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 starstruck; Dino

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Anonymous
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MessageSujet: starstruck; Dino   starstruck; Dino 1400359500-clockSam 6 Sep 2014 - 1:22



starstruck

feat. Denver ♥
Go ahead, you know you want it  You'll have no other way, you just want to take us down


Starstruck by Santigold on Grooveshark

Fin d'après-midi banal.
Milo est complètement avachi sur son lit, et, les yeux fixés au plafond en bois de la pièce, observe dans un silence quasi-religieux les multiples particules de poussières réfléchies par un rayon de soleil timide perçant à travers les rideaux. Il admire leur danse lente et monotone d'un air absent, et un soupir fatigué s'échappe d'entre ses lèvres entre-ouvertes. Milo, depuis qu'il est arrivé à Prismver, il s'emmerde. Il a arrêté de compter le nombre de jours qu'il a déjà passé sur l'île, parce que ça le déprime. Aussi parce que ça lui rappelle constamment, comme une claque dans la gueule, ce qu'il a laissé derrière, persuadé qu'il faisait le bon choix. Et finalement, cette certitude est devenu un questionnement récurrent, qui le bouffe peu à peu, lentement, insidieusement.
Parce que Milo, il est en manque de son ancienne vie. Les rues bigarrées et constamment bondées de Londres, bruissantes des sons et des clameurs de ses habitants, s'enfuient de son esprit à une vitesse terrifiante, et même le sourire contagieux de Travis et le regard lumineux de Sim se ternissent, se flétrissent, s'altèrent progressivement dans chacun de ses souvenirs. Milo, il court après des fragments de son existence qui lui échappent, et il ressent toujours cette profonde impuissance qui l'emprisonne, l'abandonne enchaîné et haletant, tête baissée en signe de reddition.
Ici, rien n'est comme il se l'était imaginé. Il est arrivé avec cette conception complètement idéalisée et utopique de l'établissement sensé l'accueillir, lui offrir enfin un nouveau foyer, et l'aider à contrôler son don qui, plus qu'autre chose, lui pourrit continuellement la vie depuis qu'il s'est totalement éveillé, et c'est face à un conflit intérieur déchirant l'école même qu'il se retrouve finalement confronté. Milo, il refuse automatiquement d'y faire face, de prendre un quelconque parti, parce qu'il ressent bien au fond de lui que ce combat n'est pas le sien.
Il ne possède ni les idéaux, ni les convictions nécessaires pour lutter.
Il ne se battra pas pour l'avenir d'un endroit qui a plongé le sien dans l'incertitude.
Milo, il se contente de n'être qu'un spectateur anonyme et silencieux de plus. Définitivement, c'est ce qui lui convient le mieux, d'être lâche.

