Elle saute, vole, tourbillonne, rollers scotchés aux pieds, Felicia ressemblait à un oiseau. Elle avait rejoint le skatepark un début d’après-midi après avoir englouti son repas en quelques minutes, espérant s’exercer dans cet art. Folle des hauteurs après avoir surmonté son vertige, elle adorait ce genre d’expériences, ce danger, ces sensations fortes. Elle aimait sentir ses cheveux voler au vent, ses pieds décoller du sol et son corps se fondre en différentes acrobaties en l’air, pour ensuite retomber sur ses pieds avec grâce. Elle aimait ça, Felicia, ça lui changeait les idées, ça lui donnait cette sensation de liberté et d’isolation. Elle aimait la compagnie, c’est vrai, mais s’éloigner de temps à autres lui faisait tout de même du bien.
Comme si le poids de la vie de tous sortait enfin de sur ses épaules. Elle se sentait responsable du sourire des autres, responsable de leur bonheur et de ce qui constituait à peu près toute leur vie. A sa façon, elle aidait les autres, et ça commençait à peser parfois. Et parfois, elle s’isolait, prenait une break, parce que c’est ce dont elle avait besoin. C’était ça sa vie, encaisser pour les autres, souffrir pour les autres et exploser seule dans son coin lorsqu’elle le devait. Tout intérioriser, prendre sur elle, briller sur les autres quitte à pourrir sa propre lumière - mais Felicia s’en moquait, parce que rien n’était plus beau que le sourire d’autrui.
Cette fois, c’était les rollers. Exploser, virevolter, profiter de ce soleil tapant et des dernières bribes de chaleur de cette année. Lunettes d’aviation posées devant les yeux, elle filait à travers le parc, sourire aux lèvres. Prendre du temps pour elle après en avoir passé énormément pour autrui, rien ne pouvait lui faire plus plaisir. Rien n’était plus beau que ça. Une énième figure conclut son tour de piste et elle s’arrête un instant, décide de se reposer. Ambitieuse, elle décide de trouver un coin plus tranquille à l’ombre et file comme le vent au travers le parc - manquant de renverser une silhouette familière. Elle l’évite, trace un large cercle autour d’elle en l’observant, reconnaissant Warren - le délégué des E.
« Warrouuu ! Désolée, j’ai failli te renverser. Je faisais pas attention. Enfin, d’habitude si, mais j’étais fatiguée, je voulais me reposer et… bref c’est pas important, qu’est-ce que tu fais là ? Oui t’as le droit d’être là, je sais, mais j’aimerais bien savoir, t’es pas obligé de me le dire, mais ça m’intéresse parce que ça me surprend un peu tu vois ? »
Et elle tourne encore et encore, elle tourne autour de lui, parle, sourit, rassure. Elle s’arrête même derrière lui pour le serrer dans ses bras une seconde, toute souriante, et s’écarte de nouveau. Quand enfin elle s’arrête, par peur de lui donner le tournis, elle plante ses yeux dans les siens avec gentillesse. Elle a toujours apprécié Warren, lui qui faisait tout pour sa classe malgré l’absence de reconnaissance - sur ce point-là, il lui a toujours été similaire. Elle l’admirait cependant, ne savait pas si elle aurait le courage d’être déléguée, et à vrai dire, elle n’était pas assez sérieuse pour. Sans compter que Warren était d’une gentillesse sans précédent, ce qui aiguisait son instinct maternel.
« Il était temps qu’on ait un week end, après tout ça… entre la réparation du hall et tous ces soucis avec la classe S, on avait plus le temps pour rien. Et maintenant les chambres ? On a pas fini de réparer. Au moins on se fera les muscles ! »
Elle sourit, optimiste, rajuste ses lunettes sur son front et observe le délégué. Préoccupé ? Inquiet ? Elle espère le savoir. Parvenir lui aussi, à le faire sourire.
