Afternoon [/!\♥]

Une jupe à volants, légère et fluide. Un petit chemisier fleuri. Des bottes marrons, quelques bijoux. Je me regarde de haut en bas dans le miroir, tourne sur moi-même, minaude. Bon, je me trouve plutôt jolie. C’est pas tout les jours. Je ne me maquille pas, parce-que ce n’est pas un rencard. Je ne me maquille que pour les rencards /mais j’en ai pas donc je me maquille pas #mavieestnaze/ Et je sors de ma cabane, enjouée, prend le chemin vers les nouveaux bungalows des grands - bande de veinards. Ces gros chanceux ont, en plus, le bungalow numéro 1. Pas besoin de se taper tout le chemin, j’y suis déja. Je toque, entre, et c’est mon Jo qui me saute dessus, tout sourires. Il m’illumine. Je ris et me laisse porter par son entrain - la joie de ce mec est contagieuse. Je salue rapidement tout le joli monde.

« Si jamais t'as faim, fais gaffe à ce que tu prends. C'est Charlie qui cuisine. »
« ... Tu m’prend vraiment pour une morfale, j’hallucine ! » Oeillade vers la cuisine, tandis que Joach retourne sur le canapé. « .... Bon ok. » Et d’un pas léger je m’élance vers la cuisine, gourmande que je suis. Un regard rapide, un bol de cerises. Je m’en empare, mais reste un moment dans la cuisine pour un apparté avec ma Charlie. Alors, la vie en colloc avec Heath, tout ça. Quelques minutes entre filles, complices. Et puis, Charlie s’en va, et c’est le grand Neil qui vient chercher calme et tranquillité dans la cuisine.

J’aime beaucoup Neil. Et je pense que c’est réciproque. Tout les deux, on se comprend énormément, sans avoir besoin de se le dire. Je sais ce qu’il ressent pour Heath, il m’en parle, parfois. Moi aussi, je lui parle de mes histoires de coeur désastreuses. De mes amours impossibles. J’éprouve beaucoup d’affection pour lui. Et j’espère sincèrement qu’au fond, il y a une chance pour qu’Heath se rende compte de son attirance pour les mecs et qu’ils se mettent ensemble. Ca me paraît improbable, mais j’aimerai que ça arrive. Pour Neil. Ici, dans la cuisine, on parle bas, et il en vient vite à me parler de Joach, et combien il l’énèrve. Ca me fait un peu mal pour lui, parce-que Joach est vraiment génial, Heath aussi, mais ils font du mal à Neil. J’aimerai m’en mêler, mais Neil refuse. Toujours. Alors je finis par lui offrir une accolade - sur la pointe des pieds - pour lui exprimer mon soutien, et nous retournons dans la salle principale avec les autres.

Heath est littéralement vautré sur le canapé, ses jambes étendues de tout leur long, ordinateur portable calé sur lui. Et au bout du canapé, Joach est affalé. Neil récupère son fauteuil et Lysander et Charlie sont par terre, jouant avec la petite boule de poils. « Pousse toi Heaaath. » Le brun me regarde, jette un regard circulaire sur la pièce, échange un regard avec Joach et reporte son regard sur son écran, un sourire étrange aux lèvres. « Nope. » Je fronce les sourcils, soupire et pose les yeux sur Joach, tout prêt. Un sourire complice, et je m’assied sur ses genoux, appuie mon dos contre son torse et cale ma tête contre la sienne. Et je me blottis contre lui, alors qu’il m’entoure de ses bras.