Milo, il se sent une nouvelle fois incomplet, et il se demande parfois, un peu désabusé, s'il est destiné à rester ainsi éternellement ; et c'est depuis quelques jours maintenant qu'un visage familier vient aussitôt se coller sur sa rétine, comme une réponse narquoise  formulée par son propre cerveau, et à cet instant précis, Milo ferme hermétiquement son esprit et tente de songer à autre chose.
Malheureusement, c'est certainement pas aussi simple, et ses pensées, comme mues par une force extérieure indépendante de sa volonté, reprennent leur ascension inexorable vers cette personne même qu'il souhaiterait oublier ne serait-ce qu'un instant.
Dino, avec son nom improbable et sa tronche qui l'est encore plus, il est entré dans sa vie un peu par hasard, et franchement quand il repense aux circonstances, ça lui donne presque envie de ricaner. De toute évidence, il n'y a qu'un type comme lui pour l'aborder bourré, le molestant presque pour obtenir son nom après lui avoir donné le sien, et même avec la faible probabilité de le recroiser ensuite dans la même semaine, ils se rentrent quand même dedans une nouvelle fois quand l'un sort de la laverie alors que l'autre y rentre, Dino fuyant honteusement en l'ayant reconnu, laissant un Milo complètement interloqué derrière lui. C'est évidemment quand Milo retourne dans son bungalow qu'il constate que durant la collision, leurs vêtements se sont éparpillés, mélangés, et qu'il est à présent l'heureux possesseur d'une paire de calbut inconnu (et de mauvais goût) rouge à cœurs jaunes.
À ce moment précis, il hésite sérieusement entre exploser de rire ou se frapper le front contre l'embrasure de la porte jusqu'à ce que mort s'en suive. Il opte, après réflexion, pour balancer le truc dans un coin de sa chambre, priant intérieurement pour que son propriétaire ne se rende pas compte de sa disparition.
On croirait presque à une de ces rencontres incongrues un peu mièvres dans ces films romantiques pour jeunes filles en fleur qu'affectionnaient les sœurs à l'orphelinat, et la réflexion le fait marrer.
Il rigole tout de suite beaucoup moins quand le dit-type tente de s'infiltrer discrètement (se ramassant à moitié par terre dans l'entreprise) dans sa chambre pour récupérer son bien, se justifiant tant bien que mal : « T'vois, c'est mon préféré, j'pouvais pas l'abandonner, le pauvre », alors qu'il se contente de le fixer, les sourcils arqués, attendant une explication digne de ce nom qui ne viendra jamais.
Milo n'hésite pas une seconde, et après l'avoir envoyé chier, « T'es sérieux à te ramener chez moi comme ça pour récupérer ton slibard moche connard ? », le fout à la porte. Cependant, quand Dino se retourne, caleçon à la main, pour le fixer quelques secondes avant de sortir et lui décoche un sourire en coin indescriptible, c'est Milo qui se fige et reste planté sur le perron, l'observant sans vraiment le voir se diriger vers son propre bungalow.
Milo ne sait pas de quelle manière interpréter ce regard rendu encore plus profond et énigmatique par les lentilles que Dino se plaît, de toute évidence, à porter, et c'est dérouté qu'il va s'effondrer sur son lit, écouteurs enfoncés dans les oreilles dans l'espoir d'oublier cette entrevue pour le moins... originale, sans se douter qu'ils vont se revoir quelques jours plus tard.
Dino l'aborde de nouveau alors que Milo, caché en retrait, mange tranquillement sans emmerder personne, perdu dans la contemplation du contenu peu ragoûtant de son plateau. Il lève les yeux et croise aussitôt son regard, et comprend avec fatalisme qu'il va difficilement pouvoir l'éviter à présent. Dino s'installe en face de lui comme si la table lui appartenait, et Milo soupire, le fixant avec l'espoir de le faire dégager.
« Alors, décidé à faire bonne impression pour une fois ? C'un peu tard, t'sais. »
De toutes les réactions possibles, Dino choisit de se marrer, et Milo, décontenancé, reste silencieux pendant que l'autre reprend son souffle.
« Ouais, on peut dire ça comme ça. », ricane-il, occultant volontairement sa réflexion, et pique un morceau de pain sur son plateau. « Un des rares trucs bouffables ici t'vois », qu'il explique quand Milo hausse les sourcils.
Ils discutent pendant une bonne heure après ça, et ratent tout deux une bonne partie de leurs cours. Dino pose les questions et Milo fournit les réponses, à contrecoeur au début, avant de se retrouver finalement happé par la conversation et d'oser questionner l'autre à son tour.
Au fur et à mesure qu'il en apprend plus sur lui, Milo décide de réviser son jugement. Dino n'est pas débile, juste un peu couillon. Mais, contrairement à ce qu'il pensait initialement, il n'est certainement pas le pire des connards mal-élevés du bahut (quoique). En fait, c'est même un gars plutôt sympa, et de toute façon, Milo, il a pas inventé l'eau chaude non plus, alors il se trouve finalement qu'ils s'entendent pas trop mal, et Milo en est sûrement le premier étonné. Il est d'autant plus surpris quand, alors que Dino se lève finalement pour aller rejoindre ses potes, il se penche vers lui et lui propose d'aller boire un verre à un nouveau bar, où il est apparemment employé, et qui selon lui, « gère un max » ou une connerie du genre.
Avant que son cerveau n'ai eu le temps de saisir totalement l'information, Milo a déjà accepté.

