Il fallait se doutait que ce jour viendrait. Cela faisait déjà quelques heures que Tony passait dans son cabanon, assis en tailleur sur son ordinateur portable. Il avait déjà tout fait : insérer quelques dossiers sur le réseau informatique du pensionnat pour non-respect de sa divine personne par les concernés, pirater le compte xBox d'un Cale ignorant et montrer son incontestable supériorité dans tout domaine en faisant perdre le contrôle de son ordinateur personnel à un B qui s'était autoproclamé meilleur informaticien du pensionnat. Il fallait s'en douter : Tony Nalkäinen avait plus d'un tour dans son sac.
Il lâcha l'objet aux alentours de midi. Il avait beau avoir énormément de choses à faire dessus, le blond referma l'objet qu'il prit soin de ranger soigneusement dans un endroit que vous ne connaîtrez pas. Son objectif du jour n'était au final pas défini : il avait épuisé temporairement sa liste de plans machiavéliques, n'avait plus de cible potentielle à emmerder et personne ne le défiait. Il y avait mille et une personne capables de le faire, mais pourtant, aucune ne le faisait. Au fond, le niveau de maturité présent ici l'affligeait presque, personne ne l'amusait vraiment.
Tony se cherchait une place à lui-même ici.
Il connaissait tout le monde, mais ne se connaissait pas lui-même. Il aurait pu deviner les désirs d'une femme en la regardant mais était bien incapable de dire ce qui aurait pu le combler en cet instant. Il ne trouvait refuge que dans la peur qu'il engendrait et jusqu'à présent, cela lui suffisait. Maintenant, cette activité ne lui servait que d'option par défaut, dernier recours pour combler à cet ennui grandissant dans sa vie. Cette théorie ne l'avait pas inquiété jusqu'à récemment, et à nouveau, face à l'inquiétude, il partit pratiquer son activité favorite.
Ses grands pas le menèrent devant la salle des E presque vide, comme à l'accoutumée, mais qui l'était davantage à midi. Peu de A y passaient depuis l'incident d'il y a quelques jours, aussi n'y avait-il qu'une seule personne à l'intérieur. Le sourire de démon de Tony s'agrandit à la vue d'Anarchy, petite fille naïve qu'il prenait plaisir à côtoyer sans raison, pour son propre plaisir et celui de se prouver une supériorité intellectuelle, alors qu'une personne sans génie aurait pu être en mesure de manipuler une fille si naïve. Il ne pensait pas vraiment à elle avec indifférence, il lui arrivait parfois qu'elle lui fasse pitié.
Yo, Zelda. Tu as l'air déprimée, ton chevalier vert aurait-il disparu ?
I'M FUCKING SCARED 'CAUSE EVERYTHING I SEE ON YOUR EYES IS ANGER AND CRUELTY. I THOUGHT YOU WERE NICE.
« It's raining men ! Hallelujah ! It's raining men ! Amen ! »
... wat. Anarchy cligne des yeux. Jette un oeil à son lecteur. Depuis quand a-t-elle cette musique ? Ses lèvres frémissent d'un rire, sans qu'elle le laisse sortir. En public, non. Déjà qu'elle se sent extrêmement mal, coincée entre deux armoires à glace... Son souffle se fait plus ténu, le stress l'envahit déjà. Comment faire pour s'extirper de cette masse gigantesque d'hommes ? Enfin, hommes... D'étudiants de sexe possiblement masculin, dans tous les cas. Elle se faufile entre eux, essayant d'éviter tout contact. Ses gants protègent ses mains, c'est déjà ça. Pas très rassurée, la petite chose glissait désespérément, cherchant un endroit par où elle pourrait s'enfuir.
Saleté de hall, trop grand pour qu'elle réussisse à partir avant qu'ils n'arrivent en masse sur elle, comme un troupeau de boeufs - en supposant qu'ils soient castrés, évidemment. Effaçant les soudaines pensées peu catholiques qui envahissaient son esprit, elle se force à réfréner ses pulsions yaoiste, pour éviter une hémorragie nasale en pleine salle publique. Cherchant en même temps qu'une sortie une nouvelle musique, elle s'arrête finalement sur un original soundtrack de Shingeki no Kyojin, se concentrant sur la pensée qu'un Rivaille l'attend au loin, prêt à l'emmener grâce à son équipement tridi...
STOP. Serrant ses petits poings, la brune force finalement le passage, le visage baissé. Elle hurle presque aux autres de se pousser, histoire qu'ils réagissent au lieu de regarder bêtement leurs amis. Il est presque midi, il faut qu'elle trouve un endroit tranquille où manger, maintenant qu'elle est certaine que sa mort ne serait pas provoquée par l'étouffement de la foule. Hall : trop grand pour elle. Elle déambule comme une âme en peine dans les couloirs, et se pose devant la porte de sa salle de cours. Peut-être qu'il y a quelqu'un, peut-être pas. Risquant le tout pour le tout, elle s'engouffre par la porte délabrée, et lâche un couinement de souris heureuse en constatant qu'elle est bien seule.
Déposant délicatement son sac sur une table - après avoir viré les chaises, elle est stupide mais y a une limite -, elle en sort son déjeuner : trois sandwichs préparés le matin-même, alors que le commun des mortels se forçaient à tomber de leur lit pour se préparer. Sa console se dévoile en deuxième, les vocaloid attendant probablement impatiemment qu'elle joue des pouces sur la jolie psp. Un léger sourire étire finalement ses lèvres ; elle est seule, elle est rassurée. Sans même ouvrir les volets, ou allumer la lumière, elle se contente du rayon de soleil à sa table, s'installant confortablement - soit chaussettes, pieds sur la table et jupe remontée, par ricochet. Elle attrape un sandwich, le déballe et le croque, allumant la console.
« Yo, Zelda. Tu as l'air déprimée, ton chevalier vert aurait-il disparu ? »
Elle sursaute, manque de lâcher la console ET la bouffe. Se rattrapant maladroitement avec la table, Anarchy tourne son regard vers la source de la voix, une expression mi-apeurée mi-blasée sur la visage. Adieu tranquillité, ce fut bref mais délicieux. La brune se calme presque aussitôt en reconnaissant l'homme en face, se forçant à lui offrir un sourire tordu.
« J'ai pas trouvé de chevalier. Il a dû se perdre.. Je m'attendais pas à te voir.. Je t'ai manqué ? »
Infime rire, ravalé l'instant d'après. Blague foireuse qui ne fait rire qu'elle, et encore, elle a trop honte pour s'extasier sur son humour. Qu'est-ce qu'un A fait dans la salle des E ? Telle est la question inutile qu'elle se pose. En un sens, ce n'est pas surprenant. Depuis que les E avaient dévalisés la classe pour obtenir un mini-bar déjà à moitié vide, Anarchy craignait les conséquences, silencieusement.
Elle ne bouge pas d'un poil, fixant piteusement le blond. Lui dire qu'elle est contente de le voir serait un mensonge éhonté. Intérieurement, elle s'est déjà mutilée et même suicidée, mais le montrer est inutile. Ca se sent, quand elle a l'impression d'être stupide - sisi, Anarchy se sent parfois extrêmement intelligente. Sa main libre passe nerveusement dans sa chevelure noire, même pas coiffée. Ses cernes de pandas doivent être encore plus effrayantes qu'à l'accoutumée.
