De quoi se rendre chèvre [12 juin 2018] - pv Eros

Tim est sorti son cabanon pour aller faire un tour à la ferme. Depuis son arrivée au pensionnat, il n’a jamais voulu y mettre les pieds. Non par dégoût des bêtes, il les apprécie bien plus que les humains. Cependant, sa maitrise relative de son pouvoir lui fait entendre des voix lorsque trop d’animaux se retrouvent à proximité. Ceci est assez dérangeant et désagréable. Les pauvres n’y sont pour rien. Ils ne sont guère responsables du don du garçon. Et ne vont certainement pas se taire pour ses beaux yeux quand monsieur daigne se balader. Bref, il n’a aucun argument pour y aller. Hormis sa curiosité.

Tim a entendu certains de ses camarades vanter un système de communication. Il parait que l’on peut discuter avec des lamas là-bas mais il n’a pas vraiment saisi comment. Intrigué, le blondinet a de suite voulu en apprendre davantage. Il a bien envisagé de questionner les personnes ayant évoquées ce système néanmoins il connait les gens. Ils racontent, ils brodent et au final ils vous  retransmettent des informations incomplètes voire erronées ce qui lui vaudrait une visite sur place pour démêler le vrai du faux par lui-même. Autant y aller seul du premier coup. C’est un gain de temps évident. En plus cela lui évite une interaction sociale.

Aujourd’hui, le ciel est gris. Tim en est ravi. Cette météo a des chances de rendre frileux le touriste, rendant sa quête plus facile. Il s’est vêtu simplement. Accoutré d’un classique jean-baskets-T-shirt, il est lambda parmi la foule. Rien ne laisse transparaitre son pouvoir, il est là incognito. A peine piétine-t-il l’endroit que son esprit commence à s’embrouiller. Il n’a cure de cette querelle de famille lapin qui en a ras-le-bol de manger des carottes ou encore de ses deux amies vaches débattant sur la verdure de l’herbe. Pourtant il subit ces brides de conversations. Il ne va pas devoir trainer dans les environs s’il ne désire pas devenir fou. Il presse sa marche pour rejoindre les lamas.

C’est l’attraction des lieux. Malgré le peu de monde présent, la foule est agglutinée. Tim ne souhaite pas jouer des coudes pour se frayer un chemin. Attirer l’attention n’est pas son truc. Il compte revenir dans quelques minutes, quand les gens se seront lassés du spectacle. Il s’éloigne de l’enclos afin de s’isoler. Compliqué de trouver un morceau de tranquillité par ici. Les bestioles sont partout. Il distingue une chèvre  accompagné de son maître ? Il ne sait pas vraiment, c’est du genre inhabituel comme animal de compagnie. Le regard du mammifère croise le sien.

« J’vois pas c’qu’ils ont de plus que moi ! J’suis bien plus mignonne qu’eux ! Ils méritent juste de se faire cuisiner par Eros ! »

Tim sourit et rit. Serait-elle jalouse ? Il s’approche du duo et lui répond.

« J’suis d’accord avec toi, même si j’irai pas jusqu’à les transformer en steak. »

Tim est à la hauteur de son propriétaire désormais. Il semble un brin perdu, il ne peut guère comprendre l’échange précédent. Tim ne le connait pas, son visage ne lui dit rien. Cependant il pense que c’est quelqu’un de respectable. Pourquoi ? Il ne fait pas son mouton à se ruer pour bavarder avec les camélidés. Il n'en est pas certain non plus alors il va le vérifier immédiatement.

« Bonjour. Vous aussi vous attendez que la foule se disperse pour aller voir les lamas ? »

Tim sourit à la réponse de l’homme. Lui est un dominé, sa chèvre porte la culotte à la maison apparemment. Pas vraiment étonnant en se rappelant des remarques lancées envers les attractifs mammifères. La Miss semble avoir son caractère. On pourrait dire de cochon mais c’est une chèvre alors on se contentera de son sale caractère. Tim l’aime bien. L’animal hein. Son propriétaire, il s’en moque un peu. Il s’accroupit pour caresser le dessus de la tête de la bête.

« Vous êtes bien sympa de vous plier à sa volonté. Concernant la compagnie des herbivores, je peux pas vous dire. Par contre, elle est pas fan des lamas. »

« Qu’est-ce qui dit ?! Il veut pas bouger son popotin ?! Allez hop hop hop ! », lui annonça-t-elle en usant de ses cornes dans les pattes de son maitre.

Vraiment pas commode cette Praline. Petite certes mais il ne faut pas trop l’enquiquiner. Tim tente de la détendre. En plus elle est super mignonne d’extérieur. Rien ne laisse imaginer une telle furie intérieure.

« Minute, on se présente. »

Tim redouble de caresses pour la faire patienter. L’homme se joint à lui et l’animal arrête de gesticuler. Voilà ce qu’elle désirait : se faire chouchouter. Tim se dit que le pauvre Eros ne doit pas avoir la vie facile avec elle. Après il le comprend. Comment résister à une bouille pareille ? Et ces tâches sur son pelage. C’est son atout numéro un. Tim en est tombé amoureux.

« Je m’appelle Tim. Je suis en troisième année au pensionnat. C’est bien ma première fois ici mais je suis pas venu voir les lamas. Je m’intéresse à l’outil qui permet de communiquer avec. En fait, le langage animal est mon pouvoir. Alors j’me demande comment un homme a pu créer un tel appareil. »

Tim reçoit un coup de tête dans un genou. Il n’aurait pas dû arrêter de masser le cou de la créature. Caractérielle qu’on disait ?

