He's really evil|| ANARCHY

Elle s'attend à conclure cette entrevue sur une victoire écrasante, sur la satisfaction d'avoir été courageuse, sur un sourire triomphant et une démarche sautillante. Elle s'attend simplement à gagner, pour une fois dans sa vie, à autre chose qu'à un jeu de console portable.

Mais il se joue d'elle, sans qu'elle ne s'en rende compte. Son rire s'élève dans la pièce, la faisant frissonner de dégoût. Elle cherche à descendre de son perchoir, mais il l'attrape par les cheveux, la soulève et plante son regard glacial dans le sien. Elle tente de l'esquiver, mais l'attraction de ces pupilles la tient, elle perd son souffle d'un coup. Sa motivation et sa conviction s'envolent subitement. Elle perd momentanément l'envie de l'aider, de le faire sortir de ces ombres où il semble obstinément enfoncé.

Il lui tourne le dos, la laissant libre. La douleur dans son crâne est presque moins importante que celle qu'elle ressent au fond de son être, brisée jusque dans les moindres recoins. Ne peut-elle pas réussir une simple chose, juste une fois ? Elle serre les poings et les dents, de nouvelles larmes s'échappant de ses yeux rouges. Des larmes de rage, de déception. Pas un son ne sort de sa bouche fermée, elle renifle brièvement mais ne bouge pas d'un millimètre.

Anarchy est têtue. Anarchy s'accroche à ses idées et n'en tolère pas d'autres. Et, plus que tout, Anarchy ne pliera plus. Elle s'est écrasée devant la haine de Pandora, devant l'autorité de ses parents et devant les difficultés qu'elle a rencontré. Ca n'arrivera plus. Il est temps qu'elle s'impose, putain.

Si l'affection n'a pas suffit, alors elle utilisera un moyen plus violent, comme il l'a fait pour la faire abandonner. Reprenant lentement sa respiration, elle attrape son haut et le tire de toute sa force à elle, chuchotant d'une voix rauque. « Quelqu'un s'est déjà confessé à toi ? » Ses doigts s'agrippent, ses jambes passent devant lui pour l'enfermer dans une faible étreinte. Elle sert comme elle peut, dans le vain espoir de lui faire un peu mal. Ses mains se lèvent pour atteindre sa peau, elle se concentre intensément. Le sentiment le plus fort qu'elle ait ressenti ; l'amour. Il n'est pas dirigé vers lui, mais vers Panda.

Sa peau glaciale se pose dans son cou et, dans un sourire, elle murmure. « Finalement ferme-la... » Elle ferme les yeux et repense à la sensation du baiser de l'ancienne blonde, son propre rythme cardiaque partant en vrille. Ses jambes se serrent par réflexe, de nouveaux sanglots soulèvent ses épaules. Son rictus joyeux ne disparaît pas, elle se remémore tous ces moments passés avec elle, cette joie si intense qu'elle en devenait douloureuse qui l'enserrait dans sa douce étreinte à chaque fois que la chevelure rose de sa Panda à elle apparaissait dans une foule. Elle était tout pour elle, son amie, sa confidente, la seule avec qui elle pouvait dire n'importe quoi sans avoir peur de passer pour une conne...

Anarchy ne pense pas à cette douleur qu'elle a ressenti en effet secondaire de ce baiser. Elle ne pense qu'au contact en lui-même, à l'éclair euphorisant qui l'a traversé jusque dans les orteils. Elle ne pense qu'à la joie, pour écraser le titan. Après cette décharge, elle le lâche et le repousse violemment, reprenant possession de ses moyens. Ses jambes se relèvent, elle essuie ses larmes et cesse brutalement de sourire.

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Elle devrait continuer de s'acharner, de se battre contre lui comme ça. Elle devrait endurer ses coups, ignorer la douleur aigue. Mais elle n'y arrive pas. Elle se redresse lentement après avoir poussé un gémissement, et attrape son sac. Sa motivation s'est définitivement enfuie, laissant place à la haine, à la rage et au mépris. Une main sur la blessure, elle ferme les yeux le temps de reprendre ses esprits, et se précipite pour parler, avant qu'il ne parte réellement.

« Si, quelque chose a changé. J'te déteste, connard. » Et un sourire fend son visage. Malgré sa puérilité, elle est fière de lui avoir craché ça au visage. Assez fière pour se lancer à sa suite et pour le dépasser, pour se planter devant lui et pour le foudroyer du regard, toute peur envolée. « T'penses p'tête que le pensionnat entier a peur de Tony, mais en fait t'es encore plus enfoncé dans tes idées que je l'pensais. Et encore plus pitoyable que moi. » Un rire s'échappe d'entre ses lèvres fines, elle lui écrase le pied de toute sa force, plus par signification que pour lui faire mal.

Elle n'aura plus jamais peur de lui, elle n'aura plus de pitié pour lui. Plus de compassion. Plus de gentillesse. Que dalle. Mais elle l'écrasera à chaque fois que la clémence du destin le lui permettra. La réputation d'Anarchy n'a aucune importance, personne ne sait qui elle est, à part quelques rares êtres. Les poings serrés, elle se retient difficilement de cracher sur la chaussure du géant, mais se contente finalement d'un reniflement dédaigneux, avant de partir en marchant plus vite que jamais.

Son ventre lui fait terriblement mal, mais son coeur n'éprouve plus rien que de la haine. Elle le déteste, elle fera tout pour qu'il souffre, désormais. Elle lui a ouvert son coeur et il a voulu le piétiner ? Eh bien elle allait lui faire mal, du moins autant qu'elle le pouvait. Frannie et ses scoops lui seraient d'une utilité capitale, si elle veut vraiment faire comme il le faut. Léchant ses lèvres fines, la brune s'enfonce dans une foule, bravant ses peurs pour être perdue de vue. Elle a vu ça dans les films, ça marche peut-être.

Déglutissant, grognant & transperçant de ses yeux rouges quiconque ose croiser son regard, elle court presque vers sa chambre et s'y enferme, laissant enfin libre court à la colère du géant, qui l'envahit à l'instant où la porte se ferme. Son oreiller en est la principale victime, pauvre de lui. Mais imaginer le A à la place de ce coussin dévasté est une image des plus alléchante. Se dire que, dans quelques heures, l'effroi prendrait la place de la colère... C'est moins plaisant.

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