... Qui peut me blâmer ? Sérieusement. J’ai des potes tous aussi canons les uns que les autres, et j’ai un grand besoin constant d’affection - et de testostérone. Ce n’est un secret pour personne, j’adore me blottir contre Joach et Heath. Je passe ma vie dans leurs bras. Mais depuis qu’Heath a une copine, je ne le touche plus, par respect pour elle. Parce-que si j’avais un mec, et qu’une fille squattait H24 dans ses bras, je lui arracherai les yeux à la petite cuillère et lui ferai manger. - Quelque chose dans ce goût là. Bref, c’est Joach qui a l’exclusivité de mon besoin de tendresse en ce moment. Ca n’a pas l’air de le déranger, alors pourquoi m’en priver ? Le bol de cerises posées sur la table, je me penche pour en saisir deux encore liées et viens les caler sous le nez de Joach, le forçant à mettre ses lèvres de façon à les faire tenir en moustache sous son nez. Ca le fait loucher et j’éclate de rire, ne suivant plus vraiment la conversation. Ce n’est que le nom de Skygge qui m’y ramène rapidement, alors que je tourne la tête brusquement, soudainement attentive. - Et on se fout de moi. Je me pend au cou de mon Joach, chouine en disant qu’il est le seul à être gentil... jusqu’à ce que lui aussi se foutte de moi, en coopération parfaite avec Heath. Well. U bitchies.

Et puis, petit à petit, la pièce se vide. C’est Neil qui se casse en premier, j’ai pas bien compris pourquoi. Charlie et Lysander décident de sortir le chat, et je reste seule avec Heath et Joach. Un silence, et je les vois se regarder. ... Ils ont ce truc, ce mode de pensée télépathique, je sais pas, mais quand ils font ça ils se comprennent sans avoir besoin de parler, et moi je suis larguée. Bref, Heath soupire, râle, et se lève, ordi en main. « Bon. J’ai... un truc à faire. » Et il pose son pc - fermé - et va vers la sortie. « ... Je suppose. » Et il se casse. Je reste sceptique quand à cette sortie qui manque clairement de motivation.

« Bon bah reste plus que nous deux. »
« Etrangement, oui... »

Je plisse les yeux, fixe la porte derrière laquelle vient de disparaître Heath. Et puis, je me rend compte que toutes les places sont désormais libres, ce qui suppose clairement que j’ai le droit de quitter les genoux et les bras tellement agréables de Joach. ... Gn. Je m’empare de nouvelles cerises et me laisse tomber à côté de lui, prenant l’ancienne place de Heath, le dos contre l’accoudoir et mes pieds - en chaussettes -  venant se caler sous les cuisses de Joach. Je cale une cerise entre mes dents, tire la tige, observe Joach un instant. Il est silencieux, ça lui ressemble pas. « A quoi tu pense ? »

« À la lune, au soleil. À la vie, à la mort. À toi et moi. » J’hausse les sourcils, éclate de rire. Wtffff. Quel imbécile. Croyant à une énième connerie, je me contente de secouer la tête, saisissant le noyau de cerise pour le poser sur la table, au milieu des autres.

« ...À Heath, Neil, Lys et Charlie aussi. »
« C’est bien moins romantique tout à coup. »

Je plaisante, sourire aux lèvres, le regard rivé sur un fil de couture de ma jupe qui pend - je tire, et l’arrache, l’enroulant autour de mes doigts, distraite. Il me tapote la jambe, je n’y prête pas attention, le regard ailleurs. Le contact est tellement habituel et naturel entre nous que plus rien ne me choquerai, venant de lui. Ou presque.

« Je pense au danois dont tu rêves toutes les nuits. » Je cille, et mon regard vrille sur lui, une sensation désagréable se glissant jusqu’à mon plexus. Je fronce légèrement les sourcils, et baisse les yeux, muette. J’ai pas super envie d’en parler. On passe un bon moment là, et penser à Skygge ne fais que me rappeler combien je m’ennuie dans la vie, quand ces adorables amis ne sont pas là pour me faire rire. Ca me rappelle son regard, aussi effrayant qu’attirant. La puissance qu’il m’inspire. Ca me rappelle combien il est doué au basket, combien ses mains sont belles, combien son dos est musclé. Le mystère qui l’entoure.
... Et son amour pour Cale.

