|
| Aride. | |
| InvitéInvité | Sujet: Aride. Dim 29 Déc 2013 - 21:44 | | hai hai ojou-sama LIl fait chaud à en crever. Horriblement chaud. Même avec des chaussures, on a l'impression que le sable s'immisce entre elles, sournoises, elles ouvrent le passage. Ça brûle. C'est une véritable fournaise.
Des dunes de sable à en manger pendant des décennies. Du sable, du sable, des ruines, des bestioles, du sable. Pour les touristes chinois ou ceux de passages, ce paysage pouvait être magnifique. Mais franchement, il n'avait rien de sublime. Ca dégageait quelque chose de vide - comme coupés du monde extérieur. Et pourtant, elle était bien là, elle. En sa compagnie.
Égypte. Vacances. Non. Deuil. On avait mit presque deux mois a organiser toute cette merde. Mais finalement, ça y est. Deux mois sérieusement, durant tout ce temps il était bien obligé de le faire son deuil. L'utilité de ce voyage se rapprocherait presque du néant.
La chaleur se glisse même dans l'avion. Avec ce silence écrasant, même en sussurant, elle aurait pu entendre. Il entre-ouvre les lèvres pour parler. L'air brûlant pénètre sa gorge avec ardeur, lui ôtant presque chaque parcelle d'humidité déjà bien mince. Frustration. Il déglutit.
En vérité, ça ne le dérangeait pas de faire ce voyage avec elle. C'était plus l'embarras des choses passées qui lui montait au joue. Elle savait pour Corentin et lui - ce fut la première. Elle avait tout entendu. Lui-même savait que ses similarités avec Drew l'attirait. Mais là, Corentin lui sert simplement de substitut. Et elle le sait.
Elle sait tout. Ça crevait aux yeux.
Il appréhendait vraiment ce séjour. Deux longues semaines en sa compagnie. Ça va être horrible. Même inviter Mabel aurait été plus agréable - sans doute. Mais il ne s'était pas plaint et s'était même retenu de lui lancer des pics pendant les six longues heures d'avion qu'ils avaient subits. Et là, il ne saurait dire si c'est la chaleur qui lui brûle les lèvres où s'il a vraiment envie de l'importuner...
L'avion se pose. Attente presque interminable. Il grogne et tourne la tête vers la brune, assise sur le siège à côté de lui. Regard. Un fin sourire se dessine alors sur son visage. Il s'apaise.
Ça va ? Il détourne le regard, le posant sur le hublot où derrière celui-ci figurait une vaste piste d'atterrissage. Silence. Il parle. Il va faire très chaud, quand on sera dehors. Silence. Temps de pause. Tu vas le voir. Il tourne la tête pour la regarder. Sa main se glisse sur ses propres vêtements qu'il tâte. Et il en sort une bague en or, lui tendant impassiblement. Met-ça. Durant ces deux semaines, tu feras mine d'être ma fiancée. C'est hautement plus crédible. Nous n'aurons rien à partager mis à part la chambre. Soupire. Tu feras ce que tu veux de cette bague après. Mais tâche de la garder pour l'instant.
Il s'était presque montré nonchalant, calme. On te traitera de la même manière que moi. Il se mord la lèvre. C'était tellement rabaissant de dire ça. Fais-toi juste passer pour quelqu'un de droit et de distingué. Les paroles ne servent à rien, il ne comprennent quasi pas l'anglais. Tu sais très bien jouer la comédie, n'est-ce pas...? Sourire narquois. Le venin s'échappe, bien qu'en très faible quantité.
Un homme arrive. Il était temps. Rapide regard adressé à Sarah. Pointe de détresse. Son coeur bat. Le stress monte. En réalité, il avait surtout peur qu'on ne parvienne pas à le croire vis à vis de Sarah. Après tout, lui qui était si misogyne, qu'il trouve une fiancée en quelques mois serait que trop remarquable. Surtout qu'il aurait pu choisir une fille nettement plus belle et prestante. Déglutit.
Calme, Anshu. Soupire. La porte s'ouvre, les escaliers se montrent. Il lui adresse un autre regard, souriant, cette fois. Un pas, puis deux. L'air brûle déjà la peau en plus de la chaleur et de l'embarras. Soupir. Ses pas trouvent lentement les escaliers alors qu'il jette pour la énième fois un regard derrière lui, Sarah, la suivant.
Une fois descendu, il s'incline légèrement, allant prendre la main de la Brune. En Égypte, on pouvait dire que la femme devait être hautement respectée, même si se tenait devant elle un des hommes les plus influents du pays. Il ne lève pas le regard vers elle mais peste intérieurement, rage, de tout son être.
Ils étaient juste sur le toit de la demeure, là où résidait la piste d'atterrissage qu'il cotoyait presque chaque vacances. Même descendue, il ne lâche pas sa main. Il la serre même, prêt à la broyer si cette garce montrait le moindre signe de moquerie.
Devant eux se présente alors des hommes, tous inclinés, presque soumis, aussi bas que terre. Il n'a jamais trouvé ça injuste. Mais peut-être qu'elle... Sa main libre s'agite verticalement, leur faisant clairement signe de se redresser. Grognements.
Pressant le pas au vu de la chaleur écrasante qui s'adressait à eux, il pousse alors la large porte séparant le toit de l'intérieur. La chaleur disparaît progressivement. Il fait presque froid dans le palais. Ça parait presque ancien. L'électricité était trop chère pour la cupidité et l'avarice du maître des lieux, et dans tous les cas, ils bannissaient tout ce qui était électrique. Alors c'était les flammes luisant sur des flambeaux qui servaient d'éclairage. Les murs étaient ornés d'or, de tissus de soie. C'était toute cette délicatesse qui avait incité au Prince d'être si féminin.
Des hommes, encore des hommes qui étaient inclinés, tous abandonnant leurs tâches pour les arrivants. Il n'y avait que très peu de femmes ici, parce qu'Anshu, lui, n'aimait pas ça. Les seules femmes qui avaient la chance de subsister ici ne servaient qu'à lui choisir ses vêtements.
Cette fois-ci, il ignore le malaise de Sarah face à la situation présente. Il s'arrête en plein milieu du couloir pour lâcher sa main.
Vos bagages seront portées dans la chambre en temps voulu, Sarah. Sa voix s'était soudainement faite faussement mielleuse - comme quoi, il ne savait pas toujours bien jouer sa tête à claque. J'espère que vous allez vous plaire en ces lieux.
Sous les regards des domestiques, il pose un genoux à terre alors qu'il saisit délicatement sa main, portant le plat de cette dernière à ses lèvres. Discret regard, rageux. Que ces deux semaines en ma compagnie vous soient bénéfiques. Hypocrisie.
codage par Palypsyla sur APPLE SPRING - modifié |
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Lun 30 Déc 2013 - 23:18 | |
i'm a princess and i wanna be the queen.
Il y avait des fois où je me surprenais moi-même. Des paquets de fois. Depuis le moment où j’étais montée dans cet avion – et Dieu savait que cela faisait maintenant un bon bout de temps – une question m’était restée à l’esprit, ancrée dans ma cervelle, marquée au fer rouge dans les plis les plus sombres de ma personne.
Pourquoi ? J’avais cette horrible impression d’être coincée pour une dissertation – ayant 6 heures sur table pour trouver une réponse. C’était de la pure folie. Partir en vacances dans un endroit où la température extérieure frôle les 40 degrés alors que le simple contact du soleil sur ma peau me donne envie de vomir était une folie.
Partir avec Anshu était une folie. Certes, c’était une promesse qu’on s’était faite dans un moment de faiblesse qu’on s’était concédé de manière tacite. Aller en Egypte pour faire un deuil. Aller en Egypte pour panser ses plaies, et apaiser mes maux. C’était bien joli tout ça. Mais deux mois étaient passés. Deux longs mois où tout avait changé, deux mois de silence entre nous, deux mois – et Corentin. Il savait sans aucun doute que je savais, j’avais pris la peine de lui envoyer un lézard pour le prévenir. J’étais bien d’accord sur le fait qu’on ne pouvait pas se fuir éternellement mais de là à vraiment organiser ce voyage pour nous deux … C’était franchement culotté de sa part de tenir ses engagements après ce léger malaise. Mais je suppose qu’il ne voulait pas perdre la face – car un Prince ne revient jamais sur sa parole ou quelque chose comme ça … Quoiqu’il en soit, tout ça était stupide.
Quoiqu’il en soit, je m’étais jetée tête la première dans cette idiotie. Bien joué, Sarah.
Maintenant tu es dans cet avion où la moiteur est insoutenable, attachée à côté d’une personne avec qui tu entretiens une relation plus que chaotique – tu es énervée, et silencieuse. Depuis maintenant un bon nombre d’heures. La vision du paysage désertique se profile dans le hublot, et je passe une main sur ma nuque collante, frissonnant. On est presque arrivés. Lancés dans l’inconnu. Une vague de stress me soulève alors que la vérité me percute enfin de plein fouet. Deux semaines avec l’homme dont la présence même m’empoisonne – deux semaines où tout sera révélé, éclaté. Je prends vaguement conscience que celle que suis en cet instant sera radicalement différente de celle qui reprendra ce même avion pour repartir à Prismver. Dit comme ça, ça donne le vertige. J’avale difficilement ma salive alors que l’avion se met à atterrir, mes ongles s’enfonçant dans les accoudoirs capitonnés du siège. C’est juste une anxiété passagère. Ca va très vite disparaître. N’est ce pas ? – je compose un air serein sur mon visage, respirant à grands coups silencieux. Le visage planté sur le tableau de bord, décidé.
« Ça va ? »
Ma tête se tourne vers le Prince, hochant la tête doucement. Pourquoi Prince ? Pourquoi ? Il doit voir la question, le problème, tourbillonner au fond de mes yeux résignés. Il continue cependant à parler, meublant ce silence – horrible chape de plomb qui nous entoure – du mieux qu’il peut. Et nous qui d’habitude avions la langue bien pendue.
Il aura fallu 6 heures pour entamer une conversation, et pas des plus intéressantes qui plus est. Franchement Prince ? Parler de la pluie et du beau temps ? Voilà qui ne sied guère à votre bouche. Je grimace à l’idée de la fournaise qui m’attend dehors – le pire étant que je n’ai pas beaucoup d’affaires pour grande chaleur. On habite à Prismver bordel, c’est pas les maillots de bain là-bas ! Et puis, c’est pas comme si je pouvais mettre des débardeurs ou autres décolletés exposant mes cicatrices. Bref, j’étais foutue. Je soupire. Il tourne sa tête vers moi alors que ses mains viennent chercher les poches de ses vêtements, et j’hausse un sourcil alors qu’il me tend quelque chose … Une bague ? Mon dieu, tout ça sent les embrouilles à plein nez.
