Y'a des fois, vaut mieux être bien réveillé pour faire les choses [PV Curtis]

Temps de merde, journée de merde, arrivée de merde… Bref, que des trucs chiants. C’était son premier jour dans l’établissement et déjà tout ce qui l’entourait le faisait chier. Tout et rien pouvait l’ennuyer, en fait, c’était quelqu’un qui ne supportait rien de rien. Dormir c’était beaucoup plus passionnant qu’écouter les professeurs, surtout ça en fait. Il lui suffisait d’entendre seulement deux mots de la part des enseignants pour pouvoir s’endormir paisiblement sans le moindre problème. Un dormeur né, rare sont ceux qui arrivent à le réveiller d’ailleurs. Le plus chiant en fait, dans tout ce qu’il se passait actuellement, c’était qu’il se trimballait son énorme valise avec lui…

Pourquoi tant de haine ? Pourquoi est-ce qu’il devait déjà avoir droit à une journée aussi pourrie ? Il n’en savait rien et ça l’énervait. Il n’avait toujours pas reçu les clés de sa chambre, du coup il était obligé de zoner dans les alentours, cherchant de quoi s’occuper à gauche et à droite. La première chose qu’il fit, c’était un petit détour au parc. Oui, il y avait carrément un parc dans les environs, ça l’avait surpris, mais comme c’était des heures scolaires, il pouvait se permettre de flâner sans que l’on vienne l’ennuyer avec une question ou l’autre. Ce serait bien trop chiant encore une fois.

Il y resta quelques heures. Peut-être deux voir même trois, il ne savait pas réellement. Il était resté allonger sur un banc à fixer le ciel d’un air concentré, comme si c’était la première fois qu’il le découvrait. L’avoir observé si longuement l’avait tellement ennuyé que finalement il s’était endormi. Oui, c’était pour cela qu’il était resté assez longtemps dans les alentours. « Tsss… Je vais encore devoir attendre longtemps ? C’trop emmerdant. » Oui, ce mec sentait vraiment la motivation ! Même à du 3000 pourcent ! Ou pas quoi, le simple fait de marcher le dérangeait profondément.

D’un pas las de toutes choses, il quitta son banc, trainant sa valise derrière lui. Il se dirigeait vers un bâtiment légèrement à l’écart, s’il ne se trompait pas, c’était là que se trouvait la bibliothèque selon certaines personnes qu’il avait croisé. Sans doute des employer ou quoi. Si ce n’était pas le cas, il irait les faire dormir pour un petit moment. Bah ouais, il allait encore s’énerver s’il voyait qu’il se dirigeait dans la mauvaise direction ! Après tout il ne connaissait rien aux environs… Cela risquait même d’être assez drôle de le voir se perdre à plusieurs reprises.

Après quelques minutes de marche bien lente, le jeune norvégien arriva à destination ; la bibliothèque se trouvait bien en ces lieux. Il n’y avait pas grand-monde, mais il y avait énormément de bouquin. Il soupirait, se disant qu’il allait trouver ça fastidieux de prendre un livre et de le lire sur place… Mais bon, tant qu’il n’avait pas ses clés, il n’avait rien de mieux à faire… D’ailleurs, alors qu’il cherchait un titre accrocheur, un bruit sourd se fit entendre, similaire à une chute. Chute qu’il avait bien évidemment vue de ses propres yeux. Le moins que l’on puisse dire, c’était qu’elle s’était écrasé comme une fiente de pigeon.

« Pffuhuh ! On ne sait pas s’asseoir sur une chaise ? » Oui, la personne qui venait tout juste de tomber, s’était totalement assise à côté de sa chaise. C’était visiblement une jeune blonde. Blonde ? Alors les rumeurs courant sur ces filles étaient donc vraies ? Elles étaient tellement bête qu’elles arrivaient même à confondre une chaise avec du vide ? Pas mal. Mais en tant que bon « garçon », il s’avança vers cette blonde en question, l’attrapant par l’une de ses mains avant de la relever lentement. Il n’allait pas la laisser parterre ainsi tout de même…

Moqueur ? Oui, à ses heures perdues. Il lui arrivait de se montrer peut amical avec certaines personnes quand il se rendait compte que quelque chose d’amusant venait tout juste d’arriver. Oui, comme par exemple s’asseoir à côté de sa chaise. C’était assez amusant, mais aussi stupide. Surtout quand il s’agissait d’une personne intelligente –extrêmement intelligente même- qui s’en rendait compte. Pauvre petite chose. Elle n’avait vraiment pas de chance que ce soit Curtis qui soit justement tombé sur elle et surtout, au mauvais moment ! Du moins, ce n’était sans doute pas terrible pour elle, mais pour lui, c’était simplement magnifique.