Milo, il réfléchit toujours beaucoup trop. Et une nouvelle fois, il ne peut s'empêcher d'analyser, décortiquer, d'examiner cette relation atypique qui s'est finalement créée entre eux, sans y trouver un quelconque raisonnement logique. Parce que, pour être totalement honnête, ils ne possèdent absolument rien en commun, excepté leurs origines. Tout, dans leur caractère comme dans leur manière de vivre, devraient les éloigner, les repousser, et pourtant contre toute attente, Milo se retrouve attiré par ce type étrange, et ça l'agace autant que ça le fascine.
Et en même temps qu'ils essayent de se comprendre et se rapprochent, Milo se cherche lui-même, sans réel succès.

Après quelques jours passés à traîner avec Dino, Milo remarque avec agacement et frustration que ce dernier est partout. Il a commencé à investir sa chambre, disséminant ci et-là certaines de ses fringues, et une fragrance particulière a également débuté à envahir la pièce, preuve des passages plus que réguliers du jeune homme dans sa piaule. Mais plus important, c'est dans son esprit même qu'il s'est comme creusé une place, et l'y déloger semble être devenu quasiment impossible. Milo, il se dit que c'est normal, après tout, il n'a jamais vraiment été habitué à avoir des potes, alors il se convainc que tout ça, c'est qu'une sorte de processus banal.
Sauf que Dino, il commence à tenter des choses. Au début, Milo, il ne relève pas, parce qu'il ne comprend pas. Parce qu' il ne veut pas comprendre. Il refuse catégoriquement de concevoir, d'assimiler, d'admettre, ce qui est en train de se passer, et d'avouer qu'il n'a aucune emprise sur la situation. Il lui en veut aussi, férocement. Parce que ce genre de trucs, c'est sensé le dégoûter. Parce qu'il a déjà perdu son meilleur ami de cette manière, par sa faute. Parce que les tentatives de drague foireuses de Dino devraient le déranger, l'amuser à la limite, pas provoquer en lui toute cette vague de questionnements, de curiosité et d'envie presque malsaine.
Parce que Dino n'a pas le droit de réveiller cette chose qui sommeillait jusqu'à présent au plus profond de lui. Cette anormalité grotesque qu'il avait réussi à enterrer, annihiler, sous une couche épaisse mais finalement ô combien fragile de faux-semblants, de mensonges et de haine, et qui a son contact s'est comme fissurée, disloquée, désagrégée pour laisser apparaître une vérité nue, laide, dégoûtante. Lui.

C'est peu après qu'il remarque que Dino, il est comme ça depuis le début. Et que lui, il a simplement été naïvement, stupidement, terriblement aveugle pendant tout ce temps.

Dino, il lui a envoyé un message en début de journée. Dino, il devrait arriver d'un moment à l'autre. Et Milo, il reste là, partagé entre empressement et appréhension.
Et quand il entre enfin, sans toquer sinon ça ne serait pas vraiment lui, l'atmosphère se charge d'un quelque chose d'électrique, et Milo frissonne.
Et il l'accueille, un peu essoufflé, parce que Dino putain, il possède quand même cette aura qui l'impressionne, l'intimiderait presque, même s'il refuserait catégoriquement de l'avouer à voix haute à qui que ce soit, et certainement pas à lui-même.
Parce qu'il peut pas s'empêcher d'admirer cette aisance qu'il possède, et cette façon qu'il a de paraître si totalement en accord avec lui-même quand Milo, c'est juste un masque de plâtre sale et craquelé de défauts qu'il trimballe au quotidien en guise de visage.
Milo, il commence peu à peu à ressentir tous ces non-dits et secrets qui flottent entre eux refaire surface, plus brutalement présents que jamais. Pour l'instant, il choisit de les ignorer, parce que c'est tellement moins contraignant, tellement plus simple et confortable.

Milo se lève, l'ombre d'un sourire sur ses lèvres.
« Hey. »

Milo cède.
Milo, il ne sait pas qu'il a déjà abandonné.
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MessageSujet: Re: starstruck; Dino   starstruck; Dino 1400359500-clockDim 21 Sep 2014 - 21:21




Starstruck



 
 
 
« Hey. »

Il n’avait pas plus d’inspiration en voyant ma gueule ? C’était presque vexant. Et assez délirant. Milo n’avait jamais eu une imagination débordante pour les salutations ou autre, même si je ne le connaissais pas depuis très longtemps, il ne fallait pas être con pour comprendre qu’un délire sur les salutations de merde, ce ne serait pas avec lui…J’ai donc opté pour un sourire en coin, un haussement de sourcil marqué et une remarque raciste.