Kyara finit de mâcher son sandwich avant de montrer les deux autres à Tony. Bon ok, elle savait qu quelqu'un allait se pointer. Son éternelle malchance qui la poursuivait inlassablement. Mais elle contrattaquait avec des précautions, genre se faire de la nourriture en plus au cas où ce qu'elle voulait faire était compromis - en l'occurrence, violer ses touches avec les doigts.
« S't'en veux, v'là.. Enfin s't'as pas bouffé..? »
Right, elle tentait de paraître crédible. Sa manie de parler comme une gamine l'avait agacé elle-même, alors elle s'était efforcée d'utiliser le langage courant en observant les autres. Chose qui ne fut pas simple, au passage. M'enfin, suffit maintenant d'espérer qu'un mec trois fois plus grand qu'elle sera satisfait par un malheureux sandwich.
Mein gott, pourquoi a-t-elle fait des formes avec ce pain ? Les coeurs, c'pour les tapettes.
Forcément, quand on a pas de victime, le mieux est de prendre ses aises. C'est ce que Tony avait décidé de faire aujourd'hui : il n'avait pas la foi, pas la foi de se risquer dans la recherche de nouvelles victimes, d'un nouveau punching-ball susceptible de se rebeller comme tout inconnu trop brusqué par une personne lambda. Tony avait les nerfs, la personnalité et le charisme, il était ce qu'aucun autre n'était, un leader, avec les couilles de s'imposer, de contredire et de sortir de son domaine de prédilection que chacun avait, pour se risquer à affronter la vie.
Si seulement il avait usé de ses qualités d'une bonne façon, Tony aurait pu être une personne bienveillante - quelqu'un qui aurait de quoi soutenir les gens. Il aurait pu aider Nana, la faire s'intégrer, se faire entendre du pensionnat entier pour que tous arrêtent de se conduire d'une façon pathétique. Tony aimait sa propre personne, aimait sa façon de se comporter et, il a beau avoir un bon fond, il n'était pas du genre à le montrer. Enfin, bon fond serait un bien grand mot puisqu'il se traduisait au travers de quelques écarts dans ses habitudes de martyr vis-à-vis des autres - car si Nana avait eu le droit à un petit moment de répit, c'était pour cette unique raison.
Elle avait finalement répondu et son soudain gain d'assurance avait failli te coûter ton calme. Impulsif, doté d'un incroyable sens de supériorité, surtout vis-à-vis de cette fille, chaque écart venant d'elle lui apparaissait comme une insulte, comme inacceptable. Elle n'était qu'un jouet virevoltant entre ses mains, n'avait le droit à aucune faveur et surtout pas celle de s'élever trop en assurance vis-à-vis de lui. Tony était tellement narcissique - alors il attendit, encore et encore, puis d'elle-même, elle lui proposa un sandwich, fit preuve de docilité sans qu'une demande fut faite, acte qui flatta l'égo du A, bien que ce dernier n'en laisse rien paraître.
Eh, quelle belle attention, princesse Zelda. Je vais accepter l'offre avec plaisir, sois-en rassurée.
Un peu de gentillesse mais pas trop, car le remord allait lui revenir quand les doigts de Tony viendraient se saisir de la nourriture. Lentement, sourire aux lèvres, il tendit la main vers le sandwich qu'il saisit, se retenant d'en faire de même avec le second pour ne pas satisfaire un appétit trop léger. Il prend son temps, savoure le sandwich qu'elle a fait, la forme lui important peu - c'est bon, et ça lui va. Il vient finalement s'asseoir sur une chaise, posant ses pieds sur la table adjacente à la sienne, croisant les jambes dans une marque d'impolitesse extrême. Tony, quoi.
Qu'est-ce que tu fiches sur cette console ? Encore un Zelda ? Tu devrais t'acheter des meilleurs jeux.
I'M FUCKING SCARED 'CAUSE EVERYTHING I SEE ON YOUR EYES IS ANGER AND CRUELTY. I THOUGHT YOU WERE NICE.
« Eh, quelle belle attention, princesse Zelda. Je vais accepter l'offre avec plaisir, sois-en rassurée. »
Elle aurait pu rougir, si elle n'avait pas l'étrange impression qu'il se foutait de sa gueule. Son côté paranoïaque refaisait surface sans qu'elle puisse s'en empêcher. Attrapant le sandwich restant, la brunette mord dedans à pleine dent, se concentrant sur sa console. Elle voudrait oublier la présence de Kyösti, mais il n'est pas très discret non plus... Ses propres jambes descendent de la table, le temps qu'elle fourre ses pieds dans ses chaussures. A l'origine, elle était seule, et ne pensait pas que quelqu'un viendrait rompre cette solitude si parfaite.
« Qu'est-ce que tu fiches sur cette console ? Encore un Zelda ? Tu devrais t'acheter des meilleurs jeux. »
Son pouce se tord, lui arrachant un couinement. Elle lève les yeux, lui envoie un regard assassin. Anarchy n'est pas méchante, à l'origine. Mais elle déteste qu'on juge ses goûts, en particulier sur les jeux vidéos et les mangas. Insulter Zelda, c'est comme insulter sa famille, ça coince forcément. Elle serre les dents et lui sourit, un sourire si crispé qu'elle ne doute pas de son peu de crédibilité. Ses doigts craquent contre la psp, ça lui fait mal putain.
« C'est Vocaloid. Et la saga Zelda est une des meilleures de Nintendo. »
Pour la première fois depuis des lustres, elle n'a pas fait une pause, n'a pas baissé les yeux et n'a pas rougit une seule seconde. Son rictus s'efface aussi rapidement qu'il est apparu, elle retourne à sa console, un écouteur planté dans l'oreille. Son index glisse de nouveau sur les touches, le mode insane est plus facile qu'elle ne le pensait. Mâchonnant son repas, elle l'avale en appuyant pour la dernière note, et reprend d'un ton plus calme et d'une voix plus.. douce, moins forte en fait.
« Si t'aimes pas Zelda, pourquoi tu m'appelles comme ça ? »
Ses dents agressent sa lèvre inférieure, arrachant des millimètres de peau. C'est vrai, il n'est pas logique. Ou alors c'est plus compliqué. Suspicieuse, Anarchy ne bouge pas la tête, continuant de fixer son jeu pour éviter de comprendre. Elle réfléchit peut-être trop. C'est peut-être parce qu'il la voit souvent jouer à Zelda ? On peut appeler quelqu'un d'une telle façon uniquement parce qu'il joue beaucoup ? elle soupire, s'emmêlant carrément dans ses propos. J'suis surtout trop naïve...
Sa main glisse dans son sac, elle en sort un nouveau jeu random. Ses pieds se remettant sur la table, finalement elle éteint sa console et plante ses pupilles dans les siennes, yeux légèrement plissés. Si elle le touche, elle saura. Mais est-ce qu'elle veut vraiment savoir ? Perturbée, elle passe les doigts dans ses cheveux, et laisses ses paupières s'abattre devant ses iris.
