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 À un doigt de la victoire [Ailin]

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MessageSujet: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockLun 26 Aoû 2013 - 19:42
Un brouhaha sans nom régnait dans l'infirmerie depuis un bon quart d'heure, combien étaient-ils ? Dix, peut-être douze élèves avaient fait irruption dans la salle et en un instant pour un seul blessé, et comme si ça ne suffisait pas, ils étaient tous plus bruyants les uns que les autres. Visiblement, deux camps s'opposaient, celui des "Mais non, c'était un accident !" et celui des "Il l'a fait exprès, vous savez bien qu'il ne fait jamais d'erreurs !". C'était assez rare de voir les A aussi déchaînés, et le pauvre infirmier ne savait plus ou donner de la tête, d'autant plus que dans le même temps, le blessé le harcelait pour être certain de pouvoir encore taper au clavier avec son bandage.

Tout avait commencé quelque minutes plus tôt, c'était l'après-midi, et le cours de sport s'achevait sur une victoire écrasante de l'équipe d'Ailin au basket. Ailin, Lukas en avait entendu parler bien avant de le rencontrer en personne, quand il n'était pas encore dans sa classe, il faut dire qu'avec un don comme le sien, difficile de laisser les gens indifférents. Beaucoup de commentaires jaloux ou rancunier circulaient dans son dos, difficile de se faire beacoup d'amis quand on écrase tout le monde à la moindre activité de groupe, enfin sans doute. Pour Lukas, c'était avant tout un adversaire redoutable, un type plutôt froid qui ne semblait vraiment pas aimer qu'on lui parle, et accessoirement, c'était celui qui venait de lui casser un doigt.

Les choses s'étaient passées si vite qu'il n'était pas certain d'avoir comprit lui-même. Ailin allait sans aucuns doutes marquer un énième panier, Lukas était bien décidé à le contrarier dans ses plans, sa main vint se mettre dans la trajectoire de la balle, et crac. Le temps de le dire, son majeur s'était retrouvé dans un angle plutôt curieux, un cri lui échappa et aussitôt, la moitié de la classe se mit dans la tête de l'escorter chez le médecin. C'est drôle, le jeune homme avait pas mal d'amis, mais pas autant que ça.

Quand enfin l'infirmier eut jeté tout le monde dehors et terminé son bandage, il put profiter du calme pour essayer de comprendre ce qui avait causé tout ce chahut.

« Alors, finalement, qu'est-ce qu'il s'est passé ? »
« Ben, j'ai mal réceptionné le ballon, au basket. »
« Tu es sûr ? Certains disaient qu'en te voyant arriver, le garçon qui t'as fais ça à lancer la balle comme un sourd. »
«  Oh, c'était sans doute pour éviter que je puisse l'attraper, c'était un accident. »

Il sortit enfin, et la horde l'attendait toujours, ils retournèrent alors tous en cours, Lukas passant tout le chemin à répéter que non, ça ne faisait pas très mal, et que oui, il trouverait bien un moyen de continuer à noter ses cours parce qu'il était hors de question qu'il prenne du retard, que non, il ne voulait pas rejoindre la ligue vengeresse qui était en train de se former, et ainsi de suite. Quand il se retrouva à nouveau au gymnase, ce ne fut au final que pour regarder tout le monde ranger le matériel, et aller chercher ses affaires dans les vestiaires. C'est là qu'il tomba sur Ailin, qui s'était mystérieusement volatilisé depuis l'incident, histoire qu'il ne se sente pas trop coupable, Lukas lui fit un sourire tout en retirant son tee-shirt pour enfiler son uniforme.

«  Hey, t'en fais pas pour ça Ailin, c'est rien, mon doigt ne s'est même pas péter en fait, c'est juste une petite entorse. »

Il eut un léger rire comme seuls les fans de sport qui viennent de se casser un truc peuvent en avoir, et finit de s'habiller sans rien ajouter de plus. Vraiment, il ne voyait pas pourquoi il lui en voudrait, c'est le genre d'accident qui peut arriver n'importe quand, même quand on est doué d'une dextérité hors du commun, la preuve.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockLun 26 Aoû 2013 - 20:24

— Pfff, mais aller, quoi…

Telle était la brillante rhétorique qu’Ailin opposait aux sournoises accusations de ses détracteurs. La vérité, c’était que les apparences étaient contre lui. Après avoir marqué en cinq minutes vingt-et-un points du milieu du terrain, le jeune homme pouvait difficilement faire admettre à ses adversaires qu’il avait fait preuve d’un tout petit peu de maladresse en retournant l’index de Lukas. De la même façon qu’après cinq ans passés à ignorer le dit Lukas, maintenant que son animosité pour lui était de notoriété publique, il était délicat de prétendre qu’il n’avait rien contre lui.

