Quand il s’est réveillé ce matin, il avait ce mal de crâne assourdissant, frappant dans sa tête et résonnant dans ses os. Il est sorti du lit, titubant jusqu’à sa cuisine, n’y trouvant que de ces merdes de céréales bios qui lui foutaient la gerbe. Il avait toujours détesté ces putains de céréales. Toujours.
Il avait toujours tout détesté. Ce monde qui le fait chier. Toujours pareil, bien réglé, bien fait - Sa vie qui le fait chier. Toujours pareille, bien réglée, bien faite - le temps traçant une boucle sans bavure. Toujours la même. Tous les mêmes. Des moutons, des rats dans un laboratoire géants qui croient que courir c’est être libre - mais qui au final n’ont jamais ô grand jamais goûté à la liberté. Il déteste. Il déteste cette école, il déteste ces gens, il déteste les systèmes, il déteste son planning bien organisé - Il les déteste eux. Sans raison. Sans préavis. Il déteste.
Et pourtant c’est avec le sourire qu’il marche vers le gymnase, main dans les poches, cigarette aux lèvres. Un sourire bizarre, un sourire mauvais, un sourire qui va pas avec son visage si doux. On peut bien se demander ce qu’il fout là, le scientifique, l’intello, le faible qui porte jamais de coups, même pas avec ses mots. On peut se demander pourquoi il rentre dans la salle de boxe avec le regard déjà brûlant, violent. Assoiffé et avide. Toute cette violence le bouffe depuis plusieurs semaines déjà - depuis toute une vie - il veut la faire éclater. Encore. Son appartement détruit, ses recherches dévastées - cela ne lui suffisait pas, ne lui suffisait plus pour exprimer toute la colère qu’il pouvait avoir envers cette Vie. La solution s’est imposée à lui, toute naturelle, officielle. Le Fight Club. Mais on ne parle pas du Fight Club, c’est l’une des règles d’or, imposant le silence mais pourtant suintant des lèvres de tout le pensionnat.
Il était donc allé au gymnase chercher plus d’informations - et peut être même la trouver elle. Arsène. Arsène et ses manières de garce, Arsène qui l’a défié défié défié. Arsène que l’Autre a commencé à apprécier. Stupide qu’il est. Ou plutôt qu’il était, car maintenant l’Autre est brisé, lointain, oublié, comme un rêve dont on ne peut pas se rappeler. Il cherche Peters. Et l’ironie, une fois de plus, frappe à la porte de son destin. Peters en veux-tu, en voilà.
Apparemment, Lukas aussi avait eu le droit à un cadeau de Noël des plus empoisonnés.
Pas de flammes, pas de griffes, pas de queue - plus rien du démon que l’Autre avait observé, étudié avec ses motifs désintéressés. Juste un homme au visage balafré, blessé - un homme qu’il reconnait directement sans pour autant ressentir la morne apathie de l’habitude. Juste un homme qui tue sa douleur en coups bien placés dans le sac de sable. Avant même qu’il s’en rende compte, Terry s’était arrêté, accoudé à la barrière, pour le regarder. Se délectant en silence de cette hargne qui remplissait l’air, cette douleur libérée.
Ce n’était pas ce qu’il cherchait. Qui il cherchait. Mais ça ferait l’affaire.
Il expire une volute, les yeux rivés sur le dos nu du jeune homme, dont les muscles se tendent. Quelque chose commence à battre dans son sang, une envie, une lubie. Celle de voir, de découvrir de plus près l’âme blessée de celui qui a le même sang qu’elle. Même dans sa folie, il avait cette soif de découverte propre à l’Autre. Peut être un des seuls de leur point commun, la tranche commune de deux faces d’une même pièce.
Doucement, sa voix s’élève, trop polie et douce pour ce qu’il est vraiment. « Mr Peters, vous allez bien ? » Il attend que celui-ci se retourne pour le regarder droit dans les yeux, eau glacée et profonde venant lécher sa peau brûlée. Sa langue ne fourche pas - plus un seul bégaiement, plus une seule hésitation. Et tout de suite, il ressent le besoin de parler un peu plus. D’entendre sa propre voix enfin libérée des peurs qui l’enchaînaient. « Je vous cherchais. » Mensonge. Si grand mensonge. Et pourtant c’est toute l’honnêteté de l’Autre qui transpire, qui envoûte, qui charme. « J’ai appris ce qu’il vous était arrivé. » Même enfermé dans son antre de tourments, il avait entendu parler de l’incendie de la cabane 16, du déchaînement du démon. « Je suis désolé. » Comme s’il l’était. Lui dont le sourire faussement triste ne demande qu’à s’étendre un peu plus.
Oh, il ne pense pas que Lukas a mérité ce qu’il lui est arrivé. Il constate juste que le monde, que la vie est une salope. On brûle tout pour une caresse, et en retour on ne vous donne qu’un coup de couteau, bien placé dans votre dos. Il passe une main dans son cou, défaisant son écharpe, et s’avançant vers son élève. La démarche fluide, débordant d’une présence que l’Autre n’avait jamais eue. Pourtant c’est bien lui, les cheveux en bataille, la légèreté dans les pas. Tellement comme l’Autre mais tellement différent. Incompréhensible.
Une énigme, une anomalie, une tâche noire dans ce monde qui fascinait l’Autre, et qui lui donne maintenant envie de vomir. Tête penchée sur le côté, il susurre, presque pour lui même. « C’est tellement … injuste. » Ce monde. Ses rêves brisés. Le visage de Lukas. Et le jeu cruel dans lequel il s’apprête à l’attirer. Si injuste.
