J'aurais préféré que tu es une autre première impression | ft. Louis T

Nous sommes samedi soir. Il n'est que onze heure trente-deux et je suis déjà finie. Marche pas droit, dis tout ce qui passe par la tête, rigole pour rien. Je reconnais que j'aurais dû faire plus attention sur la quantité de vodka que machin, excusez moi mais là tout de suite le om viens pas, me foutait dans le verre. Ca, combiné avec la sur-utilisation faite de mon don, faite toute la soirée depuis 19h, pour pas me faire déplumer au poker, que ce soit de mon fric ou mes vêtements selon les parties. Ceci dis je me sens un peu moins maligne maintenant entre la migraine et la faim causées par ma magie, cumulé à l'alcool ingurgité. Je marche pas droit, il fait presque noir, j'ai fait câlin à un arbre, je me suis cassée la figure en trébuchant sur... absolument rien du tout, je n'ai plus qu'une chaussure, je dois avoir un tête hideuse et j'ai le genoux écorché.

Y a plus grand monde à cette heure-ci dans les allées, à part devant les quelque cabanons bien animés, quelques couples, des paumés ou des junkies. Je dois plutôt rentrer dans la deuxième catégorie en ce moment. Une fille saoule, avec une chaussure et une veste trop longue qui n'est même pas la sienne. Je sens une main sur mon épaule. Un violeur ! Réflexe de paranoïa accentués par un esprit lucide à environ -80% : Et un pain dans la figure de la pauv' fille taillée comme un bulldozer et aussi féminine qu'un camionneur, qui voulais juste savoir si j'avais du feu. Elle me regarde mal et moi forcément j'suis à côté de la plaque, je commence à rire, on comprend pas trop ce que je dis, puis je me retrouve sur le cul. La nana part en me crachant dessus. C'est dégueu et humiliant. Déjà. Normalement. Je n'aurais pas tapé. Ensuite, je ne serais pas tombé sur le derrière et ensuite j'aurais fait bouffer un arbre à cette fille là. Mais non: bourrée, pitoyable, fatiguée, absolument ailleurs ... je me met à pleurer, en marmonnant des plaintes. Type : "Méchaaante" ou "c'est pas justeee". On dirait une gosse. Des moments de solitude qu'on voudrait à tout pris effacer de notre vie. Si  on s'en souvient le lendemain.

« Besoin d'aide, je pense ? »

Je redresse la tête, la mine déconfite et regarde de mes yeux mouillé d'où provient la voix. Un mec aux cheveux blanc, au yeux rouge, le visage masqué. Ca faisait un peu déguisement d'halloween. Je crois que n'importe qui dans mon état et face à un inconnu avec une apparence aussi peu singulière aurait eu peur. Mais non. J'avais déjà vu ce type là, sans jamais lui parlé, c'était un élève comme nous tous. De toute façon aucun de nous ne peut être classer dans une catégorie de gens « normaux ». Alors je ne réagis pas, regardant simplement ce qui semble être un bienfaiteur. Il m'attrape par dessous l'aisselle et me tire vers le haut pour me remettre sur mes deux pieds. En fait j'avais plus besoin de réconfort que d'aide pour marché, quoique cela ne soit pas tout à fait inutile en fin de compte.

« Bon, même si pour moi c'est peine perdue, tu saurais me dire où se trouve ton cabanon ? Ou ton bungalow ? Je sais pas où t'es, toi. »

Bon ok, je suis pas en bon état, et toi tu me regardes vraiment comme si j'étais la dernière des couillonnes, ce qui en un sens est compréhensible, mais bon, y a des limites.

« Prochaine allée, troisième bungalow à droite. » Marmonnais-je alors en lui jetant un regard momentanément très lucide et accessoirement froid, histoire de faire comprendre que j'étais quand même assez réveillée pour comprendre ce qu'il me disait et le fait qu'il se paye ma tête.

Puis malgré tout, je reconnais qu'il aurait pus me passer à côté en riant au lieu de m'aider et, après une courte pause je me décide à le dire, d'un air gêné avec un sourire peu naturel en coin : « Merci »

Il me traine jusqu'à mon dortoir, on y est en trois minutes environ. Je galère un peu à gravir les trois marches du perron mais je ne tombe pas. Je ne pleure plus. Je ne pense plus vraiment d'ailleurs, j'essai de faire abstraction de se moment triste et humiliant de mon existence. Une fois devant la porte ( absolument certaine que je ne trouverait pas le trou de la serrure et convaincu qu'essayer aurait été plus pitoyable et désespéré qu'autre chose ) je retire la petite clef métallisée de la fine chaine autour de mon cou et la donne à mon camarade. Je dégage le passage pour lui laisser de la place et je regarde autour de moi, décrivant le moment. Temps, lumière, détailles, gens, comme je le fais souvent, comme si je peignais. Un petit plaisir banale de la vie. Même totalement à l'ouest. Ca aide à se focaliser sur autre chose que la migraine.

Le ciel est dégagé, on voit nettement les constellations, les étoiles, les planètes, je devine nettement la distance qui me sépare de chacune d'elle. Malgré le fait qu'utiliser mon don n'améliorait pas forcément mon état, c'était tout bêtement inné. je le savais c'est tout. Il n'y avait pas de lumière sous la porte. Doreen, n'était pas là, elle faisait une séance niaiseries, film, mouchoir et crème glacé chez des amies du cabanon d'en face. La latte du fond de la véranda n'avait toujours pas été réparé et le coucou chantait. Moi, j'étais la un peu perdue, un peu bourrée et obligée d'être assistée pour ouvrir une putain de porte.