I was enchanted to meet You [Damon]

L'heure du déjeuner venait à présent de se terminer pour de bon. Le self était vide, le ménage et la vaisselle venaient d'être terminés. Lana s'essuyait les mains dans un chiffon, avant de repousser quelques mèches rousses derrière son oreille. Il n'y avait désormais plus qu'elle en cuisine. Elle n'avait besoin que de ses collègues en fin d'après-midi pour préparer le dîner et mettre le couvert.
Elle s'accorda alors quelques minutes à rêvasser, en s'appuyant sur le mur, tout en regardant par la fenêtre. Un rayon de soleil avait réussi à se faufiler à travers deux nuages blancs. Ses yeux verts contemplaient la vue comme si elle était enfermée dans une cage et qu'elle rêvait de pouvoir s'envoler un jour. Pourtant, c'était loin d'être son cas. Elle était heureuse, derrière ses fourneaux. Ses parents aussi avaient mis du temps à comprendre pourquoi la jeune fille préférait passer son été dans la boulangerie plutôt que d'aller s'amuser dehors avec ses copines comme tous les enfants de son âge. Elle vous dira aujourd'hui qu'elle aurait sûrement pu s'y endormir. Les odeurs de pains chauds, les bruits familiers, le salut des clients et leurs bavardages. Elle s'était rendue compte petit à petit que la boulangerie du quartier était probablement l'endroit où on était le mieux informés sur ce qu'il se passait en ville. Les rumeurs, les ragots, les personnes décédées, les nouveaux qui viennent d'emménager, l'incendie ici, le dégât des eaux là. Oui, la boulangerie était un endroit où on pouvait s'assurer s'endormir le soir un peu moins bête, ou plus au courant, que la veille.

Après s'être remémorée ces quelques souvenirs nostalgiques, Lana sembla hésiter sur l'activité à faire. Elle piocha alors quelques livres de desserts et en feuilleta les pages, tranquillement assise à son comptoir. Finalement, elle opta pour un gâteau moelleux au chocolat, tout simplement. Le genre de gâteau qui faisait la joie de tous les enfants, et probablement un des plus simples à faire. La voici donc en train de ressortir les ustensiles et ingrédients dont elle avait besoin pour préparer tout ça. Elle sortit soudainement un foulard blanc en soie de son tiroir pour le mettre sur ses cheveux. Il retenait ainsi les cheveux rebelles de la jeune cuisinière, ce qui lui faciliterait la tâche. Elle ne parlait pas, elle ne chantait pas. Les seuls bruits présents étaient les oeufs cassés en deux, la balance électronique, le fouet qui remuait les ingrédients, le gaz qui venait de s'allumer.

La jeune femme prit soin de casser ses tablettes de chocolat au lait pâtissier en barrettes de deux carrés. Elle les ajoutait au fur et à mesure dans un récipient, posé sur une casserole d'eau bouillante, pour faire fondre le chocolat au bain-marie. Sa spatule remuait les carrés qui fondaient petit à petit, répandant une odeur de sucre et de chocolat dans toute la cuisine. Elle osa ouvrir la fenêtre pour laisser s'échapper cette odeur à l'extérieur de l'établissement.
Elle enchaîna avec la montée des blancs en neige pour alléger le gâteau. Elle utilisait pour cela un batteur électrique, car il faut l'avouer, la technologie a aussi son intérêt en cuisine. Elle mis le petit saladier en plastique à l'envers, pour voir si oui ou non ses blancs en neige étaient susceptibles de tomber. Si c'était le cas, il faudrait tout recommencer. Dans le cas contraire, ils étaient réussis. Car oui, même après des années d'expérience, on n'a pas toujours confiance en soi dans la cuisine, et en particulier dans la pâtisserie, car il s'agit là d'un domaine où les quantités et la minitiosité sont d'ordre.

Il ne lui restait plus qu'à les incorporer à son mélange de base, sans les casser, délicatement, et à remuer jusqu'à obtenir une pâte fluide, pour finir par la verser dans un moule.
Elle hésita une fois de plus, sur le moule à prendre. Puis finalement, l'espace d'un instant fleur bleue, elle décida de prendre celui en forme de coeur. La saint-valentin était passé, et elle n'était pas spécialement d'humeur amoureuse, mais elle avait envie, voilà tout.
Soudain, un léger bruit vint l'obliger à diriger son regard en direction de la porte d'entrée de la cuisine.