Tu croyais pourtant avoir pris l’habitude d’être rejeté par les gens. Seulement, cette fois, c’était différent : Scott Newton allait regretter d’avoir refusé ton offre. Pourtant, sur le coup, tu n’avais pas été le plus impoli possible, et de ton point de vue, t’avais même sorti le langage soutenu. Red posait problème et à ton sens, toute personne était bonne à prendre pour les arrêter. Le projet WIP ne t’intéressait pas, tu te doutais bien qu’il ne fallait pas seulement réparer les choses pour arranger la guerre. Ces types étaient motivés pour exploser le pensionnat entièrement, alors, somme toute, réparer était insuffisant. Il fallait agir, et ce gars avait compris ça - seulement, monter un groupe de A n’était pas non plus suffisant. Tu pensais qu’il ne cracherait pas dans la soupe, pourtant, c’est ce qu’il a fait. Tout ça parce que lui-même n’appartenait pas aux A.
Ridicule. Puéril. Et ça avait fini par le mettre en rogne - parce qu’on ne refuse pas l’aide de Silvester Almirante. T’avais une fierté, et ça, personne ne pouvait se permettre de cracher dessus. T’étais honnête, droit, peut-être chiant et doté du pire humour du monde, mais jamais t’avais fait faux bond à quelqu’un. … Bon, peut-être que c’était arrivé, finalement - tu pouvais seulement te vanter de l’ouvrir assez suffisamment pour que tes potes arrivent à se tirer ds pires situations quelques fois. Ce n’était pas la gloire ce genre de talents - et peut-être qu’au fond, tu comprenais quel était le problème avec lui : tu serais tout simplement inutile sur le champ de bataille. Pas vaillent impressionnant physiquement -juste le nécessaire pour ne pas subir une humiliation quand tu engageais une dispute-, et un pouvoir qui laissait à désirer. Le clonage - technique Naruto.
Super. Et les clones avaient souvent l’air trisomiques. Bref, c’était la déprime, la colère et une énième clope après un repas dégueulasse. Le pensionnat jonglait entre les bons et les mauvais menus, comme si le personnel changeait, se dissociant entre certains compétents et d’autres inutiles. Très franchement, ça t’était bien égal, mais t’avais finit par mémoriser les horaires - seulement là, c’était la dèche, t’avais plus de pognon pour aller manger dehors et t’avais du te taper l’horrible menu. Tu soupirais, écrasais ta clope sur un mur et en sortais une nouvelle - machinalement, instinctivement. Tu pensais même pas à celle que t’avais fini ni celle que t’allumais, seulement à la suivante. Une drogue - et tu te posais pour fermer les yeux, pensais à ta famille, loin, pauvre, isolée.
Ce fut une vraie claque dans la figure. Tu te rendis compte de cette arrogance qui te gagnait lentement, de cette insatisfaction pour laquelle tu te maudissais. T’aurais tué pour ce que t’avais mangé aujourd’hui, à l’époque, et tu trouvais aujourd’hui le moyen de t’en plaindre. Tu serrais les doigts, commençais à fumer cette nouvelle cigarette en marchant dans les égouts. T’avais envie de te baffer, te rappeler ta position dans cette putain d’échelle sociale. Y’avait les gens qui se trimbalaient avec des voitures neuves, y’a ceux qui les nettoyaient. Le monde est ainsi fait, et tu n’échapperais pas à cette connerie de seconde catégorie. Colère. Nouvelle raison de stresser, nouvelle raison de te haïr - presque forcé de soutenir ces saletés de A, gosses de riches.
Tu soupirais, te calais contre un mur à l’écart. Dans un endroit sec avec un minimum de place. T’avais envie de tout foutre en l’air, mais cet endroit t’apaisait - la puanteur te rappelait ton quartier submergé par la boue, ces maisons construites avec des restes. Un moment de tranquillité, duquel ces pas te sortirent - et t’avais vraiment envie de faire payer le prix fort à cette innocence.
- Qu’est-ce que tu fous là ?
T’as toujours été calme, t’allais pas craquer maintenant. La voix est calme, le ton est dur, presque intimidant. Mais tu refuses de devenir ce que tu n’es pas.