▬ Début janvier • D4RK Terry parle en cadetblue • Code par Lix ♥ ▬
« Il avait autre chose à faire désormais que de se poser des questions sur ses ressentis à propos de son professeur. »
La violence était certes sont défouloir, mais elle était également son plus puissant canalisateur. Tous ses profs de maîtrise du pouvoir avaient été impressionnés par le potentiel de Lukas. On lui avait dit qu’il avait une affinité avec la destruction, que son type de magie était clairement défini. Qu’en possession de ces dons là, il pouvait être un véritable carnage à lui seul. C’était son professeur de l’an dernier qui lui avait appris à canaliser toute cette puissance. Il avait vu Lukas au Fight Club et avait compris que frapper était pour lui le meilleur moyen de contrôler son don. Ca lui était d’ailleurs venu naturellement, à Lukas; il s’était toujours battu, depuis son plus jeune âge. « Frapper t’aide à maîtriser ta rage. N’écoute pas ceux qui te disent de te calmer, de faire du yoga ou je ne sais quelle thérapie. Laisse-toi aller à tes pulsions, quelles qu’elles soient. C’est grâce à elles que tu te retrouve toi-même au milieu du chaos de ton esprit. »
Ce mec était complètement perché. Mais Lukas avait retenu le principal: on l’encourageait à se laisser aller à ses plus bas instincts.
▬ Mr Peters, vous allez bien ?
Son poing écrasé contre le sac s’immobilisa. Bras tendu, figé et concentré, les pupilles du jeune homme avaient dérivé sur le côté. Il ne l’avait pas entendu arriver mais avait facilement reconnu sa voix.
▬ Ca va.
Lukas avait reprit sa frappe. Le torse nu, il transpirait, suant plus que d’ordinaire. Il avait chaud, tellement chaud. Son sang bouillonnait en permanence depuis qu’il avait quitté l’infirmerie, il avait la sensation qu’il faisait toujours quarante degrés. « Contrôles ton souffle, c’est lui qui régulera ta température. Tu auras très chaud au début. Et si tu respires mal, tu auras de lourds mots de tête pendant tes efforts. »
Se remémorant les paroles de son professeur qu’il avait vu quelques jours plus tôt, Lukas inspira plus fort, souffla. A chaque coup, il avait la sensation de maîtriser cette lave qui coulait dans ses veines. ... Et si il arrêtait de frapper... Et si, pendant son sommeil...
▬ Je vous cherchais. J’ai appris ce qu’il vous était arrivé. Je suis désolé.
Lukas n’avait pas pris la peine de répondre. Il en avait marre d’entendre ces mots. Et le fait qu’ils viennent de lui n’y changeait rien. Il avait autre chose à faire désormais que de se poser des questions sur ses ressentis à propos de son professeur. Celui-ci était toujours dans son dos. Lukas avait espéré qu’il parte, et pour l’y encourager, avait simplement lâché un “Merci.” fait de cette dureté et de cette froideur avec laquelle il s’était entouré depuis l’accident. Imperméable. Concentré. Il n’avait plus qu’un objectif: maîtriser son don à la perfection, comme l’ancien. Il refusait qu’un nouvel accident se produise. Quand au reste... Plus grand chose ne lui semblait important. Penser à son objectif lui permettait d’effacer tout le reste de son esprit. On ne l’entendait plus râler, Lukas. On ne l’entendait plus tout court. On ne le voyait plus non plus, à moins de venir le chercher ici ou en cours de maîtrise.
▬ C’est tellement … injuste. ▬ J’ai l’habitude de l’injustice.
Nouvelle frappe violente qui avait fini par s’immobiliser. L’élève s’était finalement redressé, ne dérivant sur Terry qu’un regard éteint, au fond duquel brillait tout de même cette flamme qui ne l’avait jamais quitté, farouche. Les iris de Lukas étaient différentes depuis sa première utilisation de ce nouveau don. Reflétant son feu intérieur, le marron sombre qui les colorait était devenu ambré. Flamboyant.
▬ C’est pour ça que vous me cherchiez ? C’est bon, merci. Mais vous auriez pu vous contenter d’un LMS.
Bouteille en main, boire de longues gorgées fraîches lui donnaient la sensation d’une douche froide tant la fraîcheur était bienvenue dans son corps brûlant.
▬ Oh ou alors vous vous demandez pourquoi j’viens plus en cours ? J’ai décidé de plus venir, c’est tout. Et c’est pas contre vous, j’vais plus à aucun cours sauf celui de maîtrise. J’ai toujours eu des notes minables partout, ça sert à rien. ... Je suis idiot et je le resterai.
Il avait laissé tomber sa bouteille au sol après en avoir vidé le contenu sur sa tête. Il s’était remis surs ses appuis, faisant rouler ses épaules.
▬ J’ai pas de temps à perdre avec toutes ces matières générales. Je dois apprendre à contrôler mon don. Désolé professeur. ... Votre cours était mon préféré.
Nouvelle frappe, mais cette fois, pas dans le sac. Tourné vers le vide, à l’opposée du professeur, Lukas frappait l’air avec force, et de ses poings se dégageaient de petites flammes. Il avait peur, Lukas. Peur d’un nouvel accident, peur de blesser quelqu’un d’autre. ... Ou lui-même. Combiner le combat et la magie (ses deux domaines d’excellence) était le meilleur moyen qu’il avait trouvé pour maîtriser cette dernière.