« Je veux toooouut savoir. Dis-moi ce qui te plaît chez lui par exemple. » J’hausse les épaules, les yeux rivés sur le petit fil que je torture désormais entre mes doigts. Je cligne des yeux doucement, réfléchi. Ce genre de choses, j’en parle plutôt à Charlie et Ashley. Je me confie aussi à Heath et Joach... mais je leur parle pas de mes histoires des coeur. Même si Joach a tendance à s’y intéresser. Je suppose qu’il est curieux, et incroyablement attentionné. Je roule le fil entre mes doigts, jusqu’à ce qu’il ne forme qu’une boule et le laisse tomber au milieu des noyaux de cerise. Alors je prend la main de Joach, l’observant. J’aime tellement ses mains. Comme Heath. Des mains où l’on voit bien les veines ressortir. Des mains masculines, matures. Mais j’ai beau les observer et jouer doucement avec ses doigts, c’est bien le fameux danois que j’ai en tête. Mais je ne me sens pas d’humeur à chanter l’amour que je lui porte. Au contraire.

« Je sais pas ce qui me plaît. Peut-être qu’au fond, c’est parce-que je ne sais rien de lui... » C’est ce que je me dis, souvent. Les gars de la bande, je les connais par coeur. Je peux être déçue. Comme je suis déçue du désintérêt constant d’Heath, ou de la façon dont Joach défie Neil. Je suis déçue des défauts de Pytha, de Neil. Parce-que je les connais. Mais dans ma tête, Skygge n’a aucun défaut. Je l’idéalise. A mes yeux, il est parfait. Mais j’ai conscience que cela est faux, que l’image que j’ai de lui n’est qu’une illusion. « C’est comme une ville, ou un pays... Tu l’idéalise, tu rêve d’y aller... et une fois là-bas, tu peux être déçu. Et finalement, ta petite région, que tu connais bien, est beaucoup plus belle. » Je divague, tente de poser des mots sur mes analyses. Je soupire, mon regard revenant à la réalité après s’être perdu quelque part sur la main de Joach. « C’est pas important de toute façon. Il ne le saura jamais, et ça me passera. Ca me passe toujours. » Parce-que Skygge n’est pas le premeir, et ne sera pas le dernier. Il y a eu, dans mon petit coeur, des passages de Nathan, Léocade, Heath. Et d’autres. Joaquim, même Jim. Je suis un véritable coeur d'artichaut, c’est désolant. « De toute façon, il vaut mieux pas qu’il le sache. Parce-que même quand j’arrive à quelque chose, ça devient toujours catastrophique. » Je lâche sa main et me lève du canapé. Allusion à Nathan, une vraie râclure. Et allusion à Léocade, qui aujourd’hui encore, s’amuse à torturer mon coeur. Quelques pas, j’ai mes noyaux en main que je jette à la poubelle de la cuisine, m’essuyant ensuite sur la serviette qui traîne. Je reviens à Joach, lissant ma jupe et laissant glisser mes cheveux sur mon buste.

« Jooo, t’es sensé me remonter le moral, pas me faire déprimer. » Derrière lui, je me penche en avant, par dessus le dossier du canapé et glisse mes bras autour de son cou, et viens coller ma joue à la sienne, penchée au dessus de ses épaules. « J’tombe jamais sur le bon de toute façon, j’suis destinée aux abrutis. Alors ça sert à rien de s’attarder la dessus. » Je tourne légèrement mon visage vers lui, mes lèvres toutes proches de sa joue, le regard curieux. « Et toi alors ? T’a une fille en vue ? Ou c’est définitivement Heath l’homme de ta vie, mmmh ? » Et, distraite, je me redresse à peine, penche la tête de sorte à ce que mes cheveux tombent en cascade autour du visage de Joach, qui semble avoir une chevelure de rêve, comme ça. Je ris. En vérité je sais pas si j’ai envie d’entendre sa réponse. Si il avait une fille en vue, et une copine, ce serait différent, comme avec Heath actuellement. Et alors, ma vie serait vraiment, vraiment merdique.

