Get balls.

Lacets. Je me lève du banc, fais trois petits sauts -  j’aime la façon dont ces baskets amortissent mon poids plume. Je les squatte encore un peu avant de les rendre à Cale... Je m’étais promis de m’acheter les miennes vite, tout comme le short d’ailleurs, celui-là aussi est à lui... Mais bon, de toute façon, j’préfère éviter le blond cette semaine... Vu ce que j’ai fais à Ashley... Je lui rendrais quand tout ça ce sera calmé. Je passe devant le miroir des vestiaires, y jettant un oeil. Mon tee-shirt gris ne jure pas trop avec le short bleu et blanc de Cale, ça passe. Je sors des vestiaires, marchant le long du couloir pour aller jusqu’au casier de basket. J'entends quelqu’un dribbler, déja. J’espère que c’est pas Ashley... Peu de chance quand même, je serais vraiment poisseux. La tête dans le casier, je regarde les différents ballons. Merde, je sais plus quelle taille je dois prendre... J’suppose que c’est les plus gros... Ouais nan mais c’est un peu trop gros quand même... J’vais prendre un taille 6, osef non ?

J’arrive sur le terrain dribble maladroitement, m’avançant vers le centre. Oh putain. Je me plante là, et voit Skygge dribbler pour aller au panier et marquer. Heu, quand je dis dribbler, c’est pas mes dribbles hein. Il a genre, fin, la balle a tourné autour de tout son corps avant de passer dans le filet. ... Weeeeeeell. Hem. Bon, donc je suis là, seul, avec Natsson. Rappelons nous notre aimable dernière rencontre : lui, venant m’éclater la gueule - et c’est pas une façon de parler - dans ma propre salle de classe, parce-que j’ai couché avec Cale y’a plus d’un an. Sympa non ? Il se retourne vers moi, je pivote vers l’autre panier, me mordant la lèvre. Il vient de rompre avec Cale, comme je viens de rompre avec Ashley. On le sait, tout le monde le sait; deux couples aussi populaires, ça fait vite le tour. Et me voila avec le short de son bien-aimé perdu sur le cul, à squatter SON terrain. ... Ouuuups. On va faire comme si de rien n’était. J’avance vers mon panier - j’en oublie de dribbler tiens. Je tire, la balle fait un gros BAM contre la planche et s’échappe droit sur lui alors que j’empoigne mes cheveux au lieu de courir après.

... Fuck my life.

Il l’attrape d’une main. Moi aussi j’peux la tenir d’une main. Bon, pas sûr pour le taille 7 qu’il a déja sous le bras, mais bref. Nos regards se croisent. Oh putain. Il va me l’envoyer dans la gueule. Mon coeur s’accélère alors que je me prépare à me mettre en formation tortue - soit accroupie à terre les bras sur la gueule - pour encaisser. Mais non. Il lève les yeux au ciel et s’approche. Oh putain. Mes mains quittent mes cheveux, mes bras tombant le long du corps alors que je baisse les yeux, comme un gosse ayant envoyé le ballon une fois de trop chez le voisin. Il s’approche, et se plante  devant moi. Je lève les yeux sur lui; c’est rare que j’ai à lever les yeux, avec mon mètre quatre-vingt huit, à moins que ce ne soit un peu plus, j’sais plus. Bref, il est pas bien plus grand que moi, mais nos carrures n’ont juste rien à voir. J’suis mince, j’ai pas de muscle, j’suis une crevette à côté de ce colosse. Mais je soutiens son regard, déglutissant lorsqu’il arrive près de moi.  Oui, ce mec m’impressionne. A la base, déja, il m’impressionnait, alors depuis qu’il m’a refait le portrait pour plus de deux semaines, me donnant un mal de chien, ouais, il m’impressionne m’voyez ?