« Tu voulais quelque chose en particulier en venant ? C'est rare, que les A viennent dans la salle des E. Surtout à l'heure de manger. »
Elle commence à se balancer sur sa chaise, priant pour que la table derrière ne bouge pas d'un millimètre.
Étrangement, Tony venait de se rappeler pourquoi il détestait cette fille. Pourquoi depuis, tout ce temps, il n'avait cesse de se moquer d'elle en feignant une amitié. Récemment, et il le savait, ce "lien" qu'il avait créé s'effritait, il faisait moins attention, montrait peu à peu ses crocs, brisait cette proximité en révélant peu à peu sa vraie nature. Il avait beau en être conscient, il n'essayait pas de s'en empêcher. Depuis le tout début, tout en elle le révulsait. De son dégoût des autres à son comportement dénué de toute animosité, il éprouvait presque une certaine pitié à l'égard de cette demoiselle qui n'avait cesse de se laisser marcher dessus. Pour ça, il la détestait, mais à la fois, il en profitait. Inlassablement.
Cruellement. Il ne se sentait pas pitoyable. Il avait le sourire aux lèvres quand elle écoutait sa volonté, riait intérieurement quand son sourire disparaissait et ne pouvait masquer son expression réjouie quand le regard de la E se voilait à sa vue. Il était, et il le savait, un véritable rempart qu'elle ne pourrait franchir. Il était ce à quoi aucun n'osait s'opposer, et pourtant, lui-même ne savait pas s'il continuait par pur méchanceté ou pour la pousser à bout au point qu'elle change. La deuxième solution, à ses yeux, lui paraissait presque invraisemblable. Tony Kyösti Nalkäinen n'éprouvait aucune pitié envers autrui - il était inflexible, méchant, il était un symbole de haine pure, un cliché du bad boy et sans bon fond.
Pourtant, il détestait qu'elle se rebelle. Paradoxalement, il éprouvait colère et haine, encore davantage qu'à la vue de sa personnalité qu'il ne supportait déjà pas, quand il la voyait se prendre en confiance. C'était plus fréquent, récemment, elle relevait la tête, lui répondait, le regardait dans les yeux. Le regardait. Il avait presque envie de se lever pour la punir, la punir de cette audace de poser ses yeux sur son visage, d'oser se comporter en égal avec l'être supérieur qu'il était. Là encore, elle le contredisait, mettait en doute sa parole. Bien sûr que Zelda était une bonne saga, il ne tarissait pas d'éloges au sujet de ce jeu, mais ça n'avait rien à voir - il ne pouvait juste pas concevoir qu'elle mette en doute ses mots.
Vocaloid... je ne pense pas qu'il soit nécessaire de m'étendre pour exprimer le ridicule de cette musique. Même les plus gros fans reconnaîtraient que ces synthèses de voix ne valent pas un clou.
Il y avait dans son regard, en cet instant, un éclat effrayant. Il y avait dans ce regard cette dissuasion de la E de le contredire, cette expression peu vue par les gens du pensionnat, sa classe comprise. Il semblait différent, véritablement en colère, Tony se montrait aux yeux de son alter ego inverse. La fille qui lui était totalement inverse, sa victime parfaite. Il ignorait sa question, il n'éprouvait plus d'intérêt pour sa curiosité et ne s'attarda pas non plus pour la suivante. Il se redressa de toute sa hauteur, observa l'unique personne présente. Il se permit un coup d'oeil aux portes, fermées, et donna un soudain coup de pied dans la table qu'occupaient ses jambes quelques instants plus tôt, qui valdingua plus loin.
Violence.
C'est quoi ton problème, lutka... Tu bouffes toute seule, tu évites les gens, tu t'enfermes comme une paska avec tes consoles. Puis tu te laisses marcher sur les pieds, tu me files ta bouffe sans que je l'aie demandé...
Pas un rire. Pas un sourire. Aujourd'hui, ce n'est plus une question de scoop ou d'affaire personnelle. C'est question d'elle. Tony est honnête, pour une fois.
C'est pour ça que je te hais. Tu défends plus ces jeux de merde que ta propre personne. T'as aucune fierté. Tu comptes passer ta vie à te laisser marcher dessus ou t'es conne comme Zelda au point d'attendre qu'un prince charmant invisible vienne te sauver ?!
La dernière phrase, il l'a presque crié. Il l'observe, dents serrés, haine explicite, mais au fond, des sentiments dévoilés par une pointe de gentillesse.
I'M FUCKING SCARED 'CAUSE EVERYTHING I SEE ON YOUR EYES IS ANGER AND CRUELTY. I THOUGHT YOU WERE NICE.
« Vocaloid... je ne pense pas qu'il soit nécessaire de m'étendre pour exprimer le ridicule de cette musique. Même les plus gros fans reconnaîtraient que ces synthèses de voix ne valent pas un clou. »
Elle s'apprête à répliquer, à expliquer que malgré la qualité médiocre de la plupart des musiques, Vocaloid restait un bon jeu de rythme, du moins à son goût. Mais son regard lui glace le sang, elle déglutit et baisse aussitôt les yeux, l'impression qu'une telle lueur n'annonce rien de bon pour sa petite personne. Les portes sont fermées, pour son plus grand malheur. Elle pose les pieds au sol, dans l'intention de se lever pour partir sans un mot. Il la devance, debout, tellement grand qu'il lui donne l'illusion d'être aussi haute qu'une puce.
Impact. Ca ne la touche pas, mais le vent fouette sa joue, soulève ses cheveux. Son regard surpris se lève d'un coup, si étonnée qu'elle en ouvre la bouche. S'en vient un son étranglé, dû à la soudaine peur. « C'est quoi ton problème, lutka... Tu bouffes toute seule, tu évites les gens, tu t'enfermes comme une paska avec tes consoles. Puis tu te laisses marcher sur les pieds, tu me files ta bouffe sans que je l'aie demandé... »
Quelques mots lui échappent, bien que le ton lui indique que ce ne sont pas des termes très affectueux. Chaque phrase s'enfonce en elle comme un couteau, lui transperçant l'intérieur. Elle tombe de sa chaise en se balançant inconsciemment, les yeux brillants. Au bord des larmes. Son souffle devient plus court, elle tente d'avancer pour l'éviter, l'ignorer et le fuir.
« C'est pour ça que je te hais. Tu défends plus ces jeux de merde que ta propre personne. T'as aucune fierté. Tu comptes passer ta vie à te laisser marcher dessus ou t'es conne comme Zelda au point d'attendre qu'un prince charmant invisible vienne te sauver ?! »
C'est pour ça que je te hais. Il la déteste. Parce qu'elle est faible, parce qu'elle est trop empathique. La peur & la douleur deviennent colère, elle grimpe d'un coup sur une table, pour être à sa hauteur. Elle ne le regarde pas, elle fixe droit devant elle, les dents serrées. Et elle murmure.