« ... Il y en a une. Mais, je crois que je suis un peu invisible pour elle. » Invisible ? Joach ? C’est possible ça ? Ce mec est ultra canon, il est drôle, il est gentil, attentionné, il est adorable. Il a toutes les qualités du monde. Et je suis persuadée qu’il a du succès auprès des filles. « Je suppose qu'elle préfère les mecs plus... Mystérieux. » Je cesse de jouer avec mes cheveux, m’immobilise un instant. ... Ca a un goût d’amertume, ça. Je déglutis, penche la tête, cherche son regard, mais il a les yeux baissé, vient même bientôt les cacher de sa main, me laissant soucieuse. « Plus les jours passent, et moins j'ai l'impression d'avoir rien qu'une petite chance avec elle. » ... Mon Jo... est triste ? Mes sourcils se courbent, je cille et fais le tour du canapé. ... Merde, je pensais pas le mettre dans cet état... Je m’attendais pas à ce qu’il soit dans la même situation merdique que moi, en vrai. Pour moi, Joach peut avoir les filles qu’il veut. Il est génial. Bon, il a pas le charisme de Skygge, il est pas un truand-séducteur comme Heath... Mais il a ses qualités, des qualités gigantesques. Je pousse le bol de cerises et m’assied sur la table basse, face à lui. Je glisse mes genoux fins entre les siens, et prend sa main - celle sur son visage - pour la ramener près de mon visage. Mes coudes sur mes genoux, je ferme les yeux, déposant ma joue dans le creux de sa main, songeuse. Je veux lui montrer que je suis là. Pour moi, rien n’est plus cicatrisant que la chaleur humaine. Alors, que ce soit pour moi ou pour les autres, je n’ai aucun mal à établir un contact, pour réconforter.

Nous restons ainsi de longues secondes. Et sans bouger, sans même rouvrir les yeux, je lâche à voix haute, suivant le fil de mes pensées. « Un jour, elle comprendra que c’est stupide de courir après des illusions. » Je parle pour cette fameuse fille. Et je parle évidemment pour moi. Moi, je l’ai compris. Je me le dis jour après jour. J’essai de me résonner. Mais je continue de courir à l’étage des D pour le croiser. Je continue de venir à l’entrainement pour le voir exceller. Je continue de le regarder de loin. Et je continue de souffrir dans mon coin. « Alors je suis sûre qu'elle verra combien tu es génial. »

Un instant silencieux. Les secondes passent, et elle reprend.

« Peut-être qu’on peut apaiser nos tracas, toi et moi. » J’ouvre les yeux, douce, affectueuse. Je l’observe, et m’explique, un sourire affectueux aux lèvres, une lueur légèrement gênée au fond de mes pupilles. Je rougis à peine, et vais au fond de ma pensée, sans lâcher sa main, toujours sur les coudes, penchée vers lui. « Tu peux essayer de me dire ce que tu lui dirai. Et je te dirais ce que j’aimerai dire à Skygge. » Peut-être que le dire à voix haute nous allégera d’un poids. Je ne sais pas. C’est un peu idiot, mais je suis tellement idiote, quand il s’agit d’amour. Je tiens toujours sa main chaude dans les miennes, le bas de mon visage l’effleurant.

On est tellement complices. Je peux tout lui dire. Et même si ce que je propose est idiot, je n’en ai pas honte. Pas avec lui. Je déglutis et baisse les yeux, après avoir plongé mon regard dans le sien un peu trop longtemps. J’hausse une épaule, dans un demi-sourire. « Enfin, si tu veux pas je comprend hein. C’est un peu bizarre, j’admet. » Je fronce les sourcils fixant son genou. « ... C’est carrément bizarre, mais bon, tu me connais. » Je souffle un rire léger, repose mon regard dans le sien.

C’est un moment parfait. Je me sens parfaitement bien, avec lui. Toujours.

