitement qu’elle devra se modérer sur le plat ou sur le dessert. C’est peut-être un peu triste, mais c’est comme ça. La mère de Lana en revanche détestait faire des mélanges, et prendre dans les assiettes de tout le monde car elle savait qu’elle allait finir avec un mal de ventre avant la fin de la soirée. Quoi de mieux pour vous gâcher la soirée ?

Lana commençait à trouver le silence qui se trouvait entre eux, presque pesant, maintenant. Mais craignant de dire quelque chose d’inintéressant pour lui, elle décida de rester silencieuse jusqu’à ce que la serveuse apporte les plats. Curtis, qui semblait toujours légèrement nerveux, la remercia finalement pour le repas, alors qu’elle n’avait encore rien payé. Lana lui fit un grand sourire, avant de prendre sa fourchette en bouche, à son tour.

"Bon appétit, toi aussi !"

Soudain, un bruit de porcelaine qui claque lui fit redresser les yeux. Curtis, venait littéralement de tomber tête la première dans son plat de spaghettis… Aussi bien que lorsque Lana était tombée sur sa gaufre. L’espace de quelques secondes, elle n’osa pas réagir, et ne lâcha pas sa fourchette. On ne sait jamais, il aurait pu lui faire une blague, ou faire semblant de se jeter sur le plat comme s’il n’avait pas mangé depuis trois semaines. Mais au bout de plusieurs secondes, cela commençait à inquiéter notre jeune pâtissière. Elle se leva brusquement de sa chaise. Les pieds grincèrent sur le parquet du restaurant. Elle s’approcha de lui, et le secoua légèrement.

"Curtis, Curtis !"

Toujours rien. Les battements de son cœur commençaient à s’accélérer. Elle décida finalement de demander de l’aide.

"S’il vous plaît ! Aidez-moi, je crois que mon ami vient de s’évanouir."

Des clients se retournaient en leur direction. Des chuchotements commençaient à se faire entendre, mais Lana n’attendait qu’une chose, que quelqu’un se bouge. Finalement, deux jeunes serveurs arrivèrent à pas rapide. Il demanda quelques détails sur la situation à la jeune demoiselle, mais elle n’avait rien d’autre à dire que sa tête était soudainement tombée comme ça, sans aucune raison particulirère. A moins qu’il se sentait mal, et qu’il n’avait pas osé lui en parler.
Les deux jeunes hommes penchèrent Curtis en arrière, et décidèrent de l’assoire correctement. L’un des serveurs tâta son poignet, avant d’expliquer que tout était normal. L’autre s’approcha du visage de Curtis, avant de commencer à rire.

"Pourquoi riez-vous ?!" demanda Lana, étonnée de la réaction du garçon

"Approchez-vous, vous comprendrez."

Lana hésita, avant de se rapprocher. C’est alors qu’elle les entendit. Des ronflements. Elle ouvrit grand les yeux, avant de se retourner vers les deux serveurs.

'Il.. dort ?'

"On dirait bien." confirma l’un des deux

Elle n’en revenait pas. Il s’était endormi. Comme ça, sans prévenir. Comme une personne qui avait la maladie du sommeil et qui pouvait s’endormir n’importe où, n’importe quand. Mais de là à s’endormir dans son assiette… Son visage était recouvert de sauce tomate et quelques spaghettis décoraient encore plus ce dernier. En y réfléchissant bien, Lana avait presque envie de rire. C’était une situation on ne peut plus drôle, que l’on voyait exclusivement dans les dessins animés. Pourtant, elle craignait vraiment qu’il se soit évanouit. Heureusement, ce n’était pas le cas. Elle se demanda alors si pour lui, c’était drôle, si ça lui arrivait souvent, s’il avait bien dormi la veille. Elle avait presque tout un tas de questions à lui poser en fait, à présent. Mais ce n’était pas le moment. Elle n’osait même pas le réveiller. Tandis que le jeune homme ronflait donc, les bras le long du corps et la tête en arrière, Lana tenta de négocier avec les serveurs. Elle leur dit qu’elle n’avait pas la force suffisante pour le transporter jusqu’à leur école, et c’était la vérité. Curtis était bien plus grand et plus musclé qu’elle. Elle risquait juste de s’écrouler sous son poids, rien d’autre. Une autre situation comique me direz-vous, mais qu’elle préférait éviter. Quant aux serveurs, ils n’allaient pas quitter leur lieu de travail pour transporter un inconnu, logique. Le restaurant finit par accepter que ces derniers restent sur une banquette, en attendant que le jeune homme se réveille. En revanche, s’il ne se réveillait pas avant la fermeture du restaurant, soit 22h, il faudrait bien le réveiller. Lana les remercia infiniment, c’était amplement suffisant.
Ils l’aidèrent donc à allonger Curtis sur une banquette. Lana était assise, juste au bout du canapé. La tête du jeune garçon, touchait presque ses cuisses. Elle l’observa un moment, souriante, avant de finalement décider de soulever sa tête et de la poser sur ses cuisses. Sans la moindre hésitation, elle prit une serviette en papier qui se trouvait devant elle, renversa de l’eau dessus qu’elle avait demandé en carafe et lui nettoya délicatement le visage. Elle rit, en se disant que ces quelques nouilles au milieu de son visage gâchaient sa beauté naturelle. C’est ce qu’elle lui aurait dit, s’il avait été éveillé.

"On dirait que c’est à moi de prendre soin de toi maintenant" chuchota-t-elle en souriant

Après cela, elle bu un verre d’eau , sans dégager la tête du jeune garçon de ses jambes. Comme si ces dernières lui servaient d’oreiller. Lana n’aimait pas dormir sans coussins, elle en avait toujours deux. Dormir à plat, elle n’avait jamais aimé ça. Elle ne savait pas ce que préférait Curtis, mais elle ne lui avait pas vraiment laissé le choix non plus. Elle garda alors les mains croisées, non loin de sa tête, tout en regardant par la fenêtre du restaurant. Il pleuvait encore, dehors. Elle regrettait de ne pas avoir pris son parapluie. Mais après tout, qui aurait pu prévoir ce mauvais temps excepté les médias, auxquels elle ne s’intéressait pas vraiment. Une jeune femme avec son chien en laisse, un homme qui luttait pour son parapluie lui reste dans les mains. Elle aimait regarder cette animation, le sourire aux lèvres, comme si quelque chose de différent allait se produire à chaque seconde qui suit.
Enfin, ses yeux se portèrent sur le visage propre de Curtis. Elle remarqua soudainement ses petites tâches de rousseur qu’elle n’avait pas encore remarqué, ainsi qu’une chaîne autour de son cou, avec un pendentif en forme d’épée. Il était joli. Elle se demanda ce que ce bijoux pouvait représenter, signifier pour lui. Et pendant qu’elle rêvait de tout ça, elle ferma les yeux, comme pour s’endormir à son tour, alors qu’ils étaient tous les deux dans un restaurant, rempli, un peu bruyant. Pourtant, à cet instant, c’est comme s’il n’y avait eu personne autour d’eux.