InvitéInvité
Sujet: Re: paradoxe. Mer 30 Juil 2014 - 21:53
Stop m'agresser ça m'fait stresser
Ft. Silvester
Une routine monotone et ennuyante. Chaque jour tu te lèves, tu t'habilles et tu manges, pour ensuite bâiller jusqu'au soir. Les cours « normaux » ne t'intéressent pas, tout ce qui s'y dit n'est pas une nouveauté pour toi. Même si se lever signifie sortir et avoir une vie, tu préférerais largement rester au lit et lire pour la énième fois un livre que tu as instinctivement appris par cœur. Ta mémoire eidétique, combinée à tes connaissances illimitées, est autant un don qu'un fardeau. Un moment gênant de ton existence qui restera probablement gravé dans ton esprit jusqu'à ce que la mort emporte ta conscience – par exemple, cette fois où tu avais postillonné et balbutié lorsqu'un professeur a fait la bêtise de t'interroger en classe.
Visiblement, ce matin est différent. Le réveil est moins brutal, l'envie de meurtre quotidienne a disparue. Tu te sens presque bien et, en un sens, c'est mauvais signe. Ta paranoïa habituelle en est intensifiée, tu évites tout le monde et t'enfermes dans un cocon protecteur ; tu ignores ceux qui ont l'audace de s'adresser à toi, ton excuse étant la lecture d'un livre et le port d'écouteurs. Certes, la musique qui retentit à l'intérieur est faible, mais personne n'est supposé le savoir. Passionnée par ta lecture, tu finis même par vouloir la suite.
Cependant, le monde entier semble décidé à t'ennuyer et à t'adresser la parole. Toi qui, d'ordinaire, aurait tué pour un peu d'attention, tu ne voulais maintenant que la solitude, le plaisir de bouquiner dans la tranquillité d'un lieu lambda que toute trace de vie avait quitté. Rares sont les endroits correspondant à ta description ; cependant, tu sais que l'un d'eux serait suffisant. Les égouts. Pas très attrayant, certes, mais tu pourrais lire tranquillement là-bas. Tu n'es pas spécialement habituée aux fortes odeurs mais tu saura certainement t'y faire.
C'est d'un pas décidé et rapide que tu t'aventures dans les tréfonds puants des égouts de Prismver, non sans lâcher au préalable un juron – vieux réflexe, ta voix finit par retentir toute seule. Pour ton plus grand bonheur, rien n'y répond, alors tu continues ta route en fronçant le nez – c'est plus odorant que ce que tu espérais. Livre en main, écouteurs aux oreilles et sucette entre les dents, tu glisses discrètement sur le sol, comme si tu craignais que quelqu'un te surprenne – est-ce une bévue que de désirer la quiétude d'un lieu peu commun ? Sans chercher la réponse à cette question purement rhétorique, tu sifflotes presque joyeusement, jusqu'à ce qu'une voix glaciale et foutrement flippante te serres les tripes. « Qu’est-ce que tu fous là ? »
Une série de réponses supposées drôles traversent ton esprit, suivies d'autres plus agressives – du genre « j'cherche ta mère, paraît qu'elle s'est perdue ici. » Finalement, tu ne tentes pas le diable ; tu es consciente que tenter une bataille verbale est un suicide pur et simple. Tes yeux cherchent instinctivement ceux de l'inconnu... Jusqu'à ce que tu te rendes compte que l'individu en question mesure une bonne vingtaine de centimètres de plus que toi – ce qui n'arrange en rien ton sentiment de vulnérabilité.
Tête levée à s'en briser le cou, faible sourire du bout des lèvres. Quelques pas en arrière, par mesure de sécurité. Tu en oublierais presque sa question, cet aboiement presque agressif et pourtant d'un calme déroutant. Il ne semble pas si énervé, mais la bonne humeur n'est apparemment pas de sortie chez lui. Tu prends une profonde inspiration, ton visage pâle ne prenant aucune couleur – alors que ton rythme cardiaque est déjà au paroxysme niveau vitesse. Bordel, il t'a juste demandé – pas très poliment – ce que tu faisais dans un tel endroit, il a pas menacé de t'égorger !
« J'suis venue pour bouquiner. » Lâché à une vitesse normale, sur un ton normale et avec un sourire poli. Alors qu'à l'intérieur, c'est la tempête, l'ouragan, le tsunami. Tu réfléchis précipitamment à la suite, comme si planifier des scénarios farfelus te calmerait. Peut-être qu'il va subitement devenir gentil, peut-être qu'il va pleurer et te raconter un gros fragment de son existence ?