« Alors.... Je ne suis peut-être pas le genre de mec avec qui tu t'imagines être... Peut-être que tu ne vois que de l'amitié entre nous... » ... C’est donc une amie ? Instinctivement, je pense à Ashley, à Charlie. Non, il y en a d’autres, évidemment. Mais qui ? Est-ce que je la connaîs ? Je reste silencieuse, patiente, garde mes questions pour moi. Et il continue. Je le fixe, tenant toujours sa main dans la mienne. Attentive. Attentionnée.

Happée.

« ...c'est douloureux de te voir courir après d'autres garçons, des salauds alors que moi je suis là tout prêt et que j'attends juste que tu me regardes. » Un frisson vient courir le long de mes bras, et je déglutis, me tendant légèrement. Il y a ce petit quelque chose dans le creux de mon estomac. Une sensation, qui a disparu aussitôt. Ca n’a duré qu’une fraction de seconde, et je ne saurai dire ce que c’était. Probablement ma sensation de déja vu. Le rapprochement, inévitable, avec moi. Avec lui. Nous. « Mais, j'espère quand même. Que tu finisse par me remarquer. Me voir autrement. »  Je le regarde. Autrement. Ses mots viennent d’avoir cet effet sur moi. De le regarder non pas comme mon meilleur ami, mais comme ce jeune homme souffrant, soufflant ses désirs, soufflant ses espérances. Ce garçon qui me regarde droit dans les yeux. Qui me parle. A moi.

C’est la sensation que j’ai, alors que son regard me pénètre, m'électrise sous la sincérité de ses mots. Et je me sens proche de lui. Plus que jamais. Nos regards s’embrassent, le silence nous enveloppe. Une bulle, un monde. A cet instant, il n’y a que nous deux. Sa sincérité. Sa peine. Ses confidences. Il est beau, Joach. Je l’aime fort, Joach. Et, à cet instant, moi qui suis toujours si proche de lui, j’ai envie de poser ma main sur sa joue. Toujours plus proche de lui. Et j’ai envie de déposer un baiser sur ses lèvres. Parce-qu’il le mérite. Parce-que je veux apaiser sa peine.

Et, parce-que, égoïstement, je voudrais que ces mots soient pour moi. Je voudrais qu’on m’embrasse avec amour. Avec passion. Avec sincérité.

Ce n’est jamais arrivé. Jamais.
Il n’y a toujours eu que tromperie. Mensonge. Et masques.
Mais Joach est la sincérité même. Il est un trésor. Un éclat pur.

Mais, moi, je n’ai jamais le droit aux diamants. Moi, ce sont les pierres écorchées qui roulent jusqu’à moi. Fendues, brisées. Torturées. Et les yeux sombres de Skygge viennent remplacer ceux de Joach, face à moi. Un regard dur. Un regard meurtri. Blessé. Pierre abîmée. Et cette pierre m’intrigue. Elle m’intrigue et me capture, me faisant oublier les plus beaux diamants.

« J'ai. L'air. D'un. Con. Oublie tout ce que je viens de dire. »

Je cille, baisse les yeux et esquisse un sourire. Le décor revient. Skygge disparaît, et je fais de nouveau face à Joach. Face à mon meilleur ami. Je déglutis, reste silencieuse, songe l’espace d’un instant. Alors, je lève les yeux vers lui. Et les mots me brûlent les lèvres. Ils ne devraient pas. Je ne devrais même pas y penser.

Mais il est là, avec toute sa sincérité. Toute son affection. Il est là, avec tout ce que je recherche. Et je veux lui demander de m’embrasser. Même si ses sentiments sont pour une autre. Juste. Goûter à ces qualités. Qu’il fasse semblant. Qu’il fasse semblant de m’aimer, et m’offre le plus beau baiser que je n’ai jamais reçu.

Mais ce ne serait toujours qu’un mensonge. Factice. Illusion. Comme toujours.

