Because you're gold to me - Joy

Il guettait par intermittence ses mouvements depuis à peu près un heure, histoire de rester fidèle à sa réputation. Son aura vert forêt, ce vert brillant et lumineux qui se met finalement à se déplacer dans le bungalow 12. Il lève la tête de sa valise dont le contenu, aussi divers que varié, essayait de trouver sa place dans la nouvelle chambre du jeune homme. Brève consultation de son téléphone : elle arrive. Il remonte les manches de sa chemises entrouverte, jaugeant le travail accompli depuis la fin de sa petite altercation avec sa nouvelle colocataire et s'autorise une petite pause pour aller rejoindre son amie.

Elle passe la porte de la chambre d'Ezio, lui celui de sa salle de bain pour s'offrir une rapide remise en forme. Il s'arrose le visage, le sèche d'un bref coup de serviette, tire ses cheveux blond en arrière et referme un bouton de sa chemise, prenant soin de garder le premier détaché pour faire face à la chaleur extérieur.

Elle passe le seuil du dortoir du S, lui celui de la cuisine. Il y a un pack de bière dans le frigo, mais Matthew hésite une seconde. Ce sont celles de Madeline. Une moue perplexe sur le visage, il jette un œil au chat le temps de prendre sa décision.  Ca parle de S et de deux ou trois autres trucs quand il demande s'il doit ramener de la bière. Ca l'intrigue, mais qu'importe, il lui demandera plus tard. L'anglais attrape les boissons et se dépêche de gagner le bungalow 3 dont il l'a senti sortir un peu plus tôt.

Elle est à mi-chemin, lui sur le seuil de sa porte. L'étudiant en profite pour arranger une dernière fois ses cheveux, vérifier le tombé de sa chemise, remonter ses lunettes, jusqu'à ce qu'il voit sa silhouette se dessiner au bout du  chemin.

Joy. Joy et sa joie de vivre qui rayonne jusque dans l'ondulement de ses mèches. Joy et son visage sans soucis qui brille encore plus que la malice dans son regard. Joy et son sourire qui irradie de bonheur quand elle pose ses iris noisette sur son ami. Il ne peut pas s'empêcher de sourire, lui non plus, quand il l'a voit approcher. Accoudé sur le rebord de la fenêtre, il a du mal à garder sa pause cool et je-m'en-foutiste. Alors il se laisse aller à un bref signe de la main alors qu'il reprend appuie sur ses longues jambes.

Elle lui a manqué, ces dernier mois. Il était parti un peu sans rien dire et durant ses longs mois d'absence, il n'avait finalement qu'eu peu l'occasion d'échanger. C'était formel, une lettre. Trop formel pour parler de tout et de rien avec celle qu'il considérait presque comme sa famille. Et au final, aujourd'hui il n'avaient pas la moindre idée de leurs problèmes mutuels, ce qui inquiétait réellement Matthew. Il savait qu'elle était bonne pour s'attirer des ennuis sans surveillances.

- Joy ! Qu'est-ce que tu m'a manqué ! s'exclama-t-il en venant à sa rencontre.

Il l'enlace sans la moindre retenue, s'imprégnant de sa présence, de l'odeur de son shampoing, de la douceur de ses cheveux sous ses doigts. Quand il prend finalement un pas de recul, il observe sa camarade d'un regard attendrit avant de se baisser pour récupérer les bouteilles d'alcool qu'il avait laissé contre le mur d'un main, tandis que l'autre passait derrière son cou, traduisant un once d'appréhension à cause de son départ un peu trop soudain l'année précédente. Il y avait un peu de crainte qu'elle lui en veuille, au fond, et ça se voyait dans son sourire pas aussi assuré qu'à l'accoutumée.

- On a des trucs à se dire, je crois.

Il a un peu perdu l'habitude de cette proximité, des baisers un peu trop fréquents et inopinés de sa camarade. Aussi proche soit-il de la jeune femme, Matthew avait toujours été étonné du point auquel elle pouvait être tactile. Pourtant, bien que ceci le mette légèrement mal-à-l'aise, son éducation à la vielle école ne l'ayant pas vraiment habitué à ce genre de salutation, il était heureux de ressentir à nouveau cette sensation, parce que malgré tout, ça voulait dire qu'il était de retour.