« Met-ça. Durant ces deux semaines, tu feras mine d'être ma fiancée.» Plaît-il ? «C'est hautement plus crédible. » Mais, attends, quoi ? Nous n'aurons rien à partager mis à part la chambre. Oh bien sûr, rien que ça. J’attends un peu, croyant à une blague, en vain. Même si le Prince en lui-même est de mauvais goût, il ne s’abaisserait pas à ça. Comme à moi, la nouvelle lui coûte. J’avale difficilement ma salive, l’information ayant du mal à passer, coincée dans ma gorge. Il savait tout ça. Et il ne prenait le soin de m’en parler que 5 minutes avant d’arriver. C’était vraiment … exécrable. Et voilà une chose de plus qui s’ajoutait à la longue liste des facteurs qui feront que ce séjour sera un véritable enfer. «Tu feras ce que tu veux de cette bague après. Mais tâche de la garder pour l'instant. »
Je pousse un long soupir résigné, regardant la bague scintiller au creux de sa paume. Elle est belle – en même temps, il avait plutôt intérêt, sinon il se serait pris mon poing dans son royal visage. Mes yeux croisent ceux d’Anshu. Je suis là pour lui – je suis son soutien, son rappel, son gardien. Ce n’est pas comme si cette situation devait lui faire plaisir non plus. J’esquisse un sourire. « Et tu n’es pas censé me la passer au doigt ? » L’air chaud brûle ma bouche, et je le regarde un instant, fidèle à moi-même. Je me décide tout de même à prendre la bague et à l’enfiler sur mon annulaire, contemplant le résultat. Etrange. Mais pas mal du tout.
Le Prince continue de se perdre en explications. Désormais, je suis une princesse – sa princesse. Goût désagréable dans la bouche – je mords ma lèvre inférieure. Est-ce que le fait d’être traitée comme une reine pourra vraiment repayer ce jeu de masque – tout cela allait être douloureux. Difficile. Contre-nature. « Fais-toi juste passer pour quelqu'un de droit et de distingué. Les paroles ne servent à rien, il ne comprennent quasi pas l'anglais. Tu sais très bien jouer la comédie, n'est-ce pas...? » Je rigole doucement. Le poison est toujours là, entre nous – bien qu’il soit affaibli. « Ne t’inquiète pas pour moi Prince. Occupe toi plutôt de ton propre jeu d’acteur, je ne tiens pas à ce que tu gâches tout mon travail. » Car il sera beaucoup plus simple pour moi qui n’aurait pas à parler de convaincre des étrangers. Toi, Prince, ils te connaissent. Et ton attirance pour les hommes et comme tatouée en chacun de tes gestes, en chacun de tes mots. Tu ne me connais pas Prince, du moins pas assez pour savoir que ce milieu ne m’est pas inconnu. Je suis née dans une cage dorée moi aussi, et même si je l’ai fui dès mon plus jeune âge, des choses restent. Ancrées dans ma mémoire de petite fille, ancrées dans les coups, les leçons, les remontrances de ma mère. Savoir jouer à la princesse sera un jeu d’enfant aux saveurs aigres et acides. Tout ça ne fait pas partie de mes meilleurs souvenirs.
Tu me le paieras, Prince.
Un homme arrive, et le coup d’œil furtif qu’Anshu me lance fait fondre toutes mes idées de revanche. C’est de la panique, il avait besoin d’aide – au fond, c’était sûrement lui le plus anxieux. C’était lui, qui avait tout à perdre. Sans un mot je suis docilement les deux hommes qui se trouvent devant moi, descendant les marches de l’avion en inspirant. Puisant de la force dans chacun des regards qu’il me jette – la force de l’embarras, de l’humiliation, de la colère. Epaules droites, menton relevé. Livre sur la tête. Tout commençait maintenant. Et moi, en simple slim noir et chemise à manches courtes blanche, tâchait d’être à la hauteur, pour lui – mais surtout pour moi. Je fus presque choquée de la facilité avec laquelle les vieilles leçons de ma mère – que j’avais à l’époque subi comme torture – revinrent naturellement changer mon corps. Mes attitudes. C’était effrayant, vraiment.
Tout comme cette main qui se glisse dans la mienne, galante. Qu’est ce qui me retient d’exploser de rire, qu’est ce qui me retient de rejeter cette main, d’une claque bien précise ? Mes doigts s’enroulent autour des siens, les serrant, griffant. Me confirmant pour de bon que ceci n’est pas un cauchemar – cette étreinte autour de ma main est bien trop douloureuse pour être réelle. Je le connais assez pour savoir qu’il brûle de rage de tout son être à mon contact – et je suis certaine qu’il sait à quel point le voir courbé me fait jubiler, intérieurement. Les hommes continuent d’affluer, s’étalant à plat ventre à nos pieds. Je ne peux réprimer une mine dégoûtée. Des hommes sans aucun amour propre au service d’un adolescent au lourd complexe de supériorité. Tout s’explique. Je me ressaisis rapidement, n’oubliant pas la tâche que je dois effectuer. Princesse. Nos mains serrées sont tout ce qu’il reste de notre combat quotidien, je me laisse guider, assommée par cette chaleur cuisante, gagnant le palais. Me serrant un peu plus contre lui – cré-di-bi-li-té.
Le palais était digne de tout ce que j’avais pu imaginer. Il était sombre mystérieux doré enluminé – bref, on se serait cru dans une peinture tout droit sortie des milles et une nuit. C’était magique. Irréel. Et à peine concevable que quelqu’un puisse y vivre en réalité – sans électricité, sans rien de moderne ? Peut être que ce cet écrin de soie et d’or était ce qui avait rendu le Prince ainsi. Fou et démodé. Pour moi, c’était le dépaysement total, tout allait trop vite, trop de couloirs, trop de recoins mal éclairés, trop de mystères, trop de – est ce normal que l’on ait croisé uniquement des hommes jusqu’à maintenant ? Un malaise silencieux s’empare de mon ventre alors que j’ai conscience de tous les regards rivés sur moi. Moi, l’étrangère habillée simplement qui a fait changer le Prince de bord.
Je ne devais pas vraiment les impressionner. Pour une fois, j’étais vraiment heureuse que personne à part lui ne pouvait me comprendre.
Sa main lâche la mienne et je ressens un immense vide entre mes doigts – sans ce point d’attache, je suis perdu. Mes yeux viennent anxieusement le chercher, et trouvent sa Majesté dans toute sa splendeur – ceci est ironique. Comme quoi il n’allait pas changer. Comme quoi, Anshu restait toujours Anshu. Vos bagages seront portées dans la chambre en temps voulu, Sarah. Cette pointe de politesse malvenue – et totalement moqueuse m’apaisa aussitôt. C’était beaucoup plus simple ainsi, c’était ainsi, c’était nous. Même un genou à terre, même avec ses lèvres sur ma paume, il était le Prince. Etre entier de haine et de souffrance, jouant avec les fils de ma vie – comme je m’applique à emmêler les siens. « Que ces deux semaines en ma compagnie vous soient bénéfiques. » Quelle hypocrisie. Je suis admirative. Je laisse mes doigts glisser sur sa joue, l’entraînant vers le haut, l’intimant de se relever. Et tout sourire, je m’applique à répondre.
« Ne vous inquiétez pas mon Prince , elles le seront. »
Car j’aurais ici l’occasion de toucher à vos faiblesses, et d’attaquer votre fierté. Et ceci était un cadeau des plus somptueux.Le ton de ma voix s’était fait rempli de messages cachés, et toute cette animosité entre était enfouie dans une complicité silencieuse. Et redoutable.
Sans quitter ses iris pourpres, noyée dans la mer écarlate, je joue. Enfilé, mon costume de vices. Posée, ma couronne invisible. La confiance arrogante glisse sur mes traits.
« Alors, par où commençons nous, mon Prince? »
|
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Mar 31 Déc 2013 - 3:27 | | kowaiiii ojou-sama Sarah s’était affublée de son plus beau masque, aujourd’hui. Sourire satisfait alors que ses doigts glissent sur sa joue, lui citant alors de se relever - chose qu’il fait, sans aucune hésitation. Ses yeux se posent sur elle. Refléxion. Par quoi commencer ? Je n’en sais rien. Il doit être dans les environs de dix-neuf heures, sachant que nous sommes partis vers.. euh… je n’en sais rien. Il attend de longues secondes avant de lui répondre.
Et finalement, il tourne la tête vers un des serviteurs, agitant sa main en sa direction. Arwah. Et il porte sa main à son oreille, y susurrant quelques mots. Hochement de tête, le serviteur quitte les lieux. Sourire. Il tourne à présent la tête vers l’ingénue, la fixant. Hm. Nous devons aller rendre visite à mon père afin de signaler notre arrivée.
Il commence à marcher, s’attendant à ce qu’elle la suive. Ils quittent le couloirs, empruntant de larges escaliers. Il jette un regard derrière lui. ...Honaka mochkéla. Ahha.On doit se changer. Je me suis renseigné sur tes mensurations durant ces deux mois, j’ai eu le temps de demander des vêtements sur-mesure pour toi. J’espère que tu n’as pas prit quelques kilos, ça risquerais de te mouler sinon. Sourire.
Il sautille entre chaque marche, attendant qu’elle puisse le rattraper. Un regard derrière lui - personne. Ils étaient à présent seuls à franchir les escaliers de la demeure Kyô. Hmm. Dis, Edwige… Il s’arrête un instant. Quelques secondes. Et reprend sa marche. Laisse.
Un étage où règne encore un long couloir empli de portes. Un profond sentiment de malaise s’était emparé de lui. Il savait que quelque chose n’allait pas - mais il ne pensait pas que cela pouvait être lié à ça. Sarah. Vraiment, Sarah, ici. Quand on y repense, il y a de longs mois de ça, ils se haïssaient du plus profond de leurs êtres pourris par l’acerbité. C’était une lutte pour voir qui allait ramener Drew et en quel état allait-il rester, ils s’étaient crachés leur haine dans la salle intemporelle.
Et pourtant. Juste après sa mort, tout s’était radicalement modifié. Le destin avait fait des siennes. Là, ce qu’il ressentait pour elle… Il ne savait pas. Rien, peut-être qu’il ne ressentait rien. C’est vrai, car le paradis n’est pas juste au dessus de l’enfer, avant ça, il y a la terre, le sol, le vide, le brouillard, l’hésitation. Et actuellement, ses pieds sont sur ce sol et il se bat à faire un choix distinct entre les abysses obscures et le doux paradis idyllique. C’était juste une lutte, plus avec Sarah, avec sa propre volonté - avec la place qu’elle allait occuper pour lui dès à présent.
Il s’arrête devant une porte, alors qu’une femme se dresse à côté de cette dernière. Hochement de tête. Il tapote l’épaule de Sarah. Elle va s’occuper de tes vêtements. On se rejoint devant cette porte dans une demi-heure, ça va prendre plus de temps que ça en a l’air. ...Les vêtements que tu portes ne font pas bonne figure.
