J’avais préféré ne pas en parler aux gars. Me faire ma propre opinion, voir par moi-même ce qu’il en était. Mes meilleurs amis disaient que Gabriel était un pourri, et je voulais bien les croire, même si je me fichais pas mal de RTP. Et puis, il y avait eu mon nom, écrit en toute lettre dans son interview. Yeux baissés sur mon écran, je descendais les escaliers en relisant ces quelques lignes qui, pour être honnête, m’intriguaient.
« J'avais beaucoup d'admiration pour leur chef, Heath D. Ackland. J'appréciais sa présence d'esprit, son art oratoire. J'avais vraiment eu l'impression qu'au-delà de nos différends, il savait où il allait. »
Une inspiration, je relevais les yeux, troublé. Ca me faisait toujours bizarre de lire noir sur blanc que j’avais été un chef, que j’avait été important. Et je ne pouvais que le croire quand je regardais autour de moi: si on ne m’adressait pas la parole, je captais tout de même l’attention. De tous. Tous savaient qui j’étais. Qui j’avais été. Quand à moi, j’avais toujours du mal à assumer une situation pour laquelle je n’avais aucun souvenir, ni son, ni image, ni ressentis. Ah, si, le ressenti. C’était peut-être cette chose qui m’avait poussé à lire les trois interviews. A poser des questions à Joach et Gauitier. A lire les commentaires des lecteurs, associer un clan ou une tendance aux gens qui m’entouraient. On était tous au milieu de cette guerre, c’était notre quotidien, impossible de l’ignorer. Surtout pas avec tout ces E dans ma classe qui avaient tendance à me regarder d’un oeil mauvais ou déçu. J’avais eu un rôle dans tout ça, et pas des moindres, et on avait beau m’avoir enlevé ce vécu, quelque chose en moi continuait de vouloir s’impliquer.
Peut-être qu’il restait une petite étincelle, vacillant entre mon désir de l’éteindre et la possibilité de redevenir le brasier qu’elle avait été.
Quoi qu’il en soit c’était elle qui menait mes pas à la cafétéria. Elle, et peut-être aussi mon égo curieux. Je n’avais pas été insensible aux mots de Gabriel. C’était peut-être l’un de mes défauts: j’étais un Renard qui appréciait qu’on le caresse dans le sens du poil. Il fallait dire les choses comme elles étaient: j’avais un égo assez monstrueux. Mais c’était aussi lui qui m’avait probablement donné la force d’être un leader, et visiblement un bon leader. Même si j’en doutais toujours, quelque part en moi. C’est qu’à côté de ça, j’étais un grand égoïste diablement flemmard. J’avais vraiment dû passer quatre années horribles en E pour consacrer la cinquième à un tel « combat ». Et c’est bien pour ça que je ne rejoignais pas mes meilleurs amis aujourd’hui: je n’étais plus concerné. J’étais en B, j’avais de bonnes notes, des amis, une copine, un don génial. J’avais tout pour être heureux, et franchement, la flemme de bouger mon derrière pour quoi que ce soit. Je savais que les choses ne tournaient pas rond. Que le système était merdique, qu’il était inadmissible que des élèves soient traîtés comme l’étaient les E.
Mais, comme beaucoup trop de gens, je ne pouvais m’empêcher de me demander: « pourquoi moi ? » Pourquoi j’irais me battre pour des inconnus, moi le solitaire, moi qui n’aimait globalement pas les gens. Moi qui n’était même plus concerné. Le combat de Joach et Gautier était admirable, encore plus en sachant qu’ils étaient en B. Mais c’était à mon goût trop d’implication pour pas grand chose. J’étais trop feignant.
Trop feignant, mais toujours, quelque part au fond de moi, indigné.
▬ Salut.
Porte-monnaie en main, je sortais une pièce pour me payer un café. Gabriel était là, et non, je ne m'étais pas attardé à lui offrir une poignée de main. Etre intrigué par ce qu'il pouvait potentiellement me dire ne signifiait pas que j'avais l'intention d'être son pote. Parce-que même si je n'épousais pas automatiquement les querelles de mes amis, je restais méfiant envers leurs ennemis. Surtout quand ceux-ci étaient réputés pour être manipulateurs. Et même au delà de ça, je ne pensais pas que nous puissions avoir de quelconques affinités: moi qui jugeait très vite les gens, j'avais déja un gros problème de base avec son côté "conservateur" alors que j'avais moi-même un grand amour pour l'évolution, le changement, et oui, ce petit fantasme de révolutions qui ne me quitterait probablement pas.
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Sujet: Re: Figures. PV Dim 28 Sep 2014 - 22:50
Figures {Fe Heath}.
La nuit à Prismver. Comme partout à travers le monde, la nuit guidait les fascinations spirituelles, encadraient les dépravations et autres débauches, qu’elles fussent licites ou illicites. Propices aux nombreux trafics, Gabriel A. Oswald connaissait très bien le Royaume de la Nuit, bien qu’il y allait très peu. C’était le genre de type à observer de loin, à écouter les bruits de couloirs, à espionner les autres sans jamais se mouiller lui-même dans quelconque dépravation. Tout ceci existait bel et bien, mais les tabous rendaient les choses accessibles uniquement aux initiés. À ceux qui goûtaient au plaisir pervers d’une nuit brûlante d’adrénaline, de dangers, et d’interdits. « Un chèque de 8 000 £ provenant d’un compte off-shore de mon père. Pour notre commission, c’est largement assez. » Avec un petit sourire hypocrite, le jeune garçon tendit une enveloppe serrée dans sa pince gantée de cuir.
Le temps avait passé. La saison estivale était terminée. Il recommençait à faire froid. Une petite chemise, un gilet sans manches, une canne au manche doré, de grosses lunettes de circonstances. La lune était le seul éclairage et ses rayons traversaient les feuillages des arbres du parc. « Je préfère te prévenir. Si cette info’ fuite, je détruis ta vie, je coule tout, et je fais en sorte que tu passes dix bonnes années en prison. N’est-ce pas la recette du trafic de drogues ? » Satisfait de lui-même, l’échange s’arrêta là. La silhouette disparut dans les ténèbres. Tout se mettait en place.
Dès le lendemain, Gabriel Oswald participait aux cours comme s’il ne s’était rien passé. On ne voyait pas ses cernes, qu’il maquillait habilement avec du fond de teint. Quelque peu fatigué, il paraissait aussi rayonnant que d’habitude, malgré des interventions plus rares en cours. Surpris du LMS reçu par Heath D. Ackland, il s’activait plus ou moins à défendre corps et âme sa tribune au sein du journal de Prismver. On ne l’avait jamais autant vu monopoliser l’espace médiatique. L’ambiance se dégradait au sein de l’établissement, et si le garçon profitait de son idylle avec Nathan, c’était surtout pour se faire plus petit durant tout le mois de septembre. Il voulait plus que jamais éviter un nouveau scandale. Être accusé de l’amnésie de l’ancien leader de RED lui avait donné mauvaise presse. Brillamment populaire, il sentait bien que son engagement au sein du RTP le rendait particulièrement vulnérable. On détruisait son image, parfois à raison, parfois à tort. Et sortir avec Nathan C. Richardson n’avait peut-être pas été la meilleure option. Pour une raison étrange, toutefois, il ne voulait pas le quitter, il ne voulait pas l’abandonner.