Mais Terry était resté là, et malgré tout ce que sa présence avait pu provoquer chez Lukas par le passé, désormais, elle le dérangeait. Il ignorait si c’était à cause de son visage qu’il préférait ne plus montrer ou si c’était parce-que Terry agissait bizarrement. Peut-être les deux. Redressé et l’oeil vivement méfiant planté dans celui de Terry, il fronçait les sourcils.
▬ ... Vous vouliez autre chose... ? J’préfère être seul.
Dérangeant. Il avait senti quelque chose de dérangeant. Et comme d’habitude, les magnifiques iris de son professeur avaient le don de le troubler, le happer. Il s’en arrachait alors rapidement, détournant la tête pour reprendre ses exercices, tendu, nerveux et déconcentré.
Oh, regardez ce qu’elle avait fait d’eux, la jolie, la belle, la fascinante Vie de l’Autre.
Les regards se croisent juste le temps d’une seconde, et Terry voit. Terry sait, Terry sent le changement qu’il s’est opéré en Lukas, dont les pupilles se sont teintées d’une rage, d’un mal d’être dévorant. Et comme piqué d’une curiosité malsaine, il s’approche un peu plus - toujours si nonchalamment. Fumée aux lèvres, mains dans les poches. La colère de Lukas l’appelle. Elle rebondit tout autour de lui, au fur et à mesure que les mots sortent de la bouche du jeune homme. C’est comme un bruit de fond, les battements d’un tambour - celui de son coeur - qui l’interpellent. Petit à petit, sûrement, lascivement, poussivement.
Jusqu’à ce que soudainement, cette pure colère trouve un écho dans son coeur en mutation.
Il faut dire que la colère, c’est encore un concept nouveau pour lui - le nouvel homme. Elle a pourtant toujours été en l’Autre, bien confinée dans une cloche de mensonges et de restrictions. Ne jamais la montrer, toujours l’enfermer, la cacher, la crever comme s’il s’agissait d’un animal dangereux. Mais Terry, il n’a plus peur de la fureur qui sature l’air, bien au contraire. Il veut la voir, la sentir, en toucher toutes les formes. Il arrive déjà à la sentir en lui, sous-jacente sous sa peau. Glacée. Froide comme un serpent qui glisse entre ses os. Tellement différente de celle de Lukas qui brûle et dévore, comme un incendie. Qui éclate.
Et il trouve ça magnifique, Terry. Si magnifique, que le désir de posséder cette flamme lui saisit le coeur, la tête - l’âme. Un frisson le parcourt, un frémissement d’anticipation.
Je dois apprendre à contrôler mon don. Désolé professeur. ... Votre cours était mon préféré. Rire d’une tendresse empoisonnée. « Ne t’inquiète pas pour ça, je peux comprendre. Et merci de l’attention que tu pouvais ...» Il avance encore un peu plus, jusqu’à arriver juste derrière lui. Planté dans son dos qui dégage encore cette aura de chaleur - mêlée d’humidité. « … me porter.» Juste derrière son crâne, assez loin pour garder sa politesse - mais assez près pour lui faire sentir son souffle contre son oreille. Tout près de sa brûlure. Son regard s’échoue sur les flammes qui s’allument et qui dansent près des poings de Lukas. Dangereuses. Il lui vient comme une soudaine, agressive envie d’y toucher - mais il la réprime dans une bouffée de tabac amère.
... Vous vouliez autre chose... ? J’préfère être seul. Déjà ? Non non non, ça ne va pas du tout. Il ne fait que commencer, Terry. Maintenant face à face, il tente de trouver le regard de son élève, qui a beaucoup de mal à lui offrir. Regarde le, Lukas. Il en a besoin. Une vie passée à se cacher aux yeux du monde - ça laisse une cruelle soif d’attention. Et de puissance. Et de domination. Il a besoin qu’on attise le feu de son arrogance pour survivre, ce nouveau Terry. Ovide a dit que le génie naît du malheur. Il est un génie. Et il soufflera les cendres de son malheur.
« Je voulais juste te parler un peu, je suppose. Mais vu que je te dérange, je vais m’en aller. » Il laisse traîner ses mots, penchant sa tête sur le côté, regardant sa clope terminée, écrasée sur la paroi la plus proche. Terminée, et pourtant, il en veux encore. Il en crève d’encore. Comme cette conversation - il ne veut pas s’arrêter là, comme le ferait l’Autre. Il veut plus. Balancée, jetée la jolie raison, la jolie mesure, la belle retenue. Lukas et ses flammes, sa colère, son regard qui se dérobe - tout ça, il le veut. Simple caprice de l’enfant qu’a jamais eu l’occasion de grandir, qu’a été tué bien avant ça.
Il pose sa main sur l’épaule de Lukas pour capter son attention - sa foutue attention. Sourire avide. « Mais avant ça, je veux vérifier quelque chose. On va voir si tu t’en sors tout seul, comme tu dis. » Il sort de sa poche une autre cigarette, qu’il porte à sa bouche. « Allume la. » Sa voix mêle son habituelle malice et douceur, mais reste impérative. C’est un ordre, lancé à celui qui ne supporte pas qu’on lui dise ce qu’il veut faire. Un ordre teinté de défi. Un peu plus penché vers lui, les regards se captent enfin, l’océan gelé de ses yeux s’accrochant à l’ambre de ceux de Lukas. Il veut jouer, Terry. Avec la vie, sa vie, ta vie. Avec le danger, l’excitation, l’adrénaline que lui procure ces simples petits mots glissés - envoûtants - entre lui son élève.