Il fait demi-tour, lui jetant un dernier regard. Soupir soulagé. Enfin seul. Il n’acceptera pas les personnes comme elle est actuellement. Elle n’a rien d’une soit disant princesse, elle paraît juste ordinaire. Elle est ordinaire. C’est juste moi qui lui ait donné un genre, afin qu’elle soit désirée. La servante va la vêtir et la maquiller entièrement de blanc afin de dévoiler sa pureté au grand jour - c’est faux, horriblement faux. C’était risible, foutrement risible. Sarah, pure, dans un monde antérieur. Là, c’était une boule de cendre que rien ne peut éclairer.
Mais il avait lui-même vu à la fête de Jim qu’elle savait s’amuser et rire. Peut-être qu’elle était pure, peut-être que oui, finalement, elle pouvait l’être. Mais en sa compagnie, pas le moins du monde. C’était peut-être même sa vision des choses, lui qui avait la vision floutée par ces iris vermeils et ce coeur noircit par toutes ces années passées en ces lieux sacrés, il ne pouvait pas imaginer quelqu’un de pur.
Et il a le temps de réfléchir, encore et encore, jusqu’à arriver devant une large porte où deux femmes l’attendaient. Elles ouvrent la porte qu’il traverse rapidement, pénétrant dans une pièce - sa chambre. Ses pensées sont embrumées par Sarah et ça l’énervait plus qu’autre chose, Sarah, elle et sa foutue pureté et lui-même savait qu’il n’avait pas fini de penser à elle, sachant qu’il allait passer deux longues semaines en sa néfaste et pourtant admirable compagnie.
Il se dirige vers son armoire et l’ouvre, scrutant ce qui s’y trouvait avec grande attention. Les servantes le rejoignent. Malak ? Netfarage.
Même misogyne, le non-respect de la femme était hautement prohibé en Egypte. Alors en bon Prince qu’il faisait, il obéissait aux ordres fondamentaux et fermait sa gueule parfois trop grande face au sexe opposé. Et c’était d’ailleurs pour ça qu’il laissait déferler toute sa haine sur les femmes de Prismver, car l’Irlande est loin d’être l’Egypte.
Ses yeux se glissent sur la fenêtre. Il fait déjà nuit. Il est donc plus de dix huit heures. Que ce soit en été ou en hiver, le soleil se couche tôt alors on peut souvent savoir l’heure approximative en regardant l’état du ciel - à l’occurrence, ce dernier était teinté d’une couleur céruléenne à l’heure actuelle.
Il soupire alors et s’écarte, laissant les femmes choisir ce qu’il allait mettre. Car oui, quand Jim n’était pas là, c’était elles qui l’assistait. Il ne pouvait rien faire seul. Vraiment rien. Assis au pied du lit, il observe la pièce, humant l’odeur qui s’en dégageait. Cet endroit lui manquait souvent. C’était là où il passait majoritairement son temps. A présent, il n’y restait que très peu de temps. Même s’il détestait son père, il était bien ici.
Il laisse tomber son dos sur le lit, yeux clos. Sarah. Corentin. Vraiment. Il aurait voulu que Drew occupe ses pensées plus que ces deux êtres que trop chers pour lui. Plus il y pense, plus Drew lui manquait. Il n’était pas faible moralement, il pensait beaucoup et c’est ce qui lui servait à survivre. Mais ses pensées le détruisait plus qu’autre chose, en réalité. Et là, c’est son coeur qui se broie encore plus à la pensée de l’homme. Il aurait voulu qu’il soit venu à la place de Sarah. Il se mord la lèvre. Il aurait voulu qu’il l’embrasse, qu’il l’enlace, même ressentir sa chaleur et humer son odeur était agréable. Et pourtant. Il était juste là à pourrir, lui et sa chair entrant amèrement en putréfaction, six pieds sous terre, coupés du monde. Mais ne t’inquiète pas Drew, même enterré, tu restes miens. Ses dents enserrent plus ses lèvres encore. Mais qu’en est-il de toi ? Tu ne peux pas en dire autant, n’est-ce pas ?
Une voix féminine l’interpelle, l’extirpant alors de ses pensées. Oh diable merci, il était purement et simplement en train de se noyer dans ses pensées amères. Il se redresse alors, observant la tenue que sa sauveuse lui présenta. Blanche, pure, cela ne lui ressemblait tellement pas. Il hoche alors la tête, acquiesçant. Anshu balaie l’air de la main en direction de la porte. Il était effroyablement pudique et même des femmes le cotoyant depuis son plus jeune âge n’avaient le droit de violer son intimité.
Ses yeux embrassent la pièce. Il n’était pas encore là. Soupir. Lentement, il ôte ses vêtements. Sarah devait sans doute bien souffrir de son côté, essayant peut-être même de communiquer avec les femmes qui ne comprenaient pas un seul mot d’égyptien - diable qu’il aurait voulu voir ça, cela aurait été tellement drôle et risible. Il en sourit même rien qu’à y penser.
Et il enfile alors ce qu’on lui avait dicté de mettre. Il grimace, s’observant devant la glace. Elle allait à coup sûr se foutre de sa gueule. Bon, c’était certes masculin mais Anshu était déjà assez efféminé au vu de sa chevelure… Soupir. Après tout ça, il veut absolument prendre un bain. Il n’avait que des douches à Prismver - il détestait ça. Et il se souvient même le jour de son arrivée le scandale qu’il avait fait en découvrant cette horreur… Là, c’était grand et vaste, luxueux, le comble. Pouvant même détendre le pire des anxieux.
Il se rassied sur le lit, enfilant alors de fines chaussures noires. Il devait toujours s’habiller avec ces robes ridicules aux diverses teintes - celle-ci étant blanche mais aussi d’un vert pomme étrange et rouge avec des ornements dont on pourrait attribuer de nom - le premier jour de son arrivée. En temps normal, ça ne l’aurait pas dérangé plus que ça, mais là, il n’y avait rien d’autre que Sarah. Hhh. Mais le pire de tout ça, comment allait-elle être habillée ? Imaginez-la en Aladdin. Il ricane, riant à sa propre bêtise.
Au bout de quelques minutes, les domestiques rentrent et affichent un sourire satisfait. Le Prince rend le sourire - ce dernier ressemblant plus à un rictus dégoûté qu’à un joli sourire tout droit sorti du coeur. Il se lève alors du lit, allant s’asseoir sur un fauteuil où résidait de divers produits capillaires. En général, il refusait catégoriquement qu’on touche à sa chevelure, c’était sa propriété. Mais là, il n’avait juste simplement pas le choix et devait laisser les femmes s’en occuper, rien que pour un soir.
Le peigne se glisse alors sur sa chevelure. De longues minutes s’écoulent. Un bruit de féraille. Les ciseaux. Il écarquille les yeux, paniquant. Ahhhaaaaa. Hhh… Il en perd même ses mots. Akeed. Il grogne, se décontractant. Certes, ses cheveux frôlaient presque le sol alors qu’ils devaient se trouver au dessus de ses chevilles - mais l’enfant était capricieux et refusait de couper ses cheveux et de perdre sa “dignité”. Alors si l’enfant n’en avait pas la force, on le faisait à sa place. Durant toute l’affreuse torture, il n’avait cessé de pester et d’afficher sa colère et son désaccord - mais ne faisait rien. Raaabbiiiiiii… Tsss…
Il lâche un profond soupir quand son supplice s’achève, laissant les autres poursuivre la dure labeur qu’est de s’occuper de lui.
Et il quitte finalement la pièce au bout de quelques temps, coiffé, habillé, maquillé. Allez, encore quelques petites heures et tout ça sera terminé. Je retrouverai mon lit et… Et Sarah y sera. ...J’aurais pas pu rêver mieux ? Même dormir auprès de Warren serait moins désagréable et surtout gênant. Il descend les escaliers, se dirigeant vers l’endroit où il avait déposée sa très chère blonde. Les manches de la robe qu’il portait étaient larges et longues - ça devrait suffire à cacher ses cicatrices. Car il n’avait pas mit de bijoux - oh qu’il n’en avait pas le droit. A part sa pureté, il ne devait rien montrer à son père, ni rien, ni sa richesse. Et c’est pour ça qu’il n’avait pas montré son coeur, trop honteux de ce dernier.
Elle était déjà devant la porte, l’attendant sans doute. Il la regarde, un instant et sourit, replaçant son masque. Ravissante, hm. Et dans sa tête, il grimaçait juste et remplaçait cet adjectif par “PASSABLE” voir même “PAS A MON GOÛT”. Mais c’est sûr qu’elle était déjà mieux ainsi qu’avec les vêtements qu’elle portait - que ceux de Prismver portaient tous.
Il lui saisit alors une seconde fois la main - pousser le jeu plus loin, créer les regards des servants pour préparer le terrain. Ses ongles se plantent discrètement dans sa main qu’il tient avec ferveur, d’ailleurs. Plus par rage, en réalité. Même s’il était bien content de l’éventuelle douleur qu’il lui procurait. Là, c’était plus le stress et l’anxiété qui lui bouffait toute son assurance. Ils étaient là, en train de descendre pour la ô combientième fois les escaliers - cette fois-ci en route pour les appartements du maître. Tout deux vêtus et maquillés de blancs, presque parfaits. Alors qu’en réalité.
Anshu s’arrête devant une porte immense où siégait des inscriptions en arabe. Elle était ornée d’or et imposante, résumant avec perfection ce qu’il dégageait. Anshu n’était pas comme son père, il lui était beaucoup plus inférieur. Il enserre davantage la main de Sarah entre la sienne alors que l’autre effleure la porte. Frisson parcourant ses jambes, remontant jusqu’à son échine, sa nuque et arrachant son cuir chevelu. … J’vais t’avouer quelque chose. Il ne la regarde pas. J’ai horriblement peur… Rien qu’une confidence. Il inspire longuement, risquant d’aller chercher son regard. Dis-moi quand tu es prête.
codage par Palypsyla sur APPLE SPRING - modifié Lexique for u poupoule juste histoire de comprendre ce que tu lis 8D Honaka mochkéla : Il y a un souci Ahha : Putain Malak : Qu’est-ce qu’il y a ? Netfarage : Je regarde Akeed : Bien entendu - plus ironique style “ok j’m”en cale.” (dis moi si j'en ai oublié flemme de me relire ;_;) |
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Jeu 2 Jan 2014 - 19:03 | |
Et ainsi commença le séjour dans l’inconnu avec le Prince. Son regard dans le mien avait beau être fixe, réel, j’avais la sensation étrange d’être dans une autre dimension. Aveugle. Guidée uniquement par cette personne dont je ne n’arrive toujours pas à comprendre la place dans ma vie – et avec qui j‘étais partie pour élucider ce mystère. Que sommes-nous, Prince.
« Nous devons aller rendre visite à mon père afin de signaler notre arrivée. » Je considère la réponse un instant, pensive. Le père d’Anshu – ou plutôt, la famille d’Anshu. Tout ce que j’en savais avait été sorti de l’accès de rage de Drew à la cafétéria. Le souvenir s’empare de mon corps, et je me mords l’intérieur des joues pour éviter de crier. Trembler. Pleurer même. J’efface le plus important pour me concentrer sur le détail. J’efface le timbre de la voix de Drew lorsqu’il avait prononcé ces mots. Ne gardant que le contenu. Ton père a baisé une pute. Elle est morte en te mettant au monde. Tu es comme ton père, que tu hais. Le goût du sang envahit ma bouche, mais je garde l’expression droite et digne. Mon regard glisse sur Anshu . Questionnant. Scrutant une étincelle de douleur. A l’aguet d’une faiblesse. Mais rien ne vient. Je pousse un soupir de soulagement discret – chassant les idées noires et souvenirs informes - et lui réponds, un sourire en coin sur les lèvres.