Peu importe, la sonnerie de quatre heures retentit. Le britannique repensa au rendez-vous posé par son ancien ennemi. À ses yeux, Heath était un ennemi. Un titre tout-à-fait honorable que seul lui pouvait comprendre. Oui, un ennemi, à ses yeux, ce n’était pas un déchet, pas un sous-homme comme il tendait à appeler ses adversaires. Un ennemi devait être loyal, honnête, dévoué, droit dans ses bottes, et buté dans ses convictions. À la différence de Gautier, Gabriel avait beaucoup de respect pour Heath, aussi étonnant que cela puisse paraître. Malheureusement, une guerre se devait d’être une guerre. Un conflit se devait d’être un conflit. Cela faisait quelques semaines qu’il y réfléchissait déjà, mais l’amnésie d’Ackland allait être une bonne occasion de recoller les morceaux. Le jeune homme ne voulait pas lui causer du tort, il voulait simplement lancer une amarre dans son cercle social. Pas l’avoir sous son emprise, avec sa personnalité, c’était impossible, mais avoir une place dans son cercle social pour rester un observateur actif.
Il allait être difficile de sympathiser avec lui comme si de rien n’était, et de là naquit l’idée d’une vieille amitié… Enfouie par les querelles d’une guerre. La Guerre des Classes. Vêtu d’une petite marinière, pantalon bleu marine, Converse roses, le style vestimentaire de Gabriel était assez différent de ce à quoi il était habitué. Un effort pour paraître décontracté aux yeux d’Heath ? Peut-être. Mais ce n’était pas assez flagrant. « Coucou ! » Dit-il avec entrain, en agitant son bras droit pour le saluer de loin.
Déposant une pièce sur le plateau de son interlocuteur, il en glissa une aussi pour que la machine lui serve du thé. Un thé au caramel, pour changer. « T’inquiètes, je paie la consommation. ». Il lui proposa une table, ne chercha pas à lui serrer la main, et se cala confortablement dans le siège, sans chichi ou autres révérences hypocrites. « Woah… Cela faisait vraiment un bail quand même. La dernière fois qu’on s’est vus, c’était le 24 août il me semble ! Après une rencontre chez le directeur. Ça changeait du cadre habituel cela dit. » Regardant sa montre Swatch bleu cyan, il prit une grande inspiration. « Comme je te le disais, j’ai été surpris que tu veuilles me reparler. J’étais certain qu’on t’avait brossé un portrait de moi… des plus exécrables, qui suffirait à condamner à jamais notre relation à tes yeux. Quoi que… c’est peut-être le cas, je ne sais pas. En tous cas, j’ai vraiment été surpris, agréablement surpris. »
Il regarda ses yeux, sans le mettre mal-à-l’aise. Sans doute y rajoutait-il un peu de son pouvoir pour alléger l’ambiance, pour le détendre, pour le mettre à l’aise. « Et… ça va… ? Je veux dire. Avec tout ce qui s’est passé dans ta vie, j’espère que tu tiens le coup. »
Il hait les marinières. Il a déja envie d’se barrer. Dans le dos de Gabriel, il lève les yeux au ciel, se demande ce qu’il fiche ici. Mais on lui a payé le café. Et puis, il le sait, il peut pas juger un mec parce-qu’il porte une marinière. ...Si. C’est pas l’genre de mec avec qui il s’entend, c’est statistiquement prouvé. Il pose son plateau, ne laisse rien paraître, ne fait pas non plus l’hypocrite. Il est simple, jette un oeil autour d’eux pour la forme en ôtant se veste en cuir qu’il laisse s’échouer sur le dossier de la chaise. Gabriel a prit un thé, forcément. Heath aime bien le thé, de temps en temps, avant de dormir. A côté de ça, c’est café café café. Beaucoup trop de café. Mais faut tenir toute la nuit sur le pc et toute la journée en cours.
▬ Cela faisait vraiment un bail quand même.
Sûrement. Et il ne peut s’empêcher de remarquer la façon familière avec laquelle il vient de dire ça.
▬ La dernière fois qu’on s’est vus, c’était le 24 août il me semble ! Après une rencontre chez le directeur. ▬ J’ai vu ça sur les Breaking News.
Il s’était pourtant promis de ne pas remonter les historiques des différents blogs. De ne pas trop retracer son propre chemin. Il avait décidé de vivre normalement, en faisant simplement une croix sur “l’ancien” lui. ... Il avait clairement foiré la chose. Trop curieux. Trop dans le besoin de contrôler l’intégralité de sa vie, passée présent et future.
▬ Ça changeait du cadre habituel cela dit.
Une oeillade. Il vide sa sucrette dans le café, touille avec la petite tige de plastique, silencieux.
▬ Comme je te le disais, j’ai été surpris que tu veuilles me reparler. J’étais certain qu’on t’avait brossé un portrait de moi… des plus exécrables ▬ C’est le cas. ▬ ... qui suffirait à condamner à jamais notre relation à tes yeux. Quoi que… c’est peut-être le cas, je ne sais pas.
Tête haute mais yeux plongés dans son café, Heath hausse une épaule, silencieux. En vérité il n’en sait rien. Oui, on lui a dit du mal de Gabriel. Forcément. Heath a pour frère spirituel Joach et pour amis proches Gautier, Anarchy, Pytha... RED, c’était plus qu’un parti, c’était eux, son clan à lui, leur amitié. La condition des rouges, c’était leur univers, leur environnement. ...Mais tout ça a quand même perdu beaucoup de signification désormais.
▬ J’me suis pas encore décidé., lâche t-il alors pour toute réponse, posant sa touillette. ▬ En tous cas, j’ai vraiment été surpris, agréablement surpris. ▬ Baaah moi aussi...
Il hausse les sourcils, cligne des yeux en se détendant, se mettant plus à l’aise sur sa chaise. Ca sert à rien d’être froid et désagréable, c’est complètement con dans le sens ou c’est lui qui lui a proposé le rendez-vous. Heath est un minimum ouvert dans sa démarche, autrement il ne l’aurait pas fait, lui qui a le don de ne se mêler de rien. Mais cette fois, ça le touche directement, et c’est bien la façon de procéder pour piquer l'intérêt d’Heath. Il n’accorde pas son intérêt à grand chose ou à grand monde, mais en revanche, quand il le fait, il ne fait pas semblant. Il s’y donne entièrement. C’est ainsi qu’il joue à peu de jeux et pratique peu d’activités mais y a toujours un niveau plus qu’honorable. Et c’est aussi de cette façon qu’il ne s’est impliqué que dans une seule chose à Prismver, à savoir rendre l’égalité pour tous, et y a été efficace. ... ou tout du moins, comme l’avait dit Gabriel dans son LMS, menaçant pour ses ennemis.