Et pourtant, et pourtant : Ailin était innocent comme la colombe qui venait de naître. Sûr de lui parfois à l’outrance, doué d’un pouvoir simplissime et la plupart du temps infaillible, il lui arrivait de commettre des erreurs souvent douloureuses — mais pour lui. Il était rare qu’une tierce personne eût à pâtir de ses petits couacs. Il tendit néanmoins le cou pour vérifier que ce crétin de Vassily ne simulait pas sa blessure, mais non, il ne simulait pas. Il était bien trop honnête pour ça, le salaud.

La foule des élèves reflua devant le gymnase et la plupart se dispersa de dépit dans les vestiaires. Un petit groupe entoura néanmoins Ailin, pour le prendre à part.

— T’es vraiment une enflure d’avoir fait ça, vous étiez déjà en train de gagner.
— Mais…
— T’as pas besoin de montrer tout le temps que t’es meilleur que tout le monde.
— C’pas…
— D’un autre côté, faut bien que tu t’rattrapes quelque part.
— PARDON ?!

Ce dernier commentaire avait jeté un froid. Chez les sixième année, il se murmurait parfois que si Ailin était dans la classe A, ce n’était guère que pour trois raisons : parce qu’il était odieusement doué en arts plastiques, parce qu’il jouait des instruments avec une facilité insolente et parce qu’il maîtrisait son pouvoir avec brio. Mais dans les matières qui comptaient vraiment, dans les matières pour les gens intelligents, l’Irlandais, c’était bien connu, était loin d’avoir le niveau.

— Vous voulez vous battre, c’est ça ?

Le sujet était sensible.

— Euh…
— Non.
— J’sais pas.
— Faut voir.
— J’vais aller m’changer.


Chercher la bagarre à Ailin était un excellent moyen de s’offrir un ticket simple pour l’infirmerie, si bien que ces harceleurs récalcitrants ne tardèrent pas à s’enfuir à leur tour. L’adolescent resta à tourner pendant quelques minutes dans les couloirs, histoire d’être sûr que personne ne rôderait encore dans les vestiaires quand il s’y rendrait. Quand le dernier débile/génie des maths sortit, il s’y faufila, les larmes aux yeux, et s’achemina vers son casier en balançant des coups de pied dans ceux des autres, pour la forme.

Ailin s’assit par terre dans un coin, dans son joli débardeur de basket, les avant-bras sur les genoux, la tête contre le mur, reniflant. Comme un malheur n’arrive jamais seul, Lukas repointa bientôt le bout de son nez. L’Irlandais s’empressa de ravaler ses larmes. Plus ou moins. Il ne restait plus qu’à compter sur l’obscurité. Quand Lukas enleva son tee-shirt, instinctivement, Ailin détourna le regard et se mit à fixer les douches avec une concentration littéralement religieuse.

D’une voix peu convaincue, il répondit :

— Rien à foutre de ton doigt. T’avais qu’à pas fourrer ta main au milieu.

En vrai, il se sentait affreusement coupable, bien sûr. D’ailleurs, presque aussitôt, il ajouta d’un ton malgré lui beaucoup plus sincère :

— Mais tant mieux, si c’est pas cassé. D’t’façons, t’es vengé, tout le monde me fait la gueule, maintenant. C’est ta faute.

N’est-ce pas.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockLun 26 Aoû 2013 - 22:49
Ailin était toujours aussi sympathique avec lui, c'était probablement bon signe, cet incident ne devait pas trop l'avoir perturbé. Une fois changé, Lukas n'était pas partis pour rester plus longtemps, cela faisait des années qu'il ne cherchait plus à comprendre ce qu'Ailin pouvait bien lui reprocher. C'était un vrai mystère pour lui, ce type capable de faire des miracles dès qu'il se retrouvait avec quelque chose entre les mains semblait… Non, il ne pouvait pas être jaloux, il se passait forcément autre chose, délit de sale gueule, peut-être. Bref, en tout cas il allait partir quand l'irlandais poursuivit sa tirade.