« Très bien, allons voir beau-papa. » Je ris doucement, mettant ma main poliment devant ma bouche.
On est loin des grands éclats de rires grossiers dont je plante habituellement les gens. Il s’en va sans un mot, et je le suis sans poser de question. Attends moi, eh, me laisse pas là. Heureusement pour moi, il ne marche pas vite. Notre chemin se perd dans d’innombrables escaliers de marbre, et je tente de mémoriser le chemin – ne sait-on jamais, en cas de fuite urgente. En vain. Il faut bien que je me rende à l’évidence. Ici, sans le Prince, je ne suis qu’une fillette perdue – c’est quand même dur à accepter. Disons que je laisse mener la danse pour l’instant. Juste le temps de s’adapter.
«On doit se changer. Je me suis renseigné sur tes mensurations durant ces deux mois, j’ai eu le temps de demander des vêtements sur-mesure pour toi. J’espère que tu n’as pas prit quelques kilos, ça risquerais de te mouler sinon.» Je lève les yeux en l’air, feignant l’exaspération. Toutes ces manières, tout ce protocole – je veux dire c’est bon, ils vont pas faire un flan d’un jean - tout ce … quoi ? Mes mensurations ?
J’ai bien entendu ce que je viens d’entendre ?
« Prince. Sais-tu que ce que tu dis est vraiment digne du pire des stalker ? J’aimerai bien savoir qui t’a donné ces renseignements … » Que je lui rende une petite visite à mon retour. Enième soupir alors que tout va trop vite pour moi, me forçant à le suivre sans poser de question. Si frustrant. Un bref coup d’œil aux alentours me confirme que nous sommes seuls. Enfin.
J’hésite à lui sauter dessus pour lui demander pourquoi il m’oblige à faire ça – seulement, il est trop loin de moi. Sautillant sur les marches, comme un gamin heureux de rentrer chez lui. Peut être l’est-il vraiment après tout. Peut être que ces rumeurs sur son passé ne sont que ce qu’elles sont – de vulgaires mensonges. Peut être qu’il va très bien, sûrement qu’il va très bien. N’hésitant pas le moins du monde. Et pourtant.
« Hmm. Dis, Edwige… » Je me crispe à la mention de mon deuxième prénom. Où est ce qu’il avait entendu ça lui ? Oh, je suis idiote, c’est marqué sur n’importe quelle liste d’élèves de Prismver. Et puis il avait réussir à avoir des informations personnelles sur moi, ça ne devait pas être très difficile de … « Un problème Agni ? » Silence, il me dit de lâcher l’affaire. J'hausse un sourcil.
Tout est si étrange. Ou est passé la haine, où est passé le poison, où sont passés les rires déformés par la douleur et la folie ? Nous sommes si passifs, si hésitants, si … protecteurs entre nous ! Dépassés, perdus. Réduits au long sommeil après la mort de notre astre qu’était Drew. Je suis toujours le Prince, soucieuse.
Nous arrivons face à une grande porte aux battants massifs, et je reste un instant silencieuse à la contempler, avant de me faire interrompre de ma rêverie par une petite main autour de mon poignet. Une femme, plus petite que moi, au teint bronzé et aux grands yeux sombres me dévisage. Je crois voir dans ses yeux un mélange de crainte et d’admiration – sûrement à l’égard du Prince. Ca ne pouvait pas être moi qui lui faisait cet effet. Je lui souris doucement, lançant un dernier regard à Anshu qui s’éloigne.
Bon.
Voilà. Je suis jetée dans la gueule du loup. Et cette femme m’entraîne un peu plus vers les profondeurs, de son petit pas pressé et énergique. Nous entrons dans un pièce aux murs drapés et aux tapisseries dorés. Une odeur d’encens flotte dans l’air, et la décoration à tout d’un boudoir oriental. Autour des sofas de velours tombent de longs voiles colorés, et la lumière des bougies rouges créent de drôles d’ombres sur les murs. C’est magnifique. Je ne peux empêcher un murmure d’admiration de s’échapper de mes lèvres entr’ouvertes – trouvant pour réponse le rire léger de la servante. Je me mords la joue. C’est vrai Sarah, tu dois être une altesse, tu n’as pas à t’émerveiller sur tout et n’importe quoi. Du moins, tu dois contrôler un peu plus tes émotions. Putain. Dans quel bordel est ce qu’il m’a encore entraîné.
« Bon alors, où est la robe que je dois mettre ? » - je demande presque automatiquement, oubliant au passage le léger détail qu’est le souci de communication dans ce pays. D’autres filles se trouvaient déjà dans la pièce, s’affairant autour d’une chose que je ne vois pas. La première servante ne prend même pas la peine de me regarder, dit quelque chose – que je crois deviner comme être des ordres à ses subordonnées …. et se jette sur moi. MWARGLIA. Non non franchement. « Eh – mais … attendez ! » Ses mains viennent déboutonner ma chemise – et d’autres viennent s’ajouter sur mes lacets – ALERTE AU VIOL. Je me débats, jouant des coudes pour me défaire de la fermeté de leurs mains qui viennent enlever mes vêtements, prête à griffer, prête à mordre – l’anxiété muette qui s’étirait sous ma peau transparaissant enfin. Mais c’est déjà trop tard. Je me retrouve en sous-vêtements – qu’elles n’ont pas eu le temps de retirer - éclairée à la lumière des flambeaux. Je m’apprête à pousser une gueulante, à sortir la peur de mon corps étroit quand mon regard se heurte à ceux de mes agresseuses.
Tout droits plantés sur mon torse. Spectre de surprise, spectre de pitié, spectre de douleur.
La glace remplace le feu de ma colère. Tout en moi s’engourdit lentement, et je réponds à ces regards attentionnés par un sourire triste. La première servante, celle aux yeux de jais, vient toucher du bout des doigts ma cicatrice. Prononçant des mots que je ne comprends pas – mais que je ressens. Je réponds en secouant la tête.
« Non, ça ne fait plus mal. »
Plus physiquement du moins. Je déglutis. Essayant de me ressaisir. De ranimer l’ambiance de la pièce qui était tombée au plus bas. « Allez mesdemoiselles, au travail ! » J’ai un Prince qui me fera toute une histoire si je suis en retard. Elles restent immobiles pendant quelques secondes, avant de se remettre en mouvement – pensant sûrement à la même chose que moi.
La séance d’habillage à vraiment quelque chose de surréaliste. Je me laisse tranquillement faire alors que les étoffes de soie passent une à une sur mon dos. Du blanc. Parmi toutes les couleurs, il avait fallu que cela soit du blanc. Symbole de pureté, symbole d’innocence. Couleur du mariage – la main sur laquelle la bague était enfoncée se crispa légèrement. Sérieusement. Une fois habillée, je jette un coup d’œil dans le miroir poli qui se trouvait dans un coin de la pièce. C’était une robe de voiles blanc et de coutures dorées, tombant jusqu’au bas de mes chevilles. C’était une nuance incroyable d’opacités – tissu transparent du cou jusqu’au début de la poitrine, cachant de manière partielle les prémices de mes balafres – tissu transparent sur le bas de mes jambes. A mon dos et à mes bras étaient accrochés de longs voiles, formant une sorte de traîne. Et comme Anshu l’avait prédit, tout ceci épousait parfaitement la forme de mon corps – cintrée par une lourde ceinture d’or. J’étais devenue un être taillé dans la soie.
Un toussotement poli me sortit de ma contemplation, et je retournai à la suite des préparations. Coiffure. Cela ne prit pas beaucoup de temps – et je pouvais voir à leur visage qu’elles semblaient déçues de la longueur de mes cheveux. Une princesse se doit-elle obligatoirement d’avoir les cheveux longs ? Elles, les avaient toutes. Anshu les avait aussi. J’en vins à me souvenir de l’époque où moi aussi j’avais de longs cheveux – loin du jour où j’étais rentrée dans l’appartement de mon père la tignasse coupée aux ciseaux, et où il m’avait demandé depuis quand il avait un fils. Ah. C’était le bon temps. Avec mes mèches qui tombaient jusqu’à sous mon menton, elles réussirent tout de même à exposer leur talent en coiffure. Les tressant en couronne mêlée de fils dorés jusqu’à l’arrière milieu de mon crâne. Laissant le reste tomber sur ma nuque. Pendant ce temps-là, on me maquille, me gratifiant du fameux trait d’eyeliner à l’égyptienne. Cléopâtre pouvait aller se rhabiller.
Un dernier coup d’œil à mon reflet, des sandalettes enfilées, je partis de la pièce, le cœur battant d’un drôle de rythme. Je me sentais dépossédée. L’image que le miroir m’avait renvoyée n’était pas moi. La robe blanche n’était pas moi. La bonne conduite et tenue n’était pas moi. J’avais fui la princesse en moi. Je l’avais tué. Rejeté. Comme j’avais déclaré la guerre à ma demi-sœur. Ce masque, ce costume, ce rôle a jouer semblait être tout droit sorti de mon enfer personnel. Et ça m’enrageait. Et je ne pouvais rien dire. Parce que j’étais sous le silence de la promesse que j’avais faite au Prince sur le toit – j’étais ici pour lui. Rien que pour lui – pas même pour moi.
J’arrive devant la porte, et il n’est pas là – là est tout l’inconvénient d’avoir des cheveux serpillères. J’hésite à m’asseoir quand j’entends des bruits de pas résonnant dans le couloir. Je me retourne, et sourit. « Ravissante, hm. » Mais bien sûr. Tant d’ironie de la part de celui qui est en ce moment même en dessous de toute norme de virilité. Si je ne connaissais pas sa voix aussi bien, à mon plus grand malheur, j’aurais sans doute pris le Prince en cet instant pour une fille. Une fille mignonne – je crois que c’est bien ça le pire.
« Evidemment. Je peux dire la même chose de vous, Princesse. Ravissante en effet. » Je lui sers un large sourire. Bien heureuse d’avoir l’avantage de la langue pour pouvoir me foutre de lui en toute impunité. Sa main vient de nouveau chercher la mienne – et nos ongles se trouvent encore une fois. Cette douleur, ce combat étant ce qui nous donnait étrangement du courage.
Des escaliers. Encore des escaliers. Toujours des escaliers. Quelques minutes s’écoulent en silence alors que nous marchons ainsi calmement, tous de blancs vêtus, main dans la main. Fantomatiques, pâles errant parmi les vivants. Nous nous arrêtons devant une porte gigantesque et richement décorée, et je sens sa main se tendre brusquement. Il est temps. Je le dévisage un instant alors que je ressens la peur s’insinuer dans sa peau. Son sang bat plus vite au creux de mes doigts.
