Let's set the world on fire ◈ ft. Yu

Y a certains jours comme ça où on se dit qu’on aurait mieux fait de ne pas sortir de son lit. Bah aujourd’hui, c’était une de ces journées-là. Elle avait commencé par un cours d’anglais (aka la matière qui t’ennuyait le plus au monde, plus encore que la géo – et pourtant dieu sait à quel point tu haïssais la géo). Comme tu avais déjà séché celui d’avant, tu t’étais dit que tu ferais mieux d’aller à celui-là. Au point où t’en étais, ce n’était pas ça qui allait améliorer tes notes, d’autant que tu ne faisais aucun effort en ce sens, mais au moins, tu éviterais de finir (encore) en heure de colle. Sauf que manque de pot, t’étais tombé sur le jour où tu devais rendre un devoir, que bien évidemment tu n’avais pas fait. Résultat, le prof t’avais refilé du boulot en plus en guise de punition.

Et ce n’était que le début.

Au final, c’était pas le cours d’anglais qui t’avaient le plus pourri la vie, ni les endives qui étaient au menu ce midi-là, ni même le fait de te casser la gueule dans les escaliers en glissant dans une flaque d’eau qui n’avait rien à faire là. Non, ce qui t’avait vraiment exaspéré, c’était la lettre que tu venais de recevoir de ton père. Dire que tu avais été assez stupide pour te réjouir en la recevant, t’attendant à ce qu’il te demande des nouvelles, qu’il dise que tu lui manquais, et surtout, qu’il s’excuse du silence radio des derniers mois – ne serait-ce que l’habituel « j’ai été très occupé par le boulot » que tu commençais à connaître par cœur. Mais non, à la place, il gâchait une feuille entière pour te faire la leçon sur l’importance de l’éducation pour réussir dans la vie, etc. Typique. A chaque fois qu'il recevait un de tes bulletins de notes, c'était la même chose. T'aurais dû être habitué depuis le temps, mais non, rien à faire, ça t'énervait toujours autant qu'il te fasse la morale sur tes responsabilités, alors que pendant des années, lui-même n'avait pas été capable d'assumer les siennes en participant à ton éducation. Tu n'avais même pas lu la lettre en entier. T'étais à peine arrivé à la moitié quand tu l'avais chiffonnée et jetée avec rage dans un coin de ta chambre.

Et voilà comment t'en étais arrivé là, à fixer le plafond d'un regard noir, étalé de tout ton long sur ton lit. Au bout d'un moment, tu décidas d'aller faire un tour dehors. Qui sait, ça pourrait peut-être te changer les idées. Dix minutes de marche plus tard, t'étais toujours aussi en rogne, et en plus tu commençais à te les geler - mais franchement, qu'est-ce qui t'avais pris de sortir en t-shirt ? Tu songeas à revenir sur tes pas, avant de réaliser qu'ils t'avaient mené près du complexe sportif. Te dépenser un peu t'aiderait sans doute à te débarrasser de toute cette colère. Tu espérais seulement qu'il n'y aie personne - t'étais pas en état de faire des efforts pour sociabiliser. D'un pas rapide, tu rejoignis l'entrée du bâtiment pour découvrir une fois à l'intérieur que tu n'étais pas seul, contrairement à ce que tu espérais. L'individu qui se trouvait là ne t'était pas inconnu. Il s'agissait d'un des élèves avec qui tu partageais ton cabanon. Comment s'appelait-il, déjà ? Impossible de t'en souvenir. Tu n'avais jamais eu de véritable conversation avec lui.

Il ne t'avait peut-être pas encore remarqué, ou bien ta présence lui était égale. En tout cas, tu aurais pu faire demi-tour, mais tu n'en fis rien. Apparemment, il s'entraînait à réaliser des acrobaties. En tout cas, c'était impressionnant. Assez que tu restes là, debout près de l'entrée, à l'observer, fasciné. Tu avais complètement oublié pourquoi tu t'étais retrouvé ici en premier lieu. Tu aurais voulu t'approcher un peu, mais tu n'osa pas ; tu avais trop peur de le déranger.