Tu voudrais bien savoir qui c'est, sa seule identité te donnerait accès à un bon nombre d'informations sur lui. Si tu avais du courage, tu lui demanderais son prénom, juste histoire d'avoir un truc ou deux sur lui – mais courage et toi, ça fait trente-six. Tu recules encore, comme une bête effrayée, et contemple d'un air absent tes propres pieds. Si tu le regardes une seconde de plus tu vas probablement avoir un problème – ton nez qui te gratte et te force à le frotter comme un goret, par exemple.
Arrête de réfléchir et dis quelque chose. Demande-lui son prénom. Tu réfléchis à la façon de le faire. Bonjour, à qui ai-je l'honneur ? Non, il risquerait de le prendre mal. Comment tu t'appelles ? Bien sûr, ça sonne comme une demande de gamine de trois ans. Tu tripotes nerveusement ton bouquin et lâches à toute vitesse. « Si tu m'disais ton nom ça me rassurerait un peu j'aime pas trop les inconnus enfin ça veut pas dire que je t'aime pas mais voilà et je. Okay enfin laisse tomber. »
Putain Epona, en fait tu ferais mieux de fermer ta gueule. Précipitamment, tu sors une clope de ta poche et l'allumes, tirant une latte sans réfléchir. Ah putain, mine de rien ça détend. Pas assez, mais un peu.
InvitéInvité
Sujet: Re: paradoxe. Jeu 31 Juil 2014 - 17:17
T’avais pensé la voir à des kilomètres, cette arrogance indigo qu’elle abordait. T’avais cru avoir raison une fois encore, défier un regard hautain, te mordre la lèvre pour ne pas céder devant cet orgueil auquel tu étais maintenant habitué. T’avais pensé tout savoir, t’avais pensé lire en elle par sa seule apparence - parce que t’avais tellement fait face à ce genre de personnes récemment. Et surtout, parce que la colère d’avoir été rembarré par un A arrogant t’était restée en travers de la gorge. Tu la toisais, ton mètre quatre-vingt lui faisant de l’ombre - cigarette en bouche, sourire charmeur troqué pour cette rage enfouie en toi depuis des semaines. Des années. T’étais honnête avec toi-même, et t’étais arrivé à lui faire peur - toi le nain, toi blanche-neige, toi le pauvre, le gamin frêle qui ne savait pas se battre.
Cette taille respectable ne te garantissait pas d’être aussi fort qu’un autre, et t’aurais bien troqué ce physique pour tout ce qu’elle avait sur elle. Un livre, une sucette, un paquet de clopes et surtout, un cerveau en assez bon fonctionnement pour qu’elle puisse aborder cette couleur. Bref oeillade à ta cravate verte récemment acquise.
C’était ridicule. T’étais content de l’exploit d’être passé de l’état d’insecte à insecte pour les types dans son genre - et ça, ça te foutait les glandes. Parce qu’en réalité, t’admettais juste pas qu’il y ait des types qui réussissent mieux sans rien foutre. Au fond, t’en savais rien, elle avait juste eu la malchance d’être là au mauvais endroit dans ton seul moment de faiblesse. T’aurais sans doute pas pu l’écraser même elle, parce qu’il y avait de grandes chances qu’elle te sorte un don puissant et parfaitement maitrisé qui t’envoie au tapis en deux secondes. Tu savais rien d’elle, et c’est ce qui t’apaisa - tu expirais, lentement, reprends ton calme. Elle t’a rien fait, et t’as juste pété les plombs parce que tu refusais le fait d’avoir été refusé. Paradoxe. Mais au fond, tu culpabilisais déjà d’être le méchant de l’affaire. Parce que t’avais beau emmerder ton monde pour rire, cette réponse simple et ce sourire poli effacèrent toute cette mauvaise image que t’avais pu te faire d’elle.
- Oh fuck, désolé, j’suis sur les nerfs.
Tu tournes la tête, soupire en regardant le ciel. C’est cette cigarette que tu viens porter à tes lèvres, éternel calmant, éternel réconfort - et en cet instant, tu te sens revivre. Tu sais que tu n’es pas rien, parce que tu ressens cette culpabilité, parce que tu te sens presque sur un pied d’égalité avec elle. C’est tout con, mais cette taille semble te compenser de ne pas être aussi bien gradée, cette peur que t’as réussi dieu sait comment à lui insuffler te hisse à son niveau ; sinon au dessus. Tu te passes une main dans les cheveux, t’accorde un temps pour te calmer. De préférence, t’aimerais quand même éviter de lui gueuler dessus à nouveau, surtout qu’elle n’a pas l’air méchante. Tu tires une nouvelle latte, observe la fumée cancéreuse s’envoler un instant, oublie ta situation actuelle. Un endroit puant, à l’écart - comme une camisole improvisée, isolée du monde. C’était comme retrouver ton petit village à l’écart de cette si belle civilisation.
