Le tigre et le lapin ✘ WITH PYTHA ♥

Et juste au moment où j’étais bien tout seul
Tu m’arrives comme un coup d’poing sur la gueule.

Tu pourrais passer des heures à l’observer. Des heures, des jours, des mois, toute une vie. Tu l’aimes. Tellement. Tellement que tu ne diras rien, taisant ce tumulte faisant bondir ton cœur à chacune de ses paroles, de ses sourires, de ses regards. Sa simple présence a ravivé en toi un feu pas entièrement consumé. La chaleur dans son regard et dans sa voix te donnent l’impression de geler sur place. Paradoxal mais tellement vrai. Être avec lui te suffit. Les mots sont presque superflus. Prêt de lui, tu te sens tellement mieux. Tu te sens en sécurité. Le comprendra-t-il un jour… ?

▬ Comme je veux… Ouais, on va dire ça.

Un demi mensonge. J’aurais aimé avoir le don de lire les pensées, ou celui d’apaiser les gens. Je ne préfère pas m’engager dans une conversation confrontant nos études, ce serait mal approprié. Il est élève en E alors que je suis élève en B. Je ne me pense pas particulièrement plus intelligente que lui, mais je ne veux pas qu’il pense que je le sous-estime. Chacun ses qualités et ses défauts. Si les études ne sont pas son fort, je sais qu’il se rattrape dans un autre domaine. Je lui montre alors mon écharpe. La sienne avant. Un cadeau que je chéris depuis tout ce temps. Un cadeau dont je ne me séparerais pour rien au monde.

▬ Tu l’as encore ?
▬ Naturellement ! Tu pensais que j’allais m’en débarrasser ? Elle est épaisse et duveteuse. Elle me tient bien chaud en hiver.
▬ On dirait qu’elle est neuve…

Un large sourire. Sincère, reconnaissant. J’en prends énormément soin. C’est mon trésor, mon bien le plus précieux. M’en séparer serait une torture, un calvaire. J’exagère peut-être un peu, oui. Mais c’est la seule chose matérielle qui me relie à Pytha. Et je refuse de perdre ce lien. En reprenant quelque peu mes esprits, je réalise que je le dérange peut-être et je lui en fais part. Je ne voudrais pas qu’il me voit comme une empêcheuse de tourner en rond. Je ne veux pas le forcer à rester avec moi. Et pourtant… tu voudrais tant l’emprisonner dans tes bras, contre ton cœur. Et ne plus jamais le laisser partir. Le garder jalousement pour toi. Comme une petite fille égoïste.

▬ Non, en fait je viens de terminer. C'est que t'as quelque chose à faire, toi ?

Je veux rester avec toi. Dis-le Kate, dis-le. Et je finis par dire quelque chose d’autre, incapable d’affirmer ma pensée à voix haute. Je suis tellement idiote. J’ai honte de moi, vraiment. Je réussis néanmoins à lui demander si je pourrais venir le voir jouer au basket. Je suis persuadée qu’il est très bon.

▬ Pourquoi pas. C'est deux fois par semaine et ça dure environ une heure et demie. Mais t'es pas obligée de rester jusqu'à la fin si tu veux pas.

Je ne réponds pas tout de suite, surprise que ma présence ne serait finalement pas une gêne. Je lui adresse un sourire, heureuse.

▬ Je suis sûre qu’on ne voit pas le temps passer, pas vrai ? Si je ne dérange pas le reste de l’équipe, je resterais du début à la fin ! Je t’encouragerais !

J’ai vraiment hâte de le voir à l’œuvre. Si j’ai bonne mémoire, il me semble que je connais deux de mes aînés qui participent également au club. Cale et le métisse au regard hargneux. Ça me rappelle d’ailleurs que ce doit être Monsieur O’Connor le responsable du club. J’espère qu’il n’est pas trop dur avec eux.

▬ Sinon on est pas obligé de se séparer maintenant.