Tiens, c'était bizarre, il avait l'air plutôt affecté par cette histoire, en fait. Lukas baissa les yeux vers lui pour le regarder avec plus d'attention et effectivement, il n'avait pas l'air bien du tout. Est-ce que c'était pour ça qu'il traînait dans les vestiaires vides sans même se changer ? L'adolescent avait même l'impression qu'il pleurait, mais ce devait être un effet d'optique. Lui, en train de pleurer pour une histoire pareille ? Impossible. Pas franchement à l'aise dans ce genre de situation, Lukas hasarda, tout en rangeant consciencieusement ses affaires repliées dans son sac de sport.

« T'en fais pas pour ça, dans quelques jours, tout le monde aura oublié. Je sais très bien que c'était un accident, moi. »

Ce n'était pas un accès de naïveté qui le faisait parler, Lukas était réaliste, si son camarade avait voulu lui faire du mal, il l'aurait fais depuis très longtemps. C'était une première en cinq ans, alors ça n'allait certainement pas l'affoler. Son sac fait, Lukas n'avait plus vraiment de raison de traîner dans les vestiaires, mais Ailin ne semblait pas décidé à cesser de se morfondre. Après une petite hésitation, il poussa son sac plus loin et s'assit à ses côtés sur le banc.

« Allez, te met pas dans des états pareils. Si y'en a qui t'ont dis des trucs, ignore-les, c'est tout. »

Facile à dire pour quelqu'un comme Lukas, dont on disait rarement du mal. Travailleur, sportif, poli et calme, il lui faudrait chercher longtemps pour se rappeler avoir était pris en grippe par d'autres pensionnaires, et pour les professeurs, c'était juste l'élève idéal, celui qui peut engloutir un bouquin de mille page et en faire le compte-rendu pour la semaine suivante. Non, vraiment, il n'avait aucune idée de ce que pouvait traverser son camarade, dont il ne connaissait par ailleurs que les paniers parfais et autres coups de maître. Et il ne tarda pas à le prouver.

« En plus, si tu traînes, tu vas rater l'étude dirigée. »

Ce serait quand même vachement dommage de rater ce merveilleux moment, pouvoir faire ses exercices de la semaine prochaine – parce que ceux pour le lendemain sont déjà fais, bien sûr – et lire des manuels passionnants dans une atmosphère propice au travail, grâce l'autorité bienveillante d'un surveillant zélé. Lukas aimait bien l'étude dirigée, parce qu'à la bibliothèque, il y a souvent des élèves qui se réunissent pour jouer aux cartes dans les tables du fond, et qui font un bruit dérangeant même après les remarques de la documentaliste. Après un silence, il regarda sa montre, et constata que l'heure avait tournée. Avec cette histoire d'entorse il était arrivé un peu tard dans les vestiaires, s'il ne se dépêchait pas, il risquait de se retrouver coincé au fond de la salle à côté d'un élève turbulent qui croit qu'on le voit moins quand il est derrière. Ce qui ruinerait tout l'intérêt de la chose.

Quand son camarade finit par bouger, Lukas ne put au final s'empêcher de remarquer qu'il avait les yeux étrangement rougis.

« Tu… pleurais ? »

Le jeune homme ne put cacher sa surprise, et le regarda avec des yeux ronds, avant de s'en rendre compte et de détourner le regard d'un air embêté. Il ne savait vraiment pas quoi dire dans ce genre de situation, en admettant qu'il puisse dire quelque chose. Un silence gênant s'abattit sur eux tandis qu'il se maudissait d'avoir mit les pieds dans le plat à ce point.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockLun 26 Aoû 2013 - 23:10
En d’autres circonstances, Ailin eût rêvé qu’il allait faire avaler son sac de sport à Lukas, mais, ce jour-là, même cette idée pourtant séduisante ne parvenait pas à le réconforter. Monsieur Parfait trouvait encore le moyen de lui pardonner d’un air princier et néanmoins modeste l’entorse qui était la sienne, parce qu’évidemment il se drapait dans une dignité de martyre, comme le parfait salaud qu’il était. Tout suintant de bienveillance, avec ses vêtements bien pliés, dans son sac bien rangé, sur son épaule bien musclée — on s’égare — Lukas s’apprêtait à sortir et Ailin à le maudire en gaélique.