Il veut jouer avec lui. Jouer avec le feu.
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« Il pensait réellement que ça allait achever cette “dérive” de son esprit - et de son corps - mais c’était visiblement un échec; l’effet “Terry” était toujours là. »
« Je. ... Je sais pas faire doucement. » Bougonna l’ancien démon, fronçant les sourcils en ayant peine à regarder Terry dans les yeux. Avouer ses faiblesses était très difficile pour Lukas, mais Mr Clayton venant de frapper dans le mille avec cette demande. Bien cerné, l’impulsif et enflammé Lukas. Ce n’était cependant pas bien difficile de deviner cela chez lui.
Il lui suffit pourtant de croiser de nouveau le regard de Terry pour savoir qu’il allait tout de même essayer. Car il était là pour s’entraîner, pas vrai ? La mine toujours aussi dure - contrarié envers lui-même - il se tourna totalement face à Terry cette fois, le regard sur le bâtonnet. Puis, sur ses lèvres entrouvertes autour.
Il était contrarié de toujours ressentir cette chose - et ce malgré ce qui s’était passé avec Mack. Il pensait réellement que ça allait achever cette “dérive” de son esprit - et de son corps - mais c’était visiblement un échec; l’effet “Terry” était toujours là.
Peut-être même encore plus saisissant.
« ... Vous devriez pas jouer avec le feu. Et encore moins me faire autant confiance. »
Il avait pourtant le visage concentré et déterminé lorsqu’il s’approcha de Terry, réduisant l’unique pas de distance qui les séparait.
Face à face. Lukas s’efforçait de fixer la cigarette pour ne pas tomber de nouveau dans les prunelles de Mr Clayton - mais voila, il venait d’y penser, à ses yeux. Et le corps agissant sans la volonté de l’esprit, son regard de braise épousa le sien. Et comme à chaque fois, et cette fois plus encore, il se sentit y plonger.
Son coeur se mit à battre plus fort, plus vite. Son ventre se serra, sa respiration ne devint plus qu’un souffle court, incertain. Et il s’oublia dans son regard le temps de quelques secondes, bien incapable de mesurer et contrôler l’image qu’il laissait paraître à son professeur. Si proche de lui, yeux dans les yeux, il perdait le contrôle.
Ramené à la réalité par une force inconnue - peut-être la raison - il cilla et déglutit, baissant de nouveau le regard sur la cigarette. Au bout de ses bras tombants, au niveau de ses hanches, ses poings se serrèrent. Il ne savait pas faire doucement. Ses mains étaient de véritables machines de guerre, durement entraînées pour asséner des coups violents, bruts; elles devenaient désormais lance-flammes. Toujours essoufflé et suant suite à son entraînement, Lukas pouvait sentir une goutte perler sur sa tempe. La peur naissait dans son ventre. La peur de le blesser, de lui infliger la même brûlure qu’à lui, ou pire. Il ne pouvait pas répondre à sa demande. C’était totalement déraisonnable.
Mais Lukas était déraisonnable.
Alors, déglutissant de nouveau, il se pencha à peine en avant, approchant son visage si près de celui de Terry qu’il en avait le bout de sa cigarette au bord de ses propres lèvres. Et son coeur, lui, battait de façon démentielle.
Il fit pourtant absolument tout ce qui était en son pouvoir pour garder le contrôle, se concentrer malgré la nervosité évidente qui transparaissait de tout son être. Il fixait la cigarette, ne pouvait se résoudre à lever son regard dans le sien en étant si proche - il perdrait tout contrôle.
Alors, il inspira, et lorsqu’il expira à peine, une toute petite flamme s’échappa de ses lèvres pour embraser le bout du bâtonnet. Guère plus imposante qu’une flamme de briquet, elle s’évanouit d’elle-même, ne laissant d’incandescente que la cigarette sur laquelle Terry tirait sous le regard braisé de son élève encore tendu.
Celui-ci leva alors son regard dans le sien, et une seconde après, se redressa doucement pour retrouver une distance acceptable.
Avec ses mains, il lui aurait probablement brûlé le visage. Mais ses lèvres, elles, étaient capables de douceur. ...Grâce à Quinn.
Lukas déglutit, détournant le regard en se passant une main nerveuse dans la nuque, silencieux.
« ... Merci. » finit-il par dire à voix basse, fixant le sol.
Parce-qu’aussi étrange que cet exercice ait été, s’en était un. Lukas était parvenu à faire une flamme douce, presque innocente. C’était un progrès - et une ouverture d’esprit - pour celui qui ne s’était entraîné jusqu’ici à la violence et à la puissance.
A l’idée que Terry lui ait enseigné, indirectement, à faire preuve de douceur, son ventre se serra un peu plus encore et il risqua un regard dans ses iris dont il aimait tant la couleur.
“Merci de l’attention que tu pouvais... me porter.”
Quand il avait dit ça, Lukas l’avait regardé, avec probablement trop de sincérité et d’inquiétude dans le regard. Yeux dans les yeux, pendant deux petites secondes, le jeune Peters avait eu l’impression qu’il savait.