Alors je me ravise, et détourne les yeux. Sourit. « T’a pas l’air con Jo. » Au contraire. Il a l’air sincère. Tellement. Je me penche finalement en avant, pose mon genou entre ses cuisses, sur le canapé, et le prend dans mes bras. Etreinte. Mes lèvres contre son épaule, mes yeux clos. Et, de nouveau, cette sensation de bien-être. Un bien-être infini, dans ses bras. Et je souffle.

« Je t’aime fort. »

« Si ces mots t'étaient destinés... Tu tomberais amoureuse de moi..? » BAM. Je cligne des yeux, me recule, décollant mon corps du sien pour le regarder, un sourcil haussé, un sourire amusé aux lèvres.

Mais le coeur qui bat vite.

« Je plaisante. »

Alors je ris, comme ça, ça fait naturel. Il plaisante - je ris, la logique y est. Hem. On va dire que ceci n’était pas du tout awkward. On va dire que je n’ai pas du tout eu l’envie mordante de lui souffler un Oui. Je me mord la lèvre, sentant cette proximité physique de plus en plus étrange au fur et à mesure que mon coeur s’emballe. ... Sérieux, depuis quand Jo me fait cet effet ? Va falloir arrêter les confidences, j’crois que ça nous monte à la tête. Je me redresse alors, debout, replace les volants de ma jupe et le bas de mon chemisier. « À toi maintenant. Qu'est-ce que tu lui dirais? » ... Gn. J’avais presque oublié. Du moins, j’espérai lui avoir fait oublier, avec cette étreinte. Je me penche pour saisir une nouvelle cerise et me met à faire les cent pas autour de la table basse, en chaussettes, ma jupe voletant doucement au rythme de mes pas légers. Mon regard est pour la moquette, pensif, et le fruit entre mes lèvres, dans lequel je ne croque qu’un petit morceau qui rougis mes lippes. « Je lui dirais... » Dieu, c’est difficile de me mettre en situation. Il n’y a aucune raison que je me retrouve seule avec Skygge. Encore moins que j’ai à lui déballer ce que je ressens. Et quand bien même j’en avais l’occasion... « ... Je ne lui dirais rien. » J’hausse les épaules. « Comme d’habitude... » Trop timide, trop sensible, trop fragile. « Et de toute façon... Je n’ai rien à lui dire de ce genre. C’est loin d’être une attirance aussi belle que la tienne... Moi c’est... plus un fantasme qu’autre chose. J’peux pas lui dire que j’admire ses qualités et que je supporterai ses défauts. J’peux pas lui dire qu’il me rend heureuse jour après jour. C’est pas le cas. » Je soupire, lentement, m’amuse à faire bouger les volants de ma jupe en observant la façon dont elle ondule, pensive. « Je suppose que je lui dirais que je l’admire. Et qu’il m’intrigue. » J’hausse les épaules de nouveau. C’est tout. Je ne le connais pas assez pour lui dire autre chose. « ... Que son regard me fascine. »

Silence. Je secoue la tête, sors de mes pensées. « Enfin. Ca n’arrivera pas. Je vais simplement essayer d’arrêter. Avec lui, avec tous. Tous ceux qui sont innaccessibles. Ca me fatigue de courir après du vent. » Oui, je dis ça à chaque fois. Mais qui sait, peut-être que cette fois, ce sera la bonne. « C’est peut-être Charlie qui a raison. Elle se prend pas la tête. » Je lève les yeux vers lui, hausse les sourcils, parle soudainement plus vivement, maintenant que le sujet n’est plus calibré sur mon coeur. « Tu te rend compte ?! Ca fait un an qu’ils couchent ensemble avec Heath ! C’est dingue ! Franchement... » Je ris, me passe la main dans la frange en laissant partir mon regard, je me rend toujours pas compte, je crois. « C’est comme si toi et moi on couchais ensemble régulièrement. Sans être en couple. Juste comme ça, amitié et sex. C’est pareil. »

« Mais moi aussi j’cherche du sérieux, qu’est-ce que tu crois ! » Je m’offusque presque, croisant les bras. Attends, il a quand même pas cru que j’étais sérieuse ? J’veux dire, c’était un exemple, pourquoi il répond de façon rationnelle comme ça ? Je fais une petite moue. Et il s’excuse, comme toujours, cherche ses mots. Ah ça, Joach n’a pas l’éloquence d’Heath, c’est certain. Toujours en train de rectifier, toujours en train de se contredire. Je ne peux m’empêcher d’esquisser un sourire dans ma moue boudeuse, devant un tel bafouillage.