Quoi qu’il en soit, le jeune garçon venait de l’aider à se relever. Cela devait être plutôt embarrassant de rester assit ainsi, bêtement sur le sol. Il la plaignait. C’était le genre de situation à laquelle lui-même n’aimerait pas être exposé. Il trouvait ça chiant en général, d’être dans une « mauvaise passe ». D’ailleurs, l’excuse qu’elle venait tout juste de trouver était vraiment pitoyable. Passé une mauvaise nuit ? On voit double quand on passe une mauvaise nuit ? Pour lui c’était loin d’être l’effet d’un manque de sommeil, mais plus de quelque chose d’assez spécial. Il n’y avait pas photo à ses yeux.

Il ne répondit pas et resta silencieux, il trouvait cela chiant de devoir montrer qu’il était intéressé à ce genre de mensonge. C’était sa nature, un point c’est tout. Elle était désormais debout, et il pouvait constater qu’elle semblait plus jeune que lui. Aaaah regardez-le ! Le voilà en train de penser comme un ancêtre ! Il constata ensuite le regard de cette demoiselle se diriger vers le sol. De son côté, curieux de savoir ce qui semblait la rendre si anxieuse, il tourna à son tour son attention vers le sol, riant légèrement. Une mauvaise nuit, hein ? Cela n’avait pas vraiment l’air d’être le cas.

« Et bien… Qu’avons-nous là ? Tu appelles ça une mauvaise nuit ? Je dirais plus que cela ressemble à des restes d’une nuit très agitée personnellement. »

Il lâcha la main de la blondinette avant de se pencher légèrement, et ramasser la bouteille qu’il tenait en main, silencieusement. Du whisky… On dirait qu’elle était du genre à aimer l’alcool fort. Et elle n’était même pas majeur… Bonjour l’avenir qu’elle était en train de se créer, pauvre petite. Il soupirait. Trouvant cela trop chiant de devoir la sermonner ou quoi que ce soit, et surtout parce qu’elle lui était inconnue, il plaça sans même regarder la bouteille dans le cabas. Normal qu’il ne regardait pas, ce sac ne lui appartenait pas. Par contre, le livre, là, c’était une autre paire de manche.

Un livre qu’il n’avait jamais lu. Et sans gêne, il l’avait pris en main pour observer de quel genre de livre il pouvait bien s’agir. Mais au final, il s’en fichait un peu, il ne lut que le premier mot, avant de trouver le contenu chiant. Pourquoi être venu à la bibliothèque alors ? Bonne question. Il était justement en train de se questionner à ce sujet bien précis. Pourquoi être venu s’il n’avait pas envie de lire ? Allez savoir, il trouvait ça chiant de faire travailler ses yeux pour le moment…

Elle semblait être mal à l’aise quand il avait remarqué la bouteille. Ce qui était tout à fait légitime étant donné que cela pourrait lui donner une mauvaise réputation. Une réputation de fêtarde ou encore de grosse alcoolo alors qu’elle n’avait même pas l’âge suffisant pour boire. Bref, un gros bordel quoi ! Mais au final, elle ne risquait rien. Il avait rangé la bouteille et se contentait de garder le silence à ce sujet, trouvant qu’elle devait sans doute avoir assez honte ainsi de ce qu’elle cachait depuis son réveil. À croire qu’elle avait peur que ce soit un professeur qui ne tombe dessus.

Silencieux comme pas deux, il se contenta de se relever après avoir attrapé un livre qui semblait lui appartenir également. D’ailleurs, lorsqu’il venait d’attraper ce livre, elle avait eu une réaction totalement différente par rapport à la bouteille de whisky. À croire que ce livre semblait cacher un secret plus énorme encore. Finalement, alors qu’il pouvait aisément constater qu’elle voulait réellement récupérer ce bouquin, il soupira pour ensuite le lâcher. Après tout, il n’allait pas non plus l’ennuyer de la sorte. Ce n’était pas son genre et il trouvait cela plus chiant à faire qu’autre chose en réalité. Normal venant de lui je dirais.