« Hey le jaune. J’t’ai manqué au point que tu cours pour m’ouvrir ? »

Référence à son côté essoufflé. C’était amusant de l’emmerder. Même s’il ne réagissait pas de la meilleure manière qui soit. Bref. J’ai farfouillé ses cheveux d’une main pour qu’il ressembla bien plus à un caniche, posa les deux bières que j’avais ramené sur la commode à l’emplacement même où se trouvait un souvenir récent. J’avais la mémoire sélective je crois. Je me rappellerais toujours de ma tôlée monumentale pour récupérer le vêtement dans sa chambre. Vêtement échoué sur un coin de commode. Et j’étais le seul con à trébucher et à ne pas l’attraper en deux secondes. Je n’aurais jamais cru que j’en serai là. Pas que ce soit surprenant, Milo est sympathique sous ses abords de koala sauvage. Ouais, koala, il me fait penser à cet animal. Et le voir me foutre une mandale avec ses mots, ça avait un côté plutôt fascinant. Je ne savais pas exactement pourquoi j’avais continué de le faire chier - disons le franchement - tandis que j’aurais pu l’ignorer. Peut-être son masque constant. Ouais, c’est ça. Sa manie d’afficher une absence de liberté. C’était drôle de palper ce masque, et agaçant de ne pouvoir l’arracher.

Mon regard revint sur le propriétaire de la chambre, avec une clope entre les lèvres, prête à être allumée. Je faisais comme chez moi, depuis le temps que…Bah que c’était chez moi. Si, c’est une sorte de propriété maintenant qu’il y avait quelques affaires à moi, dont un cendrier et un autre briquet, cassé.

« J’ai apporté des bières, je me suis dit que ça te ferait desserrer les fesses. »

Je lui offris un nouveau sourire en coin, particulièrement amusé par mon sous-entendu, qu’il ne capterait pas ou bien il me surprendrait. Milo était aveugle, et j’étais partagé entre le désir d’en profiter, et l’envie de lui foutre une gifle pour qu’il enlève ce putain de bandeau qui lui brouillait la vue. Mais devrais-je réellement en avoir quelque chose à faire ? J’ai allumé la clope, aspira une bonne dose puis ouvris doucement les lèvres, silencieux, laissant la fumée s’échapper d’elle-même et se révéler sous la lumière extérieure. Je ne doutais pas, un Dino ne doutait jamais. Je voulais m’amuser, même si les débuts étaient plutôt drastiques avec Milo, il y avait toujours cet objectif d’enfoiré dans ma tête. Le mettre dans mon lit. Néanmoins, c’était creux, plus creux que d’habitude à mon goût. Fade presque. Comme si quelque chose clochait et je ne me lassais pas de Milo et de sa présence, au contraire, mais c’était creux. Et trop compliqué pour moi. Ne rien laisser paraître plutôt que de chercher, jouer au con semblait plus dans mes cordes.

Je me suis déchaussé pour m’asseoir en tailleur sur le lit, et mis le cendrier sur le drap. « Je suis crevé, truc de dingue, et toi ? » Je remis mes cheveux en place d’une main puis posa mon regard totalement noir dans le sien clair, pour le fixer sans rien dire. Entre jeu et réflexion, l’observer droit dans les yeux avait quelque chose d’intéressant et de particulier. Puis, j’ai pensé, et comme j’aimais penser qu’à des conneries j’ai étiré un vieux sourire pour mieux pointer d’un doigt tatoué l’une des bouteilles.

« J’ai zappé ma bouteille le jaune, tu me la passes ? » Je tendais déjà la main, certain qu’il ne me laisserait pas sans bouteille chez lui. Et j’ai continué : « Tu t’habitues à ta nouvelle vie maggle ? » Questions, trop de questions. Autant pour parler et combler le silence que pour savoir, par curiosité. J’étais pro-WIP, lui, il n’était rien du tout, perdu, toujours perdu, il donnait cette impression dans tout ce qu’il faisait je crois ; perdu. Alors oui, je m’intéressais à lui, oui. Et pour ma défense je sortirais qu’entre asiatiques, on se sert les coudes, même si je suis métisse.


