What do you flee to run like that ? | Feleamour

Certains individus ont pour habitude de réfléchir avant d’agir. Ils inspectent minutieusement les différentes options qui s’offrent à eux et généralement ils optent pour celle qui fait le moins de vague… Puis il y a Féléa. Rare spécimen qui se pose peu de question et qui prend un soin méticuleux à suivre ses envies et ses impulsions.

C’est ainsi que le professeur envoyait valser ses convers, laissant ses pieds nus sur la pelouse qui entourait le stade. L’homme gardait son regard sur le jeune garçon à la chevelure enflammée qui trottait paisiblement sur la piste. Vêtu simplement et de façon pratique, son cadet semblait absorbé par le contenu de ses écouteurs. Expression renfrognée sur le visage, les cheveux qui dansaient au rythme de sa course… Féléa eut un sourire malicieux. Il s’amusait d’avance d’aller perturber le tableau calme que peignait le coureur.
Tout en continuant d’observer discrètement la source de son divertissement, le brun fit tourner rapidement ses chevilles et s’étira succinctement, surtout au niveau de son épaule droite. Au passage il nota que sa chemise turquoise ne permettait pas une amplitude suffisante à ses mouvements vu ce qu’il prévoyait. Il déboutonna donc simplement cette dernière, laissant ainsi visible son torse qui expliquait clairement que l’effort physique et lui étaient des amis de longues dates. Puis d’un regard pensif, il observa son jean noir… se demandant si les coutures tiendraient… Puis il haussa les épaules et se lança.

Enchainant de belles et longues foulées, ses pieds tapèrent un rythme soutenu pour rattraper le garçon. Arrivant derrière celui-ci, il accéléra encore et d’une main désinvolte il attrapa l’un des fils des écouteurs du jeune homme pour le lâcher une fois que l’oreillette s’était délogée de sa place initiale. Passant devant le coureur en trombe, il s’arrêta une petite dizaine de mètre plus loin et lança avec un regard provocateur et un sourire malicieux :

« Ah la jeunesse… ce n’est plus ce qu’elle était… »

Puis lentement, il recula d’un pas, puis de deux un peu plus rapidement. Se préparant à tout instant à repartir au galop. Près à en découdre avec cet élève du pensionnat.

Se fut avec une satisfaction des plus délectables que le professeur vit le jeune homme porter son regard sur lui. Une expression toujours aussi renfrognée sur le visage… il semblait évaluer rapidement l’individu qui était venu détruire sa course tranquille. De son côté, Féléa continuait de dégager un air provocateur soutenu par un délice de malice. Patient, il vit l’élève ranger ses écouteurs dans son haut… puis retirer celui-ci pour le jeter négligemment sur la pelouse. Chose qui ne manqua pas d’élargir le sourire du brun. Son vis-à-vis se mettait à l’aise… pour une suite des évènements qui allait lui donner chaud. Bagarre ou course ? Il fallait dire que le joyeux perturbateur ne connaissait rien du coureur… et c’est ce qui lui plaisait. La surprise ! L’excitation de devoir improviser face à l’imprévisible !
Se préparant à tout, il observa l’Allumette qu’il avait embrasé inspirer en ancrant son regard dans le sien. Il n’avait pas peur de la confrontation… Tête haute… l’homme voyait la détermination jaillir du regard de son cadet. Il aimait cela. La suite se promettait très divertissante.

Puis le coureur fit un pas… puis deux…se lançant dans un enchainement endiablé.

«Alors papy, on se fait vieux? »

Papy ? Féléa haussa un sourcil qui se voulait faussement indigné. L’élève passa alors devant lui en le bousculant… Le jeu était lancé. Le brun, se lança à sa suite. Coude à coude… ils dévoraient la piste à vive allure. Le prof souriait comme à chaque fois qu’il trempait dans une compétition.
Mais courir en cercle, ça avait un arrière goût de poisson rouge dans un bocal. Routinier… chiantissime. L’homme aimait le piment. Il fallait innover et rendre la chose enivrante.

C’est ainsi qu’il lança à son concurrent :

« Papy te propose la chose suivante : Le premier qui arrive sur le toit du pensionnat. »

Il lança alors un regard moqueur au coureur.

« Si tu gagnes… je te couvrirai trois fois avec mon statue de prof. En revanche… si je gagne… »

Il fit mine de réfléchir alors qu’il savait déjà ce qu’il voulait.

« Tu me serviras à trois reprises de cobaye pour mes cours d’Arts »

Puis il prit la même expression que celle d’un adulte face à un nouveau né :

« Qu’est ce que tu en penses Bébé? » Il avait prit une voix enfantine pour le dernier mot. Bien décidé à attiser au mieux l’esprit de compétition de celui qui se défoulait avec lui.

« Très bien. Je ne sais pas ce que tu souhaites prouver, mais si cela peut te remettre à ta place... »

Le remettre à sa place ? Féléa se mit à sourire. Ce qu’il fallait savoir avec cet homme c’est qu’il n’avait justement aucune place. Il ne supportait pas d’être limiter à un espace ou un rôle… il était une tornade qui emportait tout sur son passage. Tout essayer, tout faire… ne jamais s’arrêter aux limites du corps ou de l’esprit. Ignorer la raison, la bienséance et les règles de la société. C’était un esprit libre qui se suivait ses lubies.

Bref, il eut l’immense plaisir de voir le jeune homme démarrer comme une furie.  En moins de temps qu’il ne le fallait pour le dire, il se lança à sa poursuite. Son opposant était à peine plus petit que lui… les deux avaient optés pour des chemins « non conventionnels ». L’élève avait la jeunesse mais Féléa avait l’expérience… les deux équilibraient la balance. Le prof ayant passé sa jeunesse à courir comme un fou en Guyane avec ses amis et avec une forme physique des plus médiocres. C’était un habitué des dépassements de soi, les limites de son corps il les piétinait. Mais le jeune homme avait la vigueur de la jeunesse et l’énergie de l’adolescence. Mais une chose fit la différence… l’épuisement déjà accumulé par la journée. Féléa était tout frai… c’était pas très réglo… Mais c’était justement le but.
Avoir un jeune homme aux expressions faciale constipées comme cobaye artistique… il allait s’amuser.

Bref, de peu, Féléa arriva en tête. Il s’étira rapidement pour limiter les risques de courbatures et reprit son souffle paisiblement. Mais son regard explosait de satisfaction.
Mais restait plus qu’à savoir si la parole de son élève comptait…
Il s’approcha donc du garçon et attrapa ses joues avec ses doigts pour les lui tirer comme on le ferait à un enfant boudeur.

« Mon pauvre chéri… »

Il prit une mine faussement inquiète.

« Tu vas t’en remettre ? Tu veux peut être un gros bisou pour te remonter le morale ? »

Féléa chercher la merde ? Mais non voyons… Ce n’est qu’une impression.