▬ Et… ça va… ? Je veux dire. Avec tout ce qui s’est passé dans ta vie, j’espère que tu tiens le coup.
Tout quoi ? Si il s’était passé des choses, il les avait oubliées, et depuis, ma foi, il a plutôt la belle vie.
▬ Bah écoute, depuis l’amnésie j’ai été à New-York, au Mexique, j’maîtrise bien mon don et j’ai même une copine alors franchement... , il laisse échapper un sourire, haussant les épaules. J’suis bien moins à plaindre que vous tous, avec toutes ces emmerdes...
Les insultes qui fusent dans tout les sens sur les réactions des lecteurs, les regards venimeux, les disputes, les bagarres, les représailles... La haine constante attisée de jour en jour. ... Tout ça pour quoi ?
▬ ... J’suis content d’être sorti de tout ça., avoue t-il, sincère.
Ca a beau l’intriguer, essentiellement parce-qu’il a peut-être été le déclencheur, il ne souhaite pas replonger dedans. Peut-être que, comme Etienne, sa place est en tant qu’observateur-actif. Un médiateur, un critique objectif. Objectif ? Non, il ne l’est pas. Même en tant que B, même en mettant ses meilleurs amis de côté, il n’aime pas ce système, cette injustice. Ca n’a pas de sens, il existe des solutions mais l’administration est bornée. Et, plus que tout, il hait ceux qui se complaisent dans cette injustice. Ceux qui profitent et ouvrent leur bouche.
De son côté, il profite, il ne peut pas le nier: il va en cours dans une belle salle, il mange à la cantine à une heure normale, assez rapidement. Les profs sont attentionnés, on lui donne des conseils, des exercices. Il progresse.
Mais à côté de ça, il donne ses cours à Anarchy, les a aussi proposé à Pytha. Parfois, il rate volontairement son passage au self pour manger avec eux. Il essai de les aider que ce soit à la maîtrise de leur don ou pour les cours généraux. Et, surtout, si on lui demandait entre perdre ses avantages pour restaurer l’égalité ou garder le système actuel, il n’hésiterai pas une seconde. Ce n’est peut-être qu’une question d’altruisme, sûrement même. Mais rien ne le blase plus que ces A qui ouvrent leur gueule pour rabaisser les autres. Et dire qu’il est blasé est important. Parce-qu’avant, il était révolté. Quelque chose s’est indéniablement brisé.
Confortablement installé au fond de sa chaise, une jambe en équerre sur l’autre, Heath étend un bras sur l’accoudoir et pose le coude sur le second, sa main venant caresser le bas de son visage. Il observe Gabriel un instant. Il est curieux. Intrigué. Mais également terriblement méfiant.
▬ Tu sais, je pense que c’est toi. Mon amnésie.
Il attrape son gobelet ou et boit une gorgée.
▬ Soyons clair, j’suis pas là pour te dire ça, pour te faire des reproches. Mais juste que tu sache ce que j’en pense. Même si je me fiche de qui me l’a fait et pourquoi, même si je le vis très bien et juge que c’était peut-être même plus une chance qu’un drame, j’préfère te le dire. J’ai aucune confiance en toi. Et je peux pas - et veux pas - le prouver, je sais même pas comment tu aurais fait, ou si quelqu’un l’a fait pour toi, mais voila ou j’en suis actuellement.
Il porte alors son regard ailleurs, observe autour de lui sans but. Il tenait à le dire, prouver que ce n’est pas parce-qu’il est ici qu’il est naïf ou dupe.
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Sujet: Re: Figures. PV Lun 29 Sep 2014 - 12:11
Figures {Fe Heath}.
Gabriel Oswald ne comprenait pas la démarche de son ancien ennemi. Pourquoi agissait-il en toute froideur, comme si c’était lui, Gabriel, qui avait proposé l’entrevue ? Les difficultés qui se dressaient sur son chemin allaient être beaucoup plus difficile à occire qu’il ne le pensait, mais le jeune homme n’insisterait pas si jamais Heath voulait partir. Au contraire. Il ne recherchait pas le contact, du moins plus maintenant. Alors il n’était pas envisageable de s’accrocher à son genou tel un roquet si celui-ci ne le voulait pas. Mais alors, pourquoi ? Quel intérêt d’une entrevue, si, de toute façon, on a déjà prévu de la clore en se montrant si fermé ? S’il avait conservé sa mémoire, ce comportement aurait pu être normal. Sauf que ce n’était pas le cas, bien au contraire.
« Si tu ne veux pas me parler, pourquoi tu m’as invité en fait ? » Lâcha-t-il avec une pointe d’agacement. Le britannique n’avait pas anticipé cet événement, par conséquent, qu’il dure ou qu’il cesse, cela ne changerait que très peu de choses à ses plans. Par surcroît, insister ou tenter de le manipuler serait beaucoup trop dangereux dans les circonstances présentes. Il demeurait beaucoup trop méfiant.
Le garçon prit une posture beaucoup moins chaleureuse qu’au début du rendez-vous. Il se rendait bien compte que cela ne fonctionnait pas, mais surtout, dans la tête d’un individu lambda, ceci apparaîtrait comme largement déplacé. Il n’était pas au courant de la vérité. De la fausse vérité qui sommeillait dans l’esprit de M. Oswald. Il ne put s’amuser de dessiner un petit sourire en coin lorsqu’Ackland aborda le sujet de l’amnésie. Tout allait pour le mieux, on dirait. Il n’avait même pas besoin de faire lui-même des sous-entendus. Il ignorait toutes ses motivations, il ignorait toutes ses volontés, qu’importe.
« Tu as raison de le penser, c’est parfaitement légitime. Je vais même être honnête avec toi, j’ai pris la responsabilité de ton amnésie auprès de Gautier Everfield, avant qu’il ne me frappe. J’ai fait ça pour éloigner RED du danger imminent que représente la Classe S. » Il prit une pause. Pour l’une des rares fois de sa vie, il ne faisait que dire la plus sincère vérité. « J’ai mené ma petite enquête. Tu étais de taille à ébranler les S, c’est la raison pour laquelle ils t’ont éliminé. Tu me crois ou pas, j’en ai rien à faire, sache-le. Mais il ne me manque plus qu’une preuve pour accuser S. Orest Koslowski ou, voire et Narcisse Jackson de ton amnésie. Je suis tout proche de découvrir la vérité, mon ami. » Gabriel insista particulièrement sur la dernière partie de la phrase.
Les motivations pour lesquelles il lui disait cela demeurèrent floues. Peut-être avait-il une sincère affection pour Heath ? Ou peut-être que tout simplement, il voulait l’aider à sa manière parce qu’il ressentait une infime part de culpabilité ? Non. Ce n’était pas du genre de Gabriel. Cela ne lui rapportait plus rien d’être soupçonné à présent, alors il était temps de faire tomber les masques.