.... Etait-ce le cas ? Terry pensait-il quelque chose dans ce sens, alors qu’il restait là, à l’observer ? Et à la Jim’s, avait-il remarqué qu’à travers leurs masques, Lukas n’avait pu s’empêcher de le regarder bien trop longuement toute la soirée... ?
« ... A quoi vous pensez ? » Laissa t-il échapper de façon abrupte; trop impulsif, trop curieux, trop contrarié et craintif à l’idée d’être lu comme un livre ouvert.
Et se rendant compte du caractère intrusif de sa question, il rosit légèrement, mais fronça davantage les sourcils en tenant bon, son regard défiant droit dans le sien. Il assumait, borné et déplacé, attendait sa réponse. Insolent.
Il ne fait pas dans la douceur ? Tant mieux. Cette douceur - il en avait déjà subi toutes les amertumes et ressenti toute la douleur. Elle était devenue une part de lui, et ne la quittait plus, ceci même lorsqu’il ne voulait que violence et destruction. Dans chacun de ses mots, gestes - elle continue de l’étouffer, cette foutue douceur, celle de l’Autre. Il n’en voulait plus.
C’était pour ça qu’il sourit, lèvres serrées autour de sa clope, alors que Lukas s’approche enfin, décidé à s’exécuter. Le regard calme glissant sur son visage - sur la courbe de son nez, sur ses lèvres, sur le bas de son menton. Sur son torse nu. Mais non Lukas, c’est pas une question de confiance, même si c’est ce qu’il veut te faire croire. C’est juste qu’il s’en fout, d’être brûlé ou non. Il s’en fout, de passer pour un fou ou non. Il s’en fout, d’être plus qu’un incohérent ramassis d’émotions contradictoires, d’être un lunatique sans ciel ni étoiles. Il s’en fout de ce qu’on peut penser de lui. Il n’est plus comme l’Autre, à faire bien attention, à s’enfermer dans un cadre pour faire plaisir aux autres. C’est à lui, qu’il veut se faire plaisir. C’est ses désirs qu’il veut assouvir. Ses caprices. Ses passions. Il s’en fout de ce qu’on peut penser de lui, du moment qu’on le regarde - exactement comme Lukas le regarde. Avec une nervosité, une tension mêlée de crainte qui l’attire un peu plus. Parce qu’il sait pourquoi il a peur, Lukas. Il sait pourquoi depuis qu’il s’est approché, l’air s’est figé en agitation. En trouble. En excitation.
Il a compris l’effet qu’il faisait à son élève, Terry - et est curieux de voir jusqu’où tout ça pourrait les mener. Jusqu’où il pourra continuer de le torturer. Qui d’eux deux possèdera l’autre. C’est qu’une distraction de plus au programme de sa nouvelle vie.
Sa cigarette allumée par les lèvres de son élève, sa bouche qui étire un peu plus son sourire. Satisfait. « ... Merci. » « Merci à toi. » Il crache un filet de fumée, rieur. C’est toi qui l’a allumée, cette cigarette. C’est toi qui le commence, cet incendie. Est-ce que tu le sens ? Un frisson possessif le prend une fois de plus, alors que le jeune homme s’éloigne de quelques pas - alors qu’il bouge de lui même. C’est qu’il aimerait déjà le contrôler, lui ordonner de rester, et de continuer à jouer - il le pourrait, il en avait le pouvoir. Mais au fond, il sait que tout ça serait bien vite ennuyant. Et qu’il valait mieux attendre, le voir tomber de lui-même dans ses filets - il a tout son temps après tout. Mais il le veut maintenant. Mais maintenant n’est pas le bon moment. Trop de contradictions.
« ... A quoi vous pensez ? » A la manière dont il va te dévorer. La question le surprend, l’agresse - mais il n’en laisse rien paraître. Il s’avance de quelques pas, recouvrant une fois de plus la distance, et se penche vers lui. Alignant ses yeux aux siens, le transperçant. Lèvres toujours étirées en un sourire suave. Trop calme - trop plein d’un danger à peine dissimulé. « Et toi, à quoi penses-tu ? » Il espère que tu penses à lui. Lui lui lui.
Il espère être tout ce tu vois - tout ce que tu veux voir. Il espère - oh non, il en est persuadé. Noyé d’arrogance.
Il reste un instant ainsi, en silence, soufflant sa fumée contre les lèvres de Lukas, avant de se redresser. « Je me disais que j’avais eu raison de te faire confiance. Tu progresses vraiment vite. » Elle revient si vite la fameuse douceur qu’il ne demande qu’à pourrir. Joli mensonge tout enrobé d’un miel empoisonné. Cela dit, c’était vrai qu’il progressait. Pas que dans la maîtrise de son don, mais dans son estime, dans son échelle d’intérêt. Celui qu’il voyait comme un simple jouet remplaçant temporairement Arsène devenait quelqu’un d’autre. Ca grimpe, ça monte, ça lui brûle de plus en plus les tripes - et ça éclate finalement comme une évidence. « C’est plutôt intéressant. »
Des mots si simples qui sous-entendent tellement de choses, pour le coeur de ce scientifique dégoûté par la Vie - celle détaillée dans ses livres, dans ses notes, dans ses cours. Mots lancés droit dans ses yeux, sourire aux dents de loup accroché aux lèvres. Euphorie malsaine. Ou la naissance d’une bien trop violente et douce obsession.
