Take me to church ♛ Myosotis

Take me to the church...
avec Herbert Hunter

Une matinée banale alors que je me sentais étrange. En ce moment, un sentiment bizarre était né en moi et ce déjà depuis quelques journées. Quelque chose sur lequel j'avais besoin de mettre des mots mais surtout je me devais d'être seule si je ne voulais pas craquer. Je détestais ses moments de faiblesses, je détestais pleurer. Je me sentais faible dans ses instants et préférais m'isoler pour me changer les idées. À ce moment précis, j'avais en tête  l'expression "prendre l'air", décortiquée, elle voulait clairement dire "je m'en vais car ici j'asphyxie."
Alors armée de mon casque et de mon téléphone en mode avion s'il vous plaît, histoire d'éviter tout contact avec le monde, je m'étais motivée à aller m'isoler un peu sur la plage. Le sable chaud et la solitude c'était tout ce dont j'avais besoin.

Je venais d'arriver à la plage. Chaussures enfouies dans le sac, casque posé sur les oreilles, je lançais une musique en boucle et m'élançais sur la plage.

« My lover's got humour
She's the giggle at a funeral
Knows everybody's disapproval
I should've worshiped her sooner...»

La musique raisonnait dans mes oreilles. C'était un souvenir d'une autre époque, d'une autre histoire mais cette musique était celle qui me détendait quand j'étais tendue et perdue comme aujourd'hui. Je me souvenais encore du jours où je l'avais écouté pour la toute première fois, une nuit passée à regarder les étoiles, une nuit qui me faisait encore sourire aujourd'hui.

« ...If the Heavens ever did speak
She is the last true mouthpiece
Every Sunday's getting more bleak
A fresh poison each week ... »

J'adorais cette musique pour son côté doux du début qui s'accélérait en un côté mouvementé qui donnait envie de se bouger, de s'agiter et de prendre les choses en main. J'étais seule sur la plage et j'avançais en chuchotant cette musique à moitié en dansant plutôt qu'en marchant tellement cette musique me prenait au tripe... Mon moment préféré approchait.

« ... "We were born sick", you heard them say it
My church offers no absolution
She tells me 'worship in the bedroom'
The only heaven I'll be sent to
Is when I'm alone with you  
I was born sick, but I love it
Command me to be well ... »

Je m'emballais, mon coeur aussi. Mon esprit s'emportait alors que le refrain arrivait.

« ... Take me to church
I'll worship like a dog at the shrine of your lies
I'll tell you my sins so you can sharpen your knife
Offer me that deathless death
Good God, let me give you my life ... »

Alors que je m'apprêtais à fermer les yeux je remarquais au loin une silhouette. Une silhouette familière. D'un coup de poignet, j'essuyais une larme fuyarde qui venait de s'échapper alors que je fixais le jeune homme qui n'étais plus qu'à quelques mètres de moi. Ses grands yeux bleus et ses cheveux blonds, sa démarche, son visage fin. C'était sans aucun doute possible Herbert. Moi qui étais déjà pommée comme ça, je n'arrivais pas à savoir si cette rencontre était une bonne ou une mauvaise chose. On parlait quand même de mon premier amour, du seul homme que j'ai aimé de cette façon. Un large sourire se dessina sur mon visage alors que je détaillais à présent chacun des traits du sien.

» - Herbert ! » Lançais-je en me précipitant vers lui en sautant à son cou. Déjà à l'époque, il était plus grand que moi, mais là, c'était vraiment impressionnant. Mais ça ne m'avait pas empêché de lui sauté au cou.  

Take me to church...
avec Herbert Hunter

Mon corps se soulevait légèrement avant de retoucher le sol alors que j'entendais sa voix hésitante. Il n'avait pas changé, mais en même temps, il avait tellement changé. J'avais l'impression d'avoir un jeune homme face à moi et je détaillais les traits de son visage dont je me souvenais si bien. Tant de souvenirs jaillissaient, remontant à la surface des bons moments et des moins bons. Des regrets aussi, notre rupture s'était particulièrement mal passée et ma fierté avait prit le dessus sur mes sentiments. Stupide que j'étais. Je retirais mon casque et le rangeais rapidement alors qu'il hésitait sur les paroles à lancer.