« J’ai toujours eu une dette envers toi. C’est pour ça que j’ai éloigné tes amis de la vérité. Ils n’hésiteront pas à s’en prendre à toute votre coalition. Et bien que rien ne me fasse plus plaisir de voir RED couler, je ne peux pas faire l’impasse sur deux ans d’amitié auprès de toi. Autant je déteste plus que de raisons les gens qui t’entourent – et c’est réciproque – autant, vu tout ce que tu as perdu, je ne veux pas que tu deviennes malheureux. Tu ne comprends certainement pas pourquoi, c’est pas grave. Un jour, peut-être. Je ne tolère pas les agissements de la classe S, s’en prendre ainsi, s’en vergogne, comme des animaux, à des élèves… Cela me répugne. Mais je préfère ne pas te mentir, si ça n’avait pas été contre toi, je n’aurais pas réagi. » Buvant une gorgée de thé, il le trouva beaucoup trop sucré. Avec une mine grave, il ancra son regard dans celui d’Heath.
« Je ne te remercierai jamais assez d’avoir été la personne qui m’a poussé à dévoiler mon homosexualité. Bien que tu ne t’en souviennes pas… on a partagé bien des souvenirs. » Oswald baissa la tête. Il feignit la fatigue morale. Tout allait pour le mieux.
▬ Tu as raison de le penser, c’est parfaitement légitime.
Heath s’était attendu à cette réaction. Gabriel avait l’air d’être un mec intelligent, il avait compris que ça ne servirait à rien face à Heath de crier à l’innocence. Et puis, comme dit, c’était légitime, et le Bleu apprécia que Gabriel soit sur la même longueur d’onde que lui sur cette réflexion.
▬ Je vais même être honnête avec toi, j’ai pris la responsabilité de ton amnésie auprès de Gautier Everfield, avant qu’il ne me frappe. J’ai fait ça pour éloigner RED du danger imminent que représente la Classe S.
Heath se redressa sur sa chaise, fronçant les sourcils, plongeant dans Gabriel un oeil vif, mauvais et perplexe. Il n’aimait pas l’emploi de la formule “prise de responsabilité” venant de lui et concernant l’amnésie, et était désagréablement surpris par cette soit-disant stratégie pour protéger RED.
▬ Ca veut dire quoi ça. ▬ J’ai mené ma petite enquête. Tu étais de taille à ébranler les S, c’est la raison pour laquelle ils t’ont éliminé.
La mine toujours dure, Heath se laissa de nouveau tomber au fond de sa chaise. Il croisa les bras, fixant Gabriel sans que la perplexité et un certain trouble ne quitte ses pupilles. Il avait l’allure fermée, mais son regard happé par le A témoignait de toute son attention.
▬ Tu me crois ou pas, j’en ai rien à faire, sache-le. Mais il ne me manque plus qu’une preuve pour accuser S. Orest Koslowski ou, voire et Narcisse Jackson de ton amnésie. Je suis tout proche de découvrir la vérité, mon ami.
Heath grinça des dents sur les derniers mots, jetant son regard ailleurs dans une inspiration perplexe, bras toujours croisés. Orest et Narcisse, il ne savait rien d’eux, si ce n’est les débilités qu’ils lâchaient dans les commentaires des lecteurs. Heath n’avait pas eu à faire aux S depuis son amnésie, avait-ce été le cas avant ? Sa position dans RED le posait automatiquement en ennemi des S et du Ranker, et en effet, il était tout aussi probable que ce soit un S que Gabriel. Mais il lui semblait que les S étaient directs dans leurs actions, fiers de les revendiquer. Hors, l’amnésie était une manipulation, un coup bas, une stratégie faite dans l’ombre. Et ça, ça ressemblait bien plus à RTP et à ce que représentait Gabriel aux yeux d’Heath.
Ce dernier se rendit compte que son coeur était légèrement sérré. Il inspira de nouveau, rivant son regard noisettes de nouveau sur Gabriel.
▬ J’ai toujours eu une dette envers toi. C’est pour ça que j’ai éloigné tes amis de la vérité. Ils n’hésiteront pas à s’en prendre à toute votre coalition.
Deux pulsions cardiaques à peine ressenties. Il ignorait tout de cette dette, ne savait pas encore si il devait le croire ou non. Mais à ses mots, c’est automatiquement Joach qui apparût dans son esprit, et la peur qu’on s’en prenne à lui. Qu’on le rende également amnésique, qu’il l’oublie, ou qu’on s’en prenne à lui d’une autre façon. Grondement intérieur.
▬ Et bien que rien ne me fasse plus plaisir que de voir RED couler, je ne peux pas faire l’impasse sur deux ans d’amitié auprès de toi.
Heath roula sa langue dans sa joue, caractéristique de sa nervosité, et dévia de nouveau son regard ailleurs. C’était troublant. Ses amis haïssaient Gabriel, et même tout son être lui criait de se méfier. Mais pourtant, quelque chose en lui, une toute petite chose, accordait crédit à Gabriel. Et si c’était vrai ? Le trouble résidait dans le fait que ce serait bien son genre, à Heath. D’être à contre-courant. De fréquenter l’infréquentable. De faire ce à quoi on ne s’attendait pas, de surprendre.
D’être à part. Et la simple idée d’une amitié avec son ennemi avait quelque chose d’attrayant. De dangereusement attirant. Yeux rivés sur la table, réfléchissant, il finit par décroiser les bras pour boire une nouvelle gorgée. Il hocha la tête de gauche à droite en inspirant, haussant les sourcils regard dans le vide, un geste avouant qu’il était perdu.
▬ Autant je déteste plus que de raisons les gens qui t’entourent – et c’est réciproque – autant, vu tout ce que tu as perdu, je ne veux pas que tu deviennes malheureux.
Heath se passa nerveusement la main sur la bouche et cala son coude sur la table, bas du visage finalement prisonnier de sa large main. Nouveau regard.
▬ Tu ne comprends certainement pas pourquoi, c’est pas grave. Un jour, peut-être. Je ne tolère pas les agissements de la classe S, s’en prendre ainsi, s’en vergogne, comme des animaux, à des élèves… Cela me répugne. Mais je préfère ne pas te mentir, si ça n’avait pas été contre toi, je n’aurais pas réagi.
Combat intérieur. Le croire, ou non. Il ne devrait pas, il le savait: il n’était pas naïf, c’était son ancien ennemi et les gars le haïssaient. Mais quelle était cette chose qui le gangrenait, lui murmurant de le croire ? Etait-ce son don ? Son art de la manipulation ? Son inconscient qui le poussait à croire à la vérité ? Ou son insatiable attrait pour la stratégie, la réflexion, comme appelé par une partie d’échecs captivante contre Gabriel. Se laisser manipuler par lui pour entrer dans un jeu de rôles et de stratagèmes passionnants. L’attrait du duel de stratèges.