« Qu'est-ce que.. Ca peut te foutre.. Que je sois comme ça ? » La première larme coule, rapidement suivie par la deuxième. « Okay, je suis une grosse conne qu'a la trouille de tout. Et alors..? »
Ses ongles s'enfoncent dans ses paumes. Putain, même pas capable de parler sans chialer. Il la déteste. Il me hait. Cette seule phrase se répète dans son esprit. Qu'est-ce qu'elle a mal fait ? Qu'est-ce qu'elle n'a pas réussi pour qu'il en arrive à la haïr ? Tu sentais le danger Nana, fais pas l'innocente.« Pourquoi tu me détestes ? Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ta haine ? »
Son regard se lève, une fraction de seconde. Elle pourrait tendre la main, le toucher, juste pour savoir ce qu'on ressent quand on est fort, fort & en colère. Mais elle recule, jusqu'à descendre de son perchoir, jusqu'à sentir le mur rassurant dans son dos. Elle se laisse glisser au sol, assise. Qu'il s'en aille au lieu de lui gueuler dessus. Elle est très bien comme elle est, mais pas besoin d'enfoncer le couteau dans la plaie.
Menteuse.« J'te déteste. »Menteuse. Elle sait pourquoi elle l'aimait bien. Parce qu'il est l'inverse d'elle. Comme un miroir qui montre son D4RK double. Grand, fort, sans peur. Peut-être qu'elle est juste jalouse ? Ca fait trop de peut-être, trop de questions sans réponses.
Trop de questions qui n'ont pas besoin de réponses.
Se lâcher avait fait un bien fou à Tony. En toutes ses années d'existence, il n'avait presque jamais eu l'occasion de le faire. Bon, il n'était pas faux de dire que dans un sens, la torture des autres constituait un moyen de défoulement, mais avoir pété un plomb et exploser une table avait finalement reposé ses nerfs. Il se sentait plus serein, de nouveau apte à gérer la situation. Si elle lui avait glissé entre les doigts une seconde, il l'avait de nouveau empoignée, la serrait fermement sans intention de le laisser partir à nouveau. Toutefois il savait qu'au fond, un bout lui avait échappé, il savait qu'il laissait ici, dans ses souvenirs, quelque chose qu'il ne partirait pas, qu'il avait dévoilé la limite de sa patience.
C'était tellement ridicule. Tellement ridicule de se dire que l'être le plus pitoyable au monde avait pu venir à bout d'elle, que, parmi tant de personnes, c'était la petite et invisible Anarchy qui avait bousillés les nerfs de Tony Nalkäinen, le géant que personne n'ose défier. Le géant qui pourrit le pensionnat entier et dont la méchanceté avait été tue par les soins de l'innocence d'une E que la moitié des gens remarquaient. Mais finalement, il s'était reprit. Il avait craqué au mauvais moment, et désormais, il ne le ferait plus. Il ne sortirait pas davantage ses crocs qu'il ne le faisait déjà, il allait tuer lentement ce souvenir de sa mémoire et le changeait en désespoir, de sorte qu'à chaque pensée de ce jour, elle sombre.
Exact, Scarlet. Tu n'as rien fait. Qu'est-ce que ça change ? Tu aimes bien cet imbécile de Bretzel sans raison, pourquoi ne pourrait-on pas haïr quelqu'un sans raison ? Toutes ces pourritures.
Et il s'avance, peu à peu, chaque pas semble gigantesque, chaque pas semble écrasant, chaque pas détruit un peu plus l'image qu'elle avait de lui, chaque pas le rapproche un peu plus de sa propre destruction. Il n'en a que faire, il tient juste à lui montrer que, que que soit le degré de rébellion, quel que soit le point jusqu'où elle est prête à aller, il sera toujours devant elle, supérieur à elle. Après tout, elle est comme les autres, elle va juste évoluer à leur niveau, pas les dépasser.
C'est bien, tu as gagné en personnalité. Ne devrais-tu pas m'être reconnaissant ? Sourire méchant, cruel, impitoyable. À chaque fois qu'on te cassera les couilles, rappelle-toi de cette colère, rappelle-toi de ce sentiment - c'est soulageant, pas vrai ?
Et il la touche. Pour la première fois, il provoque un contact, il se permet une proximité dont rêvait jusque là la curiosité d'Anarchy. Il lui saisit le menton avec les doigts, la force à lever les yeux vers les siens, à l'affronter à nouveau. Elle la ressent dans cet instant, autant dans son âme que dans ses yeux, cette haine qui le parcoure, interminable, cette supériorité, cette colère, cette cruauté. Peut-être parviendra-t-il à percevoir une once de bon, là dedans, quelque chose dont le finlandais lui-même n'aurait pas la folie d'être conscient. Finalement, il y met fin, il se redresse, trace à nouveau cet écart entre eux, cet écart incommensurable.
N'oublie pas cependant, que comme tous les autres, tu n'es qu'un insecte à côté de moi.
I'M FUCKING SCARED 'CAUSE EVERYTHING I SEE ON YOUR EYES IS ANGER AND CRUELTY. I THOUGHT YOU WERE NICE.
« Exact, Scarlet. Tu n'as rien fait. Qu'est-ce que ça change ? Tu aimes bien cet imbécile de Bretzel sans raison, pourquoi ne pourrait-on pas haïr quelqu'un sans raison ? Toutes ces pourritures. » A l'évocation de Bretzel, elle lève ses yeux, ses yeux brillants de larmes, ses yeux exprimant toute la faiblesse qu'elle tente désespérément de cacher, cette peur qui nous ses entrailles un peu plus à chaque pas du blond. Elle qui se sentait bien d'avoir répondu, d'avoir eu le courage de se dresser devant cet être ignoble, de ne pas s'être aussitôt écrasée... Chaque parcelle de fierté se brise, comme un miroir qu'on frappe à violents coups de pied. Elle déglutit et essaye de se relever, mais n'a même pas le temps de faire un mouvement qu'il près, trop près d'elle. Elle baisse la tête, terrifié.
« C'est bien, tu as gagné en personnalité. Ne devrais-tu pas m'être reconnaissant ? À chaque fois qu'on te cassera les couilles, rappelle-toi de cette colère, rappelle-toi de ce sentiment - c'est soulageant, pas vrai ? »
Anarchy aurait voulu se lever d'un bond et lui mettre une baffe - ou un coup de boule, qui sait ? - avant de partir en courant, pour éviter de perdre le peu d'amour-propre qu'il lui reste. Mais elle n'arrive pas à bouger, elle a carrément du mal à respirer. Pourquoi n'a-t-elle rien vu ? Pourquoi est-ce qu'il a fait ça ? Pourquoi est-ce qu'elle n'a pas envie de le haïr ?
Elle n'a rien vu venir. Les doigts qui se posent sur son menton, le regard assassin qui la transperce, le flux de ressentis qui l'électrocute. Un sursaut parcoure toute sa carcasse, une haine & une rage incroyables s'enfoncent en elle comme une lame, son rythme cardiaque s'affole. Elle lâche un couinement, pas habituée. Et tout à coup, elle ressent vraiment tout.
La colère d'être aussi faible, la haine de le voir si fort, de le voir abuser de sa gentillesse et de sa patience, d'avoir été si naïve. Ses yeux reprennent de l'éclat, elle redresse les épaules, à moitié affalée par terre. Il recule, rompant ce contact si violent qu'Anarchy a l'impression de s'être pris un coup de poing.