» - Désolée j'avais vraiment besoin de m'éloigner et de prendre du recul... Oui ça fait presque un an qu'on ne s'est plus parlés je crois ? Qu'est ce qu'on a été bête quand même... »  Lançais-je en laissant mon regard se perdre dans les vagues de la mer.

Si je m'attendais à le revoir ici. La plage avait été un de nos lieux d'amoureux de prédilections, on avait passé des heures entières allongés sur une serviettes ou à même le sable à rire, à parler, à profiter, à s'embrasser. Un sourire se dessina sur mon visage. j'avais envie de lui prendre la main, de courir sur la sable à en perdre haleine, de jouer à nos jeux d'enfants de celui qui se ferai mouiller par la vague en dernier, se pousser au bord de l'eau, escalader les cailloux qui bordaient certains coins...
Soudain, une question me traversait l'esprit. Oui, il avait énormément grandit en taille, mais est ce que mentalement aussi ? Avait-il mûrit ? Son caractère était il le même ? La gamine s'illumina en un instant dans mes yeux, pleine d'interrogations et de défis lancé dans le vide.

Je me souvenais du moment où j'ai commencé à être méchante avec lui puis à tout bonnement l'éviter. J'en avais besoin, j'étais plus que perdue et aujourd'hui, je regrettais amèrement cette idée. Si quelqu'un de l'académie aurait pu m'aider à me sortir du trou dans lequel je glissais, c'était sûrement l'unique et le seul. Mais j'avais préféré me la jouer solitaire et avais préféré toucher le fond pour remonter seule. À tord ou à raison, dans tous les cas, j'avais beaucoup regretter ce choix par la suite.
Je remarquais que je ne répondais pas à sa question depuis plusieurs secondes déjà et souris à son compliment, un peu maladroitement.

» - T'as encore grandit, ça te va vraiment bien. T'es toujours aussi craquant qu'avant. » Lançais-je en espérant ne pas le gêner...

Je le détaillais rapidement. Il était presque totalement comme je l'avais connu à quelques choses près. Beau, grand, il était plus que plaisant à regarder et je me souvenais avoir passé de longues heures à le regarder en face ou en photo tellement je le trouvais beau. Pendant longtemps d'ailleurs, j'avais gardé une photo que j'avais de lui comme marque page quand je lisais jusqu'à ce qu'un garçon d'un soir (enfin, une histoire pas sérieuse) tape une crise de jalousie et fasse disparaitre ce marque page. Salaud.

» - Tu... Beaucoup de choses ont changé depuis qu'on ne se parle plus ? » Demandais-je en commençant à marcher vers les rochers sur lesquels nous pourrions nous assoir.

Take me to church...
avec Herbert Hunter

Je venais d'atteindre les rochers alors que Herbert expliquait qu'il était content de me revoir. Joie plus que partagée en tout cas. Tout ce qu'on partageait, nos regards et nos discutions m'avaient tant manqués. Je sentais ses yeux sur moi alors que je parlais, je sentais l'attention qu'il mettait à ne pas me couper la parole. Après une question sur ce qu'il devenait, je sentis comme un épais voile de gêne se poser sur lui. J'avais la sensation de le voir se débattre avec ce voile avant d'en sortir seulement la tête. Le beau blond s'emmêla les pinceaux avant de parler de sa classe. Dans mes souvenirs, il avait toujours été plutôt bon élève...
Mais il y avait autre chose que ça, après avoir passé plus d'une année collés l'un à l'autre, j'avais l'habitude de ses tics, de ses manies et de ses réponses. Je n'aurai pas la prétention de dire que je le connaissais à la perfection, mais je savais que j'étais tout de même capable de déceler les sentiments qui lui traversaient l'esprit même quand il cherchait à les cacher. Après tout, il savait si bien le faire avec moi...

Sans le fixer droit dans les yeux, je baladais mes yeux sur les vagues en laissant un silence pendant quelques secondes. Une grosse question se posait dans ma tête : Étais-je en droit de lui demander la vérité ? Après l'avoir fuit pendant aussi longtemps, après avoir cherché à ne plus avoir de contact avec, était-je vraiment en droit d'espérer qu'il se confie à moi ? Ce n'était pas vraiment par curiosité, mais plutôt par inquiétude en fait. J'hésitais quelques secondes laissant cette bataille faire rage en moi. La troupe côté "Tais toi, t'as pas à poser des questions, s'il voulait parler, il te le dirait." perdait du terrain face aux guerriers du "Tu pourras peut-être l'aider, le rassurer ou le conseiller ? Tu le connais bien après tout. Demande lui !"