De retour à Primsver. Il ne s'était pas encore vraiment fait à l'idée. Une partie de lui était plutôt satisfaite à l'idée de se retrouver à nouveau dans ce pensionnat, d'être où il était, en la compagnie de Joy, de la si charmante Joy et de son regard pétillant qui s'éternisait sans gêne sur le blond, comme pour s'assurer que c'était bien lui devant elle, de retrouver des visages si familiers et toutes les histoires qui ne peuvent arriver que sur cette île de fou furieux.  

Puis il y avait cette autre point de vue qui l'habitait. Ce ressentiment qui ne le quittait pas et qui lui rappelait sans cesse pourquoi il était là. Qui lui rappelait qu'il n'était finalement qu'une énième marchandise négociée par son père en l'échange d'un peu plus de tranquillité dans cette affaire de Grande Révélation et comme un signe de bonne volonté envers son gouvernement. Et ça, qu'importe à quel point il pouvait apprécier sa présence ici, ça le rendait malade.

Gardant pour lui sa rancœur, le violet se contenta de sourire à la remarque de son amie et de la suivre dans son bungalow. Elle sous-entend suffisamment de problème pour que la soirée s'éternise, il fait rouler ses prunelles dans sa direction avec inquiétude. Elle a pourtant l'air si confiante, si légère, si peu affectée. Au fond, il sait déjà à quel point elle sait s'attirer des problèmes et prétendre que tout va bien, et c'est ça qu'il aime et déteste tant chez elle. Ce besoin de la protéger, pour une raison qui lui échappe, cette réaction irrationnelle qu'il ne peut empêcher à son contact, il ne le supporte pas. C'est sous son contrôle, c'est imprévisible. Puis y a cette espèce de satisfaction quand son regard croise le sien qui fait que, peu importe à quel point il déteste cette façon qu'il a d'agir, il est heureux de l'avoir fait et sait qu'il le referait si le choix se représentait.

Dans sa chambre, l'anglais ne perd pas de temps avant de s'installer sur son lit, sans la moindre hésitation. Adossé au mur, il s'étale sur toute la largeur du lit, se débarrassant de ses chaussures dans un mouvement nonchalant au passage. Lâchant le paquet de bière entre eux deux, le blond écoutait avec un intérêt certain les mots sortir de la bouche de la D.

Sans la moindre délicatesse, sans introduction ni transition, elle pose sa question qui tombe un peu comme un cheveux sur la soupe. Alors dans un geste précis et mesuré, il sort deux bouteilles du pack, les entrechoquant l'une contre l'autre à leur extrémité pour se débarrasser de leur capsule. Puis, le jeune homme se contente de tendre l'un des deux récipient à l'anglaise en un soupire.

- Ok, c'est moi qui commence, c'est ça? Remarque-t-il en portant la bouteille à ses lèvre. Bien. J'imagine que t'es en droit de te le demander de toute façon. Mon père s'est pointé à Prismver un soir, il m'a dit que j'avais 30mn pour faire ma valise. Je t'ai déjà assez parlé du personnage, donc t'imagine qu'il se serait pas ramené jusqu'ici pour rien. J'ai voulu savoir ce qu'il se passait mais il s'est douté que je bougerais pas s'il me disait pour la Révélation. Il m'a annoncé la couleur une fois parti de l'île.

Il remonte ses lunettes du bout de son index avant de déboutonner le bouton du haut de sa chemise. Le jeune homme lança un regard discret à la brune, sondant ses réactions, avant de rapporter le goulot à sa bouche.

- Autant te dire que dehors c'était pas ultra fun. Tu sais, la routine entre mon père et son taf', hein. Du coup j'allais à la fac tranquillement en semaine, puis le week-end je traquais pour Prismver. Puis comme tu peux te douter, après le Black Decree ils ont trouvé que je serai plus utile ailleurs, Staunton qui était personne avant les dons à prit de l'importance dehors, elle a fait un peu pression à droite à gauche, s'est remonté qu'un ambassadeur avait un traqueur sous la main, y a quelques contentieux entre notre chère patrie anglaise et la communauté de l'UE dont la banque est en Allemagne, où bosse mon père, bref, pas la peine de te faire un dessin pour la suite hein.