« J’ai horriblement peur… »
Mon regard s’adoucit, et ma main qui serre la sienne se fait plus rassurante. Quelle était la probabilité pour que le Prince dise une telle chose ? Qu’il me le dise à moi ? L’appréhension qui devait ressentir devait être si grande, qu’elle le dépassait.
« Peur qu’il me trouve si magnifique qu’il décide de te déshériter et de me prendre en tant que fille à ta place ? Possible. » Je lui offre un regard joueur. Puis continue plus lentement. «Tout va bien se passer Anshu. Je suis là pour ça, non ? » Pour contenir ta peur. Pour calmer ta douleur. Pour t’aider à surmonter tout ce qui t’attends dans ce pays dont j’ignore tout. Ma deuxième main vient rejoindre la première, prenant toutes deux celle d’Anshu. Celle de la cicatrice. Celle de Drew. La serrant avec délicatesse et chaleur. Après quelques secondes en silence, je la laisse tomber, reprenant notre position normale. La tiédeur de mes paumes toujours présente sur la sienne.
« Je suis prête, Prince. » Regard intense. Déterminé. Tentant de lui passer le courage qui s’empare de moi. Je respire un grand coup. Expire.
Prête à m’avancer dans la lumière.
|
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Mer 8 Jan 2014 - 20:06 | | haa Son regard glisse sur elle à son contact. Sa cicatrice se trouvait alors être emprisonnée par ses doigts. Ses yeux se posent sur sa main. Sur ses mains. Elles étaient chaleureuses, réconfortantes, presque maternelles. Un demi sourire apparaît sur ses lèvres alors qu’il sent l’assurance le gagner à nouveau.
Hochement de tête quand elle prononce les mots décisifs. C’est l’heure. Le moment propice. Il tente d’emprisonner son assurance pour qu’elle ne quitte pas son esprit - et pourtant, il échoue. Il soupire pour se donner du courage - en vain. Il veut pousser cette porte mais une énergie inconnue l’en empêche.
JOKE
Peuh. Quelle énergie ? Je suis juste trop faible pour ça. Trop faible. Beaucoup trop faible. Je ne vaux pas mieux que tous ces imbéciles peuplant Prismver à présent. Ah qu’il est prestant et impérial Anshu maintenant. Foutaises. J’en gerberais tellement c’est pathétique.
Puissance. Il quitte la main de Sarah qu’il avait saisit avec plus de fermeté pour poser ses deux mains sur la porte. Pousse. Lumière aveuglante. Dans son regard se lit de la haine contre sa propre personne - sur ce qu’il avait été il y a quelques secondes à peine. Intérieurement, il s'assène une baffe mentale, puis deux, et une troisième.
La salle était immense. Ses doigts se crispent sans plus aucune délicatesse sur le bras de Sarah pour l’attirer à l’intérieur. Les pas s’enchaîne rapidement. Ne regarde pas en face de toi. Un large tapis rouge orné d’arabesques incompréhensibles trônait sur le sol. Ça avait don de lui arracher une amère grimace, d’ailleurs. Il ne jette même plus un seul regard sur la beauté des lieux tellement il en avait l’habitude. C'est ça, regarde les murs. Des tissus de soies ornant les murs, de l’or, du marbre. Cet enflure semblait tout posséder dans une seule pièce servant simplement à toiser les vermines peuplant le village. Parce qu’il aimait ça.
Son regard s’apaise, s’adoucit. Regard sur Sarah - on avait pas tout le temps, ça ne servait à rien de s’attarder à contempler cette salle. Il emprisonne son poignet dans sa main et accélère le pas. En face, il y avait un trône. Inévitable. C’était tellement risible alors qu’aucune monarchie ne faisait surface en Egypte. Il est en or, couvert de pierres qu’on pourrait dire précieuses. Et blabla. Il ne s’attarde pas plus à penser à ce qu’il y avait dessus.
Il l'avait évité du regard depuis tout à l'heure et s'était focalisé sur les murs et sur le trône. Mais celui dont il se rapprochait - il n'avait pas eu le courage de le regarder dans les yeux. Et finalement, ils se posent sur eux. Toujours ce froid glacial. Toujours cette atmosphère pesante. C'était de trop. Les yeux noisettes qu'il possédait lui aussi autrefois. Cette chevelure sous forme de tresse glissant élégamment sur son épaule. Ce teint tristement cadavérique et cette mine sévère. Tel était Shyva Kyô. Admirable autant qu'il était effrayant.
À son regard, il relâche la pression sur le poignet de Sarah, laissant glisser sa main jusqu'à la sienne pour entrelacer ses doigts aux siens. Plus besoin d'affection et d'assurance qu'autre chose. Peut-être qu'elle devait être intimidée aussi. Ses pas s'arrêtent lentement alors qu'il s'abaisse pour effectuer une légère courbette en guise de salut. L'avantage était qu'il parlait anglais, ayant étudié à Prismver. Alors Sarah comprendra sans doute sauf si elle a subitement perdu la mémoire et la langue qu'elle parlait.
C'est elle. Je vois. Elle passera deux semaines à mes côtés comme convenu. Sarah c'est ça ? C'est ça. Pourquoi elle ? C'est celle que... que j'a-j'aime. Pourquoi tant d'hésitation dans tes propos..? Mon amour est si fort que je ne puis poser de mots dessus sans balbutier.
Son coeur tapait sa poitrine avec hargne. Oh qu'il était excellent menteur quand même...
Agni. ...oui ? Approche donc.
Cille. Boum. Lâche sa main. Boum. Il sent la chaleur de sa paume le quitter - qu'est-ce triste à présent. Un pas, puis deux, et bientôt un troisième s'enchaîna. Un escalier puis deux avant d'arriver à une distance respectable de son père. Ce dernier porte sa main à sa joue, la tirant d'une manière qui était bizarrement plus affectueuse qu'autre chose. Chose qu'il n'arrive pas vraiment à saisir, soit dit en passant. La chaleurosité de ses doigts. Ses paupières tombent alors qu'il sent son coeur s'alléger peu à peu. Si longtemps qu'il attendait ce genre de gestes. Même si ça n'a rien de véritable, c'est toujours agréable.
Tu sembles avoir maigrit. C'est possible...
Il le relâche alors, l'égyptien se frottant machinalement la joue en jetant un regard à Sarah derrière lui. Et la main du roi se dépose derrière sa nuque pour exercer une légère pression dessus, ramenant sa bouche à son conduit auditif. Il y susurre quelques mots - suffisant pour que son visage se décompose. Il se recule alors, hochant silencieusement la tête.
... Qu'il en soit ainsi. J'y irais dans la semaine. Il réajuste ses manches en le fixant. N'as-tu rien d'autre à me dire ? Ta fiancée est musulmane ? Ses yeux s'écarquillent. Regard furtif vers Sarah. Ah non qu'elle ne l'était pas. Bien évidemment. Elle pourra donc prier ? Elle est comme moi, elle ne pratique pas. Ce serait inutile de la forcer à lui faire faire quelque chose contre son gré. Soit.
Il rebrousse chemin, se mettant à la hauteur de Sarah. Il la fixe quelques instants avant de se retourner, s'inclinant. Je reviendrais te rendre visite après avoir été prier. Rictus. C'est dégueulasse quand même ce que tu me fais faire, quelque soit l'âge tu resteras toujours aussi exécrable. Tel père tel fils, Agni. Il écarquille les yeux. Manque cruel de répliques. Rage. Ses sourcils s'arquent alors qu'il se redresse, saisissant la main de Sarah, prêt à quitter la salle. On y va. Et sans plus attendre il s'empresse d'aller rejoindre la porte séparant la sortie et cette pièce vomissante. Ses doigts agrippent les tissus de la brune avec force alors que la peur qui envahissait son regard se changea en rancoeur. Il m'exècre. Il m'annihile. Il me... Souffle. Respire. Les efforts qu'il produit en faisant preuve de gentillesse sont réduits à néant avec lui, toujours. Il sortait toujours avec cette mine parce qu'il arrivait à lui faire fermer sa gueule bien grande. Et quand il se sent en danger, il préfère s'eclipser, quitter les lieux.
Ils étaient loin d'être les même. Ce gars n'avait même pas l'air humain, insensible, avait un sang froid admirable. Anshu était devenu plutôt impulsif avec le temps et recevait chaque sentiments de plein fouet.
Mais peut-être qu'ils étaient pareil au fond. Pourris. Mais dans ce cas, Sarah l'était aussi - ...Sarah n'a rien à voir avec tout ça. La haine chatouille ses yeux alors qu'il prend une grande inspiration pour ne pas laisser les larmes s'échapper.
Ils quittent finalement la pièce. Plusieurs soupirs s'enchaînent alors qu'il pose un regard sur Sarah. Ahah... C'est... Dégradant. Il lâche sa main, s'appuyant sur le mur le plus proche, dos à elle. Boum. Boum. Il plaque ses avant bras sur le murs, front posé dessus. Inspire. Mord-toi la lèvre. Expire. Vomis cet air dégueulasse. Il se racle la gorge et tousse, main plaqué au cou. Putain... J'ai du mal à respirer. Et il prend son temps pour prendre de grandes inspirations, soufflant. Lentement. Il veut que j'aille voir maman… Rire nerveux. Il va vraiment finir par me tuer.
Il ferme les yeux un instant, tournant la tête en direction de Sarah avant de les rouvrir, posant ses prunelles en elle. Il cramponne le mur, toujours avachit sur ce dernier. Lui-même lui avait dit de ne pas intérioriser ses sentiments, et pourtant... Ce n'est pas important. Tu as faim..?
codage par Palypsyla sur APPLE SPRING - modifié |
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Mar 21 Jan 2014 - 20:45 | |
J’observe en silence les émotions du Prince mises à nu, une à une, à la simple pensée de franchir cette porte. Je ne comprends pas – je n’arrive pas à comprendre – et je ne comprendrai jamais. C’était une chose enfouie en lui, une faiblesse dévorante. Sa silhouette d’habitude imposante et fière était frêle. Fragile – comme celle d’un enfant dont on aurait juste détruit tout les rêves. Ce n’était pas le Prince qui poussait cette porte. Ce n’était pas mon Prince. Notre Prince. Mais peut être était-il le vrai Prince, dont le visage réel s’était révélé, dénué de tous ses masques. Le petit Prince. Le Prince à nu.
Sa main accrochée avec désespoir à mon bras, je le suis. Droite et d’acier dans mon costume de fiancée, je rentre dans la pièce. Immense, lumineuse, mes yeux se plissent, aveuglés par cette clarté soudaine. J’ai la tête qui tourne, les tâches de couleur qui dansent devant mes pupilles, mais je reste stable – consciente de chacun de mes muscles qui se tendent et se détendent sous le poids de mes pas. Traînée par le Prince, je tâche de solidifier l’égarement liquide de mes yeux. Ce n’est pas le moment d’être ahurie, Sarah, pas quand le Prince compte sur toi – pas quand quelqu’un a besoin de toi. Mon regard balaie la salle. Or, marbre, soie et somptuosité – c’était une cage des plus raffinées. Bref regard pour Anshu, pour qui le plafond a l’air d’un intérêt tout à fait passionnant, et par pure curiosité, je cherche ce qui le dérange. Qui le dérange.