Elle avait essayé de justifier son acte par quelque chose d’assez spéciale… Bien évidemment, il n’était pas dupe, il n’y croyait pas. Il n’était pas aussi bête que pour tomber dans un piège aussi stupide… Mais au final, il s’en moquait un peu, cela ne le regardait pas, ce qu’il y avait dans ce livre. Si elle tenait à garder cela secret, il n’y avait aucun souci pour lui, cela n’avait vraiment rien de dérangeant quoi ! Elle avait le droit de faire ce qu’elle voulait de sa vie, quand elle le souhaitait, sans demander quoi que ce soit en retour.

« Pas besoin de te justifier. »

Oui, il le lui précisait même ; il s’en moquait un peu au final de ce qui pouvait bien se passer dans sa tête non ? Il alla ensuite s’asseoir là où elle avait essayé de le faire quelques instants avant qu’il n’arrive, mais lui, ce fut avec succès. Il soupira légèrement et posa sa valise au sol, calmement, tout en posant ensuite ses pieds sur la table face à lui. Ouais, il se mettait un peu à l’aise, après tout il en avait le droit non ? Ce n’était pas comme si on allait le faire chier pour un oui ou pour un non en fait.

Alors qu’il était désormais confortablement assis, il observa longuement la blondinette qui en soit, était loin d’être laide. Elle était même plutôt belle, il fallait l’avouer ; mais sans doute trop fêtarde. Il soupira légèrement et l’observa de nouveau avec plus de sérieux. Elle lui souriait. Oui, encore une fois, elle était en train de lui sourire, mais ce sourire avait comme une expression étrange aux yeux de Curtis, mais il n’en dit rien, restant silencieux. Parce qu’il trouvait justement chiant le fait de poser des questions aux autres. Il lui épargnera donc se calvaire. Elle lui demanda finalement quel était son nom.

« La politesse ne veut pas qu’on se présente avant tout ? Bref… C’est chiant la politesse en fait. Curtis A. Black. Et toi ? »

Oui, il pouvait certainement lui avoir paru assez désagréable, mais c’était son genre, habituellement. Et d’ailleurs, en parlant de politesse, une personne arriva, pour ensuite bouger les pieds de Curtis de la table. Celui-ci soupira, observant la personne lui faire la morale. Cela devait sans doute être la personne qui gérait cette bibliothèque. Quoi qu’il en soit, légèrement irrité par ce qu’elle venait de faire, il l’observa en souriant. Subitement, dans un regard aussi glacial que… la glace elle-même en fait, il observa la personne tomber au sol, endormie. Au moins, elle ne parlera plus des masses n’est-ce pas ?

« Plus efficace que de lui dire de la fermer… » Avait-il dit, en souriant à la blondinette d’un air assez… Charmeur.

Alors comme cela, elle se nommait Elissy ? Plutôt sympathique comme nom, ce n’était jamais que la première fois qu’il l’entendait depuis sa naissance. Bref, comme quoi il y en avait des tonnes et des tonnes de noms. Il inclina lentement la nuque en ayant laissé disparaître son sourire de tout à l’heure, se contentant de l’observer un peu plus de la tête aux pieds. Elle semblait satisfaite qu’il ait ainsi fait « disparaître » la nuisance qui venait tout juste de s’interposer entre eux, en pleine discussion. Certes il n’aimait pas être poli parce qu’il trouvait que c’était de la merde, mais de là à couper la parole aux autres…

D’ailleurs, elle semblait prendre part au petit jeu de « charme » du jeune garçon. Elle aussi lui avait rendu son sourire charmeur. Sans doute pour se montrer « tentatrice » ou simplement pour montrer qu’elle était également capable de jouer d’une façon bien spécifique. Dans un sens, cela ne pouvait que donner naissance à une bonne relation selon le fainéant de service. Quoi de mieux n’est-ce pas ? D’un geste simple et précis, il plaça sa main dans sa nuque pour ensuite la faire craquer lentement, comme pour se mettre à l’aise en quelque sorte. Douloureux ? Pas le moins du monde pour lui.

« Je vois que l’on va pouvoir s’entendre à merveille alors, si tu penses comme moi. »

Oui, à partir du moment où il pouvait être d’accord sur un point quelconque avec une personne, alors il ne pouvait tout simplement y avoir de mésentente. Cependant, il était clair qu’il ne pouvait faire confiance en cette personne aussi facilement. Il avait vécu la trahison il n’y avait pas si longtemps que cela et depuis, il ne pouvait tout simplement pas se résigner à être « aussi simpliste » d’esprit. La naïveté était un grand défaut qu’il avait écarté bien loin de son existence. Il trouvait même que croire que ses amis ne le trahiraient plus jamais était stupide.