Sa voix t’extirpe de tes pensées à nouveau, et tu clignes des yeux, ne les comprenant pas de suite. Elle a parlé vite, et tu marques un temps, y réfléchissant. Tu feignes l’indifférence, entames un peu plus ta cigarette, prend l’air du type qui toise les autres pour prendre une décision. La vérité, c’est que t’as pas capté un mot, sauf peut-être « inconnu ». Tu te rends compte que t’as même pas balancé ton prénom, que tu sais même pas à qui t’as affaire. Alors, tes yeux se posent sur elles et tu la détailles pour la première fois - tes yeux se plantent dans les yeux puis viennent suivre les courbes ondulées décrites par ses cheveux, descendant plus bas. Pas si mal, même si elle doit s’arracher les cervicales pour te regarder dans les yeux - tu te laisses tomber assis, pose tes coudes contre le creux de tes genoux, te balance légèrement. Indifférent.
- Silvester. Sil c’est bien, de toute façon on s’en branle. J’ai bien envie de t’envoyer chier, j’aime pas les A, mais ma bite est pas du même avis. T’en penses quoi ?
Sourire ironique, et tu décides finalement de terminer en paix ta cigarette. Elle est là pour bouquiner, les intellectuelles ont jamais été ton truc. Tu l’as fait quelques fois, même un coup dans les toilettes. Sacrément ingénieuse comme idée, peut-être un peu à l’étroit, mais ça allait - et t’as jamais capté les gens qui voulaient se priver de ce genre de plaisir. Elle a l’air d’en dégouliner, de cette innocence, et tu te sens presque mal de détruire ça - au point d’en laisser tomber tes convictions. Soupir blasé, colère et cigarettes font décidément pas bon ménage.
- J’déconne, c’est bon. Ces conneries de guerre entre classes m’énervaient, j’suis venu ici pour y échapper. Dommage que j’sache pas lire.
InvitéInvité
Sujet: Re: paradoxe. Jeu 31 Juil 2014 - 21:18
Stop m'agresser ça m'fait stresser
Ft. Silvester
« Oh fuck, désolé, j'suis sur les nerfs. » Petit rire nerveux de ta part pour toute réponse, t'allais pas non plus lui dire « oh c'est rien t'inquiète, j'comprends. » parce que non, tu ne comprends pas – et ça ne te regarde pas. Même si ça t'intrigue beaucoup. Pas vraiment parce qu'il t'intéresse, c'est plus une question de curiosité. Ne pas savoir quelque chose, lorsqu'on a le même don que toi, c'est assez frustrant.
Il ne répond pas tout de suite à tes propres paroles, balancées précipitamment et aussi compréhensibles que si tu t'adressais à lui dans une autre langue. Tu parviens à ravaler un juron contre toi-même – encore une fois, s'il le prend pour lui t'es dans la merde. Un bon mètre quatre-vingt qui s'énerve contre ton pauvre mètre cinquante-neuf... Tu n'y survivrais pas – et une crise cardiaque t'emporterait avant qu'il pose la main sur toi.
Tu te laisses d'abord emporter dans tes réflexions intenses, jusqu'à ce que son regard te détaille toi. T'as juste l'impression de sentir ses yeux, comme un serpent qui glisse sur ton corps – oui, t'en es à flipper juste parce qu'il te fixe. C'est désespérant, c'est pitoyable, bref c'est Epona. Tu te grattes nerveusement la joue en reprenant hâtivement la contemplation d'une tâche de crasse sur le mur en face, ce qui te permet de le regarder sans qu'il ne le voit vraiment – paranoïa oblige, tu ne veux pas qu'un malentendu s'installe simplement parce que tes mirettes se sont aventurées à un endroit ordinairement inintéressant. Arrête de réfléchir, sinon tu vas mourir de chaud en un quart de seconde. Du calme.