« T'as pas soif toi...? »
« ... Tss. »

Je décroise les bras et, la tête haute, exagérant mon pas, vais vers la cuisine. J’ouvre le frigo, et vois une petite bouteille de Coca entamée. Je la saisi et reviens au salon, repensant à tout ce qu’il vient de sortir. Ca partait bien, il avait dit que ce serait intéressant comme idée, et puis, il était encore parti sur n’importe quoi. Je me place face à lui, pointe le goulot dans sa direction, l’air accusateur. « En attendant, je retiens. Tu voudrais pas coucher avec moi. » Je le regarde, sourcils haussés, bouche entrouverte, comme attendant sa réponse, et pourtant, ne lui laisse pas l’occasion de s’exprimer, reprenant en me redressant.

« C’est toujours pareil. C’est jamais moi qu’on veut. Heath s’est tapé Ashley ET Charlie, mais pas moi hein. C’est quoi, j’suis trop petite ? Trop grosse ? Pas assez aguicheuse ? J’suis plus moche qu’elles ? C’est ça ? Faut me le dire hein, que je fasse quelque chose j’sais pas, j’vais me couper les cheveux, j’vais changer de look... »

Je balance tout ça dans un air faussement accusateur, on voit bien que je ne suis pas réellement énervée, c’est plus de l’humour qu’autre chose, mais avec un fond de vérité tout de même. Un, grand, fond de vérité. Et je pointe de nouveau le goulot sur lui, une main sur la hanche. « Quand à toi mon Coco, si t’a soif, va falloir venir l’attraper c’te bouteille. » Agressive ? Un peu. Ils ont l’habitude. Ca m’arrive régulièrement de péter ce genre de câbles, et en général, c’est à ce moment qu’Heath décolle de son pc pour courir partout en disant TOUS AUX ABRIIIIS.

Bref. Oui, j’intime à Joach de lever ses fesses de son canapé pour venir chercher la bouteille. J’ai envie de jouer. J’ai envie de courir. J’ai envie de rire. Qu’il me fasse rire. J’ai envie de lui échapper. J’ai envie qu’il m’attrape. j’ai envie qu’il.

... Regardez moi ce corps d’athlète. Et c’est mon meilleur ami. La vie est injuste.

Et à la seconde ou je le défie, il répond. ...Ces mecs.

Bon, ok, j’aurai fais pareil à sa place. Alors je me crispe, cache bien la bouteille dans mon dos et recule, sur le qui-vive, prêt à bondir. Mais, en fait, lol, il est tellement rapide tout à coup. Il se lève, bondit sur moi, et en une enjambée a déja les bras autour de moi, me faisant piailler. Et quand il me saisit carrément, j’hurle, m’agrippe autour de son cou et atterris sur le canapé en riant. Bon sang, c’est si facile que ça pour lui ?! Va falloir songer à grossir ma vieille. Je tente de me redresser mais il prend place au dessus de moi. Je laisse tomber ma tête sur l’accoudoir, vaincue. Avec Jo au dessus de moi, je risque pas de bouger, pas tant que monsieur ne se sera pas décidé à bouger en tout cas. J’ai déja fais des bras de fer et autres batailles musclées avec lui - c’est ridicule à voir. Bon, au moins, j’ai toujours la bouteille. J’étend mes bras au dessus de ma tête et les laisse pendre au delà de l’accoudoir, hors du canapé. Et, j’ai toujours ma moue boudeuse, parce-que bien qu’inévitables, ces défaites à répétition contre les gars me vexent à chaque fois.