Pytha me sort de mes pensées. Je le regarde, surprise et silencieuse. Il fixe le sol. Il est mal à l’aise, voir gêné. Même dans cette situation il est beau. Sentant le rouge me monter aux joues, je détourne la tête avant de m’installer prêt de lui, mes genoux contre ma poitrine. Je ne suis qu’à quelques centimètres de lui.

▬ Tu as raison. Profitons pleinement de nos retrouvailles après tout ce temps !

Mon enthousiasme est presque palpable. Et je me perds encore un instant dans la contemplation de son visage. Même assis, il est plus grand que moi. Enfin, je suppose qu’il est normal qu’un basketteur soit grand. Hm, je ne vais pas lui en parler. Il faut que je trouve un sujet de conversation correct.

▬ Tu m’as manqué...

Hein ? Attendez. J’ai dis quoi là ?! Et ta tête se pose sur son épaule. Comme si une force inconnue l’avait attirée. Comme par magnétisme. Et tu t’y sens si bien que tu souris, bêtement heureuse. Tu es incapable de dire quoi que ce soit. Mais tu as peur qu’il te rejette. Alors tu finis par te redresser, quittant son épaule à contrecœur. Je dois me ressaisir, ne pas me laisser aller.

▬ Je regrette vraiment tout ce temps qu’on a perdu toi et moi… Je marque une pause. Dis… pourquoi on a été aussi idiots pour installer cette distance entre nous ?

Je parle comme si on formait un couple… je crois vraiment qu’il me rend dingue. Enfin, je perds totalement mes moyens avec lui.

▬ Je veux dire… j’aime passer du temps avec toi. On devrait faire plus de sorties ensemble ! Qu’est-ce que t’en penses ?

Et ton enthousiasme s’empare à nouveau de toi.

▬ Il faut rattraper tout le temps perdu ! Parle-moi de toi ! Qui sont tes amis ? Et tes amours ? Et… je réalise mon emportement et baisse la tête, gênée. Désolée. C’est l’enthousiasme.

Je crois entendre un rire étouffé et moqueur. À moins que ce ne soit mon imagination. Je fais une petite moue et tâche de cacher un peu plus mon visage entre mes mains.

▬ C’est pas gentil de se moquer. Je relève la tête et lui tire la langue. T’es qu’un vilain.

Tu le regardes ensuite. Et tu ris. Fatalement, naturellement. Tu te sens tellement plus libre avec lui, tellement mieux. Tout vient naturellement. Les mots, les gestes, tout. Sauf l’essentiel. Mais ces aveux viendront bien un jour, tu le sais.

Il semble accepter l’idée que l’on puisse se voir plus souvent. Et forcément, ça m’enchante. Il n’est pas très bavard, mais je me sens voyager avec lui. Avec Pytha, c’est comme ça. J’ai déjà parlé de lui à Dakota, dans mes lettres. En bonne grande sœur qu’elle est, elle a rapidement compris ce que je ressentais pour lui. Elle a aussi dit que s’il était vraiment si peu bavard et timide avec moi, il fallait que ce soit moi qui fasse le premier pas. Mais je ne m’en pense vraiment pas capable. J’ai grandi avec les contes de princesses dans lesquels les princes emmènent les princesses sur leurs chevaux blancs. Pytha est mon prince, mais je ne serais probablement jamais sa princesse…

C’est assez niais de penser de cette façon à mon âge quand j’y pense. Je suis stupide. L’espoir fait vivre, comme on dit. Mais trop espérer, c’est risqué. Et si Pytha m’avouait aimer une fille ? Comment je réagirais ? Je pleurerais, sûrement. Mais je serais contente pour lui. Une fois, Elise a dit que les filles amoureuses étaient les plus grandes bécasses du monde. Au début, je ne comprenais pas. Maintenant, je pense saisir le sens de ses paroles.

▬ C’est toi la vilaine.

Je m’apprête à protester lorsque ses doigts se posent sur ma tête pour me pousser doucement. Surprise. C’est le mot. Je sens le rouge me monter aux joues tout en essayant de ne pas afficher ma gêne en riant comme une enfant. Lui aussi est gêné. Je ne suis pas la seule au moins.