« Silvester. Sil c'est bien, de toute façon on s'en branle. J'ai bien envie de t'envoyer chier, j'aime pas les A, mais ma bite est pas du même avis. T'en penses quoi ? » Sa phrase passe en boucle dans ton esprit. Tu essayes presque de ne pas comprendre, mais ton cerveau fait très rapidement le rapprochement. Tu ouvres niaisement la bouche dans un silence, tournes tes deux jolis saphirs vers lui... Pour capter qu'il se foutait totalement de ta gueule. Son sourire est plus qu'expressif. Intérieurement, tu te frappes frénétiquement la tête contre un mur imaginaire. Sérieux Epona, arrête de prendre au pied de la lettre tout ce qu'on te dit.
Pour faire bonne figure, tu lui rend son sourire, l'air de dire « non non j'y ai pas cru une seule seconde ahaha bien joué c'était marrant » même si au fond t'es en train de partir dans une série d'insultes dans toutes les langues de l'univers – contre toi-même et ta propre naïveté, évidemment. Bon, détend-toi, prend une profonde inspiration. Dans ta cigarette. Souffle et souris comme si t'avais aucun problème mental. « J'déconne, c'est bon. Ces conneries de guerre entre classes m'énervaient, j'suis venu ici pour y échapper. Dommage que j'sache pas lire. »
Ah, oui. Ton premier objectif en obtenant son prénom, c'était des informations sur lui. Silvester, c'est pas commun dans le pensionnat – tu crois. Tu fermes les yeux quelques secondes et plonges dans ta tête, histoire de trouver deux ou trois trucs. Tu sais qu'il est en C grâce à sa cravate, ce qui réduit l'effectif à une classe. Les informations apparaissent plus ou moins naturellement. Vingt ans, Doppelganger, brésilien. C'est tout ce que tu obtiens en cinq minutes et quarante deux secondes de recherche – tu retires une petite fierté de ce temps record, même si ce n'est pas un exploit. « Sil. J'oublierais pas. Ah et euh moi c'est Epona. »
Toujours droite comme un piquet, tu rabats tes paupières en arrière et le regarde presque fixement. Pas mal, mine de rien. Non, pense pas à ça. Rappelle-toi ce qu'il a dit. Guerre des classes ? Ah oui, affirmer sa supériorité. A la base, c'est pas ton truc – mais voir ces couillons se tabasser mutuellement comme ça, ça t'amuses. Et puis au fond, tu l'as, toi aussi. Elle est cachée, mais bien présente. Cette arrogance, cette fierté d'être en A, presque l'élite. Tu te sens proche des S, c'est ta seule satisfaction. Alors tu ne craches pas sur ce moyen de te sentir supérieure ; mais pas face à ce géant, parce que c'est pas en lui lançant à la figure la définition d'un mot super complexe que tu le mettras au tapis. De toute façon, même s'il fait peur, il n'a pas l'air bien méchant. Ecrasant ton mégot du bout du talon, tu t'assois à ton tour, genoux repliés contre ta poitrine. « T'es contre la guerre des classes ? Pourquoi ? Enfin ça m'regarde pas vraiment mais.. V'là, quoi. » Raclement de gorge. Définitivement, les discussions en simple duo c'est pas ton truc – à croire que seul Sony te met plus ou moins à l'aise. Tu passes une main dans tes cheveux et les laisse retomber devant ton visage, comme si la simple impression qu'il ne voit plus ta tronche te rassure. Un petit sourire apparaît sur tes lèvres, que tu t'empresses de mordiller – un vieux tic, ça t'occupe d'arracher la peau de tes lippes.
Et pour finir, analyse de la dernière partie. Il ne sait pas lire. Comment on peut avoir vingt ans sans savoir lire ? Ah oui, quand on a pas eu une vie aussi cool que la tienne. Tu devrais peut-être pas t'attarder sur ce point, les films et livres que tu as dévorés t'ont appris que tout ce qui touche de près ou de loin l'argent était dangereux pour la santé. Cette espèce de contraste entre vous est presque surprenant ; toi, tu as réussi à rassembler suffisamment toute seule pour faire un long voyage. Lui, il n'a même pas eu assez pour être correctement scolarisé. Enfin, c'est une supposition – après tout, si les gens ne pensent qu'au foot lorsqu'on dit Brésil, toi tu penses aux bidonvilles, tu penses aux quartiers pauvres ; mais c'est peut-être parce que tu es trop terre à terre sur ce genre de sujet.