Au lieu de cela, il dût se retenir de mordre Lukas qui venait s’asseoir à côté de lui pour lui donner des leçons de zen. Ailin laissa échapper un gros soupir malheureux et, sans réfléchir, quand son camarade lui fit miroiter le discutable plaisir d’une séance d’études dirigées, l’Irlandais lâcha à mi-voix :

— Ouais, ce s’rait quand même trop triste, et puis j’ai mes exos d’la semaine dernière à faire.

Selon les standards de la classe A, Ailin était de fait un cancre fini. Mais que voulez-vous, rester assis les bras croisés dans une salle fermée pour écrire, c’était à peu près aussi engageant, pour lui, que se jeter dans une piscine pleine de sèche-cheveux branchés. D’ailleurs, il avait tout naturellement supposé que Lukas avait plaisanté en lui parlant d’aller étudier, mais quand il tourna le regard vers le Russe, l’horrible vérité lui sauta les yeux : Lukas était tout à fait sérieux.

En fait, plus sérieux que Lukas, ça revenait à animer une veillée funèbre. Aux yeux d’Ailin. Bien conscient qu’il ne risquait pas de se défaire de si tôt de son encombrant quoique magnanime victime du jour, Ailin poussa un second soupir, se releva et eut le malheur de passer dans un disque de lumière qui tombait du soupirail des vestiaires. Avec un sens de la diplomatie qui égalait celui de son interlocuteur, Lukas s’empressa de souligner la présence d’un éléphant dans la pièce. Aussitôt, Ailin passa la main au coin de ses yeux, avant de se justifier avec son adresse oratoire ordinaire :

— Nan, trop pas. C’est l’pollen.

Dans les vestiaires, le pollen, une véritable plaie : c’était bien connu.

— J’suis pas une t…

Le mot qui se pressait contre ses lèvres était bien entendu « tapette », mais les yeux fixés sur Lukas, Ailin s’était interrompu presque à temps et, avec ce qui lui servait de délicatesse, substitua une remarque misogyne à une remarque homophobe :

— Fillette.

Ce n’était pas un progrès en soi et, tout à fait conscient d’être un immonde rustre mal léché, pas du tout comme Lukas, Ailin tourna aussi sec le dos à son consolateur, retira chaussures, chaussettes, débardeur et short, pour révéler un dos parsemé de cicatrices. Pendant une seconde, il se demanda si Lukas, qui passait son temps à malaxer des garçons dans les cagibis obscurs (c’était bien connu), était en train de le regarder lui. Il chercha un miroir pour tenter d’apercevoir son camarade dans le reflet, mais même en jouant avec la porte de son casier, ce n’était possible ; très déçu, Ailin sortit son uniforme, se rhabilla prestement et se tourna vers l’inutile et minuscule miroir pour se lancer dans une tâche où, de toute évidence, son adresse légendaire lui faisait défaut : nouer un nœud de cravate.

En se débattant avec cet instrument du démon, l’Irlandais dit :

— Et si tu pouvais éviter de dire aux autres que j’ai pl…

Ah non, son alibi.

— …que t’as cru que j’avais pleuré, ce serait sympa. Déjà qu’ils m’aiment pas…

Oh, qu’il était malheureux, Caliméro.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockMar 27 Aoû 2013 - 12:01
En entendant Ailin dévoiler sans honte son manque de sérieux et son homophobie, Lukas ne put s'empêcher de froncer les sourcils. Autant il savait très bien que son camarade n'était pas du tout travailleur, même s'il avait tout de même du mal à comprendre qu'il puisse le clamer haut et fort comme ça sans une once de honte dans la voix – il n'y avait vraiment pas de quoi être fier. Autant il ne se serait pas douté que s'il était si distant avec lui, c'était peut-être parce qu'il était homosexuel. Lukas se demanda s'il tenait enfin son explication, ce ne serait pas la première fois qu'un garçon l'éviterait après avoir eu connaissance de ses penchants, mais à ce point-là, s'en devenait presque suspect.

Tout en détaillant le dos plutôt malmené de son camarade, le jeune homme ne put s'empêcher de se demander si un tel comportement ne trahirait pas quelques pensées inavouables. Il était certain d'en avoir déjà croisé quelques-uns, des comme ça, mais bon, cette fois c'était Ailin, et il n'était pas vraiment certain de vouloir savoir ce qui se passait dans sa tête. Néanmoins, en le voyant tenter lamentablement de préserver ce qui lui restait de virilité tout en se battant avec sa cravate, Lukas eut envie de le taquiner un peu, pour voir. Et puis, c'était lui qui avait commencé en le traitant à demi-mot de tapette, tant pis pour lui.