«... M’ci. »
« Tes appuis sont mauvais. »
« ... »

Et il repart, déja. Mmmh. J’me gratte la nuque, réfléchissant. Parce-que je supporte pas d’être en froid avec quelqu’un. J’suis persuadé que chacun à du bon, et qu’on peut toujours gagner à fréquenter quelqu’un. Cale fait partie de mes meilleurs potes. J’ai forcément des affinités avec Skygge. C’est juste... qu’on le sait pas encore. « Alors montre-moi. » Il s’arrête. Je le rattrape, et arrivé devant lui, jette mon ballon sur le côté du terrain, le dépassant pour  aller vers son panier. « J’suis là pour progresser, et toi t’a plus rien à apprendre à taper le ballon seul, alors de toute évidence tu veux juste te changer les idées. Ca tombe plutôt bien. » Comme si rien ne s'était jamais passé. Allons-y au culot, juste voir c’que ça fait. Je marche jusqu’à la ligne de lancer-francs, me positionnant derrière, levant les yeux vers lui. Je suis certain qu’on peut s’entendre. Je veux qu’on se réconciliee. Et quand je veux quelque chose, je l’ai.

Il me perfore la cervelle avec son regard. Enfin, c’est ptet pas un regard méchant pour lui, mais c’est l’effet que ça me fait. Il réagit pas tout de suite. Je tente le sourire, et me plie en deux dans un « MMMPH. » Alors que ma respiration vient littéralement de se couper. ALLO CE MEC VA TE TUER AVEC UNE PICHENETTE. SORS DE LA JIM. Je reprend mon souffle, me redressant une main sur la cuisse, fuyant son regard Ok, ok. Pas de sourire. D’accord. Pas de problème, ca me va.

« J'espère que tu plaisantes. » Heuuuuuuuu non, mais, si tu veux je peux faire croire que...

Frissons alors qu’il me frôle, fait un petit saut et fait claquer les filets derrière moi. Je tourne la tête vers lui, le regarde alors qu’il me dit de me démerder, voir de demander à Cale. Meeh. C’pas comme si  Cale allait venir taper le ballon avec moi, comme si de rien n’était... Il est forcément au courant, et j’ai eu aucune nouvelle. Même pas un LMS me demandant des explications. Alors j’en conclu que ça lui reste en travers de la gorge pour le moment... D’autant plus que lui-même va pas bien, je le sais, malgré tout ce qu’il essai de montrer aux gens. Mais je pense pas qu’il tenne à ce que Skygge le sache, alors je me tais, baissant les yeux.

Alors, il me rappelle que c’est pas un tendre, et cite ce que je lui ai craché à la gueule quand il me frappait. Quoi, monsieur est susceptible ? C’est mignon. Cynisme. Mais je m’efforce de ne rien laisser paraître; Skygge me fait clairement flipper, je sais mieux que quiconque de quoi il est capable.

« T’étais en train d’me frapper, j’allais pas te jeter des fleurs... »

Juste une remarque, teintée d’amertume. Je soupire, levant les yeux au ciel. Passons, avant qu’il ait le temps de mal prendre ce que je viens de dire.

« Et quand à Cale, il est trop occupé à réconforter Ashley pour venir passer du temps avec moi... »

J’ai pas vraiment réfléchi, j’ai parlé pour moi, en fait. Et puis, tout le monde est au courant, Skygge l’est forcément ; si ce que j’ai fais à Ashley lui avait déplu, il me l’aurait fait comprendre y’a longtemps.

Pourquoi c’est lui qui la réconforte et pas moi ? ... Ok, il est visiblement pas au courant... En même temps, j’imagine qu’il parle pas à Cale ces temps-ci, et il est pas du genre à traîner en groupe ou s'intéresser aux ragots... Alors quand il me dit que j’suis son mec, j’me contente de détourner le regard, me mordant l’intérieur de la joue. Il s’approche de moi, me fixe, face à face, ce qui a pour effet de me crisper légèrement. Quoi, il a compris ? Il va me péter la bouche parce-que je fais souffrir Ashley ? Il jette le ballon en arrière et mes yeux noisette suivent sa trajectoire, instinctivement. Il disparaît de mon champ de vision, le visage de Skygge me bloquant la vue, mais le bruit des filets me signifie qu’il a marqué. Ashley m’avait prévenu, qu’il y avait un sacré niveau dans l’équipe. Moi, je m’étais inscrit au club de sport pour Ashe, Cale, Gautier, puis surtout pour rigoler, mais Skygge est pas du genre à rire devant mes pitreries alors que j’suis pas fouttu de faire un double-pas. Mes yeux suivent le ballon qui roule alors qu’il s’éloigne de moi. Je souffle. J’aime pas l’avoir trop proche de moi comme ça, ça me stresse.