Sujet: Re: our universe falls apart || WARREN Mar 7 Oct 2014 - 19:43
Just take a break
Ses balades en ville devenaient de moins en moins fréquentes. La crainte de sortir le paralysait ; il avait perdu l'habitude de se promener, même pour le plaisir, par peur de révéler le lourd secret du pensionnat aux villageois. Sa place était parmi les E, dans le vrai sens du terme ; il était un élève qui haïssait la malédiction qui s'était abattue sur lui, cette malédiction que les monomaegias appelaient un don. N'ayant effectué aucun progrès en quatre années, il s'était résigné à accepter les conséquences, à abandonner toute occupation qui constituait un éventuel risque pour lui, pour le pensionnat. Il n'avait aucune envie de se retrouver accidentellement sous sa forme animale, déclencher une panique monumentale chez ceux qui ignoraient tout des élèves de Prismver. Ah, oui. Parfois, il comprenait sa colocataire Solveig, lorsque celle-ci lui confiait sa peur de l'extérieur, sa peur de voir son don échapper à son contrôle. Il ne pouvait la juger ; lui aussi restait enfermé dans cette petite bulle que représentait le pensionnat. Le monde extérieur n'était qu'un plaisir qu'il se réservait à de très, très rares occasions.
Mais, cette fois-ci, il n'en pouvait plus. Cette fois-ci, il avait besoin de s'éloigner de cet abri sûr qui se muait en un enfer infernal. Les tensions n'avaient jamais eu un bon effet chez lui, ils ne faisaient que renforcer ses peurs, son angoisse dont il ne parvenait jamais à se débarrasser. Alors, cette envie égoïste l'avait entraîné en ville pour prendre l'air, juste une bouffée d'air frais, juste se vêtir autrement que de l'uniforme scolaire, juste pour penser à autre chose que la guerre des classes un bref instant. Ses mains engourdies par la fraîcheur automnale s'étaient réfugiées dans les poches de son pull rouge, encore habituées à la douce chaleur d'été qui s'évanouissait. Un peu replié sur lui-même, il était seul, non loin d'un skatepark. Il croyait être seul, il croyait s'être défait de toute compagnie — et par la même occasion, de ses craintes habituelles ; c'était peut-être pour cela qu'il regardait ailleurs lorsqu'une fusée blonde fonça sur lui, manquant de lui rentrer dedans — accident évité grâce à un réflexe précipité venant des deux côtés. Ah, c'était pour cette raison qu'il était continuellement sur ses gardes ; dès qu'il la baissait, un accident survenait. Il reconnut la propriétaire de cette longue chevelure d'or familière aux reflets roses. Felicia.
— Warrouuu ! Désolée, j’ai failli te renverser. Je faisais pas attention. Enfin, d’habitude si, mais j’étais fatiguée, je voulais me reposer et… bref c’est pas important, qu’est-ce que tu fais là ? Oui t’as le droit d’être là, je sais, mais j’aimerais bien savoir, t’es pas obligé de me le dire, mais ça m’intéresse parce que ça me surprend un peu tu vois ? dit-elle, toute joyeuse.
Lui aussi, cela le surprenait, lui qui croyait être seul. Lui qui pensait qu'aucun élève de Prismver ne viendrait à sa rencontre. Mais elle, ce n'était pas grave ; elle l'avait accosté pacifiquement, chaleureusement, sans aucune envie de le critiquer ou de l'attaquer — de toute manière, elle aussi participait au projet WIP. Elle tournait autour de lui, se déplaçant avec facilité grâce aux rollers qu'elle chaussait. Il ne lui parlait jamais, habituellement, alors sentir autant d'enthousiasme de sa part l'étonnait un peu.
— Salut, Felicia. Hum... Disons... que je voulais juste sortir un peu du pensionnat. Rien de bien spécial... répondit-il un peu timidement, suivant des yeux le trajet de son interlocutrice.
Une phrase qui résumait tout de manière implicite, tout, sans même qu'il ne s'en rendît réellement compte. Il en avait un peu assez, Warren, assez de ce qu'il considérait comme son foyer. Sa maison ne ressemblait plus qu'à un champ de guerre, et même pas une guerre entre classes, mais opposant diverses idéologies.