▬ Je ne te remercierai jamais assez d’avoir été la personne qui m’a poussé à dévoiler mon homosexualité. Bien que tu ne t’en souviennes pas… on a partagé bien des souvenirs. ▬ J’en ai rien à foutre des gens, Gab. Encore plus de leurs histoires de coeur ou de cul. J’écouterai même pas Gautier d’une oreille attentive si il me parlait de ses problèmes de coeur, j’suis nul à ça, ça m’intêresse pas et je suis tout sauf un bon conseiller. Mes amis savent que je suis pas celui à qui on peut parler de ses états d’âme.
En revanche, il était celui qui assumait tout et poussait les autres à faire de même, en effet. Si un homosexuel souffrait de ce secret, il lui dirait purement et simplement « Assume ce que t’es, les gens tu les emmerde, y’a personne en droit d’te juger. » Dans ce sens, Gabriel pouvait dire la vérité, Heath en était conscient. C’était peut-être vrai. Ce qu’il venait de dire à Gabriel était surtout un test, parce-qu’il était vrai qu’à part Joach, personne ne connaissait Heath comme une oreille attentive et concernée.
▬ Profiter de mon amnésie en faisant semblant d’être mon ami et accuser le principal autre suspect, soit les S, c’est la meilleur chose que tu puisse faire pour te mettre dans la poche celui que tu crains comme ennemi et en même temps laver tous soupçons sur toi.
Heath tapota la table du bout des doigts.
▬ Si j’étais à ta place et un bon manipulateur, c’est ce que je ferais. Joach est tout pour moi, donne moi une bonne raison de pas le croire quand il me dit que t’es mal intentionné envers moi.
Heath haussa les sourcils, attendant sa réponse, menton sur sa main et coude sur l’accoudoir, fixant Gabriel. Ses doigts continuaient de tapoter la table rapidement.
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Sujet: Re: Figures. PV Lun 29 Sep 2014 - 17:49
Figures {Fe Heath}.
Que les choses soient dites. Sans revers ni hypocrisie. Gabriel tenait à ne pas mentir dans ce qu’il disait à propos de l’amnésie, parce qu’il savait que le temps lui donnerait raison. Sans faire attention à sa macro-intervention, le jeune homme poursuivit son laïus. Il était très attentif à ses réactions, et bien qu’il restait sur la défensif, Heath paraissait submergé par ses propos. Arrivait-il à instiller le doute dans son esprit ? Oswald l’espérait. Il y tenait plus que tout. Ce devait être son pass-navigo vers la réussite, non pas de ses plans, mais de ses ambitions. Plus qu’un ennemi, il avait une fascination assez étonnante pour lui. Dans son esprit dérangé, peut-être pouvait-on assimiler cela à de l’ambition. Peu importe, Gabriel scindait le fil de ses pensées et le fil de ses paroles sans se perdre lui-même.
La réponse ne tarda pas. Froid, tranché, fermé, comme totalement insensible à son chantre. Non, ce n’était pas possible. Gabriel avait senti quelque chose, il avait senti un malaise, ou quelque chose qui s’en rapprochait. Un doute, ne serait-ce que l’espace d’une seconde. Une faille. Une faille dans laquelle il allait s’engouffrer. Il prit un sourire soulagé, un sourire honnête, presque comme s’il s’était attendu à cette réaction. Du bluff. Toujours, encore. Et il l’écouta déclamer sa première litanie.
« Ai-je dit que nous avions parlé de problèmes de cœur ? » Répliqua-t-il le plus naturellement du monde. Il le laissa poursuivre. Heath D. Ackland était d’une redoutable intelligence, c’est ce qui le fascinait. On ne pouvait pas l’endormir facilement. Alors pourquoi tenter de l’endormir ? Gabriel acquiesça, même quand il se fit traiter de manipulateur. « Non, je ne serais pas un bon manipulateur en employant cette stratégie. Tout simplement parce qu’avec toi, elle échouerait. » Mine sérieuse.
« Ne t’y méprends pas, Heath. Je suis manipulateur, tu as été le premier à le savoir. Je n’ai aucune conscience personnelle, je me fiche de l’existence de pratiquement tout le monde parce que j’ai un sérieux problème pour ressentir l’empathie. Tu l’as senti dès notre première rencontre, je vois que tu n’as rien perdu de ton intuition. » Gabriel releva la tête, toujours avec franchise, toujours sans fioritures. « Si j’étais un bon manipulateur, je me tiendrais éloigner de toi. On t’a beaucoup trop mis en garde sur moi, on t’a beaucoup trop parlé de moi. Comme tu le sais, on ne peut manipuler que des gens influençables. Tu n’es pas influençable, preuve en est avec RED. Ai-je essayé de te manipuler dans notre passé ? Oui, au début. Oui, quand tu as fondé RED, mais ça n’a jamais marché. Tu as toujours été là pour me rappeler à l’ordre, pour me dire quand j’allais trop loin. Fondamentalement, la manipulation n’est pas le mal, ce qui est mal, c’est ce qu’on en fait. »
Sans se démonter, le jeune homme prit une grande inspiration. Il était temps de poursuivre, il était temps de tout déballer.
« Par surcroît, je n’ai aucune raison de m’en prendre à toi. La pire chose qui pourrait arriver à ma formation, c’est te voir revenir. Admettons que j’ai le projet de te manipuler, que j’y parvienne par un effort surhumain, que tu t’en rendes compte. Ta première volonté serait de me le faire payer – à juste titre. Tu reviendrais dans la bataille, et je préfère que tu restes éloigné. Oui, c’est personnel et égoïste. Mais notre amitié, d’aussi loin que je m’en souvienne, a toujours été très peu conventionnelle. Elle mettait toujours la franchise au centre de tout. Tu as été au centre du carnage Leith Fleytcher, mon ex petit-ami dont j’ai appris le suicide il y a quelques jours. Nous étions ces gens qui n’avions pas besoin de beaucoup nous parler pour s’entendre, nous faisions partie de ces gens qui se voyaient une fois par mois, qui passaient des heures ensemble, puis qui laissaient le temps passer jusqu’à la prochaine fois, si tu vois ce que je veux dire. Hormis des moments où, lors des crises, nous soutenions l’autre. »
Il s’arrêta de parler. Oui, il parlait vraiment beaucoup. « Inutile de remuer le passé, je n’ai jamais eu la naïveté de croire que tout redeviendrait comme avant après ton amnésie. Et je n’ai pas la force de tout reconstruire. Je n’aurais plus qu’à souhaiter que tu recouvres un jour la mémoire. Mes soupçons vers Orest sont véridiques, je l’ai croisé le jour où tu as perdu la mémoire, quand nous sommes sortis du bureau du Directeur. C’était le seul S en activité à ce moment, avec Anshu. »
Gabriel le craignait réellement. Ou alors c’est ce qu’il voulait lui faire croire. Quoi qu’il en soit, Heath l’écoutait avec une attention qu’il avait du mal à cacher. Gabriel était cohérent, c’était un fait. Il lui semblait également détendu, et ma foi, sincère. Alors Heath ne faisait que redoubler de méfiance. Mais tout se tenait, même si il n’était pas d’accord avec lui: selon lui, la meilleure stratégie restait de faire d’Heath son allié. C’était encore plus efficace et plus vicieux que de rester loin. Plus dangereux aussi, il fallait le lui accorder. Et bien d’accord avec lui, Heath songea que si Gabriel tentaît effectivement de le manipuler... A vrai dire il ne savait pas ce qu’il pourrait faire. Heath n’était pas un violent ni un pourri, il n’aurait jamais l’intention de détruire Gabriel, quoi qu’il fasse. Mais il était certain qu’Heath haïssait par dessus tout qu’on le prenne pour un idiot et qu’on se fiche de lui. Parce-qu’il était bien des choses, mais il n’était pas stupide. Et Gabriel avait l’air d’en avoir conscience.