▬ Je vais quand même répondre. Comme amis il y a… Cale… Skygge… Djez…  Jalel et puis… Andreah…

Je hoche la tête, l’incitant à continuer. Je connais Cale. Enfin, de réputation surtout. C’est un beau garçon d’après ce que mes amies disent. Le garçon avec un étrange aussi je crois. Skygge. Lui, pour ce que j’en sais, il n’est pas très commode. Un frisson me parcourt l’échine. Pytha a des amis bien divers. Je me demande à quoi ressemble les deux autres…

▬ Des amours…

Je sens mon corps se raidir un peu. Peut-être que je n’aurais pas dû demander. Peut-être que j’ai peur qu’il me dise que son cœur est pris. Et s’il se tournait vers moi avec son large sourire pour me dire qu’une fille le rend heureux. Je ne sais pas si je vais le supporter. Je deviens égoïste, c’est n’importe quoi. S’il entendait mes pensées, il reverrait son jugement sur moi, j’en suis sûre… Et moi je reste avec lui en souriant. Je suis une hypocrite. Pardonne-moi Pytha.

▬ Je me suis contenté d'amitié jusqu'à maintenant...

Ne pas pousser un soupir de soulagement, ne pas pousser un soupir de soulagement.

▬ Vraiment… ? C’est bizarre.

J’avoue que je ne suis pas entièrement honnête. Le savoir célibataire me rassure. Mais, d’un autre côté, ça m’inquiète. Même si son caractère n’est pas le meilleur au monde, il est quand même beau garçon. La majorité des filles s’occupent d’abord du physique. Je dois reconnaître que c’est son physique qui a attiré mon regard. Mais ce qui a conquit mon cœur, c’est son sourire le jour où il m’a offert son écharpe. Il a peut-être un tempérament tout feu tout flamme, mais tout le monde a ses petits défauts, non ?

▬ Il faut être plus entreprenant ! C’est comme au basket ! Il faut savoir sauter pour dunker. Avec les filles c’est pareil ! Il faut savoir faire le premier pas pour séduire !

Je me lève et m’étire. Si on reste là sans bouger, sans rien faire, je ne sais pas ce qui pourrait se passer. J’attrape sa main et le tire pour le mettre debout. En vain.

▬ Tas de muscles. Mets-y un peu du tien ! Dis-je en riant.

Quand il est enfin debout, je ramasse mon sac et le regarde de nouveau.

▬ Viens, on va se promener !

Je foulais déjà le sol de mes pieds, impatiente de me promener à ses côtés. J’aurais volontiers ôté mes chaussures pour marcher dans l’herbe, comme j’aimais le faire avec Dakota, mais je préfère éviter. Je ne voudrais pas que Pytha me prenne pour une gamine. J’en donne assez l’image je pense… Un légère brise se lève, venant mettre un peu plus de désordre dans mes cheveux noués négligemment. Je m’arrête alors, prenant le temps de libérer mes cheveux avant de passer mes doigts dedans pour leur donner un semblant de forme, puis je les noue de nouveau.

▬ Et toi alors ? J'imagine que tu dois avoir une tonne d'amis. Un copain ? Quelqu'un en vue ? Ça fait longtemps que t'es à Prismver ? C'est quoi ton don, à toi ?

Je le regarde une fois qu’il est à ma hauteur. Je cligne des yeux, à moitié surprise. Et je lui souris. Pytha il est comme ça. Il est pas très bavard, mais quand il doit l’être, il dit tout d’un coup. Il est adorable. Je me remets à marcher, joignant mes mains dans mon dos.

▬ Je n’irais pas jusqu’à me vanter d’avoir tant d’amis. J’ai mon petit groupe on va dire.

Je marque une pause. Dois-je répondre à la prochaine question ? Comment va-t-il réagir ? Oh, allons, Kate, il ne t’aime pas. Comment veux-tu que ça lui fasse quelque chose ? Dans le pire des cas, il se fout de toi comme de sa première paire de chaussettes. Dans le meilleur des cas, il te voit comme une bonne amie. Ne va pas t’imaginer trop de choses. Je sais que l’espoir fait vivre, mais tout de même.