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MessageSujet: Re: starstruck; Dino   starstruck; Dino 1400359500-clockSam 27 Sep 2014 - 19:39



starstruck

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« Hey le jaune. J’t’ai manqué au point que tu cours pour m’ouvrir ? »

Milo fronce les sourcils. Sourire moqueur scotché au visage, c'est Dino qui se ramène dans la pièce, et le salue comme à son habitude d'une remarque puant la fausse sympathie et l'ironie à plein nez. Milo en rougirait presque en l'écoutant, mais il est lointain et profondément enterré le temps où ce genre de réflexion légèrement humiliante pouvait lui tirer une quelconque réaction gênée ou honteuse. Alors, il se contente d'hausser les épaules et de laisser couler. Parce qu'avec Dino, il faut vite apprendre à ne pas être trop susceptible si on compte le fréquenter, ou, en l’occurrence, le supporter quand il impose de lui-même -comme ici- sa propre présence.
Cependant, quand Dino se permet d'ébouriffer ses cheveux de ce geste presque machinal et dédaigneux, Milo ne reste, -une fois n'est pas coutume- pas de marbre et une partie de lui trouve enfin la force de réagir. Ce n'est pas une question d'esthétique, ce genre de truc trivial lui passe complètement au dessus, mais c'est le sous-entendu formulé par ce mouvement anodin qui remue quelque chose en lui, comme une soudaine montée de bile incontrôlée. Le contact en lui-même n'a rien de dérangeant, mais le message qui semble résider derrière le perturbe.

J'suis pas ton putain d'jouet.

Milo écarte sa main d'un mouvement sec, et ses yeux s'écarquillent aussitôt quand il prend conscience de son geste. Il rétracte vivement son propre bras, et va enfoncer ses doigts se serrant silencieusement en poings dans les profondeurs de son sweat.
Milo inspire et expire rapidement, et son esprit s'éclaircit suffisamment pour retrouver en une poignée de secondes son flegme habituel. Ton détaché, visage éteint, regard vide et distant. Son masque est à présent parfaitement en place et ça a quelque chose de rassurant, de réconfortant, comme si tout était revenu à la normale, et que les pièces du puzzle qui le composent s'étaient imbriquées de nouveau.
Entre-temps, Dino s'est permis de poser deux bières sur la commode à côté de son lit, encombrée de papiers et de ses maigres possessions, et Milo l'observe silencieusement sortir une cigarette de sa poche et la coincer entre ses lèvres.

« J’ai apporté des bières, je me suis dit que ça te ferait desserrer les fesses. »

Milo hausse un sourcil vaguement intrigué face à sa remarque, et va s'adosser contre le mur derrière lui tout en soutenant le regard que lui envoie Dino avec un léger sourire, amusé.

« Pas sûr que ce soit le plus efficace mais merci j'suppose ? »

De toute manière, il voit pas trop pourquoi Dino souhaiterait un tel truc. Rectification. Il ne veut pas voir.

Un silence envahit lentement l'atmosphère, et Milo se contente d'observer les légères volutes de fumée produites par la cigarette que Dino a à présent allumée, un peu fasciné, et par mimétisme inconscient recherche dans sa propre poche son paquet pour en porter une à sa bouche tout en l'embrasant à son tour. Milo se tourne ensuite pour ouvrir sa fenêtre, et, coude contre le cadre, exhale nonchalamment sa bouffée de nicotine. Il aime fumer certes, mais l'odeur du tabac froid s'imprégnant sur ses draps le dérangera toujours. Alors, il prend à chaque fois des mesures radicales, et aère ensuite la chambre à grand renforts de courants d'air et d'aérosols divers et variés.