« Pourquoi tu t’arrêtes ? »

Tim remet sa main en position. Il malaxe doucement le poil soyeux de la chèvre. Elle en est ravie. Une vraie reine la demoiselle.

« Oui juste là. T’es parfait ! »

Tim croit apercevoir un sourire provenant du mammifère. Elle est comme en transe. Deux hommes rien que pour elle, elle est gâtée. Le blondinet continue ses mouvements de sa main avant de reprendre la parole. Il ne veut guère recevoir une nouvelle attaque.

« Ça doit pas être facile tous les jours avec elle. Elle est magnifique mais semble vouloir de l’exclusivité. Si vous avez d’autres animaux, je vous plains. J’espère qu’ils ne sont pas comme elle sinon vous devez vivre un enfer. »

Tim ne lâche plus Praline. La chèvre est petite mais au combien puissante. Tout ce qui est petit est mignon mais pas forcément commode. Tim l’a appris à ses dépens. Pendant qu’une de ses mains caresse la tête de l’animal, l’autre masse son propre genou endolori. La bestiole ne lui a pas déboité néanmoins, elle lui a bien malmené. Il ne lui en veut aucunement. Ce n’était pas volontaire de un. Et elle a une bouille trop adorable pour être grondée la Miss de deux. Il détourne ses yeux de la beauté pour regarder son propriétaire. Non sans stopper ses mouvements.

« Oui c’est ça. Vous ne pouvez pas comprendre ce que je dis ni ce qu’elle m’a dit. »

Tim se contente du minimum, les relations sociales ne sont guère son fort. Il préfère se taire la plupart du temps. D’ailleurs il le désir davantage ici tant l’individu lui parle de quelque chose l’intéressant. D’après ses paroles, le mystère de la communication entre lamas et humains pourrait s’expliquer par le pouvoir d’une de ses camarades. Le blondinet qui craint une exploitation des dons est outré. A priori, cela a déjà commencé. Il enregistre le nom donné et envisage de rechercher cette fille plus tard. Il se demande si Eros peut l’aider. S’il peut gagner du temps, il n’est pas contre.

« J’ignorais qu’il existait une personne avec un tel pouvoir. Vous la connaissez ? Si oui, vous pourriez peut-être me la présenter… »

Le visage du garçon est couleur pivoine. Il est gêné par la situation. Il regrette presque son geste. Il aurait dû se débrouiller seul comme à son habitude. Bref, il embraye sur les propos concernant les compagnons du cuisinier. A l’entendre, il en possède une petite collection. C’est un ami des bêtes. Une sorte de Noé des temps modernes. Tim sourit. Il rit même. C’est qu’il s’amuse à imaginer la scène décrite par son interlocuteur. Joli bazar la réunion de tout ce monde.

« Ils ont l’air de s’apprécier. Vous savez, la cohabitation entre espèce est jamais simple. Si ça se passe bien c’est qu’ils se sentent bien chez vous. Et s’ils s’y sentent bien, c’est sans doute grâce à vous. J’vois déjà avec Praline comment vous la bichonner, ses colocataires doivent pas être en reste. »

Les éloges sont sincères. Tim sait reconnaitre des animaux heureux et bien traités. La demoiselle fait partie du lot. Elle réclame plus d’attention que les ses congénères par contre. En même temps, cela est mérité tant elle est belle. Tim pose un baiser sur le haut de son crâne.

« Oui elle vous aime à sa façon c’est sûr. Puis je comprends votre dévotion, elle est magnifique. »

Tim a des étoiles dans ses mirettes. Il s’interroge sur le fait de pouvoir adopter une chèvre. Ce n’est pas forcément adapté au pensionnat ni à la vie au cabanon néanmoins il y pense. Puis cela ferait de la compagnie à Green pendant ses cours. L’idée n’est pas si farfelue. Il sort de ses projections à l’évocation du reptile. Quand on parle du lézard, on en voit la queue. En fait non. Il est probablement en train de bronzer dans l’herbe du parc.

« Euh… Non, je suis venu seul. Avec mon lézard, ça se passe très bien. Ya juste un souci. Il est très joueur et adore jouer à cache-cache. Et souvent je le cherche pendant des heures… Et si j’le trouve pas, il me donne un gage sinon il retarde la livraison. Lui aussi a son petit caractère… »

Tim s’arrête quand la boule de poils refrappe son maitre. Elle est en train de se faire cajolée. Il ne comprend pas la raison de ce coup et s’empresse de s’informer. Il s’accroupit et fait face à la créature.

« Na mais oh ! Il t’a rien fait là ! Pourquoi tu le tapes ? »

« Il a parlé de l’intrus ! Il veut me remplacer par lui j’suis sûre… »

Ah la jalousie… Tim lui malaxe le cou pour la détendre. Adorable caractérielle donneuse de coups de tête.

« Mais non voyons ! Tu sais pas livrer des colis toi. C’est normal qu’il ait un lézard. Il t’aime. Et tu devrais le remercier au lieu de le persécuter. »

Tim secoue sa tête et ne distingue pas la réponse de Praline. La présence de la ménagerie lui a bouffé son énergie. Il a besoin de recharger ses batteries avant de se lancer dans un nouvel échange avec un animal. Il reste là, à lui sourire, sans comprendre ce qu’elle lui raconte.