▬ Je n’ai pas… de petit ami, non. Mais j’ai quelqu’un en vue, oui… je lui adresse un sourire. Un amour à sens unique, malheureusement pour moi.

Un rire. Faux. Un demi mensonge dit avec un sourire. Je reprends ensuite.

▬ Je suis à Prismver depuis 2 ans déjà ! Et toi, ça fait combien de temps au total ? Je le regarde du coin de l’œil et sourit avant de regarder de nouveau l’horizon en marchant. Je suis capable de percevoir l’humeur des gens en les regardant.

C’est un don qui semble assez inutile, mais pas tellement. Je sais quand mes amis sont fâchés ou heureux. Je sais quand ils sont tristes, tout ça… ça m’aide beaucoup à les comprendre. Les gens ont tendance à cacher leurs humeurs derrière de faux semblants. Si je ne devine pas leurs pensées, je sais plus ou moins sur quelle longueur d’onde elles sont par le biais de leur humeur.

▬ J'parie ce que tu veux que t'es super populaire. Tout le monde doit t'aimer ici. C'pas vrai ? Je suis sûr que si.

Je ris. Pytha est tellement… naturel. C’est difficile de ne pas rire avec lui.

▬ Oh non, je ne suis pas populaire. Je suis juste une fille comme les autres. Enfin… presque comme les autres. Disons comme une fille normale avec un don ? Et tu sais… je marque une pause, les yeux dans le vague. Personne n’est capable d’aimer tout le monde… ce serait un peu trop beau, tu ne crois pas ?

Tu entortilles une mèche de tes cheveux autour de ton index. Légère habitude que tu as lorsque tu réfléchis ou quand tu es gênée. Tu continues à marcher, songeuse. Oui, ce serait vraiment beau que tout le monde puisse s’aimer. Mais c’est impossible. Parce que, après tout…

▬ …il n’y a qu’un pas entre l’amour et la haine…

Un murmure emporté par la brise. Tu ne te rends même pas compte que ces quelques mots ont franchi la barrière de tes lèvres. Inconsciente que Pytha ait pu entendre. Tu abandonnes ta mèche maltraitée, retrouvant ton sourire. Tu voulais profiter pleinement de ce moment avec Pytha. Un moment qui, peut-être, ne se reproduira plus avant un bon moment. Ce que tu ne souhaites pas. Tu passerais tes journées avec lui si tu le pouvais. Tu te moquerais bien qu’on dise de toi que tu as une mauvaise fréquentation en la personne de Pytha sachant qu’il est en classe E alors que tu es chez les B. Le simple fait de marcher avec lui, de lui parler, ça te suffit. Rêver les yeux ouverts qu’il te prenne la main en t’adressant un sourire qu’il n’offrirait qu’à toi…

▬ Dis, qu’est-ce que tu voudrais qu’on fasse tous les deux ?

Il était curieux et t’avait observé un moment en silence. Tu étais un peu gênée que son regard soit posé si longtemps sur toi, comme s’il essayait de lire ce que tu avais dans la tête. Tu te sentis rougir tandis qu’il prit enfin la parole pour te répondre.

▬ Tu lui en as parlé au moins? Parce que ce serait bête de laisser passer cette chance. Et puis, peut-être que c'est réciproque mais que tu t'en rends pas compte. Qui ne tente rien n'a rien.

Tu relèves la tête, plongeant tes yeux dans les siens. Lui en parler… non, ce n’est décidemment pas une bonne idée. Qui sait comment il pourrait réagir. Tu ne penses pas qu’il soit du genre à se moquer mais il pourrait te rejeter. Et ça, tu ne le supporterais pas. Tu préfères garder tes sentiments pour toi. Même si ça te fait mal.

▬ Hm, non. C’est quelqu’un d’assez… solitaire qui ne semble pas s’intéresser à ce genre de choses. Je ne veux pas l’ennuyer avec ça.