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« Il avait voulu le regarder en pensant que ça l’apaiserait. Mais c’est toute sa puissance qui avait littéralement explosé. ... C’était quoi, cet effet qu’il lui faisait... ? »
Il n’avait pas répondu, se contentant de toiser Terry avec cet oeil farouche, animal. Ce regard était celui qui caractérisait Lukas, il l’arborait au quotidien. Mais tandis qu’avec le monde entier il l’accompagnait d’une allure offensive, celle qui signifiait “tu m’emmerde, j’te rentre dedans”, Terry était le seul face auquel l’ancien démon paraissait sur une posture défensive - un animal montrant les crocs mais sur le point de détaler au moindre danger. Pourtant Lukas aimait le danger, et plus encore, il aimait le braver. Lui aussi était plein de contradictions.
- Je me disais que j’avais eu raison de te faire confiance. Tu progresses vraiment vite. C’est plutôt intéressant. - C’est qu’une question de volonté., enchaîna Lukas du tac au tac, avec dédain.
Son talent n’avait rien d’exceptionnel à ses yeux. Il faisait partie de ces génies inconscients de l’être, de ceux qui émerveillaient et provoquaient la jalousie sans se rendre compte du trésor qu’ils représentent. « Tout est question de volonté. La preuve, c’est elle qui permet de contrer les dons de votre type. » Il se détourna de Terry, retournant vers ses affaires. « ... Je hais ces dons. » Confia Lukas plus pour lui-même qu’autre chose. Et c’était tout naturel de la part d’un esprit aussi faible que le sien. Tous n’avaient pas le talent de cultiver avec brio corps et esprit - comme le faisait remarquablement John pour ne citer que lui. Lukas en était bien incapable. Pourtant, il savait de quoi il parlait: lui qui n’avait la volonté de quasiment rien, lorsqu’il désirait ardemment quelque chose, il était capable de l’obtenir. Preuve en était de son talent en magie - à peine brûlé, le voila qui s’acharnait à dompter le feu. Et il était en bonne voie pour y arriver.
... Mais encore fallait-il qu’il ait la volonté de les contrer, les fameux dons du type de Terry.
Il se pencha sur son sac, cherchant à son tour son paquet de cigarettes. Après tout, si Terry se permettait de fumer dans le gymnase, il ne pourrait pas vraiment en empêcher Lukas. Insolent, immature et ayant un certain problème avec la hiérarchie, Taz ne voyait pas les choses plus loin que ça. Si il le faisait, lui aussi, le pouvait.
Cigarette mentholée en main, son regard se fixa sur son tee-shirt, un instant. Hésitant. Il devrait garder son corps au chaud après l’exercice. Il se releva pourtant sans. Et dans une oeillade à Terry, portant sa cigarette à ses lèvres presque avec défi, il s’approcha du mur pour s’y appuyer le dos, le torse nu, désinvolte.
Il avait choisi de ne pas remettre son tee-shirt, de s’exposer. Mack les avait apprécié, ses muscles. Sa carrure, ses abdos. Elle les avait caressé et embrassé inlassablement. ... Et lui, est-ce qu’il... ?
... Mais peut-être que les garçons ne l'intéressaient pas du tout. Et, de toute façon, pourquoi pensait-il à ça ?! Etait-il réellement en tain de rester torse nu avec le désir que Terry le regarde comme Mack l’avait regardé ?!
Contrarié, fâché contre lui-même et contre ses idioties, il détourna le regard de Terry pour le baisser là où sa main s’était ouverte paume vers le ciel. Il voulait à son tour allumer sa cigarette, mais cette fois avec ses mains - maintenant que Terry n’était pas... à porté de ses lèvres. Le ventre toujours légèrement serré, se sentant observé par son professeur, il se concentra en fixant l’espace au dessus de sa main. Mais c’est une puissante flamme qui jaillit au dessus de sa paume qu’il baissa et secoua aussitôt pour faire disparaître le feu. Surpris, mais pas tant que ça - sa théorie était juste. Ses mains étaient des armes, c’est ainsi qu’il les voyait, et tant qu’il aurait cette vision d’elles il ne pourrait créer de flamme douce avec. Il réessaya pourtant, et de nouveau, une gerbe de flamme menaçante embrasa l’air juste à portée de bras. Sourcils froncés, concentré, Lukas commençait à s’énerver - la présence de Terry n’arrangeant rien. Pourtant, toute à l’heure, si près de lui, il avait réussi... Peut-être que Terry l’aidait à être plus... tendre ? Paradoxalement...
C’est sur cette pensée qu’il leva un regard dur mais hésitant sur son professeur. Il inspira, et plongea ses yeux ambrés dans les siens. Sur le moment, il se ficha que Terry comprenne la manœuvre qui consistait à croire qu’il l’apaisait d’une quelconque façon. Lukas voulait réussir, peu importe comment. Tout était-il réellement qu’une question de volonté ? Si Terry avait réellement une influence sur ses capacités, cela voulait dire que non.
Son regard était désormais ancré droit dans celui de Terry, désinvolte et sans peur. Il y brillait même, l’espace d’un instant, une flamme d’arrogance.
Et c’est une véritable explosion de feu qui surpris Lukas qui n’eut d’autre choix de se décoller à toute allure du mur pour se jeter par terre, perdant tout contrôle. Et semi-allongé au sol, les yeux écarquillés et le souffle court, il découvrit une énorme trace noire sur le mur, à l’endroit même où il était appuyé une seconde plus tôt. Heureusement, le feu avait aussitôt disparu, sans rien enflammer.
