look in the ocean, words in nothingness. — ft Nolwen

LOOK IN THE OCEAN, WORDS IN NOTHINGNESS

theo ft. nolwen

Iris magentas concentrés et front plissé, lèvres qui murmurent au papier leurs ordres éhontés : le crayon n'est des idées plus qu'esclave de leurs volontés. Lignes et courbes informes à l'esquisse donnent alors vie, tracés du crayon qui virevolte sans envie.
Premier jet terminé, sa mission est achevée; le Créateur s'autorise à retomber, prêt à passer le relais. Ses compagnons s'échappent du confort de leur maison, enthousiastes d'ajouter leurs touches colorées, de rendre ce dessin plus animé. Qui, sans leur aide, devinerait tissus et coutures, reflets et couleurs ? Qui comprendrait ce qu'exprime l'artiste, entendrait le faible chuchotement de son coeur ?

Ils travaillent avec zèle, n'en oublient pas une parcelle. Le tic-tac de la montre est la seule indication des secondes, des minutes qui s'écoulent. Mais, Théo, ils sont limités, leur concentration effilée au rythme des vos regards et rictus moqueurs mutuels. Et l'agacement s'empare de la brune, cette incapacité de rester indifférente à ce qui entre vous se déroule. Elle avait essayé des heures durant d'étudier, de réviser, mais tu la déstabilises, comme tu le fais si souvent. Alors elle a bougé sur sa chaise, tourné ses pouces, jeté son regard dans le vent. Gribouillé, raturé, surligné, annoté. Refusé de partir et rentrer, de s'installer au calme loin de toi, consumée par sa fierté.
Il était hors de question qu'elle abandonne, cette fois-ci inspirée par ce devoir pour son cours de stylisme. Tu n'auras pas le dernier mot, pas cette fois-ci. Vous la gonflez, toi, tes antiques et ton cynisme. Elle avait essayé pourtant, elle t'appréciait bien avant.

Mais même sans vouloir originellement le blesser, il a fini par t'exaspérer Noly, avec sa langue bien pendue et son air de mépris perpétuel. Est née l'envie de le gifler, de l'éduquer, de le frapper de quelques bases essentielles.

Ce que sa mère a fait.
Ce que tout parent devrait enseigner.
Ce qu'à la longue tu vas lui faire oublier.

Elle voit son épais livre de biologie effacer ce sourire triomphant de ton visage, mais bon sens et sang-froid enferment ces pulsions en cage. Elle voudrait t'ignorer, et à son élégant modèle de manteau retourner. Plus que quelques inscriptions pour légender, plus que quelques couleurs à ajouter. Mais elle te sent la dévisager, désireux de lui arracher sa sérénité.
Et la corde se brise, patience si difficilement acquise.

▬ prends ça et fous moi la paix.

Un morceau de papier, un nom signé.
prends cet autographe et dégage. Cette ironie qui t'enchaîne, cette dernière limite avant que tes mots ne le malmènent.

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LOOK IN THE OCEAN, WORDS IN NOTHINGNESS

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Plutôt que le visage du garçon c'est sa langue qu'elle claque, alors qu'elle empêche que ses nerfs ne craquent. Mais alors qu'il s'approche d'elle, se pavanant tel un paon, elle change d'avis, ses yeux se tournant vers le ciel ; il vient de perdre la partie, et sa mise en scène l'a enseveli. La proie n'a pas écouté sa mise en garde, a voulu jouer au chasseur, s'est laissée attraper par mégarde. Théo court, vole vers le piège qu'inconsciemment elle lui tend, dépassant de loin tout ce qu'elle attend.

Il ne reste du feu si puissant quelques secondes plus tôt dans les yeux de la B plus qu'un vague souvenir, une maigre étincelle qui s'envolerait d'un soupir. Elle secoue la tête en le dévisageant, plaquant sur ses lèvres un sourire triomphant. Son corps parle pour lui, ses gestes ses moues ses actions, faisant émerger sur son visage ce qu'il enfouit. Non ! pas vraiment : une autre qu'elle n'aurait jamais su lire d'un coup d'oeil ce tourment. Nolwen ne prétend pas connaître Théo, encore moins le comprendre ; l'envie se porte de plus aux absents. Mais elle se croit capable d'en cerner la surface, et se dit qu'il y a plus que ce garçon qui l'agace.

Il se croit réellement intimidant, croit qu'il va l'effrayer avec son regard sombre mais égayé, de cette lueur malsaine qui brille dans ses iris vert forêt. C'en est presque comique, c'est d'un tel pathétique. Mais ce n'est devant elle qu'un simple enfant qui se dévêt, a abandonné toute crédibilité. La flamme réduit le bout de papier en cendres, et lui jubile, convaincu qu'il ne peut en aucune façon se méprendre. Mais son rire sonne creux aux oreilles de la brune, si faux et si lointain, dépourvu pour elle de toute vitalité. Intérieurement Nolwen explose de rire tandis que la colère qui montait plus tôt disparaît, remplacée par une forme de pitié qui dans un recoin de son esprit apparaît. Une tristesse pour ce petit qui ignore tout de la vie.  

▬ si t'en avais vraiment rien à foutre, tu ne serais pas là en train de prendre la peine de me faire ton petit show pour me le prouver.

Pourquoi venir la provoquer, alors qu'il aurait pu simplement l'ignorer ?
Pourquoi vouloir la convaincre avec ce stratagème, s'il n'a pas l'air d'y croire lui-même ?

Ce ne sont pas les cours de psychologie qui lui ont enseigné cela, mais ce qu'elle a conclu après bien des années à observer les gens agir depuis son au-delà. Elle se croit si forte, si intelligente, s'imagine qu'elle possède les clés pour le comprendre.
Il peut ignorer la vérité, sans problème se mentir, mais il ne saurait la duper sans la faire rire. Mais elle ne lui dit pas cela, garde ses idiotes réflexions pour une autre fois.

Elle le laisse donc vaguer aux occupations qui pourraient le distraire, ignorant la présence encombrante de l'être monocellulaire sans cervelle. ce genre d'insultes que tu te gardes de dire à voix haute.
Elle continue nonchalemment à piocher des bretzels dans le paquet à sa gauche, se refocalise sur son dessin, ressort quelques crayons de sa poche. Et se remet à colorier en chantonnant tout bas, sans jamais se préoccuper de l'intrus à ses côtés.

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