Le Russe se leva et vint tranquillement fermer le casier d'Ailin, puis, avec un naturel qui trahissait sans doute une certaine expérience, il poussa son camarade pour qu'il se retrouve le dos contre le dit casier.

« Je ne dirais rien, t'en fais pas. Maintenant laisse-toi faire. »

L'air de ne pas y toucher, il s'approcha juste assez pour provoquer une impression légèrement troublante, dans la pénombre de ces vestiaires vides, et défit l'immonde sac de nœuds que l'irlandais s'était fait autour du cou. Lukas commença par lui fermer le dernier bouton du haut, parce que les mauvais garçons, c'est bien connu, ne ferment jamais le dernier bouton de leur chemise – ce doit être un signe de reconnaissance. Puis il lui releva le col, fit un nœud irréprochable, ajusta le tout et… Attrapa sans vraiment prévenir la boucle de sa ceinture pour lui remonter le pantalon, parce que les mauvais garçons ont toujours le pantalon qui pendouille quelque part au milieu de leurs fesses, et ça fait vraiment très négligé. Il lui resserra ensuite la ceinture d'un cran avec qu'une dextérité que même Ailin pourrait lui envier, lui rentra correctement la chemise dans le pantalon, parce que les mauvais garçons, enfin, vous connaissez la musique. Et après avoir fait le tour de sa ceinture, arrangé sa veste et épousseté ses épaules, Lukas fit un pas en arrière pour contempler le résultat d'un air satisfait - première fois que je décris une scène d'habillage, quand même, pwahaha.

« Impeccable. On y va ? »

Se disant, il sortit son téléphone tablette tactile de jeune branché et fila vers la sortie sans plus de cérémonies, parce qu'il était plus que temps d'y aller et parce qu'il préférait laisser Ailin méditer tout seul sur les derniers événements. Quand les deux jeunes gens prirent – enfin – la direction de la salle d'études, Lukas ne jeta que quelques regards à la dérobée à son camarade. Le reste du temps, il avait les yeux rivés sur son appareil, même s'il n'y touchait pas. Il suffisait cependant de jeter un regard par-dessus son épaule pour comprendre qu'il n'était pas en train de regarder anxieusement l'heure. Son écran faisait de lui-même défiler ses dernières notifications, puis afficha une to do list longue comme le bras, organisée en différents onglets selon ses activités et avec un code couleur pour définir les différents degrés de priorité. De loin, ce n'était sans doute pas ce qui pouvait exister de plus clair, mais de toute évidence, Lukas s'y retrouvait. Le téléphone finit par s'éteindre de lui-même quand ils arrivèrent près de la salle, parce que oui, il éteint son téléphone quand il est en cours, comme c'est stipulé dans le règlement.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockMar 27 Aoû 2013 - 15:52
Olalamékeskispass — s’interrogea anxieusement Ailin lorsque Lukas le plaqua brusquement et, hm, virilement contre le casier des vestiaires. Cette agression inattendue, car, en vérité, il faut le reconnaître, Ailin, ce n’était pas tous les jours qu’on l’agressait, se fût soldée par un coup de genou bien placé si le Russe n’avait pas aussitôt entretenu une proximité troublante, qui força son camarade à ravaler sa salive et sa violence et attendre, inconsciemment palpitant, la suite des opérations.

Cinq minutes plus tard, ils étaient sortis des vestiaires et marchaient dans un silence de mort, parce que Lukas était très concentré sur son téléphone et Ailin très songeur. À chaque fois qu’ils passaient devant une surface réfléchissante, il jetait un coup d’œil à son reflet, rajustait sa cravate, si bien qu’il finit par murmurer :

— J’ai l’impression d’être un pingouin. Tout le monde va se moquer de moi.

De toute évidence, l’avis des autres était sujet d’inquiétude obsessionnelle chez l’Irlandais. Cela dit, sa remarque avait été soutenue d’un peu moins de conviction que dans le vestiaire — Ailin paraissait ailleurs depuis que Lukas lui avait tripoté le pantalon et, sans mentir, la boule de nerfs de service était désormais plutôt calme et songeuse. De temps à autre, il jetait un regard à Lukas, en s’arrangeant autant que possible pour ne pas croiser celui de son camarade.

