Routine qui s’décline grise et monotone; routine assassine qui s’imprime sous les yeux et la pâle mine. Ça lui donnerait presque envie de s’coller deux doigts contre la glotte et de s’faire vomir, se purger de l’infect et enfin se sentir clean de cette routine vermine. Car les mêmes jours s’alignent et s’empilent; et ce même sentiment de néant, de vide, de gouffre ou de spleen comme aime le nommer Lucky Luke (qu’importe l'appellation au fond lorsque la définition reste inchangée) reste et se distend, enfle enfle enfle comme abcès purulent. mais les abcès se crèvent et disparaissent, à défaut de laisser une trace de leur passage. tandis que là, ça reste et se dissout dans le sang, parcourant veines et tendons, à chercher une place dans les tréfonds de nos entrailles pour venir souiller pensées et divagations. et l'hantise spectrale est vorace de choses à se mettre sous la dent; elle s'encrasse contre les parois de l'âme, foutrement tenace. alors, alors l'esprit fait les cent pas pendant que le corps s'enfouit dans les draps, esseulé de cette même valse qui dure déjà depuis bien trop longtemps.
les crocs s'enfoncent férocement dans le catalyseur qui se fond sur la langue et sara cherche; elle tente de retracer le parcours de l'aliment ingurgité qui s'avance dans la trachée et se décompose dans l'estomac. elle analyse, observe, attend le moment où pouvoir sera inhibé, où maux s'effaceront jusqu'à la prochaine dose. toujours, incapable de mieux pour l'instant. et c'est peut-être là que se loge le problème avec elle; c'est qu'un instant se mesure désormais à trois ans. ça ne la quitte plus. ça reste planté là, tapis dans l'obscurité, à se saisir de la moindre occasion pour la dévorer toute entière. la bête est carnassière mais pourtant chimère; que faut-il donc faire pour s'en défaire ?
langueur lancinante dans la poitrine, les pupilles dérivent entre les quatre murs de la chambre, à ne savoir où trouver réponses à ses interrogations. cependant l'espoir est vain et elle le sait : qu'importe l'acheminement, elle tombe toujours sur la même fin.
l'acerbe dans le cœur, elle embrasse d'une œillade la silhouette qui s'immisce dans ses débordements sentimentaux. il s'avance vers elle d'une cadence nonchalante qu'elle connaît si bien, déposant sur sa carrure un regard penaud.
je suis presque sûre que ce n'est pas ton lit luke.
elle ne se donne même plus la peine de se redresser, le laissant entre-apercevoir la loque qu'elle était actuellement; la motivation absente de prétendre.
tu veux de l’aide ? que j’aille checker sous ton lit si le croquemitaine s’y cache pas ?
Début de soirée, fin de soirée. A peine le soleil s’était couché, que t’avais sauté le repas pour t’affaler. Parce que la rentrée, ça te donnait pas l’appétit, mais surtout l’appel du lit. Les prunelles flous fixées vers un plafond en contre plongé, tu savais que t’étais pas le seul à en rêver. Oh sara, douce écume des marées passées, échouée en étoile sur son rocher. Sara territoriale, Sara royale, va bientôt tomber de son piédestal, ou plutôt de la benne sur laquelle elle s’est perché. Chat sauvage qui guette, crocs acérés. Les gens l’évitent, et c’pour ça que t’as commencé à l’approcher. A croire que t’aime vivre dangereusement.
Les heures passent et les colocs de la chambre reviennent toujours pas. Vous avez tous les deux la flemme d’éteindre la lumière alors que vous dormez même pas. La nuit tombe et vous entendez sûrement les cris des dernières fêtes d’été dehors. C’pas que ça t’intéresse pas mais un peu quand même. T’as réussi à choper une bouteille d’alcool que l’un gardait dans son sac. Quel intérêt de descendre avoir une vie sociale quand on peut se bourrer la gueule tout seul comme un cas social ?
Le bouchon saute pas et dans un élan d’agacement soudain, le flacon roule mélodieusement sous le lit, faisant résonner le verre entre les échardes du parquet. Tu soupires longuement et décide de sortir faire un tour, tournant le dos recouvert d’une veste au lit de Poison Ivy. Batman travaille en solitaire. Après avoir déambulé sans aucun but précis dans les couloirs festifs, attirés par les bruits et les cris qui puissent couvrir ceux qui hurlent dans ta tête, tu rebrousses finalement chemin au bout d’une bonne heure.
De retour dans la chambre, le sculptural cadavre ne semble pas avoir bougé. Comme si tu l’avais laissé comme morte quand tu l’avais abandonné. Au lieu de te diriger vers ton pieu, tu te diriges vers le sien, crucifiée à ses draps comme Jesus après avoir rencontré Bouddha.
— « Il semblerait. »
Son pique te transperce comme une épée le coeur et tes yeux la dévorent de rancoeur. Le sourcil hautain, tu hausses les épaules, comme si tu ne comprenais pas de quoi elle voulait parler.