Tu tapotes du bout des doigts ton livre et finis par lâcher sur un ton proche de l'affolement. « Euh tu disais que tu voulais y échapper putain j'espère que j'te dérange pas mais bref euh. Tu sais pas lire ? A la limite, j'peux peut-être t'aider... » Ta voix descend en volume dès le début de la dernière phrase, tu parles encore vite et lâches un juron en russe – pur réflexe. Tu serres les jambes contre toi en te réfugiant derrière ton bouquin. Crâne plaqué contre la couverture, tu chuchotes dans ta langue maternelle, tu fais comme si tu étais seule. « Rasslablyayet sebe Epona, on ne s"yest tebya.* » Tu répètes trois fois cette phrase et relèves brusquement la tête, sortant une nouvelle clope. Tu lui lances un regard qui se veut calme, actionnant ton briquet pour essayer de ne pas piquer une crise avec un mec que tu ne connais même pas.
*Détend-toi Epona, il va pas te bouffer. D'après Google xD.
InvitéInvité
Sujet: Re: paradoxe. Sam 2 Aoû 2014 - 20:49
Tu sais même plus où t’en es. La situation qui t’agaçait de base se retourne avec une telle facilité que tu restes étonné, incompréhensif. Tu bats des paupières, l’observe avec une certaine méfiance. Allez, comme si cette fille allait te faire un coup de pute, comme si elle en était seulement capable. Tout est de la faute de cette fierté, tout part de cette putain de fierté qui te rend tellement froid à son égard. Cette fierté qui a pourrit ton départ avec elle, qui t’oblige à rester de marbre même si t’aimerais agir différemment. Ca t’a toujours effleuré l’esprit, l’idée de te comporter en grand-frère comme tu le faisais avec toute la fratrie derrière toi. Ca t’a toujours tenté, de caresser de nouveaux ces sensations de protection, de grand-frère protecteur, de te sentir au dessus de quelqu’un - même sans rivalité.
C’est peut-être par égocentrisme, par arrogance ou juste un manque d’affection, mais c’est surtout l’impression qu’elle te donnait. T’aimerais tellement te sentir bien par rapport à ça, t’aimerais tellement pouvoir lui cracher à la gueule sans éprouver de remords. La situation est tentante, ce futur semble à portée de main, mais tu te sous-estimes. A tes yeux, t’es trop faible pour agir comme ça, trop faible pour trahir tes convictions sans éprouver de remords. Au nom d’une pseudo gentillesse qu’elle semble manifester, tu te retiens - lâche, faible, inutile. Ta fierté de C en prend un coup, tes propres paroles à l’égard de RED, de toutes ces conneries de A ressortent en masse dans tes pensées et t’insufflent un coup amer sur le palier.
Trahison, à l’égard de toi-même. T’aurais aimé pouvoir lui dire à quel point tu la détestais pour ce qu’elle était, t’aurais aimé pouvoir lui cracher à quel point son seul prénom te donner la gerbe, mais tu ne le faisais pas. T’étais trop humain pour te cantonner à ta propre fierté, trop gentil pour te voir. Pourtant, tu disais rien, tu gardais cette cigarette à la bouche, hochais la tête avec politesse. T’avais toujours fonctionné comme ça, à la défensive. T’avais toujours préféré laisser les autres se présenter, les juger avec le regard de la bête traqué - paranoïaque, poltron. Au fond, t’aurais juste jamais pensé tomber sur pire que toi, c’est peut-être pour ça que t’étais perdu avec elle - réduit à devoir faire le premier pas pour t’accorder le droit de te détendre.
- Enchanté.
Premier mensonge. Ca n’aura pas duré une minute, ce soupçon d’honnêteté. Comme si t’en étais capable, de toute façon, comme si tu pouvais réellement te donner avec quelqu’un. C’est dans ta nature Sil, d’être renfermé. C’est dans ta nature, de toujours garder cette marge de distance. Tu fonctionnes pas à la confiance toi, tu fonctionnes au pouvoir, à l’argent, aux arguments, tu fonctionnes avec cette putain de logique qui certifie ce que ne pourra jamais garantir la confiance ou l’amour. C’est pourtant de cette façon que t’attendais ta famille, c’est pourtant la confiance qui les poussaient à t’attendre, à espérer. Pour toi, ça ne signifiait rien, mais c’était eux qui te rendait tant respectueux à l’égard de ce genre de comportements.