« N'oublie pas cependant, que comme tous les autres, tu n'es qu'un insecte à côté de moi. » Elle frémit, se lève. Et éclate de rire. Un rire glacial, un rire sans joie, plein de mépris. Depuis quand tu te sens aussi supérieure ? Elle oublie momentanément que cette rage est dirigée contre elle, qu'elle n'est pas avec elle. Du bas de son mètre soixante, elle toise le A, étrangement agacée.
« Les avis divergent... » A peine murmurée, cette phrase coupe net son rire. Pourquoi a-t-elle dit ça ? Elle prend conscience de sa stupidité, elle écarquille les yeux. Emportée par le caléidoscope d'émotion, Kiara avait perdu tout instinct de survie. Elle se racle la gorge, priant sans grand espoir qu'il n'a rien entendu. Un sourire tordu apparaît sur ses lèvres.
Elle se tourne vers son sac, traversant l'espace qui la sépare d'un de ses bien les plus précieux pour le garder en sureté sur elle. La respiration hachée, elle a l'étrange impression que la mort la guette, qu'il va lui arriver des saletés et surtout, qu'elle ne va pas pouvoir sortir de cette salle. Mais, dans un élan suicidaire de courage, elle s'avance vers Tony, dans l'intention de passer à côté de lui sans lui jeter un regard, fuir pour canaliser la rage qui brûle en elle dans l'instant.
N'oublie pas que cette colère est dirigée contre toi, Anarchy.
Là, il atteignait sa limite. Jusque là, il s'était montré patient, presque trop en fait, il accordait tellement de crédits à cette fille qu'il s'en répugnait lui-même. Deux ans plus tôt, il aurait détruit les rêves de cette fille, son mental, ses envies, il l'aurait défaussé de tous ses jeux et toute volonté d'y rejouer dans sa vie. Il l'aurait conduit dans la pire situation possible, lui aurait démontré la réalité de la vie, qu'elle n'était pas si simple. Il l'aurait fait il y a deux ans, mais là, il en était incapable. Il n'avait pas perdu de sa cruauté, mais au fond, il ressentait une telle inutilité à le faire qu'il estimait ne pas avoir de temps à perdre.
Pour lui, elle était tout simplement désespérante. Tony n'avait jamais ressenti ça, elle était la personnification de la bonté qu'il lui était incapable de corrompre. Elle était trop pure, trop courageuse, bien plus que n'importe quel gars qu'il aurait pu rencontrer en classe E. Elle lui tenait tête, et ça, ça avait beau l'agacer, rien ne lui faisait plus plaisir. Rien ne le faisait tant jubiler, au point qu'il en aurait voulu qu'Anarchy soit une femme forte, forte en tout temps, forte au point d'en être une sorte de rivale pour lui. Une personne capable de se dresser face à lui et contre-carrer ses méfaits, les méfaits qu'il répandait déjà depuis trop longtemps. Et il s'en lassait, petit à petit, toujours davantage...
C'était définitif : il la haïssait. Il avait beau avoir fait son possible, elle n'avait pas craqué, elle l'avait une nouvelle fois contredit. Une phrase, à peine murmurée, une opposition, quelque chose que nul autre ne se serait permit. Carlo n'était qu'un abruti et Jim son alter égo - aucun de ces deux là ne comptaient vraiment dans son calcul tellement il estimait avoir déjà remporté ses batailles. Là, en revanche, il n'avait cumulé qu'une unique défaite, une haine interminable envers cet être si chétif et une envie inébranlable et purement enfantine de revanche. Elle était devenue l'être qu'il s'amuserait à détruire plus qu'aucun autre.
Tu vas fuir à nouveau ?
Et il l'aide, il l'aide encore. Il l'aide car, il a beau la haïr et tenter de la détruire, il veut la relever, l'aider à relever la tête, faire d'elle une personne capable de faire face aux autres. Il veut l'aider, non pas pour elle, mais pour se trouver une personne qui lui provoquera un tant soit peu de stress. Et cette idée, elle a beau ne tenir que d'une utopie pure et simple, il s'y accroche comme un diable se tenant au premier homme venu, s'y accrochant avec férocité, se refusant de laisser passer une occasion pareille. Pourtant, au fond, il sait que c'est inutile. Il le sait. Alors Tony, qu'est-ce donc ? De la gentillesse ?
Tu as déjà oublié ce que j'ai fait ? Tu ne devrais pas. Ne te laisse pas marcher sur les pieds, ou c'est moi qui piétinerait ces putains de jeux... Zelda.
I'M FUCKING SCARED 'CAUSE EVERYTHING I SEE ON YOUR EYES IS ANGER AND CRUELTY. I THOUGHT YOU WERE NICE.
Anarchy avait deux possibilités. Soit elle fuyait et évitait par tous les moyens possibles cet individu, soit elle l'affrontait une bonne fois pour toutes et se montrait plus courageuse qu'elle ne l'avait jamais été. Les poings serrés, elle s'avance lentement vers la sortie, chaque pas la détruisant un peu plus. « Tu vas fuir à nouveau ? »
Elle s'arrête brusquement, un coup de jus traversant sa frêle carcasse. Fuir. Comme une faible. Pitoyablement, fuir pour ne plus jamais revenir, éviter les obstacles en priant pour qu'ils ne reviennent pas. Elle ne lève pas les yeux, elle fixe le sol, ce sol qui s'approche un peu plus à chaque seconde. Parce qu'elle tombe. Elle s'écrase sur ses genoux, lâchant son sac pour cacher son visage entre ses mains.
« Tu as déjà oublié ce que j'ai fait ? Tu ne devrais pas. Ne te laisse pas marcher sur les pieds, ou c'est moi qui piétinerait ces putains de jeux... Zelda. » Son rythme cardiaque s'accélère, ses doigts s'enfoncent presque dans sa peau. Elle ne se redresse pas, elle continue de pleurer, faible, stupide & gentille Anarchy. Jamais elle ne pourrait faire face à un tel titan, jamais elle ne pourrait combattre sa propre personnalité.
Realize. Et si ce n'est pas la sienne ? Elle se perd dans son propre cerveau, comme si des milliers de voix lui soufflaient des choses différentes, l'embrouillant tout bonnement. Peut-être qu'elle n'a pas changé depuis ses quatorze ans, qu'elle ne ressent rien de tout ça. Qu'elle n'est pas réelle. Elle plie les genoux, les tend pour se lever. Se tourne vers le blond, s'avance vers lui.
Elle s'arrête à quelques centimètres. Tend la main. Et la pose sur son torse, là où elle lui arrive. Un sourire fend son visage. Un sourire joyeux. Elle a compris, du moins elle l'espère. Son ton se fait plus doux, comme une mère qui gronde son petit enfant. « Non je fuirais pas. Je sais.. Ce que tu ressens. »
Pas une once de gentillesse en elle, malgré l'air innocent peint sur son visage. L'alarme rouge est lancée, Anarchy a l'impression d'être dans un océan avec un requin assoiffé. Peut-être qu'il est moins humain, plus primitif. Elle prend des risques, quitte à avoir mal, autant ne rien regretter. « Maintenant.. Pourquoi tu fais tout ça..? »
Elle ne le quitte pas des yeux, espérant qu'en faisant ça, son courage ne la quittera pas. Elle attrape faiblement le tissu, tire à peine dessus, le bénissant de bloquer son pouvoir. Elle fixe le titan presque sans peur, persuadée que, de toute façon, elle est allée trop loin pour fuir maintenant.