« Je suis crevé, truc de dingue, et toi ? »

La voix de Dino résonnant brusquement dans la pièce le fait sursauter, et Milo se retourne lentement, ses yeux naviguant entre les différents éléments constituant sa chambre, avant d'être emprisonnés par le regard sombre de Dino qui semble le clouer sur place. Dino qui s'est d'ailleurs à moitié affalé sur son lit comme s'il lui appartenait, cendrier à côté de ses pieds nus, et qui tente vainement de recoiffer la masse qui lui sert de cheveux.
Milo esquisse un sourire narquois qu'il efface aussitôt, et hausse les épaules.

« Pas vraiment, non. C'pas comme s'il y avait masse de trucs à faire ici. Et toi ç't'apprendra à teuffer tout l'temps. »

Milo qui se permet de donner des leçons alors qu'il a jamais été un modèle de vertu , il en rigolerait presque tiens. Mais si Dino préfère mettre son temps à un autre profit que dormir pour s'en plaindre ensuite, c'est pas son problème.

« J’ai zappé ma bouteille le jaune, tu me la passes ? »

Mais il se tait jamais ou bien ?

Dino le fixe une nouvelle fois de ce sourire couillon qui lui donne envie de lui faire avaler, et pas de la plus agréable des manières, et Milo lève les yeux au ciel, agacé, avant de lui balancer la dite bouteille d'un geste assuré, et de lui rétorquer :

« Ta gueule un peu, j'suis né à Londres putain. J'suis sûr que t'es plus jaune que moi le jap'. » Pause. « Faut renouveler ton stock de surnoms si tu veux pas que j'm'ennuie. »

« Tu t’habitues à ta nouvelle vie maggle ? »

C'est que ce type enchaîne les questions à une vitesse impressionnante. Une vraie mitraillette franchement. Milo en serait presque soufflé, et pourtant, c'est surtout un sentiment d'exaspération mélangé à une légère pointe d'anxiété qui l'étreint à l'entente de sa nouvelle interrogation. Milo, ça apparaît dès le début qu'il apprécie pas vraiment discuter, encore moins de lui. C'est même plutôt un miracle qu'il ne se soit pas fermé totalement hermétiquement quand Dino l'a abordé toutes ces premières fois-là, parce que ce type, c'était de l'excitation, de l'empressement, de l'assurance à l'état pur, qui suintait par tout les pores de sa peau, un étrange cocktail explosif complètement ingérable et épuisant. Parce que Milo, il n'est pas habitué à ce trop-plein d'émotions qui single et le gifle en pleine face sans qu'il puisse se défendre. Parce que Milo, c'est le contrôle de tout son être avant le reste.
Milo frissonne, et comme à chaque fois qu'une question devient moins vague et innocente et un peu trop personnelle, il bat en retraite. Son bras libre se crispe, et son autre main vient descendre ses manches, déjà descendues au maximum, pour recouvrir complètement ses doigts.
Parce que ses mains, c'est la craquelure immonde dans sa façade de plâtre immaculée, c'est la marque de son échec et son incompétence, c'est la preuve même qu'il n'a, au fond, absolument aucun contrôle sur sa vie, ses sentiments, et pire, ses actions.

« ...Oui. Non. J'sais pas. »

Milo inspire et reprend, d'un ton un peu plus assuré.

« En fait, j'pensais que cette école était sensée nous offrir un avenir, et très franchement à l'heure actuelle j'en vois aucun. J'suppose que j'suis juste déçu au fond. Parce que j'comprends un peu tard que la raison que j'avais de venir ici n'a pas lieu d'être. Que ma vie d'avant était ptêtre pas si mal, et que je regrette. »

Discours haché et dissolu qu'il termine dans une expiration lente.

Milo le fixe et tente un bref sourire.

« 'Fin, j'suis pas là pour faire pleurer dans les chaumières hein. C'qui est fait est fait. C'est pas comme si ça avait beaucoup d'importance maintenant. Faut juste que je tente d'me contrôler en évitant le paquet de gens chelous d'l'école et je me casse le plus vite possible d'ici. C'est définitivement pas l'endroit que je recherchais. »

Milo s'avance ensuite pour récupérer sa bière et après l'avoir ouverte, en avale une gorgée. Hors de question de s'appesantir sur ses états d'âme, la conversation s'aventure sur un sentier dangereux et il aime pas ça.
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