Votre conversation se poursuit. Il te demande ton don, question à laquelle tu réponds sans détour. Puis la discussion prend un autre chemin, se basant sur tes relations. Tes lèvres brûlent de désir de lui avouer que c’est lui qui te plaît. Que c’est à lui que tu penses qu’on on te parle d’amour. Que c’est son sourire et sa présence qui te rassurent et te font sentir en sécurité. Oh bien sûr, tu te sens en sécurité avec Drew, par exemple. Un ami un peu dragueur mais tellement attachant. Mais c’est différent. Car Drew c’est ton ami. Et Pytha… c’est tellement plus.

▬ T'as des problèmes avec quelqu'un? J'suis pas forcément le plus fiable de ce côté-là, mais bon...

Il marque une pause, glissant une main dans ses cheveux en déglutissant presque imperceptiblement. Tu l’observes attentivement et esquisses un sourire attendri. Il est vraiment adorable…

▬ Tu peux toujours m'en parler s'tu veux…

Ta main se tend vers lui, se posant sur son bras. Le contact de tes doigts sur sa peau te fait frissonner mais tu n’en laisses rien paraitre. Tu lui adresses un large sourire se voulant rassurant et reconnaissant.

▬ Merci Pytha. Je ne manquerais pas de venir te voir en cas de problème.

Mais tu ne le feras jamais. L’inquiéter serait la dernière des choses que tu voudrais lui faire. Mais rien ne laisse croire qu’il ne s’inquiétera pas tout seul. Mais tu n’en as pas conscience. Tu n’aimes pas parler de tes problèmes, tu as peur qu’on te prenne pour une fille qui se plaint de tout et de rien, d’être incapable de te débrouiller seule.

Ta main finit par quitter sa peau. La marche reprend et tu lui poses une question, pour changer de sujet. Tu ne le remarques pas tout de suite, mais il s’arrête. Tu ne le réalises que lorsque ton cœur semble louper un battement. Tu t’arrêtes et te retournes. Il est à quelques pas de toi, t’observant. Tu plonges tes yeux dans les sien, y lisant son incompréhension.

▬ Faire tous les deux… Qu'est-ce que tu veux dire… ?

Tu penches la tête sur le côté. À ton tour d’être dans l’incompréhension. Qu’est-ce qu’il y avait de bizarre dans ta question ? Soudain, tu réalises la présence d’un éventuel double sens et tu secoues les mains, prise de panique, rouge comme un coquelicot.

▬ Ah, ce… ce n’est pas… je voulais dire… je… pardon, je…

Tu dissimules ton visage dans tes mains, vraiment trop honteuse. Quelle idiote tu faisais. Tu aurais voulu être aussi courageuse qu’Elise, ou aussi à l’aise que Dakota. Tu étais pire qu’une gamine de 12 ans. C’était sa faute à lui aussi ! Il te troublait tellement. Quelle idée d’être à la fois adorable et terriblement séduisant, hein ? Tu lui tournes le dos, découvrant ton visage pour mieux agripper le bas de ton t-shirt, tirant dessus, plus gênée que jamais. Tu finis néanmoins par balbutier une réponse.

▬ J-je… je voulais juste savoir… si tu voulais faire quelques chose en particulier. C-comme aller en ville ou… je sais pas… excuse-moi.

Tu voudrais t’enfuir en courant, te cacher dans un trou de souris et ne plus jamais en ressortir. Tu fais tomber ton sac qui se vide à moitié sur le sol. Tu les accumules là. Respire Kate, respire. Tu t’accroupis, te mordant la lèvre pour t’empêcher de pleurer face à cette maladresse qui est tienne. Pytha te déstabilise vraiment…

▬ Je suis vraiment… maladroite, haha…

Tu ramasses tes affaires, ne remarquant même pas que ton ballon de volley continue sa route, se faisant la malle. Pauvre Kate.