Lui va s’asseoir, et moi je vais récupérer son ballon. Mes mains sont grandes, j’arrive à le tenir d’une main mais il glisse. Je fais quelques dribbles, réfléchissant à la manière d’apprivoiser Skygge. Mais il est le premier à parler, finalement.

« Qu'est-ce que tu fous ici au juste ? Me fais pas croire que le basket est un moyen pour toi d'évacuer un quelconque stress, je te croirais pas. » Dédain. Je lève un regard quelque peu courroucé sur lui. Je vois bien ce qu’il veut dire. J’arrête de dribbler et cale le ballon sous mon bras, écartant l’autre. J’en ai marre qu’il me traîte comme ça, y’a aucune raison. « Franchement... Tu crois réellement que j’suis qu’un abruti heureux ? Que j’ai jamais de soucis ? Que parce-que je suis en A et fais la fête je suis forcément heureux H24 ? » Je le fixe, droit dans les yeux, profitant de la bonne distance qu’il y a entre nous pour hausser le ton dans le but de me faire comprendre. « Figure toi que si, j’suis venu là pour me détendre, pour penser à autre chose ! Parce-que je sais qu’Ashley souffre à cause de moi et ça me prend la tête, j’y pense nuit et jour, alors plutôt que de picoler ou m’rouler des joints j’viens faire un truc utile en essayant d’apprendre quelque chose ! » Je me renfrogne, fais quelques pas en dribblant et tire, et rate. Mais j’attend même pas que le ballon retombe pour me tourner de nouveau vers lui, écartant de nouveau les bras pour accompagner ma parole. « C’est quoi ton problème putain, t’a décidé d’me haïr pour une erreur du passé qui te concerne même pas ? Tu te permet réellement de juger les gens avec si peu ? » Agacé, je retourne chercher ma balle, shoot au pied dedans pour la faire rebondir contre le mur le plus proche, la laissant rebondir vers moi.

Je tend les bras vers la balle alors qu’elle vient dans mes mains, mais son corps apparaît entre elle et moi, et il me subtilise alors qu’elle frôlait le bout de mes doigts. « Oui, tu es un abruti. » Je passe ma langue sur mes dents, vrillant sur lui un regard noir, alors qu’il regarde le panier. Il tire, et marque, encore. Ca m’agace.

« Tu te pavanes comme un paon dans une basse-cour. »
« C’est faux. » Bordel, c’est pourtant pas le premier qui pense ça de moi. Je ne me pavane pas, je ne cherche pas à attirer les regards, pas du tout, j’me contrefiche de séduire qui que ce soit ! Mais je suis à l’aise, oui, je suis parfaitement bien dans mon corps, je suis libre de toute timidité, alors oui, j’occupe l’espace et je déborde d’énérgie. Je cherche à faire sourire les gens, je provoque les rires; putain de merde mon seul but est de rendre les gens heureux, et en retour, on me balance dans la gueule que je me pavane. Ca me met sur les nerfs. C’est vrai qu’en soirée, je joue au séducteur, j’hésite pas à faire des strip-tease, et à me pavaner comme il dit... Mais ce n’est que pour chauffer l’ambiance, c’est mon truc d’animer les fêtes, je veux qu’on s’y éclate, en aucun cas c’est pour satisfaire mon égo... Je joue au Roi de la Fête, mais je suis loin de me prendre pour  un Roi en dehors. Alors oui, mon comportement montre que je suis heureux. Ce matin, je dansais encore dans la salle des A, et ce soir, j’amuserai la galerie avec qui voudra bien me porter compagnie. Parce-que j’intériorise. Parce-que je veux rendre les gens heureux. Alors je leur partage pas mes peines. Et ça aussi, j’ai du mal à me le prendre dans les dents. Je ne suis pas susceptible, on peut bien dire ce qu’on veut... Mais je sais pas, venant de Skygge ça me blesse. Parce-que... Je sais même pas pourquoi, d’ailleurs.