» - T'es sûr qu'y a rien d'autre qui te tracasse ? T'as l'air un peu ailleurs. » Demandais-je alors que le deuxième troupe venait d'envahir complètement le terrain du "tais toi donc".

Ne cherchant pas à le fixer droit dans les yeux (parait que ça gêne les gens), je m'allongeais sur les cailloux et observait le soleil qui baissait alors que je me berçais par le bruit des vagues. L'envie de courir sur le sable comme autrefois me démangeais, mais j'avais terriblement envie de parler avec Herbert. Après tout, on avait près d'un an d'absence à rattraper et j'espérais que cette conversation s'étendrait. Mes sentiments pour lui avaient prit énormément de temps à s'évaporer et je restais persuader qu'un petit quelque chose restait encore. Après tout, pouvait-on vraiment oublier son premier amour ? Quelque chose d'aussi fort ? Notre histoire m'avait changé, aussi cliché que ça puisse être.

» - Après... Je te force pas à parler, je peux comprendre qu'il y ait des sujets à ne pas aborder, mais tu me connais, j'suis pas très douée pour les reconnaître..  » Lançais-je comme issus de secours s'il ne voulait pas se lancer sur le terrain des choses qui le tracassaient.

Take me to church...
avec Herbert Hunter

Des mots, des phrases, des confidences et c'est comme ça qu'on glissait peu à peu sur deux chemins qui se rapprochaient de la complicité perdu durant ces mois éloignés. J'étais, au fond de moi, soulagée de voir qu'il me faisait toujours assez confiance pour oser se lancer dans une confidence.
À l'instant où il commençait à expliquer le pourquoi du comment de ce qui le tracassait, je ressentais un étrange pincement au fond de moi. Une autre fille l'avait rendu amoureux et le jeune garçon se sentait triste de ce que l'on appelle communément un "râteau". Évidemment que je savais bien que depuis notre rupture, lui aussi avait du retomber amoureux et pas forcément une seule fois. Mais je n'sais pas si c'était le fait que justement il ait aimé une autre fille ou au contraire, si c'était parce qu'une demoiselle lui avait fait mal. Je n'étais pas possessif pour deux sous, mais le fait de savoir que quelqu'un faisait du mal à une personne à laquelle je tenais autant, ça ne me laissais pas indifférente.

J'hésitais quelques secondes, laissant à Herbert la possibilité de gérer son stress visible alors que je réfléchissais à une réponse correct. Je connaissais son côté sensible, je savais qu'il s'attachait beaucoup et prenait les choses à coeur et perdre ou voir s'éloigner l'un de ses meilleurs amis n'est facile pour personne. J'avais l'envie de poser ma main sur la sienne, compatissante et avant même que l'idée que cela puisse le gêner ne me traverse l'esprit, j'avais mes doigts sur les siens. C'était pas un geste amoureux, ou quoi que ce soit, c'était juste une façon de lui dire que je compatissais.

» — J'suis pas d'accord, j'pense pas que ça soit une excellente idée de garder ce qu'on ressent pour soi. Au moins, là tu sais où t'en es par rapport à elle... » Je laissais un temps de pause de quelques secondes, hésitante à continuer ma phrase.

Je me pinçais le coin de la lèvre, comme d'habitude quand j'hésite ou réfléchis. Une pensée me titillais, était sur le bout de ma langue, mais je ne savais pas trop si c'était bien poli à dire et surtout si elle aurai une quelconque utilité pour lui. Moi je pensais que laisser une amitié se changer parce que l'un a des sentiments pour l'autre, c'est bête. C'est pas une honte, je ne voyais pas pourquoi on devait changer de comportement sous prétexte que des sentiments amoureux sont nés chez notre ami...