Quand même, c’était bizarre, de rhabiller ses ennemis jurés comme ça, dans les vestiaires, à l’abri des regards. Ça voulait sans doute dire quelque chose. Après tout, Lukas était gai comme un pinson, alors, peut-être, il sautait sur tous les garçons. Quelque chose comme ça. Est-ce qu’il lui avait sauté dessus ? Dans le cas contraire, devait-il être déçu ? Quel était le genre de garçons de Lukas ? Tant de questions sans réponse et…

— Votre retard ne me surprend pas, Mac an Toisich, mais j’attendais mieux de vous, Vassily.

Ailin s’était engouffré sans réfléchir à la suite de Lukas dans la salle d’études. La réprimande du surveillant ne parut pas beaucoup l’émouvoir — il n’en était plus à ça près. Avec un air vaguement contrit pas du tout convaincant, il se dirigea vers le fond de la salle, comme d’habitude — sauf que cette fois-ci, Lukas était bien contraint de le suivre : tous les rangs de devant étaient occupés par des classes A qui suivirent Monsieur Parfait d’un regard narquois.

Les deux jeunes hommes s’assirent à une double table, la seule qui restât, celle des fonds d’inventaire, toute gravée de numéros de téléphones, de dessins obscènes et de poésies pour dépressifs, avec un petit train au blanc correcteur qui en traçait le périmètre et une vieille copie de chimie pliée en quatre pour caler un pied. Habitué à ce genre d’environnement, Ailin sortit pour la forme son cahier de mathématiques, une trousse bordélique et se mit à fixer sans conviction les équations.

Comme, pour faire passer le temps, il faisait tournoyer entre les doigts de sa main gauche son stylo à un rythme époustouflant, avec des figures sidérantes, et sans aucune fausse note, ses camarades aux alentours devinrent bientôt hypnotisés par ce petit manège — et les équations, elles, n’avançaient pas d’un pouce. Finalement, Ailin tourna une page, abandonna son stylo, sortit un crayon à papier et se mit à dessiner.

La page fut bientôt découpée en cases et les cases se remplir pour former une histoire sans paroles. Tout commençait avec le match de basket et son dernier tir. Mais, dans sa bande-dessinée, Lukas reprenait sans peine le contrôle du ballon, le contournait et marquait un but. Le match se finissait toujours en faveur de l’équipe d’Ailin, mais personne ne lui en voulait : ses coéquipiers le félicitaient, les deux équipes se serraient la main et tout le monde repartait ravi dans un monde idyllique, Ailin perdu au milieu de la foule des élèves, dans l’indifférence joyeuse et générale.

L’Irlandais contemplait le résultat de son « travail » : tout était tracé d’une main très sûre, évidemment, pourtant, il se mit à gommer systématiquement le visage de l’un des personnages, dans toutes les cases. Avant de recommencer à dessiner, avec plus d’application encore, les traits de Lukas.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockMer 28 Aoû 2013 - 16:09

À un doigt de la victoire [Ailin] Mini_47780123011DMZHW33GCJVQÀ un doigt de la victoire [Ailin] Mini_17852923011DMZHW34AWQMJ

Le problème, avec les approches subtiles faites de regards, de sous-entendu et de plaquage contre les casiers, c'est qu'elles peuvent être très difficiles à interpréter. Ailin ne l'avait pas repoussé, et il n'avait rien dis, en fait Lukas avait eu l'impression qu'il aurait pu aller beaucoup plus loin sans qu'il ne le retienne. Mais il savait d’expérience que ça ne signifiait pas qu'ils étaient du même bord, son camarade avait peut-être juste était pris par surprise, ou choqué, ou intimidé, ou... Le jeune homme s'était pris à son propre piège, maintenant, cette histoire le travaillait, et pourtant il s'agissait toujours d'Ailin, l'asocial qui l'avait pris un grippe avant même qu'il ne lui adresse la parole.

« Les gens vont se moquer parce que tu portes l'uniforme de l'école de façon normale ? N'importe quoi. »

Lukas avait levé le nez pour répondre à son camarade, et constata qu'il paraissait troublé. Peut-être qu'il l'avait vraiment choqué alors, parce que vraiment, il avait beau chercher, il n'imaginait pas du tout Ailin au bras d'un garçon, ni au bras de personne en fait, mais ça devenait méchant. Son camarade était tellement… seul. Ce devait quelqu'un de très désagréable, après tout, il l'était bien avec lui, enfin, la plupart du temps, sans doute était-il comme ça avec les autres. Alors qu'il venait d'entrer dans la salle, perdu dans ses pensées, il entendit la remarque du surveillant et se tendit immédiatement.