Il savait pertinemment que cela finira par arriver à nouveau un jour. Le plus tard serait le mieux évidemment, mais en tout cas, il sera le dernier à rire. Bref, il s’en moquait un peu. Il se contentait simplement d’analyser le comportement de sa nouvelle rencontre. Savoir si elle était digne de confiance, s’il pouvait simplement avoir une discussion plaisante avec elle, ou bien s’il faudrait mettre un terme le plus rapidement possible à cette rencontre. Puis soudainement, il constatait qu’elle semblait être plongée dans ses pensées. Oui, elle regardant un point vide de l’horizon, et donc elle ne faisait plus attention à ce qu’il pouvait faire.

Sans doute qu’elle se remémorait quelque chose d’amusant, étant donné qu’elle souriait même. Cela ne le regardait pas vraiment en fait, il n’avait pas envie de se mêler de ses affaires. C’était ses pensées et pas les siennes, tout simplement. Plus logique tu meurs d’ailleurs. Elle le regarda ensuite avec un air de défi, tout en gardant le sourire aux lèvres, pour ensuite s’asseoir sur l’accoudoir du fauteuil. Elle semblait vouloir jouer ou plutôt, se bourrer la gueule comme il le disait si bien, à sa façon bien « polie » rien qu’à lui. Oui, elle avait ressortit cette fameuse bouteille de whisky, cette boisson qui vous brûle l’œsophage d’une seule gorgée.

« Tu veux dire ceux-là ? » Il pointa du doigt les autres surveillants qui se trouvaient un peu plus loin, déjà endormis. « Pas besoin de demander c’est déjà fait. »

Elle était beaucoup trop lente pour exprimer par des mots ce qu’elle voulait. Il l’avait bien compris dès l’instant où elle avait ressortit cette bouteille « d’eau de vie » comme sa mère adoptive l’appelait par le passé. Oui, le whisky était l’eau de vie de la mère d’adoption de Curtis. Assez spécial dirons-nous. Elle semblait vouloir faire la grande, alors qu’elle ne semblait pourtant pas si « douée » que ça pour jouer la comédie. Elle venait de prendre une énorme gorgée de cet élixir, pour ensuite essayer de faire croire au jeune adulte qu’elle n’avait même pas trouvé cette boisson forte.

Mais oui, bien sûr ! Comme si c’était possible qu’elle n’ait rien sentit si elle était sobre ? Même à partir d’une certaine expérience, n’importe qui sentirait la chaleur traverser délicatement, comme un paradis dansant, sa gorge. Il soupira et sans même hésiter, il tendit le bras vers la bouteille de la petite blonde, avant de la prendre dans sa main. Oui, vraiment sans gêne ! Après tout, la politesse il s’en contre balançait totalement. Et bien évidemment, d’un geste rapide, il porta le goulot de la bouteille à sa bouche, en prenant une première gorgée, ensuite une seconde, une troisième et enfin une quatrième. Il laissa échapper un léger soupire d’aise après avoir terminé, éloignant la boisson.

« Apprends à boire bon sang ! » Il lui offrit ensuite un sourire de défi, lui rendant la bouteille dans ses mains, histoire de voir de quoi elle était réellement capable. « J’espère que tu tiens l’alcool, je n’aurais pas envie de te ramasser à la petite cuillère en tout cas. »

Le moins que l’on puisse dire, c’était que cette boisson était vraiment bien alcoolisée, tellement qu’il en était tout réchauffé d’un seul coup. Oui, ça donnait chaud une boisson de ce genre, mais pas encore assez pour le mettre hors d’état après seulement quatre petites gorgées de cette liqueur. Il regardait ensuite ses valises, soupirant légèrement en se frottant la nuque, il ne devait pas avoir grand-chose d’intéressant à l’intérieur en fait. Pour le moment, il se contenta d’observer la réaction de la blonde et surtout, de voir si elle allait se prendre à sa provocation pour le moins… basique.