Alors tu te taisais, alors tu l’écoutais. Alors tu gardais les yeux sceptiques de celui qui cherche à comprendre, alors tu conservais le sourire de celui qui cherche à écouter. T’aurais aimé t’en foutre, t’aurais aimé résumer ton point de vue d’un coup dans sa gueule. Tu pouvais pas, et tu le savais - comme tu savais qu’elle ne tarderait pas à le savoir. Mais t’aimes jouer au con Sil, alors tu lâches un son moqueur, tu te mets au défi. Tu l’écoutes simplement, parce que t’as beau chercher, tu peux pas non plus être tout rose. Tu restes silencieux, l’écoute avec intérêt mais sa réponse te fait éclater de rire - t’en perds ta cigarette, mais, trop radin, te penches quand même pour la ramasser et la refouler dans ton bec. Elle a vraiment gobé ça ?
- Non mais j’sais lire.
Sourire ironique devant cette naïveté, tu jettes un coup d’oeil à son livre. Assurément, pas le genre de trucs que t’encombrerais à porter, encore moins pour t’isoler dans les égouts. T’as jamais été un grand lecteur, un grand intellectuel, t’as toujours voulu être sans paraitre, choisir ton image. Sauf que là, tu contrôlais rien, parce que t’avais juste l’air d’un gros con. Un gros con agacé par une simple question, un gros con qui serrait les dents en écrabouillant la clope qu’il venait de sauver, mais un gros con qui l’était parce qu’il avait un minimum de justice en lui.
- J’suis contre ces conneries de RED. Les E seront peut-être pas dégagés parce que ce sont des dangers, mais les A ? Les B ? Les C ? Nous on est un minimum éduqués, on maîtrise un minimum. Il va se passer quoi si nous on fait une connerie ? Pas d’heures de colles, nan, ça c’est de la grosse merde. Ils vont nous dégager, pour une connerie que les E auront fait. Parce qu’on aura répondu. On se croit à l’abri dans le système, moi je pense que c’est tout le contraire. Sans cette d’arrogance que vous avez tous, si vous aviez pas cherché ces inégalités, tout irait bien.
Tu soupires, blasé, regarde le plafond. Tu t’adresses même pas à elle, tu parles à cette administration corrompue, à leur déléguée pourrie ou à ces désirs noirs que tous gardent enfouis. Tu t’adresses à cette arrogance qu’aucune timidité ne saurait étouffer.
InvitéInvité
Sujet: Re: paradoxe. Dim 3 Aoû 2014 - 17:40
Stop m'agresser ça m'fait stresser
Ft. Silvester
« Enchanté. » Il ment. Le fait est là, tu le sais et tu le sens. Il en a conscience et c’est ça qui te blesse, cette impression de n’être qu’un fardeau. Pourquoi t’es-tu obstinée à lui parler ? Peut-être que ta présence l’ennuie, qu’il ne peut pas être tranquille puisque tu es là, recroquevillée sur toi-même, faible. Mais ton orgueil t’empêche d’agir, ton orgueil te dit qu’il ne faut pas montrer tes sentiments – cache ta douleur et exhibe ta fierté. « Non mais j’sais lire. »
Rire de sa part. Oh. Il sait lire, il se foutait simplement de ta gueule. Une once de colère s’insinue dans la gêne, s’étale comme une traînée de poudre. S’il y a bien quelque chose de plus gros que ton amour-propre, c’est ta susceptibilité. Une blague suffit, deux ça commence déjà à être vexant. Tu prends son sourire comme un couteau qui s’abat sur toi, comme une honte, une envie presque effrayante de s’enfuir en courant te chatouille les jambes.
Mais tu ne bouges pas, encore à cause de cette condescendance, de cette dignité. Mélangée à un soupçon de curiosité ; sa position face à la guerre des classes t’intéresse. Toi-même, tu es indécise. Certes, tu portes le symbole des A, l’emblème de la fierté du pensionnat. Certes, tu es toi-même un génie, tu pourrais gagner à une bataille intellectuelle contre à peu près n’importe quel être entièrement humain. Mais devoir se battre contre les autres, sous prétexte que cela amuse le Ranker… C’est quelque chose qui, d’un côté, t’échappe.