Avancer sans reculer, toiser sans faiblir, rester figée sans trembler. Elle essaye de se convaincre. Tout va bien se passer. Il ne va pas la frapper. Sans se départir de son rictus, elle attend patiemment, son coeur battant si vite qu'elle a l'impression que seul son rythme se percevant dans la salle.
C'était de toute beauté, le diable qui était remonté de sa demeure pour y pourrir la vie d'une demoiselle se voyait tiré à la lumière du jour, exposé aux yeux de tous, de sa véritable apparence à ses faiblesses. Il apparaissait, nu, troublé, le dessous de ses cartes montré publiquement aux yeux d'un ange tellement innocent qu'il ne s'était même pas douté de cette double face. Il avait tout fait, pourtant, mais il ne lui avait suffit que d'un écart, un écart qui l'avait mené à cette situation - car il était resté lui-même, fidèle à sa propre personne, s'il n'avait pas craqué, elle ne se serait jamais douté de rien.
Et pourtant. Le diable fourbe continuait, secrètement, à la torturer, le diable sadique n'avait cesse de lui donner les armes, des armes inutiles pour mieux la détruire, le diable sans coeur, détruisait l'être le plus pur sans remords, le diable masochiste, qui semblait presque prendre plaisir à cette opposition. Il n'avait pas l'air d'un homme lorsqu'il se baladait en toisant les autres avec supériorité, il ne semblait pas élève alors qu'il surplombait la plupart du pensionnat d'une tête, il semblait inaccessible quand son nom apparaissait en tête de liste des résultats avec une longueur d'avance ; une longueur d'avance qu'il avait toujours eu.
Là encore, Tony l'avait. Tony ne regrettait pas, et Tony prenait plaisir. Être paradoxal, il était tout autant satisfait de cette situation qu'il avait créée que de colère, car elle semblait également le mettre hors de lui. N'était-ce pas un peu cruel ? Il exhortait cette pauvre fille à s'opposer, chose qu'il détestait, pour se donner une raison de la mettre en pièces. C'était cruel, mais si pitoyable. Il n'avait rien pour se divertir, personne pour l'aider, si bien qu'il créait lui-même les embrouilles pour mieux s'en défaire. Pouvait-on vraiment parler de gentillesse ?
Non, depuis le début, cette supposition avait été ridicule. Depuis le départ, ce doute n'était qu'une vaste blague qui ne verrait jamais le jour. Tony n'aimait que lui-même.
Tu sais, hein. Tu sais, lutka, mais tu ne comprends pas.
Il avait l'air étonné, l'espace d'un instant, étonné qu'elle ait osé dire quelque chose comme ça. Elle était son alter égo, son opposé complet, elle n'avait aucun point commun avec elle mais elle avait osé. Elle avait eu le cran, car même avec son pouvoir, il jugeait bel et bien impossible pour elle de le comprendre entièrement. Non, ça l'était véritablement. Il n'avait pas de ressenti, Tony ressentait avec son cerveau et non son coeur - il n'était pas un être dont les sentiments pouvaient être définis, il était véritablement convaincu de sa supériorité. Pour elle, pour qui fuir était devenu une habitude, ce genre de concepts était totalement hors d'atteinte.
Pourquoi ? De la même façon qu'une personne normale ne réfléchit pas avant d'écraser un insecte. Il n'y a rien à savoir. C'est un concept hors de ta compréhension. Dommage.
Dernier mot accordé d'un sourire démoniaque, acte final suivi d'une grande satisfaction pour mettre un terme à ce jeu. Il dansait dans le feu, il jouait avec, il lui avait accordé un espoir pour mieux l'écraser. Cela avait été d'une difficulté étonnante, et elle semblait toujours se refuser à la réalité, toujours vouloir lui trouver une raison. Il n'en avait pas, et c'était quelque chose qu'il allait lui montrer, par fierté et non pour elle. Tony n'était pas quelqu'un d'humain.
La porte de la salle s'ouvrit, laissant place à deux personnes entrer - deux gars aux allures de racaille qui tombèrent en plein milieu d'une scène, incompréhensifs, mais le A ne leur laissa pas le temps de se remettre. Son regard effrayant se posa sur eux, les mettant de suite en joue - mais il n'allait pas se battre. Un sourire démoniaque étira ses lèvres alors qu'il saisit le poignet d'Anarchy avec vigueur, l'écartant de sa propre personne sans pour autant rompre le contact. C'est lui qui menait. Mais elle allait tout de même savoir.
Tiens donc, Anthony Smith. Monsieur s'est reconverti dans la délinquance ? La danse serait bien mieux, surtout avec les robes que tu mettais. Quand on a deux papas, chercher une présence féminine est déjà pitoyable, mais en devenir une soi-même...
Il ne lui fallut que quelques secondes, quelques secondes pour fouiller dans son carnet et en sortir une photo dudit garçon, travesti à l'époque, photo qu'il exposa en riant, riant aux éclats comme il aimait le faire. Il riait, et bientôt, son "ami" se joignit à lui. Le garçon sortit en trombe de la salle, non sans laisser quelques larmes au sol - et bien qu'amusé, l'autre le suivit, préférant éviter que son tour vienne. Peut-être espérait-il bien s'en tirer en riant aussi ? Son tour viendrait. Le tour de tout le monde venait.
Tu vois ? C'est le genre de personne que je suis.
Et il lâcha, il lâcha son bras pour rompre cet ultime contact, installer à nouveau cette distance entre eux, lui montrer à nouveau le fossé qui séparait le titan de la pitoyable personne qu'elle était.
I'M FUCKING SCARED 'CAUSE EVERYTHING I SEE ON YOUR EYES IS ANGER AND CRUELTY. I THOUGHT YOU WERE NICE.
Anarchy se sent presque masochiste, à s'approcher autant de celui qui l'écrase, qui la fait se sentir si faible qu'elle en a envie de se persécuter toute seule. Mais son sourire ne s'en va pas, elle reste d'une douceur incroyable, comme si la violence allait faire fuir le titan en face d'elle. « Tu sais, hein. Tu sais, lutka, mais tu ne comprends pas. »
Elle a envie de rire et de pleurer en même temps. Il a raison, elle ne comprend pas. Tout simplement parce qu'elle ne cherche pas à comprendre. Tenter de trouver une cause à des sentiments aussi puissants et négatifs serait une perte de temps. Alors elle se contente du savoir, de la conscience. Anarchy n'a pas besoin de comprendre, Anarchy a juste besoin de ressentir.
« Pourquoi ? De la même façon qu'une personne normale ne réfléchit pas avant d'écraser un insecte. Il n'y a rien à savoir. C'est un concept hors de ta compréhension. Dommage. »
Il a tort mais elle ne dit rien, elle observe et écoute. Qu'il se lâche, putain. Elle y est presque, elle peut réussir. Elle ouvre la bouche, cette bouche toujours fendue par son rictus faussement doux, faussement innocent. La porte s'ouvre d'un coup, laissant apparaître deux inconnus. Un sursaut traverse la carcasse de la brune, qui ne bouge quand même pas d'un millimètre. Son poignet se fait prisonnier, une légère douleur résonnant à l'intérieur. Elle serre les dents pour ne pas couiner, essayant de paraître invisible.