S’il la défiait ? S’il voulait la tester ? Oui, vous avez raison. Il voulait voir ce dont elle était capable, et surtout voir si elle tomberait aussi facilement dans le panneau. Il pourrait ainsi voir à quel point la fierté des gens pouvaient les pousser à faire des conneries monumentales. Est-ce qu’elle serait une exception à la règle ou bien non ? C’était ce que se demandait le garçon, qui n’allait malheureusement pas être « agréablement surpris ». Non, sa fierté semblait l’avoir guidée à accepter le défis. Elle s’était saisie sans hésiter une seule seconde de la bouteille, avant d’en boire une gorgée.

Ahlalala, si simple d’esprit. Il évitera de se bourrer la gueule lui aussi alors, hein ? Histoire de pouvoir la raccompagner à bon port. Ce serait plutôt malheureux qu’il l’abandonne ainsi, au milieu de la bibliothèque, exposée à toutes les menaces envisageables. Il se frottait lentement la nuque, soupirant lentement avant de voir qu’elle lui avait rendu la même bouteille. Ou plutôt, elle avait fait en sorte que la bouteille se retrouve de force dans ses mains. Il fixa celle-ci d’un air plutôt sceptique. Comment allait-il s’y prendre pour lui faire croire qu’il buvait lui aussi ? Bonne question, mais il avait déjà sa petite idée.

« Ok, mais tu risques de le regretter. Je voudrais éviter de te blesser une fois complètement saoule. »

Devait-il prendre cela comme une mise en garde ? Dans un sens, il n’avait guère peur de ce qu’elle pourrait faire. Son pouvoir l’aidera dès l’instant où elle se montrerait un peu trop… Agressive ? Ou bien trop provocatrice. Il ne lui suffisait que d’un simple échange de regard pour la faire dormir, simplement. Comme quoi, c’était bien utile d’avoir un pouvoir tel que le sien. Surtout avec la maîtrise qu’il en avait. S’il n’était pas doué, alors à ce moment cela aurait été bien plus compliqué pour lui. Mais pas de chance pour les emmerdeurs, faire dormir ceux qui le faisaient chier était tellement facile qu’il ne pouvait résister à la tentation.

« Tu n’as pas à t’en faire pour ça. Je te ferais dormir avant que tu ne tentes quoi que ce soit. »

Il avait dit cela accompagné d’un sourire assez sûr de lui. Il n’avait jamais douté une seule seconde de ses compétences, alors il ne voyait pas pourquoi il se montrerait différent cette fois. Rien ne pouvait changer, il était ainsi et un point c’est tout. Quoi qu’il en soit, il avait finalement trouvé le moyen de lui faire croire qu’il était en train de boire. Tout en gardant son sourire, il porta le goulot de la bouteille à ses lèvres, mais celles-ci était restées closes. Il n’y avait donc que quelques goûtes de l’élixir qui avaient réussis à se frayer un passage dans sa gorge. C’était totalement insuffisant pour le rendre totalement ivre.

Déjà qu’à la base, il tenait plutôt bien l’alcool, alors s’il devait commencer à se rendre ivre de la sorte, alors il lui en faudrait du temps. Peut-être plusieurs heures avant de finir ivre. Mais cela n’arrivera pas étant donné que cette boisson était d’un genre bien trop fort pour que la demoiselle se trouvant en sa compagnie n’y résiste. Sauf si elle avait un don qui lui permettait de résister à l’alcool plus longtemps, voir indéfiniment. Ce serait d’ailleurs plutôt embêtant. Mais bon, cela ne semblait pas être le cas : heureusement pour lui. Sinon il devra trouver un autre moyen, voir même participé à la beuverie. Mais bon, c’était peut-être un risque à prendre.

Soudainement, elle se plia en deux pour ramasser le livre qui était tombé au sol, visiblement, elle avait l’intention de lire un peu. Il s’en moquait légèrement, elle faisait ce qu’elle souhaitait après tout, ce n’était pas comme s’il était son père ou on ne sait trop quoi d’autre. Il posa quant à lui la bouteille sur la petite table basse se trouvant face à eux, baillant légèrement après s’être essuyé les lèvres du revers de la main. Il n’allait pas non plus se lécher les lèvres, cela faisait beaucoup trop féminin à son goût. Et il n’avait pas tort.