Le coeur palpitant à dix mille à l’heure, l’ancien démon y apposa sa main comme pour le calmer, un reste de peur et des images d’incendie plein la tête, juste l’espace d’une seconde. Appuyé sur un bras, son regard dériva sur Terry - qui Dieu merci n’avait rien. Il avait voulu le regarder en pensant que ça l’apaiserait. Mais c’est toute sa puissance qui avait littéralement explosé. ... C’était quoi, cet effet qu’il lui faisait... ?
Le regard plein de questions, d’inquiétudes, d’incompréhension et de fierté bafouée, Lukas le quitta des yeux en soupirant, se laissant tomber allongé sur le dos. En short, il replia une jambe, laissa tomber ses bras sur le sol. Il avait été à deux doigts de se brûler. Fixant le plafond, son torse se soulevant avec sa respiration, il resta silencieux mais pourtant obsédé par cette question dont il espérait - vainement - que Terry n’ait pas l’intelligence d’y penser:
C’était quoi, cet effet qu’il lui faisait ?
Il se passa une main dans les cheveux, y restant agrippé un instant, fixant le plafond avec la crainte de croiser de nouveau son regard. Parce-qu’il avait été évident que Lukas s’était concentré sur lui. Alors il était évident que cet effet venait de lui.
... Et il était tout aussi évident qu’ils le savaient tous les deux, lui le génie de Magie, et Terry, le professeur de sciences presque assez doué de connaissances en la matière pour annihiler la Magie elle-même.
T’as raison Lukas, tout est une question de volonté. Cette même volonté qui a embrasé l’Autre, l’espace d’un instant - cette volonté de changer. Cette volonté née dans la faiblesse la plus profonde.
Pendant un instant, il se demande si son élève aurait la volonté de résister à son don. La force de se défaire de l’emprise qu’il peut avoir sur les esprits - tout en puissance, en décadence. Le professeur a un instant d’absence à peser le pour, le contre, à étudier les possibilités - le regard dérivant sur les omoplates tendues de Lukas. Non, bien sûr que non - ça ne vaudrait pas le coup. Après tout, il arrive déjà assez bien à jouer avec l’esprit de son élève, sans sa persuasion pour l’aider. Ou du moins, c’est ce qu’il croit. Lui, l’anomalie née du délire de l’Autre.
Si fier d’enfin avoir un impact sur quelqu’un, il s’applique à ce que celui-ci soit indélébile.
Le silence règne dans le gymnase, où l’ambiance s’est une fois de plus métamorphosée. Défensive. Comme si au fond de lui, Lukas savait qu’il devait craindre cet homme aux sourires trop polis. Cet homme qui s’en enchantait, une fois de plus. La crainte de Lukas étant trop rapidement devenu un nouveau tabac - un nouveau truc à fumer pour s’en cramer l’intérieur. Boum boum. Ca bouillonne et tourbillonne en lui, ne demande qu’à exploser, sans jamais y parvenir. La conscience de l’Autre toujours là, le bridant. Il ne demande qu’à devenir fou mais n’en est pas capable. Frustré. Alors, mauvais perdant, il transforme sa frustration en arme. En jolis sourires étirés, remplis de danger - et de promesses.
Regarde Lukas, t’as juste à t’approcher un peu plus, à arracher la première chaîne. Ce sera pas beaucoup d’effort Lukas. Rends-Le fou Lukas, rend-moi fou.
C’est ce qu’il lui ordonne d’un regard de givre intense, maintenant qu’ils se retrouvent face à face. Provocation. Chacun à un bout de la pièce. Lukas s’étant enfin décidé à l’affronter. Et chacun de leur côté, ils se défient. Leurs iris se gorgeant d’une arrogance liquide qui les fait un peu plus se redresser. Terry glisse ses mains dans ses poches, incline sa tête de côté. Il attend de la voir, la volonté qu’il peut inspirer à Lukas - il attend de vérifier si elle est pareille à ses flammes. D’une sublime violence.
Incendie. Il n’a même pas bougé d’un millimètre alors que les flammes ont jailli face à lui - juste assez proche pour qu’il puisse en sentir la chaleur. Ses lèvres, par contre, n’ont cessées de s’étirer, fermées sur sa cigarette. C’était donc là le feu qui brûlait pour lui. C’était la première fois que quelque chose brûlait pour lui. Et la joie qu’il pouvait sentir pulser dans ses paumes avait quelque chose d’effroyablement attirant. Intéressant une fois de plus. Ses pas glissent, furtifs sur les tapis de sol, et son ombre vient se décalquer au dessus du corps allongé de Lukas. Le visage tout droit baissé sur celui de son élève.
Un air victorieux peint sur le visage - qui l’espace d’un instant aurait pu ressembler à celui d’un enfant venant d’obtenir le jouet de ses rêves.
Il laisse passer un silence, avant de s’accroupir doucement, se penchant un peu plus sur Lukas. Il sait que celui-ci ne parlera pas en premier. Pas après sa démonstration si évidente. Il ramasse la cigarette qui avait été laissée de côté pour la glisser entre les lèvres de son élève - d’un contact aussi soudain qu’éphémère. « Je crois que tu vas devoir encore compter sur ton briquet pour l’instant. » C’est dit gentiment, mais avec ce petit air satisfait qu’ont les gagnants. Celui qu’on a très vite envie d’effacer de leurs visages. « Encore un peu de travail à faire au niveau de ta volonté. Mais je sais que tu y arriveras. » A lâcher complètement prise. Lui aussi sait être insolent. Il se penche donc encore un peu, histoire d’allumer la clope de Lukas avec le feu presque éteint de la sienne. Les visages si proches, les souffles si chauds. Pendant un instant, il peut même sentir l’odeur de cendres, mêlée à celle de l’humidité. Une odeur qui lui plaît.