« Tiens donc, Anthony Smith. Monsieur s'est reconverti dans la délinquance ? La danse serait bien mieux, surtout avec les robes que tu mettais. Quand on a deux papas, chercher une présence féminine est déjà pitoyable, mais en devenir une soi-même... »
Incompréhension totale, mais la réaction de l'intéressé laisse penser à Kiara que le blond sait ce qu'il dit. Sortant une photo humiliante pour mettre à nu sa victime, souriant de tous ses crocs, il est encore plus vicieux qu'elle n'osait le croire. La proie s'enfuit, suivie de son acolyte, laissant de nouveau la petite chose pendue par le poignet.
« Tu vois ? C'est le genre de personne que je suis. » Le contact se rompt sur cette phrase glaciale, qu'Anarchy combat sans réfléchir. Sa main bouge toute seule, animée par sa volonté de vaincre pour une fois, d'achever ses projets. L'arroseur arrosé deviendra l'écraseur écrasé. Elle lui attrape la main avant même qu'il n'en reprenne totale possession, ses lèvre s'étirant une nouvelle fois. Ne pas fléchir, surtout ne pas fléchir.
« La plus grosse différence entre nous, c'est que tu comprends tout. Sauf qu'en faisant ça, tu perds le savoir. Donc tu deviens... Inutile. » Provoquer la colère pour l'en extirper. Elle agit inconsciemment, seule la victoire compte.
Elle serre violemment les doigts dans les siens, sourcils légèrement froncés. Le rictus ne s'enfuit pas, elle continue sur sa lancée, reprenant à peine sa respiration. « Je sais comment tu es, pas la peine de sortir le grand jeu, Tony. Tu n'es pas invincible mais tu refuses de le croire, comme moi je refuse de croire que tu es entièrement méchant... » Elle déglutit mais ne fléchit pas, tendue comme un string. Soufflant doucement, elle le lâche enfin, ses ongles laissant une infime marque sur la peau du blond.
Elle ne bouge plus, le fixant d'un air candide. L'angelot est trop persuadée pour se laisser abattre.
Et c'est là, au moment le plus crucial, durant la conclusion si proche de cette scène ridicule, que la protagoniste pourtant si fragile s'opposait au titan inébranlable. C'était sûrement la plus grosse poltron du pensionnat qui faisait montre d'un courage exemplaire au moment le plus crucial et qui, à la manière des héros qu'elle admirait, se dressait face à l'ennemi. C'était tellement héroïque qu'elle aurait pu en être fière dans le futur, si tant est qu'elle en avait un. C'était tellement héroïque que Tony aurait fondu en larmes s'il avait un coeur.
Seulement, le problème était là, il en était dénué. Tony aurait pu faire des efforts, Tony aurait pu prolonger le jeu, Tony aurait pu lui donner à nouveau des armes. Elle l'avait attrapé, l'avait souillé, sa main avait une nouvelle fois touché sa peau. Son corps d'être supérieur. Elle souriait à nouveau, faible lueur dans les ténèbres qu'il avait installé - mais maintenant, elle avait été écrasée. Maintenant, le A était insensible aux provocations, intouchable aux paroles de cet être de bas étage, situé plus bas que n'importe quel type lambda. Il s'était retrouvé lui-même.
Ce jeu, désormais, le conduisait au scepticisme. Plaisir ? Colère ? Amusement ? Irritation ? Divertissement ? Agacement ? Lassitude.
Oui, le jeu l'avait lassé. Il en avait marre de jouer, marre de cette fille. L'agacement avait surpassé le plaisir, le titan n'éprouvait plus de plaisir avec son chétif adversaire. Il écoute alors, il écoute en silence, il écoute en profitant de ces mots. Il écoute, se moquant des croyances de la brune, sentant l'extase monter en lui. Il se sentait si bien, si bien de la voir tourner le dos à sa vraie personne et s'engager dans une impasse. Il était si cruel, si cruel d'apprécier le moment, la situation, mais n'était-ce pas sa vraie nature ? Lui, cruel, manipulateur, sadique. Lui qui restait insensible aux provocations, à son sourire, au fait qu'elle l'appelle Tony.
Lui qui était si intouchable.
Tu peux refuser ce que tu veux, Scarlet, ça n'y changera rien. À côté de moi, même Pandora est un ange.
Et il sourit, ce sourire qui lui sied si bien, ce sourire de démon, ce sourire qui ne laisse place à aucune once de gentillesse, aucun espoir de bonté. Il dégage sa main à nouveau, rompt ce contact et ce partage de sentiments à nouveau. Il ne fuit pas, il s'y refuse, car il a une fierté. Au fond, il a beau être lâche, fourbe, il a beau s'autoriser à user des pires stratagèmes, il veut rester le grand méchant de l'histoire. Un bon fond ? Pas moyen, et il le sait, il en est convaincu depuis le début.
Alors, sans aucun respect, c'est à lui de lui saisir le col de ses vêtements, de planter ses yeux dans les siens, ses yeux débordant de méchanceté et d'un plaisir malsain. C'est à lui d'apposer un contact, de coller son front au sien pour qu'elle ressente à nouveau tout ce qu'il ressent. Peut-être y verra-t-elle de la haine, mais surtout de la sincérité, de l'honnêteté, car il est véritablement un être maléfique. Il lui envoie toute sa haine, toute son absence de gentillesse, toute sa fierté, ses complexes de supériorité, toute cette conscience qu'il ne refusera pas de lâcher, pas sous les mots d'une fille si chétive incapable de s'imposer elle-même au monde.
Et il l'envoie, sans respect, s'écraser sur le bureau du professeur. Il la jette, sans remords, comme un vulgaire objet sans valeur, comme une petite merde. Il s'approche, tout sourire, il s'approche, car il éprouve le plaisir de la finition, le plaisir de terminer le travail qu'il commence, celui de terminer la destruction d'un être si chétif. Que ce soit spirituellement ou physiquement, il veut la faire craquer, il semble si bien parti. Il pose ses mains sur ses hanches, la toise de son regard hautain, sachant qu'à ce moment, elle n'a pas besoin de pouvoir pour comprendre.
Tu t'attendais à quoi ? Un traitement de faveur parce que j'ai perdu mon calme ? Que c'est désolant, lutka. Tu n'as rien de différent avec les autres, et ce n'est pas ton sourire ou tes mots qui y changeront quelque chose.
Et il sourit, il sourit car sa violence n'est pas l'acte d'une colère mais celui d'un plaisir simple et sans limite.
I'M FUCKING SCARED 'CAUSE EVERYTHING I SEE ON YOUR EYES IS ANGER AND CRUELTY. I THOUGHT YOU WERE NICE.
La chair de poule s'installe sur les bras d'Anarchy, glissant jusque dans son cou. Elle sent le danger plus que tout, l'impression de s'enfoncer dans la gueule du loup, de l'ouvrir un peu plus pour l'aider à la gober la prend soudainement. Sa conviction s'enfuit entre ses doigts, ses doigts qu'elle serre autour de ceux du blond dans l'espoir vain de lui faire comprendre son peu d'animosité.