Je sais, qu’il n’était pas au courant que mon histoire avec Cale était vieille. Et que c’est pour ça que ça a été si violent. Sur le coup, ce jour la, je ne pouvais pas comprendre. Ni sa jalousie, ni sa violence. Je ne pouvais pas le comprendre, parce-que je n’ai jamais été jaloux de personne. Et je n’ai jamais été amoureux non plus. Mais lorsqu’il me demande comment j’aurai réagi, à sa place, je ne peux m’empêcher de m’imaginer en lisant une telle chose. Et ce n’est pas Cale, ni Ashley, qui m’apparaît, mais bien Morgan. Imaginer la perspective qu’il me trompe... Automatiquement, c’est le visage de Mike qui me vient en tête, et je serre les dents avec force.

« ... J'ai suivi ma rage, mon instinct, ce jour-là. Tu en aurais fait de même. Avec moins de violence, peut-être. »
«... Avec moins de force c'est certain. Mais la violence aurait été là. »

Je secoue la tête, chassant les pensées de Mike et Morgan, ensemble, qui m’assaillent. Je me passe la main dans les cheveux, et rattrape de justesse le ballon qu’il me lance avant qu’il ne m’arrive dans la gueule. « J’viens pas chercher tes excuses, tu m’en dois aucune. » Mon ton est dur, mais mon regard reste méfiant, car déja, il commence à me rabaisser. Ou plutôt, à enjoliver ma situation. Populaire, intelligent, et aimé ? Je fronce d’avantage les traits alors qu’il me dit qu’il déteste ça. Je m’apprête à répliquer, mais son regard me fait littéralement froid dans le dos, et me coupe dans mon élan. Je ne suis pas là pour lui faire de beaux discours ! Je veux qu’il s’ouvre à moi, qu’il prenne la peine de me connaître avant de me juger !  Sa main de pose sur mon épaule, la serre avec force. Je le fixe, impassible, je ne souris pas, je ne baisse pas les yeux. Je suis presque aussi grand que lui, et je ne recule pas devant ce geste que je comprend parfaitement. Je n’ai toujours pas pur de toi, Skygge. Enfin, si, j’ai peur. Mais ça m’empêchera pas de venir chercher des coups tant que j’obtiendrai pas c’que je veux. Je suis têtu, inconscient, et c’est grâce à ça que j’obtiens ce que je veux, peu importe par quoi je passe.

« J'espère pour toi que ta rupture avec Ashley a un motif valable. Je me verrais contraint de te briser les os un par un. Ce serait dommage, pas vrai ? » Je cille, déglutis, mais ne le lâche pas du regard, presque défiant. Je sais parfaitement que je ne fais pas le poids. Mais je sais aussi que quand je veux, je peux. « Je dois reconnaître que ton élan de franchise m'a fait plaisir. Évite juste de shooter dans un ballon de basket la prochaine fois. C'est une insulte au sport en lui-même. » Une lueur traverse mon regard, et à peine a-t-il le dos tourné, je souffle, me rendant compte que j’étais dans une semi apnée tout le long qu’il était proche de moi. Mes muscles se détendent, je desserre les dents. Y’a vraiment personne d’autre qui me fait cet effet là. Ce sentiment la. La peur. Et je crois que c’est pour ça que je veux forcer le passage. C’est comme un défi. Tout le monde m’aime, oui. Alors je veux passer un cran au dessus. Me faire aimer des gens comme lui. Des gens qui n’aiment pas la vie, ou du moins, lui tournent le dos. Et ce n’est pas une tentative égoïste. Si je veux qu’il m’accepte, c’est parce-que j’ai des choses à lui apporter. Ils ont raison. Je suis un soleil. Et le soleil a décidé d’illuminer la lune. Défi.