Je me fais électriser par un regard de glace – un frisson longe ma colonne vertébrale, remontant jusqu’à ma nuque. Le père d’Anshu – ça ne faisait aucun doute – avait beau ne pas avoir les mêmes yeux étranges et dérangeants que son fils, il n’en était pas moins effrayant. Serpent. Cet homme respirait le vice. Il était puant.
Moi qui pensais qu’il était impossible de faire pire qu’Anshu – j’étais servie. Il lui ressemblait tellement que c’en était malsain. Lui ressembler ? Non, il était pire. Je sens la peur d’Anshu battre dans ses paumes, et je resserre mon étreinte, décrivant sur sa main un discret cercle avec mon pouce pour le rassurer. Une drôle de chose se passait en moi. Une envie de combattre. Une envie de le protéger, lui, et ses souvenirs. Nos souvenirs – voir le Prince dans cet état n’était pas quelque chose que je pouvais supporter.
Nul autre que Drew et moi n’étions autorisés à briser Anshu. Drew étant parti, il ne restait plus que moi. Moi, targuée de mon rôle de bouclier.
J’inspire. Mes traits se durcissent, se fermant à toute forme de sensibilité, et je garde mes yeux plantés dans ceux du Roi – même quand je me baisse en une révérence polie. Je ne laisserai pas la peur liquéfier mes os, pas une fois de plus. Il parle, sa voix grave faisant trembler les murs du palais. Le pouls du Prince qui s’accélère devient mon seul point d’appui – tout ce qui suivra ne sera que mensonge. Alors contente-toi de sourire et d’écouter sagement.
« C'est celle que... que j'a-j'aime. » Ne rigole pas. « Mon amour est si fort que je ne puis poser de mots dessus sans balbutier. » Ne rigole surtout pas. Je mords l’intérieur de mes joues jusqu’à m’en créer des aphtes, appliquant sur ma face un air gêné – aww stop it you. Oh, quelle magnifique petite sotte adolescente amoureuse je fais, regardez, tant d’innocence, tant de. Sérieusement. Il faudra que je me rappelle de ressortir cette charmante déclaration sur le tapis, ça pourrait être un bon point de pression.
Je souris. Je souris, mais au fond, il y avait quand même quelque chose de triste dans ces paroles. Douloureux. Moi qui attend depuis plus d’un an qu’on me dise ces mots, voilà que c’est Anshu qui les profère à mon égard – quelle ironie. La douleur créée par cette relation que j’entretiens avec Marwin glisse sa main sur mon coeur. Elle est sourde, récurrente, et s’empare lentement de mes membres. J’y suis habituée, et je ne cille même pas, les yeux toujours occupés à détailler le visage du Roi.
Un dernier regard alors qu’il quitte mon côté pour rejoindre son père – je le lui rends. Allez Anshu. Montre lui que tu ne lui appartiens plus. Te voir ainsi me fait pitié.
Une boule se forme dans ma gorge alors que je sens l’espoir candide du Prince alors que l’Ennemi lui caresse la joue. C’est l’enfant qui croit encore en l’amour de son parent – stupide gamin. Amertume. Je n’avais aucune raison d’être si violente envers la faiblesse du Prince – c’était juste qu’il me rappelait avec effroi la mienne. Ma mère. Et la façon dont je m’écroulerai si jamais elle était prête à me témoigner un peu d’amour. Si jamais.
Les messes basses s’enchaînent, et le temps semble devenir de plus en plus long, debout dans la lumière.
Je m’efforce de ne pas froncer les sourcils alors que sur le visage du Prince se brise sous mes yeux. Et voilà. Encore un espoir parti en fumée. Je le savais. Mes lèvres se retiennent de former ces mots, qui restent docilement confinés dans ma bouche. Viens alors la question de la religion.
Est-ce vraiment bien nécessaire de mentir ainsi ?
Il était évident qu’il n’achetait pas un seul de tes mensonges – et tout en moi montrait que je n’étais pas musulmane. A peine croyante. Le seul Dieu que j’avais étant celui qu’on m’avait imposé à la naissance, et qui m’avait lâché un nombre incalculable de fois. Celui que j’invoquais uniquement quand tout le monde semblait sur mes épaules – plantant ses griffes empoisonnées dans ma chair. Non. La théologie n’était pas pour moi.
« Ce serait inutile de la forcer à lui faire faire quelque chose contre son gré. » Un sourire provocateur passe tel un fantôme sur mon visage, soutenant les dires du Prince, qui se rapproche de mon espace vital – reviens près de moi, reviens, ne regarde pas en arrière. Je suis la gamine possessive reprenant son dû. Je plante mes ongles dans la main qu’il me donne, m’enfuyant avec lui de ce lui où tout était d’un blanc trop pur. Trop faux. Le triomphe sur mon visage – Qui se décompose alors que le Prince se brise entre mes doigts.
Ses mains accrochées à mes vêtements tremblent, et je l’observe, presque trop choquée. Surprise. Consternée. Prince, que t’arrive-t-il-il ? Que t’était-il arrivé ? Il murmure des mots dans un souffle – il crache sa peur d’être détesté par celui qui l’avait créée. Mais n’es-tu pas habitué à la haine ? N’es tu pas habitué à ce sentiment de destruction si enivrant ?
L’incompréhension se mêle dans mes traits alors que je reste immobile, l’observant. Qui était ce Prince ?
Il se décroche pour aller s’écraser contre le mur le plus proche. Manquant de s’effondrer à chaque pas. Pathétique. Je ravale ma salive avec difficulté.
« Il veut que j'aille voir maman… Il va vraiment finir par me tuer. »
Sursaut, la manière dont il parlait de sa mère était si différente de celle dont il crachait sur son père. L’entendre parler d’une femme avec une telle douceur avait de quoi vous fendre le cœur. Pour peu qu’il ne soit pas déjà en pièces, comme le mien. Les questions commençaient à affluer, mais je savais que ce n’était pas le bon moment. Pas alors qu’il était comme ça. Lamentable. Ombre de lui-même. Colère, trahison. Quelque chose en moi m’empêchait de vouloir accepter ce reflet ébréché.
« Tu n’es pas là pour ça Prince. Ce n’est pas cette peine qui doit remplir ton cœur. Ce n’est pas cette violence. Et ce ne sera pas lui qui te tuera. » Les mots sont secs, mais ils ne font pas mal. De même que ma main glisse sur son épaule alors que nos regards s’accrochent – protectrice, mais rassurante, ramenant à la réalité. Ne te perds pas en chemin. Je suis accroupie en face de lui, tissus ramenés sur mes genoux. Tu ne peux pas t’effondrer Prince, du moins pas encore, du moins pas pour ça.
« La Princesse a-t-elle besoin que je la porte jusqu’à la salle à manger ? » Rire joueur.
Le voir ainsi m’horripilait – j’en venais même à regretter le temps où nous n’étions que cynisme et vilénie. Je me relève doucement, remontant le tissu transparent de ma robe sur ma poitrine, cachant mes cicatrices. Passant une main dans mes cheveux par pur réflexe, me rendant compte par la suite qu’ils étaient attachés. Soupir, je me relève et tourne le dos à Anshu.
« La prochaine fois qu’il ose te briser sous les yeux de ta charmante fiancée, elle ira elle-même lui expliquer sa religion. » Je tourne la tête, sourire en coin. Moi, je n'avais pas peur de son démon.
J'avais moi-même du mal à cerner la part de vérité et la part de moquerie dans ma phrase. Sorte de blague sans en être vraiment une. Parce que quelque chose en moi me donnait la violence de le protéger, lui, celui que je déteste – pour m’accaparer ensuite le plaisir de sa destruction. C’était ça. C’était sûrement ça, n’est ce pas ?
Quoiqu’il en soit, cette vive entrée en matière m’avait épuisée. Et tout ce dont je rêvais sur l’instant était d’un bon repas, d’un bon bain, d’une bonne nuit …
Et d’une conversation en bonne et dûe forme.
|
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Sam 1 Mar 2014 - 15:46 | |
Il fixe le mur, silencieux. Genoux tombés aux sol. Crevant presque sous la honte qu'il éprouve à l'heure actuelle et qui l'avait intimé à quitter ses mirettes. Il l'écoute en silence, cracher ces mots si vrais - tellement véritables qu'il ne peut les contredire. Sarah le connaissait trop bien, c'est pourquoi, à chaque coup asséné, la Dame ripostait. Et c'était lui qui s'écroulait le premier, son cœur défaillant sous la lourdeur suffocante de ses propos.
Qu'elle était cruelle.
Froissement de tissu. Le Prince relève la tête pour la tourner vers son bourreau alors qu'il aperçoit vaguement de lourdes cicatrices sur la peau cadavérique de Blackmore. Ses yeux, durant une nanoseconde s'écarquillent, tentant de repasser en boucle cette image si troublante. Avait-il rêvé ? Était-ce une douce aberration satanique qui avait chatouillé ses pupilles ? Il baisse par la suite les yeux qui étaient rivés au niveau de sa poitrine avant qu'elle ne s'imagine des choses plus ou moins étranges sur les yeux du Prince et surtout sur l'abandon soudain de sa misogynie.
Soupir. Mains sur ses genoux, il se relève alors lentement pour se passer une main sur le visage, échouant ses doigts dans sa chevelure. La fatigue de tout ça commençait déjà à lui chatouiller les yeux alors qu'il s’abandonne dans un lourd bâillement, reprenant sa marche en direction des escaliers, devenue drastiquement plus lente. Pas un regard, pas une parole, rien qu'une expression dure et froide sur son visage qu'il utilise pour voiler son comportement si entachant pour la soit-disante dureté et cruauté du prince abyssal. Il s'attend à ce qu'elle le suive et l'entend même lui emboîter le pas, alors qu'il tourne à peine la tête pour l'observer du coin de l'oeil.
Le silence a été troublant, le silence reste troublant, le silence restera troublant. Troublant et pesant, bestial et brutal avec eux.
C'est ainsi.
Et le Prince continuera de le défier, étouffant un rire jaune, ce dernier allant même fendre ses lèvres d'un rictus acerbe.
Tu ne manques pas d'air. Je pense que... tu es brisée aussi Sarah. Je n'ai pas besoin de cette compassion, on est de la même trempe. La seule chose qu'on a le droit de faire est de se débattre pour ne pas plonger… il tourne la tête en sa direction tu ne penses pas ?
Et il hausse les épaules. Parce que quoi qu'il puisse faire, une fois entravé par la toile, il est véritablement impossible de s'y échapper. On a juste a attendre une mort douloureuse, agonisant dans son propre reflet pitoyable, perdant amour propre et orgueil. Et nombreux sont déjà tombés. Nombreux ont déjà crevé dans d’atroces souffrances. C'est ainsi, on ne peut lutter contre cette chose abominable qu'on appelle le destin, ce truc difforme qui joue des autres tel un être perfide ne se souciant pas plus de la vie. Et c'est ça, d'ailleurs.
