Colours... Everywhere !

15 jours. 15 putains de jours sans dormir. Il aurait trouvé ça impressionnant si ça ne faisait pas de lui une véritable loque. Il avait bien cru s'endormir en cours. Quelques secondes. Et puis sa tête était partie... en avant. Sur le foutu bureau. Boum. Réveil instantané. Regards moqueurs, y compris du prof, tant la situation était cocasse. Il ne pouvait pas leur en vouloir. Lui-même avait eu envie de se marrer après coup.
Heureusement ce soir il y a avait une Jim's. Il avait fini par être un habitué. Pour l'ambiance ? En partie. C'était surtout l'endroit où il savait qu'il obtiendrait le cocktail le plus fort entre débauche d'énergie physique, substances plus ou moins légales et détente. Et ça, c'était bon pour dormir.
Il passa à son bungalow et prit une longue douche où il manqua de se casser la gueule plusieurs fois. Il s'habilla avec ce qui lui restait de fringues potables pour une soirée, la quasi totalité de sa garde-robe étant sale ou trop abîmée. Tentez de faire une lessive quand vous titubez à cause de la fatigue, vous verrez si c'est facile. Bref. Il attrapa une sacoche en cuir dans laquelle il avait déjà entreposé quelques affaire indispensables à une soirée qui se respecte et se dirigea tout droit vers le lieu de la fête. Pas besoin de s'organiser via LMS avec d'autres fêtards. Ce qu'il aimait par dessus tout pendant les Jim's, c'était de passer d'inconnus en inconnus, sans savoir ce qu'il faisait ou ce qu'il consommait. D'être paumé comme d'habitude quoi. Sauf que là c'était carrément plus sympa.
Il arriva tellement tôt qu'on distinguait encore les rayons du soleil. Qu'importe, les videurs et leurs plateaux de verres à shots étaient déjà prêts. Personne ne rentre ou ne sort indemne d'une Jim's. Il se plia au rituel sans sourciller et avança. Quasiment personne évidemment. C'était pas comme s'il avait prévu de faire grand chose avant la fête. Il finit par trouver un mur contre lequel était entreposé tout un tas de caisses. Sûrement du matériel pour l'acte final de la soirée, le reste étant déjà installé. Au moins il ne serait pas dans le passage. Il grimpa donc sur le mur et s'installa sur les caisses. Vu le temps qu'il lui restait, il reprit sa lecture d'un roman policier commencé quelques jours plus tôt, l'histoire d'un tueur surnommé "l'Epouvantail". Les polars, c'était bien pour se maintenir sous tension. Puis, alors que la soirée commençait, et comme d'habitude avant une Jim's, il commença par se rouler un bon petit joint. Il l'alluma en se disant que quand même, ce coin était étrangement beau avant que le chaos le plus total ne vienne l'envahir. Il laissa lentement la fumée envahir sa bouche, sa gorge, descendre dans ses poumons et chasser l'air, puis souffla lentement. Il était bien.

Il se rendit compte qu'il s'était endormi quand un fumigène mal lancé eut le mauvais goût de venir échouer sous son nez. Complètement perdu, il battit des bras et des jambes, perdit l'équilibre, et tomba de l'autre côté du mur avec l'odieux engin. D'un geste rageur, il saisit l'arme du crime et la renvoya à l'expéditeur. Ou pas. Il s'en foutait un peu en fait. Il toussa un peu et commença à reprendre ses esprits. La soirée battait son plein. Parfait ! S'il se débrouillait bien il réussirait peut être à dormir une ou deux heures de plus cette nuit.
Il prit alors conscience des gens autour de lui, son attention se focalisant sur un jeune homme et une jeune demoiselle qui semblaient être dans une discussion bien personnelle, puisque la main du jeune homme était fermement serrée autour de l'auguste fessier de la dite charmante demoiselle. Le jeune homme se retourna dans sa direction. Gary n'était pas sûr d'être la cible de son regard, mais immédiatement, fut saisi d'un doute : était-il possible que son incorrigible maladresse ait rompu un de ces moments d'intensité émotionnelle que les jeunes âmes pourchassent, parfois des siècles, en vain ? Etait-il le bourreau inconscient des germes naissants d'une relation qui s'apprêtait à éblouir les générations présentes et futures ? Ah ! Il ne pouvait se le permettre !
Et puis c'était super gênant quoi.
Il s'empara alors prestement d'une des flasques qu'il conservait dans sa sacoche. A l'intérieur ? Un simple cocktail à base d'alcool et de fruits. Un basique pour Gary. Il tendit alors victorieusement la flasque au garçon qui lui faisait face, avec un grand sourire.

- "Tiens mon gars, c'est pour toi, éclate-toi bien !"