Heath l’écoutait, buvant calmement son café. Il nota dans un coin de sa tête cette histoire de carnage, d’un certain Leith Fleytcher qui se serait suicidé. Il n’en avait pas entendu parler, il n’avait rien vu sur les commentaires ou ailleurs. Peut-être raté, ou même oublié. Il gardait la chose en tête même décida de ne pas lui demander d’explications à ce propos, se préservant d’éventuels mensonges. il poserait des questions sur ce Fleytcher. Mais pas à Gabriel. Pas alors que c’est lui qui amenait ça dans la conversation, comme un cheveux sur la soupe. C’était poser une nouvelle pièce sur l’échiquier et Heath prit le parti de faire semblant de ne pas l’avoir vu afin que Gabriel ne puisse l’utiliser comme une arme.
La méfiance était réellement là, et forte. Heath n’était ni naïf ni influençable, et Gabriel était son ancien ennemi. Il aurait été fou de venir avec l’intention de boire ses paroles avec une totale crédulité. Néanmoins, il s’accordait l’éventualité de le croire, ou partiellement. Il y avait peut-être du vrai. Peut-être que tout l’était. Ou pas.
▬ ...nous faisions partie de ces gens qui se voyaient une fois par mois, qui passaient des heures ensemble, puis qui laissaient le temps passer jusqu’à la prochaine fois, si tu vois ce que je veux dire.
Yeux baissés sur son gobelet, Heath y faisait tourner son reste de café, attentif et concentré. Ca lui ressemblait, ce type de relation. ca lui ressemblait beaucoup trop.
▬ Hormis des moments où, lors des crises, nous soutenions l’autre.
Nouvelle donnée à ranger dans un compartiment à part. Gabriel poursuivi, acheva, et Heath termina son café avant de le reposer devant lui après quelques secondes de silence.
▬ Viens.
Il se leva, pris sa veste qu’il balança par dessus son épaule, son gobelet qu’il balança à la poubelle à quelques pas de là et, sans un mot de plus, se dirigea vers la sortie de la cafétéria.
Il avait envie de le croire. De plus en plus. Ne serait-ce que pour en savoir plus, ou pour tenter le diable. Heath avait tendance à jouer au con, à vivre dangereusement. A se mettre en mauvaise posture par simple plaisir d’avoir cette occupation qu’était de se sortir de là. C’était exactement ça. Il avait envie de jouer au con avec Gabriel. Envie qu’on lui reproche, envie qu’on le mette en garde. Curiosité de voir ce que cela pouvait créer, d’un côté comme de l’autre, et en lui-même. Voir où cela pouvait le mener. Curiosité.
Ce n’était pour autant pas gagné pour Gabriel, loin de là. Une cigarette glissée entre ses lèvres, debout sur le perron de l’école et sous le préau, Heath embrasa sa cigarette tandis qu’à quelques mètres de lui, il pleuvait.
▬ Tu parles des crises qu’on a traversé. Dis-m’en plus.
Codé par Liixi4
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Sujet: Re: Figures. PV Mar 30 Sep 2014 - 17:38
Figures {Fe Heath}.
Gabriel était satisfait par sa propre prestation. Sa force de convictions connaissait-elle des limites ? Il commençait à croire qu’il ne commettrait jamais la même erreur, sans pour autant penser qu’il avait déjà gagné la confiance de son ennemi. Il était toutefois indéniable de lui reconnaître qu’il savait manier les mots, et que de par sa verve passionnée, il avait réussi à captiver l’intérêt d’Heath au point qu’il ne remette pas en cause la véracité de ses dires. À défaut d’une victoire écrasante, il pouvait tout de même dire que son ensemble demeurait cohérent. S’il savait… Une petite pensée masturba prudemment les cellules grises de son intellect. Et si Heath Ackland retrouvait la mémoire sur-le-champ ? Cela donnerait lieu à une scène plutôt cocasse. À bien des égards.
« Attends. » Lâcha le britannique quand son ami le convint à le rejoindre.
Il engloutit la dernière gorgée de son thé au caramel et se releva. À la différence de l’ancien chef de RED, Oswald ne prit pas la peine d’aller jeter son gobelet à la poubelle. Habitude de la classe A, de la salle commune, de leurs repas… Il ne le faisait jamais habituellement, et cela paraîtrait peu naturel qu’il se mette soudain à avoir des scrupules à l’égard de ceux qui faisaient le ménage. Une amitié, elle se prend en entier, une amitié, il n’y a pas de faux-semblants.
Les deux garçons arrivèrent hors du bâtiment. Il faisait un peu frais, on sentait bien que le temps se rapprochait dangereusement de l’hiver. Déjà la mi-octobre… Comme le temps passait vite. Ackland sortit une cigarette, Gabriel ne manqua pas cette occasion pour réagir. Avec un large sourire, il se rapprocha de lui pour qu’ils ne soient qu’à un petit mètre. « Je t’ai toujours dit que le tabac te détruisait les poumons… Mais si tu es resté le même qu’avant, je suppose que tu t’en fous toujours ? » Sourire compatissant. Cette remarque se voulait beaucoup plus triviale qu’elle n’aurait pu l’être au premier abord.
Une information fuita à son cerveau. Non, l’adolescent n’allait pas commettre cette erreur. Il reconnaissait bien là l’instinct profond qui animait celui qu’on surnommait le Renard. Bien entendu, c’était évident. À sa place, il aurait fait exactement la même chose : vérifier la cohérence des informations, certes, mais découvrir des faits nouveaux sur une personne méfiante que tout le monde déteste, et qui vient se ramener en se prétendant votre ami. Joli coup, Ackland. Mais je suis trop intelligent pour ça. Ces mots te tirèrent une petite moue, qui se transforma en figure soulagée. L’interprétation pouvait être libre, mais elle signifiait surtout qu’Oswald s’était attendu à la question.
« Si je voulais te manipuler, j’aurais enquêté sur toi. Par conséquent, je pourrais t’ébranler en te parlant d’anciennes crises personnelles que tu as traversées. Ce n’est pas ce que je vais faire, mais je pourrais aborder le sujet si tu me le demandes. » La franchise pouvait être un redoutable atout. Plus que jamais, il ne fallait surtout pas tenter quelconque chose de suspecte dans les circonstances présentes. S’il voulait jeter son amarre dans le cercle social d’Heath Ackland, il devait passer par la porte d’entrée. Il devait triompher dans le hall, là où tous les visiteurs passent.