Les marches d'escaliers s'inclinent sous leurs pieds. Le temps est long, le silence n'a à première vue pas déployé toutes ses cartes. Il a instauré une barrière entre eux, quelque chose de si frêle mais qu'aucun n'ose vraiment détruire. Et c'est ça, la faiblesse de leurs deux êtres en peine.
Salle à manger. Silence de mort, distance effrayante, tension suffocante, atmosphère réticente. Le comble.
Salle à manger. La seule salle à peu près normale, basée sur une décoration plus ou moins occidentale. Une moquette vermeille, tapisseries égyptiennes et tableaux ornant les murs dorés, ainsi que de diverses plats créant une senteur des plus alléchantes, pas seulement arabes.
Et une table. Ce n'était pas les tables rondes où les sourires fusaient sous la nourriture qui se présentait devant eux, discutant distraitement de la beauté de la vie, des amours et des emmerdes. C'était une table rectangulaire, à l'allure stricte et froide. Aux deux extrémités de la longueur se tenait le Prince et sa Dame Noire. Ironiquement séparés de ce vide si important. Et sur les côtés, c'était les bouffons des Pièces Maîtresses. Les cousins et cousines du Prince trônaient là, tous âgés de onze à quinze ans. Et malheureusement, tous avaient une maîtrise de l'anglais plus ou moins correcte en fonction de l'âge. Car ici, la perfection n'est rien d'autre que le maître-mot qui doit régner dans chaque être, qui doit pénétrer chaque âme. L'échec n'est pas toléré. Le père sera toujours à l'affût d'un détenteur de don, aussi inutile qui soit. Et le jour où ledit détenteur se rendra à Prismver, le cookie donné ne sera que superflu.
Ils raillaient tous l'Invitée d'honneur, sous le regard las du Prince, coude mollement posé sur la table, ses yeux glissant sur chacune des personnes prenant la parole. Elle subissait l'interrogatoire suprême de sa vie, avec les questions banales “qui es-tu ? quel est ton prénom ? ton âge ? ton don ? tes occupations ? tes plats préférés ? et ton tempérament ?” mais également des choses comme “ça fait combien de temps que t'es avec Anshu ? vous l'avez déjà fait ? qui fait la cuisine ? tu veux avoir combien d'enfant ? tu es déjà tombée enceinte ? si oui, combien de fois ?”
Et le regard ennuyé d'Anshu se transforme peu à peu, prenant une teinte agacée et nerveuse, sourcils courbés. Tout ça le mettait plutôt mal à l'aise, et ce devait être réciproque pour elle. Les gens de cette famille semblaient tous être trop curieux, ou trop bruyants. Le seul être calme était Anshu, son sadisme et son masochisme compensant ce tempérament.
Mais il ne disait pas un mot, contentant d'observer sa fiancée répondre aux questions qu’elle voulait. Ils étaient conviviaux à leur manière, les rires étant moqueurs au lieu d'être joviaux, les regards mauvais au lieu d’être admiratifs. Mais ils étaient niais, les plus jeunes semblaient réclamer de l'affection à aller se lever de tables pour réclamer de l'affection. Et c'est compréhensif. Ici, tout le monde convoitait le moindre geste réconfortant du père, et si jamais ils avaient la joie d'en avoir, c'était juste une fausse joie. Pitoyablement brisés par lA suite.
Alors oui, c’est compréhensif. Sarah semblait dégager cette grâce et ces gestes qui peuvent être aussi cruels que maternels. Oui, elle a le comportement d'une mère, et malgré tout ce qu'on peut dire d'elle, elle est aussi faible que n'importe qui. Mais cette faiblesse n'est pas à plaindre, bien au contraire. Malgré les blessures, les coups, les déchirements que son âme subit et assène, elle se relève toujours, la tête haute, fière, même si ses cervicales pouvaient se déchirer tellement elle était en réalité basse. Et c'était ça sa vraie beauté.
Le Prince termine son repas et se lève, les pieds de la chaise contre la moquette créant un bruit lourd et désagréable. Il tend à peine les mains, des serviteurs accourant essuyer sa peau blêmie. Il jette un regard à Sarah. Tu me rejoindras dans la chambre quand tu auras terminé, cette atmosphère me donne la gerbe. Tu n'auras qu'a demander à cette... troupe agglutinée autour de toi où se trouve mes appartements.
Juste un prétexte pour voiler sa jalousie. Et il était autant jaloux des membres de sa famille que Sarah d'ailleurs, c'était cette indécision qui le rendait malade. Et son être disparaît de cette pièce où tous ces démons s'amusaient à taquiner ce qui était censé lui appartenir.
#764A61 |
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Ven 7 Mar 2014 - 21:10 | |
Et le silence se réinstalle – toujours aussi épais, omniprésent, étouffant. Des mois qu’il me suit, ce silence, des mois que j’essaie de le faire fuir. Parce quand personne ne parle, c’est moi qui pense. Et j’ai parfois de ces pensées qui vous bouffe jusqu’au recoin le plus secret de votre âme.
Dévore.
Le Prince se relève – mû par une fatigue centenaire, et je me surprends à bailler moi aussi. Crevée, vidée par cette comédie hautement déplaisante, par cette fausseté tout autour de moi - en moi. Je ne suis pas une princesse. Je n’ai que de noble ma faculté à mentir et à tromper les gens – seul héritage de ma chère mère. Et je le suis de nouveau – répétant toujours et inlassablement les mêmes gestes. Je progresse à pas lents, gardant mes yeux fixés sur sa nuque que j’ai vue courbée un peu plus tôt – nous avons des rôles Prince. Des rôles épinglés à nos fronts dont on a l’obligation d’incarner – une erreur de l’un condamnant l’autre. Puisses-tu ne jamais remontrer ta faiblesse – la prochaine fois pourrait bien nous être fatale.
Et comme s’il avait lu dans mes pensées, et comme si cela était devenu une évidence, le Prince reprit son rôle. Toujours défiant, toujours moqueur, toujours plus haut que tout le monde - même rampant à terre.
Je pense que... tu es brisée aussi Sarah. Je n'ai pas besoin de cette compassion, on est de la même trempe. La seule chose qu'on a le droit de faire est de se débattre pour ne pas plonger… Pour ne pas plonger où, Prince ? Je le rattrape, rejoignant son côté alors que nos regards se croisent. « Nous ne sommes pas brisés, Anshu. Car cela signifierait que plus rien ne pourrait plus nous atteindre – que plus rien ne pourrait nous blesser. Ce serait être mort. Mais nous ne méritons pas la Mort, la délivrance, pas plus que nous ne méritons de vivre une vie normale. D’Homme heureux. Je suppose qu’on est juste des âmes errantes qui ne trouveront plus jamais leur place. »
C’est las, c’est fatigué. Il est si lourd de vouloir se donner un but et objectif, alors que plus rien ne nous importe – alors qu’au fond, on a perdu le droit d’exister en tant qu’humain. Créatures mi-lune mi-homme que nous sommes – nous continuons d’avancer. Habillés par le manteau de silence qui couvre nos épaules.
•
Dos droit, collé au dossier de la chaise, je porte la fourchette d’argent à mes lèvres. Douleur contrôlée dans tout le corps. C’est ce qu’il faut pour être une Lady - la voix de ma mère, déformée par le temps résonne dans mon crâne. Et bien. Nous y voilà.
Un dîner chez les rois, princes, futurs tyrans à la prétention plus grande que leur nation.
Le Prince est en face de moi, et nos regards ne se croisent pas une seule fois – ô quelle ravissant couple de fiancés nous faisons franchement. Séparés par une montagne de plats – tous délicieux – et tous plus superflus les uns que les autres ; ainsi que par une tripotée de marmaille toute droite venue du nid des Enfers. La famille d’Anshu.
Et c’est à ce moment que l’on se rend compte à quel point il est difficile d’apprécier un repas dans une ambiance si malsaine qu’à côté, manger près d’un cimetière en pleine nuit serait une pure partie de plaisir. Puants, froids – ils sont tous fait du même sang, et portent tous sur moi le même regard moqueur et cruel. J’ai bien conscience d’être l’étrangère, la bête curieuse, l’animal mis à saigner face à leurs langues-poignards. C’est effrayant – c’est répugnant. Ce sont des enfants, encore jeunes et maladroits dans leur pratique du vice s’y acharnant avec tellement de volonté. Ce sont des enfants, riants tous ensemble comme la belle et rampante famille qu’ils sont. Et quelque part, je les envie. Et quelque part je suis surprise.
Que même dans toute cette saloperie de noblesse se trouve ce sentiment d’unité – de convivialité. Tordue et mal placée, certes, mais bien présente.
Les minutes passent et les plats défilent, alors que je suis soumise à leur interrogatoire. Ils se nourrissent de ça, ils se nourrissent de mes hésitations, de mes faux sourires gênés, et des mes paroles que je fais planer de manière suave et mystérieuse au dessus de leur tête. Repus – plein de vie de savoir … Que je m’appelle Sarah Edwige Blackmore, que je suis anglaise, que j’ai 19 ans, que je suis Sagittaire, musulmane – ou non – que j’aime les mokaccinos, que mes cheveux sont courts et que je ne les laisserai pas pousser, que je sois la parfaite jeune fille éperdument amoureuse du Prince d’Egypte, malgré le fait qu’il soit plus petit que moi. Mensonges et vérités mélangés dans un discours suave et bien mené – tout ceci entre deux bouchées.
Ceci ne s’arrêtera donc jamais ? N’atteindrons-t-ils jamais satiété ?
Ils se saoûlent de mes mots pourtant, attirés par ma présence qui devient de plus en plus affirmée, malicieuse, vile. A quoi pensaient-ils ? Fatalement, j’en viens à me prendre à leur jeu. Je charme les serpents en parlant fourchelangue, c’est ce qu’il y a de mieux. Une jeune fille – sûrement une des plus jeunes, se lève pour venir s’accrocher à mes voiles, et je viens lui caresser les cheveux avec une tendresse feinte bien trop sucrée pour moi.
Tu me rejoindras dans la chambre quand tu auras terminé, cette atmosphère me donne la gerbe. Tu n'auras qu'a demander à cette... troupe agglutinée autour de toi où se trouve mes appartements.
Ca a claqué, ça a résonné – et je me retrouve surprise. Surprise que le Prince, si habituée à cette comédie grotesque, ait été le premier à faiblir. Ses yeux étaient colère, fatigue … jalousie ? J’affiche un sourire – suave et doux en apparence – et dégoûté à l’intérieur, avant d’embrasser la petite tête effrontée qui a ri devant la fuite du Prince.