Il fut surpris du bref élan d'affection de Felicia, lui qui ne recevait de câlins uniquement de la part d'Anarchy, du côté des filles ; elle s'écarta, et recommença à tourner autour de lui, un petit sourire ornant ses lèvres ; puis finalement, elle s'arrêta devant lui, avant qu'il n'eût le vertige.
— Il était temps qu’on ait un week-end, après tout ça… entre la réparation du hall et tous ces soucis avec la classe S, on avait plus le temps pour rien. Et maintenant les chambres ? On a pas fini de réparer. Au moins on se fera les muscles ! continua-t-elle.
Il se rappela de la raison pour laquelle il l'appréciait sans la connaître personnellement, pourquoi elle ne l'intimidait pas malgré sa popularité apparente ; elle acceptait tout le monde, elle se montrait douce avec autrui sans laisser son titre de Miss Prismver la rendre fière et hautaine. Elle détenait ce désir sincère de servir autrui — la lettre des délégués en était la preuve. Il sourit un peu moins gêné, un peu moins timide, décida de retirer les mains de ses poches par politesse.
— En effet. On a encore beaucoup de travail à faire avant de réussir à changer quelque chose. Mais ça avance. ajouta-t-il avec une pointe d'optimisme.
Il glissa l'une de ses mèches de cheveux gênantes derrière son oreille — son esquive de tout à l'heure l'avait décoiffé.
— Enfin... j'ai vu que l'une des salles de la classe E avait été rénovée récemment. C'est plutôt agréable de travailler dans une classe un peu plus propre. Même si on est loin du matériel des A, ce n'est pas grave ; c'est un début. fit-il remarquer.
Était-ce une conséquence de la lettre des délégués ? Il n'en savait rien. Toutefois, cette initiative de la D lui avait fait grandement plaisir ; et si elle était la responsable des améliorations, il ne pouvait qu'éprouver de la reconnaissance à son égard, même si la progression était minime ; c'était un début.
— Je voulais juste te remercier pour ta lettre. termina-t-il en souriant.
Sujet: Re: our universe falls apart || WARREN Mer 22 Oct 2014 - 9:25
Our universe falls apart
Regard curieux à l’encontre du délégué des E, sourire encourageant, elle se transforme en un océan de sociabilité, donne envie par le simple contact visuel de répondre. C’est comme ça qu’elle marche Felicia, c’est un étoile pétillante de bonheur et de gentillesse. Elle a ce regard exempte de jugement, cet oeil innocent de part sa pureté et toute la joie qu’il apporte. On le sait en la voyant, au fond, on sait par ce simple échange que l’on peut tout confier à cette fille. Elle se construit encore, Felicia, étoile montante qui n’a pas de limite, mais elle sait bien que lorsqu’elle sera aboutie, sa lumière n’aura pas d’égale.
Pourtant, elle se ternit lentement, et elle a beau garder ce sourire éclatant, ce sont les rayons qui s’obscurcissent au fil du temps, sa personne qui noircit dans ce monde qu’elle n’imaginait pas si sombre. C’est ça Felicia, voile-toi la face, il n’y a que comme ça que tu pourras continuer à avancer. Alors elle continue, elle reste aveugle à tout ce mal qui s’étend, elle reste aveugle à cette guerre qui naquit - elle ne voit pas la miss, cette haine des couleurs, cette haine viscérale qui renait.
Elle voit pas Felicia, que ce mal prend d’assaut tout ce que les gens comme elle ont construit. Elle est trop occupée à penser au prochain sourire qu’elle veut faire dessiner, trop occupée à songer au suivant alors qu’elle s’occupe de l’actuel - elle a peur au fond, de ne pas pouvoir aider tout le monde, et elle se ment à elle-même pour continuer à avancer. C’est ça pour elle, la seule façon de ne pas sombrer - et pourtant, elle a beau y faire, ses yeux s’ouvrent lentement sur cette réalité à laquelle sa lumière refuse de s’accepter.