« J’ai embrassé Morgan. Ashley nous a vu. Je l’ai insultée. Je l’ai traitée comme une moins que rien, je l’ai humiliée. Je voulais qu’elle me haïsse pour moins souffrir. J’ai été la pire ordure. Elle m’a frappé, et est partie en pleurant. Depuis, elle rate tout les cours. J’me suis comporté comme la pire des raclures. »

Défi. Confessions. Je le fixe, yeux dans les yeux. Pourquoi est-ce que je lui dis ça ? Besoin de le dire à un inconnu. Mais, surtout, besoin de connaître la Bête, pour mieux l’apprivoiser. Mord-moi, je n’en saurais que plus sur la façon de procéder la prochaine fois.

« Tu me trouve toujours si parfait, maintenant ? » Regard. Je me tourne vers le panier, tire, et marque.

Après avoir marqué, je tourne les yeux vers lui, ayant aperçu du mouvement. Bien. Il a pas répondu, mais s’est levé, après ce que j’ai dis sur Ashley. Respire. Tu sais ce qui va se passer. J’inspire et me tourne vers lui. BANG. C’est violent. Mon visage vole, mon corps pivote, ma pommette explose de douleur. Penché en avant, je vois le sol, flou, arriver doucement, et ma main vient se plaquer au sol empêchant que ma chute soit totale. Mais avaec l’élan, mes jambes titubent, et voulant me reculer de Skygge, je m’écroule finalement, ma main libre venant recouvrir l’endroit douloureux. La partie supérieure de ma mâchoire me défonce de douleur, et je laisse échapper un gémissement plaintif, fermant les yeux avec force. Et lorsqu’il prend la parole, la main devant la bouche, yeux clos, j’acquiesce. Simplement parce-qu’il a raison. J’suis sonné. J’ouvre les yeux, mon environnement tremblant légèrement, mais je vois distinctement sa main se tendre vers moi. Je lève les yeux vers lui, et j’aurai souris, si en essayant, ma joue ne m’avait pas fait si mal.

Et je me relève. Il me dit que je ne suis pas parfait, que personne ne l’est, et fait une remarque sur ma mèche. Cette fois, je ne peux retenir un sourire, je laisse même échapper un rire discret, portant mes doigts à ma bouche, et observant le sang qui y perle; je me disais aussi qu’il y avait un goût dégueulasse tout d’un coup. Une tape sur la tête, et je souris d’avantage, yeux toujours baissé, devant ce que je considère comme un geste amical alors qu’il me dit que je fais pitié.  « Tes appuis étaient bons. Tu vois quand tu veux. » Mon coeur s’accélère alors que je lève les yeux sur lui, souriant, me massant toujours la joue alors qu’il s’éloigne, dos à moi. Je suis satisfait. Comme je m’y attendais, avec lui, il faudra que ça passe pas les coups. Mais qu’est-ce qu’un peu de sang comparé à une amitié ? Je retourne chercher le ballon, non loin, faisant craquer ma mâchoire douloureuse.

« Honnêtement, pourquoi t'es encore là ? T'es juste maso ou y a une raison derrière tout ça ? » J’éclate de rire, dribblant. « Je suis COMPLÈTEMENT maso, Skygge. » Je tire, rate, et me déplace rapidement pour rattraper la balle, avant qu’elle ne s’éloigne trop. Et revenant au niveau des lancers-francs, je fais deux dribbles, tire, et la balle retombe en dehors après avoir tourné autour du cercle.

« Et puis, je t’aime bien. Voila pourquoi je reste. Et qu’importe ce que tu en pense. » Il a été touché par mon honnêteté, toute à l’heure ? Ca tombe bien, parce-que je le suis. Un maximum.