L'anglais fini sa tirade en un soupire blasé, se laissant doucement glisser contre le mur derrière lui. Puis, après un court silence, il lève sa bouteille en direction de Joy, un sourire amusé sur le visage.

- A ton tours maintenant. C'est quoi cette histoire de S?

Finissant son explication, Matthew appréciait la façon dont son amie l'observait et l'écoutait avec attention, sans jugement dans ses prunelles, mais surtout sans rancœur. Puis, quand il lança enfin sa question, c'est un voile de gêne qui vint éteindre l'éclat si joyeux des yeux de la jeune femme. Il lui lanca un regard suspicieux quand elle referme sa bouche une première fois sans avoir prononcé le moindre mot. Son expression est sans équivoque : elle ne s'en sortirait pas sans lui avoir expliqué cette histoire dans les moindres détails. Si le blond avait pu penser que ce n'était qu'une mauvaise bague d'Abigail sur la chatbox, à voir la façon dont le simple fait de mentionner le sujet tracassait la D l'avait convaincu qu'il y avait bien plus que ça.  

Puis il semble que ça soit finalement la bouteille de bière qui arrive à convaincre Joy de s'expliquer. Après quelques gorgées, elle finit par prendre la parole d'une voix lasse.

- Des gens n’ont pas apprécié que je passe du temps avec Colton et Ezio. Sans compter que j’avais déjà couché avec Aaron, alors pour eux je suis rendue une pute à S, crois-le ou non. Surtout que j’ai pas eu ce genre de rapport avec Colton avant qu’il ne soit en A, qu’avec Aaron ça a eu lieu qu’une fois et puis bah… Ezio… Très franchement, on n’a pas couché ensemble, il m’a juste tâté la poitrine à quelques reprises.

L'anglais ne put s'empêcher d'alternativement lever et froncer les sourcils aux déclarations de sa camarade, tout en intercalant quelques gorgées de bières entre ses phrases. Déjà le simple fait d'imaginer Colton en S était une surprise. Puis d'entendre de vive voix qu'elle avait couché avec, qu'elle était vraiment maquée… Mais surtout, l'incompréhension globale face à cette histoire. Cela faisait peut-être trop longtemps qu'il s'était éloigné de ces dramas prismveriens pour comprendre en quoi qui couchait avec qui était devenu un problème. Ezio avait toujours été connu pour multiplier les conquêtes et cela n'avait jamais posé de soucis à qui que ça soit, doré ou pas. Hadès de son côté avait toujours été ce gars au comportement suffisamment ambigüe pour s'entendre avec les élèves de toutes classes, ou presque. Alors pourquoi en voulait-on à Joy pour faire ce que tant d'autres faisait déjà? Les S n'avaient certes, jamais eu la meilleure réputation, mais il n'y a encore pas si longtemps, on se préoccupait plus de ce qu'ils faisaient pour le Ranker qu'avec leur cul.

Alors elle a beau hausser les épaules, elle a beau faire comme si elle n'en avait rien à faire, il se refuse à laisser cette question sans réponse. Alors il balaie sa dernière question d'un revers de main pour en savoir plus.

- Rien de sérieux, comme tu peux t'en douter. Néanmoins, ne crois pas t'échapper comme ça. Tu peux pas me mentir, Joy. Je vois bien que ça te tracasse. Et je sais bien que ça ne devrait pas. T'as rien fait de pire que n'importe quelle fille de ton âge ferait. La moitié de Prismver s'envoie en l'air avec n'importe qui, t'es clairement pas la seule fille qui  a changé de mec quand t'étais célib', t'es maquée… Alors c'est quoi le problème? C'est absolument pas … rationnel… que dès que tu te pointe quelque part tout le monde se sente obligée de t'appeler comme ça.

Y a un emportement dans le ton de sa voix qui est inhabituel chez Matthew. Il y a ce début d'énervement, pas contre sa protégée, non, mais contre ceux qui tous ceux qui ont osé la mettre dans cet état.

- Me fait pas croire qu'il ne s'est pas passé un truc pour que ça ait prit tant d'ampleur.