croissants et chaussons ~

Mains dans les poches de ce petit short blanc à petit poids noirs, tu marches, le regard captant tout ce qu’il se passe autour. Observant et analysant le paysage ainsi que les habitants et les quelques touristes qui persistaient. Il faisait encore chaud, d’où ta tenue légère, malgré les baskets blanches qui étaient bien plus agréables pour déambuler comme tu le fais si bien.

Tu dois te rendre au Remains, un petit café sympa parait-il dans le quartier des arts. T’as demandé ton chemin à un vieux monsieur à qui il manquait quelques dents, mais qui fut fort aimable. Là bas tu devais retrouver ton parrain, ou autant dire le mec que l’administration t’avait attribué comme tuteur, ou nounou, tout est une question de point de vue. Le gars dont tu pensais pouvoir largement te passer. Tu aurais bien voulu refouler son invitation de cet après-midi, message envoyé par LMS, tu es définitivement fan de ce système avec les lézards ; mais la tentation de rencontrer un type tout bleu te plaisais grave. Bon et rencontrer un E aussi, vue ce que tu entends, t’as l’impression d’avoir affaire à une espèce rare et très intéressante.

Comment tu sais que ce cher Stauskas Orpheus Sawyer -nom de famille qui te fait franchement penser à Tom Sawyer le môme indiscipliné des bords du Mississipi mais bon- est bleu ? Quand t’as reçu le papier t’annonçant la nouvelle, la première chose que t’as faite, c’était demander aux ploucs de ta chambre si quelqu’un le connaissait. Même s’ils n’ont pas répondu, ils y ont tous pensés. L’être humain est tellement faible que tu trouves cela risible Calli.

Tu repère l’enseigne du café et marque une pause, faisant tourner un instant la Chupa Chups dans ta bouche tout en réajustant tes couettes blondes aux pointes roses. Un sourire victorieux s’étire sur ton visage quand tu remarques le type bleu dos à toi assit à une table en terrasse.
Tu t’approches encore un peu avant de le saluer, le surprenant peut-être un peu.

▬ Bonjour Sawyer ! Calliope, enchantée.

T’appuie ton accents français dans cette simple salutation comme jamais et tu lui tends la main juste avant de t’asseoir en face de lui, croisant tes longues et fines gambettes. Tu le scrutes même pas plus de deux secondes avant de déjà le noyer dans le flot de tes paroles enthousiastes, fouillant par la même occasion dans son esprit en espérant en apprendre un peu plus sur lui.

▬ Tu veux boire un truc ? C’est mieux avant qu’on commence à parler et pitié, me parle pas des cours, enfin… explique-moi comment ça se passe ici, je suis affreusement curieuse d’en apprendre un max sur cette île.


© YAM for Prismver

Tu t'étais peinardement glissé hors de tes draps.
Ils te retenaient, criaient ton nom, étaient malades de ton absence. Toi aussi tu languissais de devoir tenir sur tes deux longues guibolles toute cette journée. Tu défaisais tes bagages qui étaient restés cimenté entre tes sacs de voyages et les valises dont tu t'étais encombré pour un retour à la maison.
Tu revenais las, vide de force. Tu préférais ne plus penser à l'atmosphère chez toi, tout ce que tu traînais dorénavant, c'était le remord et la fatigue qui écrasaient ta carcasse ciel. Tu arrangeas ta frimousse coiffée en bataille et enfilas ce qui te tombait sous la main, en consultant tes derniers LMS. Le Remains.
Le monde de dehors.
Le monde hors de l'institut.
Une autorisation spéciale t'avait été assignée pour le coup, en ce début d'année. Un nouveau départ, une nouvelle vision. Enfin, nouveau pour les autres, pas pour toi.
Tu étais invité à t'exhiber. Depuis que l'un des petits cons du pensionnat s'était fait un plaisir de dévoiler les secrets qui entouraient cette île, l'anonymat n'était plus de mise.
Tu te chaussas de tes Stan Smith neuves et, un verre de lait engloutit, un beignet croqué, tu dardas sur l'allée principale, en te confondant entre les ruelles, tentant ironiquement de paraître inaperçu. Néanmoins, et c'était indéniable, avec sarcasme la foule se fendait à ton passage. « Le diable... » « Un alien. » « Une entité venue d'ailleurs. » « Monstre. »
Monstre.
Monstre.
Monstrueusement beau, ouais.
Ils te transperçaient comme des flèches empoisonnées de crainte.
Un enfant se heurta contre ta jambe, tu l'aidais à se relever quand ses pleurs ébranlèrent la surface de la terre, la soulevant sous tes pieds, arrimant l'attention. Les yeux de dépits et d'incompréhension se braquaient sur toi. Tu eues envie de fuir, à la place, tu bombas le torse, souris narquoisement et emboîta le pas avant de te caler sur la terrasse du Remains, comme si de rien était. En avance.
Les silhouettes continuaient de s'amonceler et tu sirotais comme un démon calculateur un chocolat chaud, la tasse tenue de ta queue. Tu ressentais cette chaleur te vaporiser, celle qui terrifiait les autres de ta différence et te rendait plus ou moins supérieur. Pour une premier expérience, ce n'était pas si mal. « Bonjour Sawyer ! Calliope, enchantée. » Elle tomba du plafond et s'abattit comme la foudre sur la tablée, une main tendue, que tu serras doucement. Une gamine en rayon de soleil, ou une éclipse... Tu ne pouvais pas percevoir quelle genre de personne elle était réellement, et avant de t'en foutre, tu détaillas la blondeur de ses cheveux. Tu te retrouverais prochainement à la materner. « Tu veux boire un truc ? C’est mieux avant qu’on commence à parler et pitié, me parle pas des cours, enfin… explique-moi comment ça se passe ici, je suis affreusement curieuse d’en apprendre un max sur cette île. »

Tu n'as même pas eu le temps de penser qu'elle enchaîne. Une nouvelle tête d'énergie à Prismver, décoré d'un accent français. Tu répliquas dans sa langue d'origine. « Salut. Et débarrassas la table de ton téléphone que tu fourras dans ta poche alors qu'elle prenait place, continuant en anglais. J'ai déjà commandé, mais ça m'gêne pas de me resservir. Par contre évite le café ici, il craint. Alors que le serveur s'approchait, tu la laissas passer sa commande et engagea. Hum... À Prismver il suffit simplement d'emprunter la bonne ruelle pour trouver ce que tu cherches. Ce qui fait cet endroit ne sont pourtant pas les lieux, mais les personnes... Tu t'adossas contre ton siège, passant une jambe par-dessus l'autre, oubliant complètement ta forme démoniaque et désappointant sans – aucun – doute le personnel et les touristes, constatant une énergumène agir avec autant de zèle. Heureusement pour toi, t'es arrivée au bon moment, ça s'est un peu plus calmé depuis... »



© YAM for Prismver