« T’es nouveau ici en fait ? »

C’te question ! Il se baladait avec ses valises pour le plaisir peut-être ? Non, il était bel et bien nouveau, elle avait visé juste. C’était d’ailleurs plutôt stupide comme question de sa part. Était-ce l’alcool qui faisait déjà effet ? Si oui, alors il était rassuré : il n’aura plus besoin de faire semblant très longtemps donc. Elle le fixait dans les yeux, souriante. Visiblement elle souriant beaucoup. Elle était sans doute le type de fille super joyeuse qui n’arrêtait jamais de sourire : son exact opposé en somme. Le moindre sourire qu’il pouvait faire en général, ce n’était que pour trois situations : mentir, jouer, ou bien se moquer de quelqu’un.

« Hum, laisses-moi réfléchir… J’ai mes valises avec moi, je suis un peu perdu, j’connais pas les environs… Bah ouais, j’suis nouveau j’crois bien. »

Ce n’était certainement pas ainsi qu’il allait se faire des amis, il le savait, mais il avait une très mauvaise expérience, du coup, se montrer amical n’était pas son fort, mais peut-être qu’il arrivera à changer un peu avec le temps, cependant cela restait évidemment à voir. Elle ne cessait de lui sourire. Il était en train de songer de son côté : n’allait-elle pas finir par avoir une crampe ? Ou bien elle s’en moquait et cela ne lui faisait pas grand-chose ? Bref, il haussa les épaules en inclinant la tête sur le côté, restant toujours aussi sérieux.

Il observait ses faits et gestes pour voir ce qu’elle comptait faire au juste désormais. Dans un premier temps, elle semblait en avoir marre de son bouquin, pour preuve elle l’avait même refermé, et ensuite, et s’était tournée vers lui. Qu’est-ce qu’elle comptait faire au juste ? Cela en devenait presque inquiétant en fait, de la voir devenir tout à coup silencieuse comme ça et surtout la voir le fixer ainsi. Et en effet, elle préparait quelque chose. Il ne savait pas quoi, et il n’espérait pas l’apprendre de toute façon. Elle avait approché sa main de son visage lentement, pour ensuite lui toucher la joue de son doigt, c’était plus une caresse qu’autre chose en fait.

Bizarrement, cela l’avait plutôt faire sourire. Il s’attendait au vieux « j’appuie sur sa joue parce que j’suis bourrée » mais non. Elle semblait être différente dans un sens, une fois que l’alcool faisait effet. Quoi qu’il en soit, il était surpris de voir qu’elle n’était pas le genre de fille qui devenait totalement débile une fois qu’elle était bourrée. Certes elle ne semblait pas encore l’être, mais l’alcool faisait déjà effet dans son organisme, c’était tout à fait logique en même temps. Du whisky, cela ne pardonnait pas en général. Il constata ensuite qu’elle semblait observer les gens qui dormaient plus loin, alors qu’il souriait de son côté.

« Intriguée ? C’est pourtant simple. Mon pouvoir réside dans le sommeil. Avec un simple échange de regarde, je peux endormir quelqu’un si j’en ai envie. » Il plaça ensuite ses mains derrières sa tête, avant de la regarde d'un air sérieux. « Tu veux peut-être faire une sieste toi aussi ? »

Il lui avait souri, comme pour lui dire qu’il serait prêt à le faire si elle essayait quoi que ce soit de déplacer, ou même si elle essayait de se montrer plutôt… chiante. Mais pour l’instant cela ne semblait pas être le cas, il était donc possible qu’elle finisse par ne pas avoir droit à ce genre de châtiment. Et dans un sens, tant mieux pour elle ! Elle aurait très bien pu le regretté, la pauvre ! Ce serait plutôt dommage tout de même, de devoir l’endormir à cause de l’alcool. Surtout que Curtis se sentirait forcément obligé de la raccompagner jusqu’à sa chambre, sinon qui sait ce qu’il pourrait lui arriver.

« Au fait, je pourrais savoir pourquoi tu as commencé à me toucher la joue de la sorte ? »

Oui, il aurait bien voulu avoir une réponse après tout. Il n’avait pas l’habitude de ce genre de contact assez spécial. Il n’avait certainement pas oublié ce qu’il lui était déjà arrivé par le passé. Tout ce qu’il y avait de plus ennuyant à raconter, et tout ce qu’il y avait de plus chiant comme souvenir. Mais justement parce que c’était-là le pire de ses souvenirs, il n’arrivait réellement pas à s’en défaire, c’était comme si son passé ne cessait de revenir à la charge, lui rappelant de ne faire confiance à personne si ce n’était à lui-même. Et évidemment, c’était le cas ici encore.