Un baiser sur le front, et les voilà tous – les plus petits du moins, accourant pour réclamer leur dû. Caresses, étreintes d’une fausse tiédeur, et je me lève. « Maintenant, si vous voulez bien m’excuser … » Laissant traîner les mots avec une langueur amoureuse et moqueuse. A peine ai-je esquissé le geste de me lever que certains serviteurs viennent m’essuyer les mains, se jetant sur moi comme des vautours avides.
Je me mords la joue pour ne pas faire rouler les yeux dans mes orbites – joue jusqu’au bout de la scène, Sarah. « Si quelqu’un veut bien m’indiquer où se trouve sa chambre … ? »
•
Je pousse la porte de sa chambre, enfin libérée du cortège qui m’attrapait par les bras par des adieux mielleux et maternels. Lumière chaude, j’approche à pas légers, trouvant la forme du Prince dans un coin de la pièce, sur un sofa.
« Jolie petite crise de jalousie Prince – il n’y a pourtant pas d’inquiétude à avoir, vous savez que je n’appartiens qu’à vous.» Mime théâtral de la jolie fiancée que je m’étais efforcée d’être - suivi d’un léger rire. Un rire qui ne s’amuse pas. Qui ne s’amuse plus. J’enlève mes sandales et détache mes cheveux, qui retombent en mèches ondulées sur ma nuque – avant de m’avachir sur le lit. Finie, la grâce de princesse. Mes yeux se perdent dans les méandres des ornements du plafond.
« Est-ce que ça va être comme ça tous les jours ? » Tous les jours la même comédie, la même préparation, la même patience, et les mêmes silences ? Un éternel purgatoire qu’est sa maison d’enfance. « Est-ce que tu as tenu comme ça tous ces jours ? » Un murmure, presque empreint de pitié – si seulement la pitié existait encore entre nous.
J’attrape mes mains pour les étirer vers le plafond, poussant un soupir exténué. Le silence est si lourd. Et maintenant que j’y pense – nous sommes enfin seuls. La réalisation de la situation afflue d'un coup dans mes veines. Je suis en Egypte, avec Anshu. Et ... «Il n’empêche que …. ta fiancée, Anshu ? Non, franchement, tu n’aurais rien pu trouver de mieux ? Ton orientation sexuelle est visible à la face du monde, comme un nez au milieu de la figure.» J’aurais tellement voulu m’énerver – mais la lassitude m’en empêche, à vrai dire, elle me fait trouver juste ça comique, ô, tellement comique. J'en rigole, même. D'un petit rire perdu et désabusé.
Mes mains se lâchent pour tomber mollement sur le lit. Et dire que ce n’était que la première journée d’une longue semaine. Dans quel Enfer nous avait-il précipités ?
|
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Sam 29 Mar 2014 - 17:12 | |
Il ferme la porte d'un coup de talons. Ses dents grincent, il soupire, grogne - se remémore à contre-coeur cette scène gerbante. Et il se dirige vers la fenêtre, pose ses mains sur la pierre - griffant inutilement celle-ci, s'abîmant les doigts, lui arrachant une douleur plus réconfortante que désagréable. Il inspire, comme si l'air de la demeure le fais air suffoquer, souffle tellement qu'on aurait pu penser qu'il faisait de l'hyperventilation.
Il est crispé, dégoûté de lui-même - de cette nature bien trop jalouse et possessive, ce n'était pas obsessionnel, c'était maladif et il en souffrait chaque jour.
Il inspire, abandonnant la torture qu'il faisait subir à ses doigts pour s'affaler sur le sofa le plus proche, roulant sur le dos. Il ferme les yeux quelques instants - instants qui pourraient bien le trahir et l'entraver dans les bras de Morphée - trop lâche pour être confronté à la réalité une autre fois.
Et c'est à moment là que la porte s'ouvre - en même temps que les yeux d'Anshu, se redressant rapidement sur ses coudes après un sursaut. C'est en croisant ses pupilles qu'il abaisse un peu les paupières, reprenant cet air nonchalant et désintéressé.
Jolie petite crise de jalousie Prince – il n’y a pourtant pas d’inquiétude à avoir, vous savez que je n’appartiens qu’à vous. Arrête, je vais vomir.
Il relâche finalement la pression sur ses coudes et passe ses mains derrière son crâne, fermant lentement les yeux.
Il ne répond pas à sa première question - sa seconde. Question qui n’en était pas une, elle devait sans aucun doute savoir qu’il étouffait avec ces êtres en pleine putréfaction. Il restait muet, parce qu'il n'était pas nécessaire de parler - pas pour lui. Anshu prend une profonde inspiration à l'entente de ses prochains mots.
Et il ouvre les yeux, les posant sur le corps immobile de Blackmore, le longeant lentement pour terminer sa course sur sa chevelure de jais.
Trouver mieux ? Eh bien je t'écoute. Il marque un fin temps de pause, ne lui laissant pas assez de temps réagir. C'était la chose la plus rationnelle. Amie, meilleure amie ? Je n'ai pas d'amis - tout le monde l'a toujours su. Et encore moins si c'est une fille. Connaissance que j'ai chopé pour qu'elle découvre ma suprématie ? Je ne serai pas aussi généreux. Les choix sont restreints - et je n'avais pas le choix. Mon père attendait depuis toujours ce moment, je lui ai offert. Sa langue bat son palet, agacé. Mais si tu veux, va leur dire que tu n'es rien d'autre qu'une fille comme les autres, et que tu n'es rien d'autre qu'une nana qui pourrait me faire vomir avec un simple regard. Je m'en fiche.
Il pivote sur le côté sur ses mots pour se retrouver dos à elle, silencieux. Et le silence n'a pas le temps de s'installer qu'il le brise d'une froideur presque gênante. Si tu veux prendre un bain, c'est la porte là-bas. Parce que ta présence est acerbe et toxique.
#764A61 |
| | | InvitéInvité | Sujet: Re: Aride. Sam 19 Avr 2014 - 22:14 | |
Et Sa Majesté grogne, acerbe. Piètres miaulements. Il crache, le Prince, félinement allongé. Mais il a perdu sa hargne.
Il a tout perdu. Je n'ai pas d'amis - tout le monde l'a toujours su. Tout. Ou peut-être n’a t-il jamais rien possédé, que ses mains ont toujours été vides. Prince d’Egypte, Prince du néant. Ses mots claquent, froids dans son palais et dans sa bouche, et j’écoute ses feulements qui faiblissent. De plus en plus. Décevants. Remplis de contradictions.
Tu m’avais habitué à mieux. Tu l’ avais habitué à mieux. Si je suis comme toutes les autres, tu ne m’aurais pas emmené avec toi. Tu n’aurais pas pris la peine de monter cette ridicule comédie, pour exaucer la chimère de ton père que tu exècres. Tu avais besoin de moi – toi qui n’avait plus rien dans tes mains. Besoin de moi pour que je te rappelle le but de ta venue de par ma simple présence. Mais comme toujours, tu sauves les apparences, Prince, parce que c’est tout ce qui te donne encore consistance.
Il est vraiment triste à voir, Anshu.
Je ne prends pas la peine de relever. Ni de réagir – c’est bien inutile. Je contemple juste son dos si frêle qu’il pare d’une arrogance bien trop lourde pour lui pendant un instant – bouche fermée.
Si tu veux prendre un bain, c'est la porte là-bas. Je sens soudainement le nœud qui serre les muscles de mes épaules – engourdies par le long voyage, les ports de tête, la rigidité d’une parfaite apparence de Princesse. Un bain ? J’en rêverai.
Je me lève sans un bruit, avant de me diriger vers la porte. Commençant à enlever mes parures qui roulent sur le sol. Ceinture d’or, bracelets de chevilles, de poignet, boucles d’oreilles – tout tombe sur les tapis aux milles couleurs avec un bruit mat. Dur. Consistant. J’arrive devant la porte, et après une grande inspiration je m’y engouffre. Laissant derrière moi ma robe toute blanche – jolie traine de mariée pour une traînée.
Ca - une salle de bain ?
Foutus riches. Cette baignoire est techniquement une piscine. Une placide piscine d’eau chaude où flottent pétales de roses et huiles moussantes. Tout ici est décidément bien trop grand, bien trop beau, bien trop tout pour moi. Je reste un moment debout, nue, sans rien dire, complètement assommée –déphasée. Hors de mon corps. J’ai encore le poids du deuil sur mes épaules et mon masque greffé à ma peau. Deux pas, et me voilà au bord de l’eau.
Je m’y laisse plonger, couler, sentant l’onde délier tous les muscles de mon corps un à un. Mes coudent viennent trouver le rebord du bassin, alors que tout doucement ma tête bascule en arrière, se noyant dans les pensées. J’aimerai parler de Corentin à Anshu, mais ce serait là rendre les choses plus difficiles qu’elles ne le sont déjà. J’aimerai lui parler de Drew – mais ce serait encore pire. Plus les secondes passent dans ce bain de réflexions, plus je me perds. L’odeur de savon et de monoï me donne mal au crâne, et même dans ce bain rafraîchissant, je commence à avoir chaud. A brûler de cette foutue flamme qui me hante et qui ne me quittera pas – qui continuera d’aller lécher mes os jusqu’à ce que je redevienne poussière. Mon regard glisse sur ma poitrine déchirée – et un sourire triste étire mes lèvres. Je suis si fatiguée – mes yeux se ferment presque tous seuls. Et me voilà en train de doucement rejoindre le pays des rêves, le ventre engourdi par la crainte de l’avenir qui se profile.
Pays des rêves ? Oh, mais cela fait si longtemps que je ne fais plus que des cauchemars. Colorés, vivaces, j’en sens le goût dans ma gorge – l’odeur dans mon nez. J’ai conscience que je rêve, mais je n’arrive pas à m’en sortir. C’est un labyrinthe sans issue.
J’ouvre les yeux, la bouche – et l’eau y rentre – je suis au fond du bassin. Mon absence m’avait fait couler à pic, et me voilà en train de me battre, convulsant pour me sortir de l’eau. Quand j’atteins la surface et que l’air passe enfin à travers mes poumons, un cri s’échappe de mes lèvres. Désorienté, apeuré. Dans mon rêve éveillé j’avais revu l’enterrement, j’avais revu mes démons, j’avais revu des visages – son visage. Heureux à m’en couper le souffle – haineux à m’en arrêter le cœur. Le tout mélangé, indescriptible – le sens s’estompant déjà de ma conscience, et la peur restant pourtant bien présente, faisant cogner mon cœur dans ma poitrine. Mes mains, tremblantes, entrent en contact avec le marbre lisse du rebord du bassin.
Le cri de terreur que j’avais poussé plus tôt résonne encore dans mes oreilles, assourdissante faiblesse. Il ne manquerait plus qu’on l’ait entendu. Je tousse, expulsant l’eau restante de mes poumons, avant de me laisser retomber contre la paroi de la piscine, laissant l’eau monter jusqu’à mon menton, genoux contre mon corps.
Moi aussi, je suis vraiment triste à voir. Toute prostrée dans mon océan de tourments.
|
| | | Contenu sponsorisé | Sujet: Re: Aride. | | |
| | | | Aride. | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|