Il se saisit alors d'une deuxième flasque, parfaitement identique, et but une bonne rasade de rhum/pamplemousse. Sa mission était accomplie, il avait dissipé le trouble de son arrivée fracassante !... Plus jamais il se laisserait dormir avant une Jim's, il passait trop pour un con.
Il se dépêcha de disparaître du champ de vision du petit couple. Il avait soif. Il pénétra dans le gymnase, ignorant la musique, les lumières, et les étudiants qui dansaient plus ou moins bien tout en étant plus ou moins ivres pour arriver droit au bar. Oh, il avait largement de quoi boire pour la soirée sur lui. Mais pas de glaçons. Il prit donc une margarita bien fraîche et observa autour de lui. Okay, c'était bien une Jim's. Il était trois heure du mat' et les gens bougeaient dans tous les sens comme s'ils venaient de commencer la soirée. Bien.
Il regagna tranquillement l'extérieur en vidant d'un trait son verre, et la flasque entamée plus tôt aussi. Il s'installa dans l'herbe et décida d'essayer son petit plaisir du moment : le gaz hilarant. Contrairement à l'hélium distribué à l'entrée, ce gaz avait de véritables propriétés hilarantes et hallucinogènes. Et contrairement à beaucoup de substances qui circulaient ici, l'effet ne durait que deux minutes et n'était pas aggravé par l'alcool. Et ça, c'était bien.
Il lui fallait juste une dose pour se mettre définitivement dans l'ambiance. Il remplit un ballon de gaz grâce à un siphon à Chantilly et le respira calmement. Il finit par perdre le contrôle de sa respiration et sentit sa tête partir en arrière, comme s'il s'était pris une balle dans la tête. Et il les vit. Les couleurs. Il n'avait aucune idée de ce qu'il foutait là. Et ça lui faisait un bien fou.

Colours everywhere

Ça faisait un moment que Natascha était à la Jim's, les heures avaient passé à une rapidité plutôt impressionnante. Il faut dire que son début de soirée avait commencé sur les chapeaux de roues, avec la rencontre de Stanley. Quelques cachetons plus tard et de nombreux shooter dans le sang, ils étaient allés chacun de leur côté et elle ne sait pas ce qu'il était devenu. Peu importe, il lui fallait maintenant continuer sa soirée. Elle commença par retrouver quelques connaissances, histoire de partager quelques anecdotes et de se tenir au courant de ce qui se passe en ce moment à Prismver. C'est très important pour la polonaise tout ça, sinon on se retrouve vite largué.

Et elle vogue de groupe en groupe, elle ne s'attarde jamais longtemps Natascha. Elle sourit à beaucoup de gens, elle fait beaucoup de gestes de la main, mais elle ne s'arrête que très rarement. Non pas qu'elle n'ait pas envie, mais le but d'une soirée n'est-elle pas d'échanger avec un maximum de personnes ? Sinon elle ferait ce qu'elle fait tous les jours, elle irait discuter avec les filles du cheerleading et resterait avec elles. Non, la polonaise n'est pas là pour ça.

Et puis vient le moment d'une pause cigarette. Natascha elle tire une blonde de son sac à main, et cherche des yeux un endroit où la fumer tranquillement. Un coin d'herbe sans personne, parfait. Elle va pouvoir s'asseoir et souffler quelques minutes. Se retrouver seule dans le noir, c'est ce qu'elle préfère la polonaise. Mais rapidement, elle détecte quelqu'un allongé et soupire. Tant pis, ce ne sera pas pour le moment.

Elle s'approche du garçon et s'assoit à côté de lui. Il a l'air jeté, elle remarque sa flasque et un ballon, sans doute rempli de gaz au préalable. Il n'a même pas l'air de se rendre compte qu'une présence féminine vient de faire son apparition. Elle allume sa cigarette en silence, ne disant rien pendant quelques minutes. La terminant, elle décide de se réveiller un peu et sort de son sac un autre cacheton. Il disparaît rapidement dans sa bouche, et tandis que la polonaise attend ses effets, elle décide de lancer la conversation.

"Ta tête me dit vaguement quelque chose. T'es pas en D ?"

C'est en le disant qu'elle se rend compte qu'effectivement, son visage lui dit quelque chose. Elle serait incapable de replacer le nom, l'année ou quoique ce soit. Mais dans tous les cas, elle ne s'en souvient pas en mal, et c'est déjà bon signe. Au moins, elle n'a pas affaire à un A ou un B. Et comme elle ne fréquente pas vraiment les C, il est plus fortement probable que cet individu appartienne aux D.

Elle le regarde en silence, attendant une quelconque réaction de sa part. Y en aura-t-il une au moins ? Elle se demande ce qui se passe dans sa tête, Natascha. En tout cas ça a l'air plutôt génial, vu les expressions faciales qu'il a.