« Tu peux refuser ce que tu veux, Scarlet, ça n'y changera rien. À côté de moi, même Pandora est un ange. » Comme un coup de poing dans le ventre, cette phrase lui fait perdre le souffle, les yeux écarquillés. Personne n'était censé savoir pour Panda, cette américaine qui avait tout simplement brisé Anarchy. Haine et amour, pitié et rage. Ses bras tombent le long de sa taille, les larmes coulent à flot sur ses joues. Toute sa douceur s'efface d'un coup, elle se sent aussi vide qu'une coquille.
Anarchy ne réagit pas lorsqu'il l'attrape, ses yeux se fermant au contact de sa peau. Une boule se forme dans sa gorge, la colère s'infiltrant en elle sans qu'elle puisse l'en empêcher. Elle vole jusqu'au bureau, s'écrasant mollement contre le bois. Sans qu'elle puisse bouger, il pose ses mains sur ses hanches, lui arrachant un frisson de dégoût et de peur mélangés. Elle lève la main pour essuyer ses pleurs, la vision troublée.
« Tu t'attendais à quoi ? Un traitement de faveur parce que j'ai perdu mon calme ? Que c'est désolant, lutka. Tu n'as rien de différent avec les autres, et ce n'est pas ton sourire ou tes mots qui y changeront quelque chose. » Plus aucun sourire ne fend les lèvres de la brune. Elle gigote pour se dégager de son étreinte, sans succès. Sa respiration se fait plus haletante, elle crève carrément de peur. Le frapper ne ferait que provoquer plus de douleur en elle.
L'angelot n'a plus l'envie d'aider ce démon, elle veut juste se venger, se venger d'avoir été ainsi mise à nue face à son passé douloureux. Le visage de Panda envahit ses pensées, sa voix s'infiltre dans ses oreilles, douloureuse, amère. Cette fausse joie qui l'animait. Tous ses mensonges qu'avaient subis Anarchy. Comme avec ce titan, qui s'était joué d'elle.
« Panda..ora était tout sauf un ange. Que tu en saches autant sur moi est.. dérangeant. » Sa voix n'est qu'un souffle rauque, la souffrance qu'elle éprouve à la simple évocation du monstre, cause de sa faiblesse si longue et déchirante. Une idée désespérée germe dans l'esprit de la brune, qui se concentre intensément. Sans réellement réfléchir, elle pose sa main sur la joue du titan, et lui envoie son propre dégoût en premier lieu, inversant difficilement le flux des émotions.
Suivi de ce sentiment répugnant, elle le regarde droit dans les yeux, et transfère la plus grosse dose possible d'affection, repensant à Bretzel, à Warren et à tous ceux qu'elle apprécie, son coeur battant plus vite suite à cette utilisation trop importante. Sans attendre un instant, elle reprend possession de ses doigts et baisse les yeux, ne bougeant plus d'un pouce.
Elle perd espoir à chaque seconde, mais sa motivation n'est plus nécessaire. Il lui suffit de mobiliser cet amour pur pour résister à sa violence, pour ignorer la douleur aigüe qui lui transperce le côté droit. Elle souffle doucement, essayant de reprendre un rythme respiratoire à peu près normal. Le ventre tordu, elle tente de repousser les doigts du blond accrochés à ses hanches, n'aimant pas particulièrement ce contact.
« Je me suis jamais attendue à un traitement de faveur. Mais il y a toujours une raison à être aussi désagréable... Même avec les insectes. »Et en général, c'est parce qu'on se sent faible. Mais elle n'a pas besoin d'aggraver encore plus sa position.
Les jeux sont faits. Et les acteurs saluent, le public applaudit, chacun retourne à sa place et reprend son train de vie - Tony, à toiser les gens de haut, Anarchy, gémissant sur le sol. L'impuissance la prend à mesure que le sourire gagne les lèvres de Tony, le diable savoure, le diable observe, cette vision montant peu à peu l'excitation en lui, l’exhalation d'une oeuvre réussie, la victoire au bout d'un chemin si simple sur lequel il a lui-même dressé des flammes. C'est triste, triste qu'il aille jusqu'à se barrer lui-même la route, triste qu'il doive s'opposer à sa propre personne à défaut de trouver en quiconque une rivalité digne de ce nom.
Alors il se contente. Il se défoule, s'agite, se fait plaisir, toise Anarchy, n'éprouve rien, sinon de la satisfaction d'un travail achevé. Elle pleure, laisse dégringoler ses larmes, tandis que son rire résonne dans la salle en écho à ses pleurs. Ce sont de vrais contraires. Par cet acte, il a prouvé, par cet acte il a montré que le bien ne gagne pas toujours, par cet acte il a défait de tous l'idée d'un coeur dans sa poitrine, l'idée de sentiments positifs, l'idée d'un bon côté enfoui dans sa personne. Tony est unique, Tony est sans pitié, Tony affirme ouvertement sa propre conviction.
Et elle n'abandonne pas. Elle gémit, et, sa surprise quant aux informations du A la dérange. Il n'en a que faire, se délectant de cet étonnement qui les frappe tous, de la surprise que provoque les effets de son pouvoir - mais plus encore, des informations qu'il possède au-delà de ça. Anarchy n'est qu'un exemple, Anarchy n'est que le début, mais elle s'approche, elle fait face à nouveau, dans un élan de désespoir - car il sait, il se doute qu'au fond, elle n'y croit pas vraiment.
Puis enfin, il ressent tout. Sa haine, son dégoût, ses pensées pour Pandora, ses sentiments à son égard, il ressent tout et à nouveau, il jouit de cette proximité, il profite de ce semblant de compréhension. Mais l'arrêt est brutal. L'amour, l'affection, les sentiments bons le prennent de court, ressentis jamais expérimentés jusque là - ou affections le renvoyant à un passé trop lointain pour être retenus. Et il semble hésiter, semble surpris.
Je... ces sentiments...
Le scepticisme semble monter, prendre de court le diable qui n'a jamais connu la lumière. Il est dérouté, prit à la gorge, il semble vaincu. Il semble.
C'est ce que tu aurais voulu, hein ?
Et il rit, il rit à nouveau, rire dément, rire cruel, rire final, elle semble accablée, désespérée, car ces sentiments ne l'atteignent, car il sait, il savait, mais il ne comprend pas, et il refuse de comprendre. Car il ne peut pas comprendre, il est unique, il est dénué de tout ça. Il lui saisit les cheveux, la lève à sa hauteur pour croiser son regard, car c'est la plus apte à la comprendre qui s'éloigne le plus de la vérité. Il la toise, une seconde, lui déverse toute la vérité, lui place toute l'inutilité de ses actes devant les yeux, et la laisse retomber au sol, sans aucun intérêt pour la suite. Puis Tony tourne le dos, cette fois, il est las, il a apprécié le jour, et ce qu'il laisse ici comme image lui est égal. Son plaisir, lui, est maintenant repu.
Le ressens-tu, cette fois ? À quel point cet être est ignoble.