« Tu n’es pas stupide, Heath. Tu te méfies toujours de moi. Par conséquent, tu vas glaner des informations sur moi pour te constituer un filet de sécurité… Au cas où. Et tu as bien raison, je ne suis pas contre. » Il fit une petite pause avant de continuer. « Quand nous nous sommes rencontrés, nous ne nous entendions pas du tout. Tu me détestais. Je te détestais. Je te trouvais tout bonnement insupportable, et je suppose que tu dois avoir quelques souvenirs de ces inimités, puisqu’elles remontent à plus de trois ans. Nous ne nous étions jamais parlés, mais on le sentait, l’un en l’autre. Et puis les choses ont changé, un jour. Les choses ont changé quand j’ai été rejeté par ma famille parce que j’étais gay, et que j’ai entamé une descente aux enfers qui m’a menée jusqu’en classe C. J’ai perdu tous mes amis, toutes mes connaissances superficielles. Plus personne ne m’adressait la parole, non pas parce que j’étais gay, mais parce que j’étais le mec qui avait trébuché. Le mec arrogant de la classe A, redescendu en classe C. Quelle honte ! Quelle infamie ! Tu pourras vérifier auprès de Sonera di Gregorio, qui se fera un plaisir de t’expliquer notre amitié et comment je l’ai trahie quand j’ai saisi ma chance de revenir en A. » Gabriel Oswald faisait des gestes avec sa main, il mettait de l’émotion, de l’intonation dans ses déclarations. Son homosexualité était bien le seul sujet qui le tenait à cœur. La seule chose qui pouvait l’émouvoir suffisamment pour rendre crédible ce qu’il disait.
« Un soir de décembre, je suis revenu de Londres où j’avais passé mon dernier Noël avec ma famille. J’étais anéanti. Anéanti parce que j’avais perdu l’amour de mes parents, mais ça tu n’en as pas grand chose à faire, aussi vais-je aller droit au but. J’ai arrêté d’aller en cours, même après la rentrée de janvier. Je faisais une sorte de dépression, parce que je n’arrivais pas à m’assumer… parce que… Je ne pensais pas me faire une place sur cette terre. Et tu as été là. Ne me demande pas comment, ne me demande pas par quel miracle, mais j’ai fini par parler avec toi. Je me montrais dur, je faisais semblant que tout allait bien. Mais tu as été porté par ton intuition, tu es allé au-delà de ton impression négative sur moi… Un peu comme ce que tu es en train de faire maintenant. Et tu as fini par découvrir la vérité. D’ailleurs, pour la petite note humoristique, tu étais à mille lieux d’imaginer que c’était ça, mon secret, si bien que quand tu m’as demandé si j’avais un petit-ami après être tombé sur un de mes Yaoi, j’ai fondu en larmes. Oui, tu as été la première personne à me voir pleurer. La seule… je crois. Tu m’as foutu une bonne gifle mentale. Tu t’es montré tantôt agressif, tantôt compréhensif, parce que tu ne savais pas encore très bien comment m’aborder, tu ne savais pas très bien ce qui me ferait réagir. » Sourire.
« Qu’est-ce que tu peux bien en avoir à foutre de ce que les autres pensent de toi, Oswald ? Tu baises avec ce que tu veux, ça regarde personne, et t’emmerdes les connards qui veulent te faire croire le contraire. Tu t’affirmes, tu t’imposes, parce que tu as plus que jamais le droit d’exister. » Ses yeux brillaient. Ils brillaient vraiment. Ce n’était pas une imitation, ce n’était pas uen feinte. Gabriel s’émeuvait de son propre discours. « Je n’ai jamais oublié ses mots… »
Il se recula jusqu’au mur et se laissa fondre par terre. « La première raison qui fait que je ne pourrais jamais cesser de vouloir t’aider. Même si tu me hais. Même si tu préférerais me voir mort. Je ne ferais jamais rien contre toi, Heath. » Lâcha-t-il en insistant particulièrement sur la fin.
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Sujet: Re: Figures. PV Lun 6 Oct 2014 - 12:24
Fin Septembre • #067790
▬ Je t’ai toujours dit que le tabac te détruisait les poumons… Mais si tu es resté le même qu’avant, je suppose que tu t’en fous toujours ? ▬ Mmh.
Heath envoi toujours sur les roses les moralisateurs, qu’il s’agisse du tabac ou d’autre chose. Il n’aime pas qu’on lui dise quoi faire. Et concernant le tabac, il se dit très souvent qu’il faudrait arrêter, parfois même essai, mais il n’a pas la réelle volonté de le faire. Et il sait que tant qu’il ne l’aura pas, il ne pourra pas. En revanche, le jour ou il se décidera réelleement, ça ne devrait pas trop lui poser de problème. Heath est quelqu’un de fort, il se fait confiance.
Mais à ce moment là, il est dans une période ou il s’en fiche, ou il fume parce-que ça lui fait du bien, ça le détend. Ca l’aide à réfléchir, aussi. Se concentrant dans ce geste régulier, il arrive bien à focaliser son esprit sur l’essentiel, et faire le vide du reste.
▬ Si je voulais te manipuler, j’aurais enquêté sur toi. Par conséquent, je pourrais t’ébranler en te parlant d’anciennes crises personnelles que tu as traversées. Ce n’est pas ce que je vais faire, mais je pourrais aborder le sujet si tu me le demandes.
Heath reste silencieux, tête baissée, yeux rivés sur l’incandescence au bout de ses doigts. Heath est probablement l’une des personnes les moins bavardes de Prismver, en dehors de sa bande, il ne parle que pour dire l’essentiel, sans fioritures ni détours. Mais tout ça, Gabriel devrait en avoir l’habitude, si ce qu’il dit est vrai.
▬ Tu n’es pas stupide, Heath. Tu te méfies toujours de moi. Par conséquent, tu vas glaner des informations sur moi pour te constituer un filet de sécurité… Au cas où. Et tu as bien raison, je ne suis pas contre. Quand nous nous sommes rencontrés, nous ne nous entendions pas du tout. Tu me détestais. Je te détestais.
Probable.
▬ ...Et puis les choses ont changé, un jour. Les choses ont changé quand j’ai été rejeté par ma famille parce que j’étais gay, et que j’ai entamé une descente aux enfers qui m’a menée jusqu’en classe C. J’ai perdu tous mes amis, toutes mes connaissances superficielles. Plus personne ne m’adressait la parole, non pas parce que j’étais gay, mais parce que j’étais le mec qui avait trébuché. Le mec arrogant de la classe A, redescendu en classe C. Quelle honte ! Quelle infamie ! Tu pourras vérifier auprès de Sonera di Gregorio, qui se fera un plaisir de t’expliquer notre amitié et comment je l’ai trahie quand j’ai saisi ma chance de revenir en A.