« Pfff, comment t'es nulle! T'as pas tenu deux secondes. »
« Gnnn. Dans une autre vie je serais un gros baraqué et je te ferais la misère. »

Espère toujours. Joach pose finalement ses mains sur l’accoudoir, de part et d’autre de mon visage, et je ne peux empêcher mon ventre de se nouer légèrement. C’est que, vu comme ça... Et il se penche au dessus de moi, approche son visage. A chaque seconde qui passe, mon coeur bat un peu plus vite. Joach et moi, on fait souvent ce genre de choses. Et ça a beau être mon meilleur ami, c’est aussi un mec ultra canon, musclé, adorable, et autres qualités incroyables. Mes yeux glissent une seconde sur ses bras, ses muscles, son tatouage. Sexy. Beaucoup trop sexy pour un meilleur ami. « Vexée, hum? » Je lui souffle avec force dans le visage en guise de réponse, faisant toujours une moue boudeuse - j’peux pas faire grand chose d’autre. « J'ai jamais dit que je ne voudrais pas coucher avec toi. »

ROUGE.

Je sens mes joues se réchauffer violemment, oui, j’ai un soudain coup de chaud et me connaissant, ça se voit, ça se voit genre très clairement. J’ai envie de baisser les yeux, mais j’aime pas perdre la face devant Joach. Alors, un sourire gêné tentant de s’étirer, je me pince les lèvres, essai de garder contenance malgré ma gêne et le trouble que provoque en moi cette déclaration faite par ce garçon dans cette position. J’ai besoin de respirer, de souffler, mais Joach approche un peu plus son visage, et là c’est mon coeur qui s'affole. J’en ai littéralement le souffle coupé, tandis qu’un frisson m'électrise le corps entier. Parce-que, le peu de fois qu’on a joué à ce genre de choses, c’est toujours moi qui jouais, m’approchant de lui, jouant la séductrice. Jamais, jamais on a été dans une telle position, avec ses lèvres au bout des miennes. Elles sont entrouvertes, et je peux sentir son souffle s'engouffrer entre mes lèvres, nos nez se frôler.

Fièvre.

Et ses doigts glissent sur mon bras, finissent de m’achever. Je le fixe, totalement happée. Et puis. C’est le drame. Il saisit la bouteille, sourit, et se redresse, pas peu fier. J’ouvre la bouche, offusquée, hausse un sourcil. Je devrais lui coller une baffe. Insolent. « C'est pas parce que Heath n'a pas couché avec toi que tu n'es pas désirée. Moi par exemple. Je vois pas pourquoi je te dirais non. » Je cille, toujours troublée par ce Joach entreprenant. Alors, je me redresse, désireuse de ne pas me laisser faire si facilement par cet insolent. Et, assise, je m’appuie d’une main derrière moi, tandis que la seconde forment deux doigt qui marchent sur le torse de Joach. Regard. « Tu pourrais me dire non... parce-que j’ai le don d’avoir des histoires qui finissent mal. Tu sais, quelque chose du genre Je veux pas gâcher notre amitié, les trucs habituels entre meilleurs amis quoi. Ca ne te dis rien tout ça ? Jamais entendu parler ? » J’hausse un sourcil, taquine. « Parce-que, si ça se passait mal, peut-être qu’on finirai comme Heath et Charlie. Voir pire. » Mes yeux sont désormais sur mes doigts, qui remontent à son cou, où ils s’arrêtent pour retomber sur ma jambe, alors que je pose mon regard dans le sien. C’est pour cette raison que je me retiens de fantasmer sur Joach. C’est pour cette raison, que je ne me suis jamais permise de telles pensées pour lui - ou du moins, que je les ai bloquées de mon mieux.

Et, en tête, me viennent Morgan et Jim. Plus heureux que jamais, maintenant que leur amitié fusionnelle est devenue amour passionné. Je déglutis, baisse les yeux.