— « Tu ferais mieux de te taire Klein, ou bien je ferais en sorte que tu suintes tellement de poison sur tes draps qu’on pense que tu mouilles ta culotte dès que tu m’vois. »
Tu te jettes sur son lit, faisant rebondir le matelas usé sous ton poids, tournant la tête pour la défier du regard. Mais faut que tu te concentres Lucky, parce qu’il faut pas que t’utilises réellement ton pouvoir. Si tu veux pas rester cloué sur ce plumard. A jamais.
T’en rêverais hein ? C’est pour ça que tu te lèves avec la gaule chaque matin ?
Traits qui se déforment; rictus railleur qui se forme. Léthargique dans sa disgrâce mais venin déjà pendu aux lèvres, salace à bout portant. Lucky et elle s'étaient captés un peu par hasard, à se retrouver dans les mêmes couloirs, mêmes trottoirs, même dortoir. leur rencontre n'avait pas été fulgurante, son histoire n'arrachant ni étoiles dans les yeux ni palpitations sanguines dans la poitrine. C’était plutôt le genre de récit qui se bâclait par un ça s’est juste fait avec le temps, c’est tout, soulevant sourcils et questionnement. Et cryptique par moment, elle ne cherchait plus à comprendre ce rapprochement. C’était juste là, maintenant. Présent, ancré quelque part dans le temps. Tangible.
t'as une grande gueule mais rien dans les cojones. même avec cette merde dans le corps, j'suis encore capable d'étouffer tes battements de cœur. just sayin'.
La vipère siffle mais ce n'est que du vent; un avertissement sans conséquences ni lendemain. Le fiel ne subsiste qu'à défaut de ne pouvoir faire autrement, le poison battant contre ses tempes d'une rythmique similaire à celui du sang entre ses artères; écumant vestiges et ruines d'un espoir avorté, d'un esprit écartelé — d'un quelque chose mort-né. Et la saloperie coule, roule sur la langue, s'en découle de la carcasse comme seconde nature.
dégage. flemme de m’retrouver avec un cadavre sous le bras.
les jambes se replient contre le thorax lorsqu'il assiège son lit de ce corps lourd, faisant teinter les ressorts usés du matelas, pendant que le corps se relève et se repositionne légèrement, de sorte à ne rien toucher; toujours cette peur pleutre dans l'estomac. et les globes oculaires s'éparpillent dans la contemplation de l'ennui persistant et grouillant au fond de l'âme, lançant une œillade désabusée à son partenaire, l'air de dire bon, qu'est-ce qu'on fout maintenant ? dans l'attente de quelconques stimuli qui sauront écarter ce blues de minuit qui s'approchait en prédateur.
elle finit cependant par quitter ses draps pour rejoindre ceux positionnés en face, récupérant du bout des doigts la bouteille délaissée, voulant mettre un terme au travail inachevé de son interlocuteur.
T’as lu trop de livres tristes, t’as vu trop de films gris. Tes amis disent que t’es aigri mais c’est des choses qui se disent. Dans le monde, nos chances chancellent. On est des pions dans ce grand échiquier sans avoir d’échelle. T’aimerais vivre de fric et de chic jusqu’a ce que viennent ce cancer, qui viendra à 50 ans à force de boire jusqu’à te foutre en l’air.
Parfois t’aimerais bien vivre en cavale, lâcher tout et dans tes veines le sang qui coule. Faire du rodéo sur un dragon, partir vivre avec Sara sur un lagon. Tu parles peu Lucky. Certains penseraient que c’est parce que t’as pas d’avis. C’est juste que t’as pas. Et Sara elle l’a compris, venimeuse Sara qui croit pouvoir t’empoisonner, sans se douter qu’elle l’a déjà fait. Infiltrée de ton coeur pour le pomper, à chaque respiration tu rentres dans un ta propre spirale. Au coeur d’un cyclone, t’absorbe le mal de ce monde. Mais tu peux pas le contenir alors t’explose.
— « J’ai pas la gaule, je suis juste particulièrement bien membré. »
Tu lui lances un large sourire que t’as eu du mal à étirer. Ptet parce que ta bouche est encore engourdis par les vapeurs liquides des paradis artificiels.
— « Arrête de faire ta tête de conne, Sara. »
Il était rare pour toi de rouler ces quatre lettres, peut-être pour ne pas donner l’impression d’une certaine proximité non encore établie entre vous deux. Mais lulu qu’elle aimait tant prononcer avec sarcasme piquant et acidulé te donnait une raison de t’adresser à elle de cette manière. Tu t’installes de manière plus confortable, t’étalant pour l’obliger à se recroqueviller dans son coin. T’étais peut-être le seul mec de l’école à pas avoir peur de son pouvoir, de sa malédiction. Ou sûrement juste le plus con.
Insouciance qui pourrait se retrouver dans la tombe. Finis ce que t’as commencé. Tu fronces les sourcils et étire un rictus, ricanant d’un air malattentionné.
— « Je peux pas t’embrasser, sinon après tu vas pleurer sur mon corps. Et j’veux pas que tu pleures moi. »
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Sujet: expi(r)ations nocturnes ☆彡 lucky 
Dim 27 Aoû 2017 - 23:09
Début de soirée, fin de soirée. A peine le soleil s’était couché, que t’avais sauté le repas pour t’affaler. Parce que la rentrée, ça te donnait pas l’appétit, mais surtout l’appel du lit.