Je continue de sourire, de plus en plus satisfait. Il m’a appelé Mec. Je le laisse me positionner - un peu brutalement - et prend ensuite la même pose que lui, m’appliquant bien à plier mon bras comme il le fait, fléchissant sur mes appuis. Il tire, marque, je tire, rate. J’hausse les épaules devant sa remarque, vais récupérer mon ballon, avec toujours cette petite fierté. Il a dit qu’on allait bosser dur; donc j’ai eu ce que je voulais. Le reste n’est qu’une question de temps.

J’effectue quelques dribbles, marchant, observant tantôt le sol, tantôt le panier, plissant les yeux. Puis je le regarde lui, le sol, le panier... Je me déplace, reviens sur mes pas, comme cherchant quelque chose.

« D’accord. »

Je cale mon ballon sous mon épaule, me mettant en marche vers un endroit précis, entre la raquette et la ligne des trois points, côté gauche.

« Je suppose que tes spots de shoot favoris sont ici, là, et là. »

Je désigne de la main trois endroits, derrière les trois points, devant, et dans la raquette.

« Si ce n’est pas le cas, tu devrais, c’est ici que tu as les meilleurs probabilités de marquer, si on prend en compte ta façon de shooter et le léger déséquilibre de forces de tes bras. Moi c’est plutôt ici, mais avec mon shoot actuel, qui n’est pas bon.»

J'essaie de prendre les appuis qu’il m’a montré, shoot et rate de peu. Je recommence, au même endroit, et marque. Puis marque encore une fois derrière.

« J’peux te demander pourquoi vous avez rompu ou ça va te mettre en rogne ? »

Le ton léger, comme désintéressé, nouveau shoot, je rate, et vais chercher mon rebond.

Il fait demi tour. Probabilités qu’il parte : 87,45%. Merde. Non, mais, j’voulais pas... Je m’arrête de dribbler pour poser mon regard dans le sien, frissonnant. Il est déçu. Ca se voit, ça se sent. Si il est déçu, c’est qu’il commençait à apprécier. A avoir un espoir, quelconque. ... Chier. J’ai tout gâché...

« J'espère que ça t'éclate de jouer avec les autres, parce que c'est la dernière fois que tu le feras avec moi. »
« Skygge... Je joue pas... J’voulais pas... »
« Et estime-toi heureux que je te refasse pas le portrait une nouvelle fois. »

Je serre les dents, sourcils courbés, déçu. Fais chier, putain de merde, j’avais enfin réussi... Il commence à se barrer. Il va se barrer. Ca n’en sera que plus difficile la prochaine fois si je le laisse partir. Faut que je le retienne. Peu importe comment. Mon ballon quitte mes bras et fonce droit sur Skygge, percutant le mur juste derrière Skygge avec force. Je me mord la joue, mais le regarde sévèrement. Probabilités qu’il vienne me frapper ? 94,91%. Tant pis. Je m’avance vers lui.

« Est-ce que j’ai l’air de jouer avec toi ? »

Je lui gueule dessus, rien à foutre. Mon souffle se coupe, alors que je  me rapproche de lui. C’est comme aller de soi-même à l’abattoir. « T’a raison, je sais rien de la solitude. Mais je vois combien elle t’a bouffé. Combien elle va te bouffer maintenant que tu l’a même plus lui. » 96,48%. « Pourquoi t’es comme ça hein ? » Je le dépasse, le fixant toujours, et ferme la porte d’un grand coup, me plaçant entre lui et elle. « Pourquoi tu me crache dessus alors que j’suis sympa avec toi, et honnête ? » Je le fixe, yeux dans les yeux, ma main toujours sur la porte.

« C’est quoi l’intêret de jouer au solitaire et de mépriser les gens qui essaient de t’apporter un peu de bonheur ? Faut vraiment être con, Skygge !» Merde. Ca, ça m’a échappé. Je déglutis. 98%.