Même si tu « vénères » la classe S, même si tu meurs d’envie de rejoindre l’élite, de te pavaner à leurs côtés et de te sentir supérieure, il te manque cette haine, ce dédain envers les autres classes. Tu ne juges pas par symbole, tu juges au cas par cas. C’est cette façon de penser qui t’as conduit à remettre en question la plupart de tes principes. Tu ne sais même plus comment réfléchir, sous quel angle voir le problème. « J’suis contre ces conneries de RED. Les E seront peut-être pas dégagés parce que ce sont des dangers, mais les A ? Les B ? Les C ? Nous on est un minimum éduqués, on maîtrise un minimum. Il va se passer quoi si nous on fait une connerie ? Pas d’heures de colles, nan, ça c’est de la grosse merde Ils vont nous dégager, pour une connerie que les E auront fait. Parce qu’on aura répondu. On se croit à l’abri dans le système, moi je pense que c’est tout le contraire. Sans cette putain d’arrogance que vous avez tous, si vous aviez pas cherché ces inégalités, tout irait bien. »
La douceur de l’innocence qui s’envole ; la naïveté disparaît. Au fur et à mesure qu’il parle, tu prends conscience de la véracité de ses propos, tu te rends tout simplement compte que la majeur partie de ses paroles sont justes. Tête redressée, tu réfléchis intensément. Tu cherches la source, la cause de tout ça. Le gros problème ; l’invincible tourmenteur de Prismver. La réponse est pourtant évidente, le Ranker est la base de tout ça. Mais plus généralement, tous les élèves. Tous ceux qui sont nés pour s’affronter, tous ceux qui prennent du plaisir à provoquer cette guerre des classes. L’élève est le commencement, un commencement qui continue de plus en plus violemment.
Tu finis par ouvrir la bouche, stupide ignorante de la réalité. Tu fais comme si tu ne voyais pas, comme si tu n’avais pas la sensation d’être de trop dans cet endroit. « C’est un système qui peut s’apparenter à la Guerre Froide. Les Etats-Unis contre l’URSS. Ici, on a plutôt les A contre les E. Il est facile de placer les autres classes ; elles forment le reste du monde, ceux qui se pissent dessus à l’idée d’un véritable affrontement ; un direct, je veux dire. Légère pause, tu reprends ta respiration, enfonces le couteau dans la plaie. C’est ça qu’ils veulent, les S. Une vraie guerre, voire même une apocalypse. Non, j’exagère. Mais leur objectif, c’est d’accentuer les tensions, de pousser les élèves à se battre de plus en plus ouvertement. »
Tu énonces inutilement les faits. Ils sont là, présents, évidents même. Mais tu poursuis, tu refuses de t’arrêter en si bon chemin ; la réponse viendra peut-être ? « Si on part sur ce principe-là, à coup sûr ça fait des ravages. Mais on est pas tous responsables. Le pensionnat entier n’est pas pour la guerre des classes ; je dis pas que j’en suis pas, mais y en a d’autre dans ton cas. En ce qui concerne l’arrogance… Si t’étais pas comme t’es, tu serais comme tout le monde. Mets-toi à leur place, imagine une seule seconde ; proches de l’élite, proches de la victoire. A l’opposé de l’éventail de Prismver. Au fond, les A et les E sont pareils. Au fond, c’est comme le système du monde entier. T’y peux rien, y en a en bas et d’autres en haut. Certains sont nés en bas, d’autres en haut. Mais la plupart l’ont pas choisi. Tu ris. Si pour être acceptée dans les écoles normales il avait fallu que tu renonces à toutes ces migraines, à ce savoir absolu qui te donne l’impression d’avoir tout vécu… Tu dirais oui sans hésiter. Juste pour avoir un peu plus d’amis, en quelque sorte. Faut penser à ça, avant d’insulter tout le monde. »
Tu lui diras pas ce que t’es. Tu lui donneras pas ta position. Il s’en fout et toi tu le sais. Peut-être qu’il sent ton orgueil, peut-être qu’il a conscience que t’es, comme beaucoup d’autres, une connasse fière d’elle, une fille qui s’en fout des E et qui se sent supérieure. Mais tu peux pas t’en empêcher, ça. Tu peux pas changer c’que t’es, t’es née avec cette sensation de puissance ; après tout, y a pas grand-monde qui possède une mémoire eidétique comme toi.
« Et puis tu peux arrêter de faire semblant, au fait. » Fais pas semblant d’apprécier, d’être enchanté. Parce que c’est encore plus blessant que si tu m’disais que tu peux pas m’saquer.
Contenu sponsorisé
Sujet: Re: paradoxe.
paradoxe.
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum