Vous aviez toujours été ensemble, dans les moments les plus tristes, comme les plus heureux. Tu te souviens que tu ne lâchais jamais sa main, avant. Avec l'âge, certaines choses avaient changées. Vous n'aviez plus vraiment de contact physique. Vous n'étiez pas en couple, loin de là. De toute façon tu ne savais même pas ce que tu ressentais exactement pour lui. Ah, qu'on était dur de qualifier votre relation... N'était-il qu'un frère ? Ou l'objet de ton amour ? Il t'était bien difficile de trouver une réponse à cette question. Probablement parce que vous vous connaissiez depuis bien des années. Puis, tu n'avais jamais été douée avec les sentiments, bien que tu fasses tout ton possible pour t'améliorer désormais. Cependant, même si tu lui venais à développer des sentiments pour lui, tu préférerais les le lui cacher. Premièrement parce qu'il serait bien trop embarrassant de lui dire - et tu ne savais pas ce que le jeune homme pouvait bien ressentir pour toi, et parce que tu avais peur. Peur qu'avec la proximité ton pouvoir n'agisse sur lui. Peut-être même agissait-il déjà, puisque vous étiez tout le temps ensemble. Tu l'avais déjà défiguré, tu t'en voudrais davantage si tu venais à le rendre fou. Tu soupiras longuement avant de te laisser tomber sur l'herbe fraîche.
Le week-end approchait vite, et t'étais dit qu'il pouvait être agréable de le passer à ses côtés, autre part que sur cette île complètement paumée. Tu n'avais pas l'habitude des grandes villes, alors tu voulais en découvrir, voir le monde extérieur. Un monde sans misère et sans guerre. Un rêve que vous faisiez souvent, enfants. Alors, tu avais travaillé une bonne partie de l'été, afin de pouvoir l'inviter quelque part, de pouvoir souffler un peu. Cela faisait sept ans que vous étiez ici, que vous n'aviez pas quitté cette île.
Tu avais choisi comme destination Londres. Ce n'était pas bien original, ni très loin d'ici. Mais, les prix des hôtels et autres futilités avaient vite coupé ta folie dépensière. Tout était si cher ici.
Dès que tu l'aperçu quitter sa salle de classe, tu t'agrippas à la manche de son t-shirt - comme autrefois :
- Lukas.
Tes yeux se perdirent dans les siens, tandis que ta main retomba doucement le long de ton corps. Vos deux visages étaient suffisamment près pour que tu sentes son souffle sur ta joue. Néanmoins cela ne t'embarrassa pas le loin du monde, tu avais l'habitude :
- J'ai envie de partir d'ici, de passer mon week-end ailleurs. J'ai réservé une chambre à Londres, vient.
Cela ne te servait à rien de lui demander s'il voulait venir, tu connaissais déjà sa réponse. Tu te contentas seulement te diriger vers la gare, votre train n'allait pas tarder.