Sa voix te parvient à peine aux oreilles. Tu es tellement paniquée, tellement honteuse, que tu ne l’entends pas t’appeler. Prononcer ton prénom. À deux reprises. Tu ne réagis que lorsqu’il pose ses mains sur tes épaules. Tu te figes. Et si tu avais pu être encore plus rouge, tu le serais probablement. Il va comprendre et il te rejeter. Il ne te considérera plus comme avant. Tu dramatises totalement, t’imaginant le pire des scénarios.

▬ Est-ce que ça va ?
▬ O-oui, ça va… désolée.
▬ Sérieusement, dis-moi ce qui ne va pas.

Tu relèves enfin les yeux vers lui. Timidement. Lentement. Tes prunelles noisettes se plongent dans l’intensité de ses yeux. Il est inquiet. Pour toi ? Est-ce vraiment possible ? Tu déglutis en regardant ailleurs. Tu ne peux délibérément pas lui dire qu’il te fait perdre tes moyens et que tu l’aimes. Tu finis par rassembler ton courage, puisant ta force dans le sourire de Dakota qui s’impose à ta mémoire, puisant dans le contact des mains de Pytha sur tes épaules. Tu lui adresses un sourire. Désolé, mais surtout sincère et reconnaissant.

▬ Tout va bien Pytha, tout va bien...
▬ Je suis là pour toi, tu le sais ça ?

Tu penches la tête sur le côté, l’observant longuement. Vraiment ? Il est là pour toi ? Tu aimerais qu’il le répète. L’entendre te le dire un million de fois. Cet instant est tellement beau que tu te demandes si ton subconscient n’est pas en train de modifier ce qu’il dit. Non, tu divagues totalement. Il a vraiment dit ce qu’il vient de dire. Et tes yeux s’embuent sans que tu ne puisses le dissimuler. C’est si peu, mais c’est déjà beaucoup pour toi. Et ça te rend heureuse. Simplement.

▬ C'est peut-être un peu étonnant, mais... Tu peux me faire confiance.

Tu secoues la tête, laissant échapper un rire léger et bref. Tu t’approches, enfouissant ton visage dans son épaule. Son odeur vient chatouiller tes narines et tu souris bêtement. Ça te suffit. Pour l’instant. Tu aimerais tellement être une autre personne, être Dakota. Elle, si elle avait été à ta place, elle se serait déclarer, qu’importe la peur d’être rejetée.

▬ Je ne vois pas en quoi ce serait étonnant…

Tu te redresses, lui adressant à nouveau un sourire.

▬ C’est dans ta nature d’être attentionné. Tu n’en es peut-être juste pas conscient, qui sait ?

Tu t’approches de nouveau, timidement, hésitante. Et tu finis par poser tes lèvres sur sa joue. Et il t’en a fallu du courage pour le faire. Qu’on applaudisse bien fort Miss Miller.

▬ Merci Pytha… vraiment.

Tu t’éloignes enfin. Et cette fois-ci, tu es bien rapide. Gênée, ah ça oui, tu l’es. Tu te relèves, époussetant machinalement ton écharpe sur ton sac. Et tu réalises que ballon qui roule à plusieurs mètres n’est autre que le tien. Tu ne retiens pas un petit cri affolé avant de t’élancer à la poursuite du fautif, que tu rattrapes en quelques enjambées. Tu ramasses le ballon, le regardant un instant avant de sourire comme une imbécile heureuse. Tu te retournes, le brandissant fièrement à Pytha avant de le rejoindre.

▬ C’est ta faute s’il a roulé plus loin, voilà.

Tu lui jettes un coup d’œil, relevant timidement les yeux.

▬ Enfin… je plaisante hein… tu ne le prends pas mal hein ?

Tu te décales sur le côté pour te placer à sa gauche, dans le même sens de marche que lui, serrant le ballon contre ton abdomen. Tu reprends doucement la marche, lui jetant un petit coup d’œil pour voir s’il accepte toujours de marcher un peu avec toi. Tu as été idiote, et tu le sais. Tu espères juste qu’il ne t’en tiendra pas trop rigueur.