La distance s’allonge aussi vite qu’elle s’était raccourcie - il se relève tranquillement, lui tendant une main pour l’aider à se relever. La main tendue d’un égoïste. La main tendue d’un chasseur pour sa proie. « Je ne te conseille pas de rester les muscles ainsi exposés, surtout pas après un effort. Si tu suis mes cours, tu dois bien savoir pourquoi. » Tu dois bien savoir. Pourquoi. Pourquoi il te fait cet effet là. Et pourquoi ta peau exposée à ses yeux peut être quelque chose de très très dangereux.
Après tout, c’est toi qui brûle déjà.
▬ Début janvier • D4RK Terry parle en cadetblue • Code par Lix ♥ ▬
« Comment l’oublier alors qu’au moment ou Terry se pencha au dessus de lui, le regard de Lukas s’accrocha au sien, vorace, bouffant; affamé. »
Le coeur qui battait un peu trop vite, un peu trop fort. Et il la ressentit aussitôt, sa présence, au dessus de lui. En plus de faire de l’ombre sur ses yeux clos, il y avait cette aura, qu’il ressentait inévitablement lorsqu’il était proche. Cette présence qu’il ressentait à peine avant la Jim’s - mais qu’il ressentait quand même, là où les autres ne le voyaient pas, le professeur de bio. Lukas l’avait plus ou moins vu dès le début, et de plus en plus. Et puis, un moment, il ne s’était plus contenté de le voir. Il l’avait regardé. De plus en plus. Et de “plus” en “trop”.
« Je crois que tu vas devoir encore compter sur ton briquet pour l’instant. » Il a cillé, lui qui tentait de regarder ailleurs malgré la présence imposante de Terry au dessus de lui. Il n’avait même pas essayé de se convaincre que ce contact sur ses lèvres - entre ses lèvres - ne lui avait rien fait. La vérité était qu’il ne pouvait plus nier. Pourtant, il le voulait.
« Encore un peu de travail à faire au niveau de ta volonté. Mais je sais que tu y arriveras. » A t’oublier... ?
Mais comment. Comment l’oublier alors qu’au moment ou Terry se pencha au dessus de lui, se rapprocha dangereusement pour allumer sa cigarette avec la sienne, le regard de Lukas s’accrocha au sien, vorace, bouffant; affamé. Il la sentait, en lui, cette chose bouillonnante qui n’avait rien à voir avec son don. Cet instinct, cette pulsion. Ce désir. Et plutôt que de détourner les yeux, il le fixait, presque provoquant.
Presque, l’appelant.
Et pourtant Terry se redressa, et avec lui quelque chose s’arracha de Lukas, se décrocha, s’éloigna - il en ressentit aussitôt un manque. Et il aurait aimé se persuader que c’était bien quelque chose à lui qui venait de disparaître, mais non; c’était simplement lui. C’était la présence de Terry qui s’était éloignée, et c’était lui et seulement lui qui lui manquait.
Alors, quand sa main se tendit vers lui, Lukas la pris. Lukas s’en empara. Et Lukas se laissa emporter.
- Je ne te conseille pas de rester les muscles ainsi exposés, surtout pas après un effort. Si tu suis mes cours, tu dois bien savoir pourquoi. - J’comprend rien à vos cours.
Vérité trop brutale, bougonnée de la part du maladroit qui avait déja oublié lui avoir confié qu’il s’agissait de son cours préféré. Et c’était presque avec la volonté de lui faire du mal, de blesser sa fierté de professeur, son amour de l’enseignement qu’il avait dit ça. Encore une fois, il n’avait obéit qu’à ses pulsions, la raison arrivant toujours avec un train de retard. Et il regrettait déja. Ou qu’à moitié.
Upset.
« J’vais rentrer. » Du travail sur la volonté ? Vraiment ? Pourtant Lukas avait l’air plus que décidé quand il rangea en vrac toutes ses affaires dans son son sac, se rhabillant cette fois sans hésitation. Fini de jouer. En vérité, la façon dont Terry s’était approché pour allumer sa cigarette, le regard qu’ils s’étaient échangé, cette chose qui avait circulé entre eux à ce moment là était purement et simplement en train de le rendre dingue. « ... d‘bye... » Et, cigarette en main et sac sur le dos, Lukas fit la seule chose qu’il pouvait faire pour échapper à son emprise, son aura, sa présence, et cette chose irrésistible qui l’attirait toujours plus à lui: fuir, fuir la tête baissée, le regard rivé au sol et sans se retourner.
Du travail à faire sur ma volonté ? Regardez donc ça.
Et pourtant.
Sitôt qu’il fut à l’abri, certain que, là, Terry ne pourrait le rejoindre, Lukas prit le temps de fumer sa cigarette. Il prit le temps de la sentir entre ses lèvres. D’en inspirer chaque dose. D’en avaler la toxicité.
Et, avec le plus grand des plaisirs, prit le temps de savourer son addiction qu’il savait ô combien dangereuse.