Paradoxe. Parce qu’elle aimerait pouvoir connaître tous les vices de ce monde pour y remédier. Et toi Warren, est-ce que tu te mens à toi-même ? Tu fermes les yeux, toi aussi, sur l’obscure réalité de ta classe ? Connais-tu vraiment les méfaits des E que tu fréquentes - ta gentillesse et ta tolérance demeurent-elles si bien parce que toi non plus, tu ne réalises pas la vraie nature du monde ? C’est souvent le cas tu sais, dans sa classe de fêtards inconscients, et peut-être devrais-tu troquer ta cravate rouge pour la jaune ? Ca ne serait pas une mauvaise idée tu sais, tourner le dos à ceux qui n’ont jamais su te regarder dans les yeux.
« Hm, ok, je vois. »
Quelques mots marmonnés, le regard d’émeraude plongés dans ses iris effrayés. Elle ne peut sans doute pas le faire pour le monde, mais s’occuper du mal d’une personne ne lui paraît pas si difficile. Et ça parait marcher au fond, quand elle voit Warren reprendre contenance et lui répondre avec optimiste. Il n’en est peut-être pas débarrassé, mais il semble au point les oublier, ces peurs, pendant au moins quelques secondes. Aveuglé par la lumière qu’elle fait tout pour lui transmettre.
Et pourtant, ironiquement, elle a du mal à y croire. Plus elle y songe, plus elle les voit, ces déséquilibres, la différence de temps entre la destruction et la rénovation qu’ils tentent d’exécuter. C’est bancal tout ça, quelques coups de pinceaux maladroits sur un mur rougit, quelques coups de balai sur le sol sali et quelques coups de marteau sur la glace qui y a naquit. C’est ça WIP, c’est tout donner pour tenter d’effacer ce mal qui a germé, mettre toutes ses forces dans cette réparation futile, si facile à saboter. Il y a eu un opposant ce jour-là, un gars qui n’a mit qu’une seconde pour tout casser - qui pour eux a valu deux heures de plus à travailler. Et elle trouve ça cruel Felicia, que le bien ait tant de mal à émerger. Que les nobles causes soient toujours désavantagées.
« C’est déjà super. Bravo Warren, tous tes efforts ont fini par payer. »
Elle ne veut pas de reconnaissance Felicia. C’est peut-être sa lettre, peut-être la casse de RED ou la bonne volonté de WIP. C’est peut-être le résultat d’un travail commun, ou le réveil d’un directeur qui se voilait la face depuis tellement longtemps. Ou peut-être au final, que ce n’est que la compilation de toutes ces raisons - elle n’en a aucune idée. Quelle importance de toute façon ? Elle le sait, elle est là depuis trois ans la miss, et elle sait que jamais personne n’a autant combattu pour les E que Warren a pu le faire.
Elle connait sa volonté, ses désirs, l’amour de sa classe. Elle sait comment il est, et qu’elle aura beau l’aider, qu’il ne délaissera jamais cette cravate écarlate - peu importe combien ses camarades pourront le maltraiter. Alors c’est un simple sourire comme réponse, un sourire de reconnaissance, parce que c’est elle qui devrait l’être. C’est toi Warren qui tient la banderole rouge, c’est toi qui symbolise cette entente qui continue d’exister. Cette entente que mille ans de haine ne sauraient briser.
« Warren ! »
Elle tourne la tête, surprise par cette voix, fait face à un E paniqué. Elle regarde le frêle première année s’avancer, manquer de trébucher - son réflexe est immédiat, elle se téléporte à côté de lui, glisse son bras sous les siens pour le rattraper. Bienveillante, elle répond à son remerciement en lui ébouriffant les cheveux, lui laissant le loisir de s’exprimer à son délégué.
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Sujet: our universe falls apart || WARREN 
Lun 6 Oct 2014 - 1:42