Sonera... une fille de sa classe à qui il ne parle pas vraiment, ignorant que deux mois plus tard il l’aura sauvée de la noyade en risquant lui même de finir au fond du lac. En attendant, il n’a pas l’intention d’aller interroger Sonera. Heath est un garçon réfléchi, mais pas manipulateur. Il est stratège sur l’essentiel, garde une ligne droite très fine et précise. Mais il ne tire pas de plans sur la comète, ne prépare pas de coups, ne fait pas réellement de stratégie. Avec Entropy comme avec RED, les buts et actions étaient très simples. Tout l’échiquier qui s’est batti autour de ce combat, il ne s’en est pas vraiment rendu compte, ne se sentait pas startège en se déplaçant d’une case à l’autre en écoutant son instinct. Quoi qu’il en soit, il ne se lancera pas à interroger les gens sur Gabriel, à démêler le faux du vrai, à enquêter, à soupçonner... Il juge tout cela inutile, de trop. Tout simplement parce-qu’il ne veut pas s’embrouiller l’esprit avec les avis de X et Y: Gabriel sera ce qu’Heath aura décidé qu’il soit. Lui, et lui seul. Son opinion éclairée à lui. Qu’importe qu’il manque d’éléments. Qu’importe qu’il se trompe: il se fera son propre jugement. Là est le grand problème d’Heath: il n’a réellement confiance qu’en lui-même. ... Et en Joach. C’est pour ça qu’il est ici. Partagé entre la logique de croire aveuglément Joach et le besoin de se forger lui-même son opinion.
▬ Un soir de décembre, je suis revenu de Londres où j’avais passé mon dernier Noël avec ma famille. J’étais anéanti. Anéanti parce que j’avais perdu l’amour de mes parents, mais ça tu n’en as pas grand chose à faire, aussi vais-je aller droit au but.
Bien.
▬ J’ai arrêté d’aller en cours, même après la rentrée de janvier. Je faisais une sorte de dépression, parce que je n’arrivais pas à m’assumer… parce que… Je ne pensais pas me faire une place sur cette terre. Et tu as été là. Ne me demande pas comment, ne me demande pas par quel miracle, mais j’ai fini par parler avec toi. Je me montrais dur, je faisais semblant que tout allait bien. Mais tu as été porté par ton intuition, tu es allé au-delà de ton impression négative sur moi… Un peu comme ce que tu es en train de faire maintenant.
Enfin. Un regard. Heath est aussi égoïste en regards qu’en mots avec les gens, et capté ses pupilles noisettes cherchant les siennes est un signe que l’on a éveillé quelque chose en lui. Même un minimum, mais quelque chose. Le contact est bref, ne dure qu’une seconde, mais il a eu lieu. De nouveau, le regard noisette redescend sur la cigarette qu’il porte à ses lèvres, et toujours aucun son ne s’échappe de ses lèvres. Neil a souvent comparé les mots et les regards d’Heath à des trésors qu’il n’offre à personne, ou au compte-gouttes. A l’époque, Heath n’avait pas eu la présence d’esprit de s’attarder sur le mot « trésor » s’échappant des lèvres de Neil. Si il savait.
▬ Et tu as fini par découvrir la vérité. D’ailleurs, pour la petite note humoristique, tu étais à mille lieux d’imaginer que c’était ça, mon secret, si bien que quand tu m’as demandé si j’avais un petit-ami après être tombé sur un de mes Yaoi, j’ai fondu en larmes. Oui, tu as été la première personne à me voir pleurer. La seule… je crois.
Tout cela faisant sens. Heath n’a pas de mal à imaginer ce que lui compte Gabriel. Il reste silencieux, regardant tantôt sa cigarette, tantôt les gens qui passent par là: on les regarde avec des yeux ronds. Si ils avaient réellement été amis, alors en effet ce ne devait pas être de notoriété publique, vu les murmures que leur échange provoquent en ce moment même.
▬ Tu m’as foutu une bonne gifle mentale. Tu t’es montré tantôt agressif, tantôt compréhensif, parce que tu ne savais pas encore très bien comment m’aborder, tu ne savais pas très bien ce qui me ferait réagir.
Mmmh. Heath ne se mêle pas des affaires des autres, et la sexualité de Gabriel Oswald lui semble à cet instant la chose la moins intéressante du monde. Le Renard est une personne passive, peu concernée. Pourtant capable de se jeter corps et âme dans ce qui capte enfin son intérêt.
▬ «Qu’est-ce que tu peux bien en avoir à foutre de ce que les autres pensent de toi, Oswald ? Tu baises avec ce que tu veux, ça regarde personne, et t’emmerdes les connards qui veulent te faire croire le contraire.»
Regard intense.
▬ « Tu t’affirmes, tu t’imposes, parce que tu as plus que jamais le droit d’exister. »
Non. L’oeil devient méfiant, le visage tendu. Si la première partie de la citation l’a ébranlé, la fin ne lui ressemble pas. Casse-tête. Montagnes russes. L’analyse et la réflexion le fatiguent. Cet échange le fatigue.
Sa propre méfiance le fatigue.
▬ La première raison qui fait que je ne pourrais jamais cesser de vouloir t’aider. Même si tu me hais. Même si tu préférerais me voir mort. Je ne ferais jamais rien contre toi, Heath.
La cigarette est jetée au sol, tandis qu’il se tourne vers Gabriel. Cette fois c’est lui qui pose son regard sur le A et cherche le sien. Il l’observe quelques secondes. Yeux dans les yeux. Et puis, il décroche le premier, baissant ces derniers au sol, enfonçant ses mains dans ses poches pour jouer du pied avec une imperfection du perron.
▬ Sache simplement que je connais le pouvoir des mots. Je suis le premier à embobiner mon monde avec.
Mais ça, Gabriel le sait. Il relève les yeux vers lui un bref instant.
▬ Je ne juge que par les actes.
Ce qu’il omet alors de dire volontairement, c’est que le concernant lui, tordu comme il est - d’après Joach - il se méfiera aussi grandement des actes. En bref, la confiance n’est pas là. La confiance d’Heath, il n’y en a qu’un qui l’a réellement. En revanche, le truand a grande envie de jouer avec le feu. Et de se laisser surprendre. Il s’approche alors de Gabriel, tue la distance entre eux avant de simplement lui tendre la main. Pour lui dire au revoir. Et pour une poignée symbolique.
Sourire.
▬ J’espère que tu dis vrai. Il hausse les épaules. On verra bien.
Poignée de main accordée sous les regards de nombreux passants, Heath recule, et une main toujours dans la poche, se détourne pour s’en aller. Il est comme ça, abrégeant toujours les échanges, quittant la scène quand il le souhaite, quand il estime qu’il le faut, gardant le contrôle de la situation comme il l’entend. Il a décidé que s’en était assez, et s’échappe avec ce qu’il a acquis, maître de ses mouvements et de ses pensées.
Si Gabriel le connaît si bien, alors il doit avoir l’habitude de voir le renard filer vers sa tanière quand il en ressent l’instinct. Il doit également savoir qu’il ne faut alors pas l’en empêcher.