» — Puis... C'est pas une honte d'être amoureux. J'comprends pas qu'elle laisse votre amitié changer pour ça. Tu verras, j'pense que si c'est une fille bien, elle laissera pas votre amitié casser ou s'éloigner juste pour cette raison. »  Lançais-je avec mon tact habituel. Faudrait vraiment que je pense à choisir l'option "tact et éviter de gêner autrui" à mon prochain spawn sur terre.

Je tournais mon regard en sa direction, sur ses cheveux roses. Le souvenir du nombre de fois où nous nous étions mutuellement aidé pour obtenir la couleur de cheveux désiré remontait dans ma tête. Je crois que c'est avec Herbert que j'ai eu l'idée de me teindre les cheveux en rose. À l'époque où je l'ai rencontré, j'avais les cheveux blancs, blanc neige si mes souvenirs sont exacts. C'est lui qui m'a ajouté ce brin de folie que j'avais gardé jusqu'à aujourd'hui et duquel je ne souhaitais pas me séparé et ce pour rien au monde. Mainte fois on m'avait fait des remarques sur la couleur excentrique qui me colorait, mainte fois, j'avais eu des commentaires désobligeants de petites poufs superficielles mais aucune phrase ne m'avait fait regretté les souvenirs que j'accrochais à cette couleur. Même si parfois, dans des élans de changement, je fonçais ma couleur de rouges ou de violets...

Take me to church...
avec Herbert Hunter

Quelques secondes après que je finisse ma phrase et Herbert me répondait d'une voix assez hésitante et assez gênée. J'avais l'habitude de son comportement et, avec lui, on finit par s'y habituer même si j'ai toujours eut l'espoir de le voir prendre de l'assurance. N'empêche que pendant le temps de notre relation, il semblait heureux et rien que ça, ça me faisait déjà sourire.

Alors, silencieusement, j'écoutais les paroles d'Herbert. Sa justification maladroite semblait tout de même assez réaliste et si, comme il le disait, cette Sonera en question était une fille bien, je ne doutais pas du fait qu'ils finiraient par rester amis. Évidemment, au moment où le jeune garçon aux cheveux roses prononça le prénom de sa nouvelle bien aimée j'avais ressenti un étrange pincement au coeur. C'était quelque chose de bizarre mais malgré que mes sentiments pour lui étaient presque réduit au strict minimum sur l'échelle des sentiments amoureux, je n'avais pu m'empêcher de ressentir un petit pincement, comme si mon coeur me chuchotait : " Tu te souviens, avec lui, comme tu étais heureuse ? Il va rendre une autre fille heureuse, et c'est bien mieux comme ça. " Et j'étais d'accord avec ça.

Son regard doux se reposa sur moi alors qu'il venait de finir sa phrase. Je comprenais qu'il était soulagé de notre discussion et même si je n'avais sûrement pas pu lui apporter une grande aide, il pourrait en déduire que j'étais toujours une oreille attentive si le besoin de parler se manifestait. À supposer qu'il ait encore mon numéro de téléphone, j'espérais qu'il sache qu'à n'importe quelle heure de la journée ou de la nuit, j'étais disponible pour parler. De toute façon, il devait bien se souvenir de mes heures de sommeil complètement étranges.

Je dessinais un léger sourire sur mes lèvres alors que Herbert me lança une brève parole qui, instinctivement, me fit hausser les sourcils et élargir mon sourire. Merci ? C'était normal.

Comme s'il devinait que ses remerciements semblaient incompréhensibles, le jeune étudiant développa sa phrase avec une petite moue charmante.


» — Tu ne m'embêtes absolument pas Herbert ! »  Lançais-je en lui poussant légèrement l'épaule avec la mienne. « Ça me fait plaisir de te revoir d'ailleurs, et puis tu sais, si t'avais eut besoin de parler même après notre bêtise, j'aurai été là sans problème ! » Ajoutais-je en souriant.


« Bêtise » désignait, pour moi, notre rupture, le moment où l'on s'est quitté pour une raison aussi bête. Le moment où un point à mis un terme à notre histoire et mine de rien, le moment où ma vision des choses de la vie a énormément changé. Encore aujourd'hui, je gardais un petit paquet de regrets et de remords quand à cette histoire.

Je laissais le temps couler quelques secondes, lui laissant l'occasion de lancer le sujet qu'il voudrait.