« Désolé monsieur, j'ai perdu du temps après l'eps. Ça ne se reproduira pas. »

Il baissa les yeux et accéléra le pas pour s'éloigner du responsable de ce désastre, qui ne semblait même pas à moitié désolé. Bien sûr, Lukas aurait pu balancer une excuse, dire qu'avec son entorse il avait eu du mal à se changer et ranger ses affaires – toutes ressemblances avec ce que j'aurais fais est totalement fortuites – mais ça ne lui était même pas venu à l'idée. Les regards narquois des autres élèves et les chuchotements spéculatifs sur ce que les deux retardataires avaient pu faire seuls dans les vestiaires augmentèrent un peu plus son mal-être et quand il s'assit à la seule table de libre, il s'était complètement refermé sur lui-même pour ruminer sa culpabilité.

Rapidement, Lukas sortit lui aussi son cahier de maths, qu'il ouvrit à l'envers parce que, évidement il sépare les exercices des leçons pour pouvoir étudier plus facilement. Il enchaîna avec aisance la suite d'application qui avait été donnée, puisque c'était exactement la même chose que ce qu'ils avaient fait en cours le jour même. Il fallait vraiment le vouloir pour ne pas être capable de reproduire ce que l'on venait tout juste d'apprendre. Après avoir expédié cette petite formalité il sortit ses cours d'anglais, qui demandaient un peu plus de réflexion, quoique. Ce n'est que là qu'il jeta un regard du côté de son voisin, qui glandait joyeusement, un léger soupir de désapprobation lui échappa tandis qu'il faisait tout pour ne pas se laisser hypnotiser lui aussi par le tournoiement du stylo, puis des doigts habiles qui le tenait, puis par l'air désœuvré de son propriétaire. Lukas se pencha sur sa feuille et lut l'énoncé de la dissertation qu'il avait à faire, mais quand il eut fini, il ne se souvenait même plus de ce qu'était le sujet, et puis, faire des maths avec un doigt en l'air, ça allait plus ou moins, mais écrire deux copies doubles…

Son regard glissa de nouveau vers son voisin, qui s'était trouvé une nouvelle activité, gribouiller sur son cahier, enfin, gribouiller à sa façon. Lukas regarda d'un air ahuri la bande dessinée qu'Ailin avait réussi a faire en quelques minutes à peine. Il se reconnut sans difficultés sur les différents dessins et allait le féliciter quand Ailin se mit dans la tête de l'effacer de toutes les cases.
Décidément, il ne changerait jamais. Lukas se tourna vers sa copie double vierge avec une moue vexée, marqua son nom, la date, fit deux beaux traits parallèles pour les commentaires du prof. Puis il tapota son stylo sur la table en tentant de s'imprégner du sujet, et ouvrit son livre au bon chapitre, en quête d'un brin de motivation, avant de jeter un œil au cahier de son voisin.

Ailin l'avait redessiné avec encore plus de détails, le jeune homme ne parvint pas vraiment à comprendre pourquoi puisqu'il se trouvait déjà très bien, mais ce n'était pas un artiste, il avait peut-être loupé quelque chose. Alors qu'il lui sembla que son camarade allait encore attraper sa gomme pour rectifier il ne savait quoi, Lukas attrapa le cahier par un coin et le tira vers lui pour le regarder un peu mieux – oui, je trouve aussi qu'il n'est pas gêné, mais j'y peux rien si mes persos n'en font qu'à leur tête.

« Tu dessines vachement bien, même si j'imagine qu'on te le dit tout le temps. »

Son regard s'attarda sur l'une des dernières cases, où Ailin repartait tout seul dans son coin. Lukas en fut surprit, il comprenait bien que l'irlandais avait représenté une issue heureuse à leur dernière mésaventure, mais dans ce cas-là pourquoi ne s'était-il pas représenté en train de rejoindre tous ses amis. Il devait bien avoir des amis quelque part, non ?

En y réfléchissant, Lukas n'en savait trop rien, il n'avait jamais vraiment fais attention, il imaginait juste mal comment Ailin aurait pu passer toutes ces années tout seul. Vraiment, la fin de cette bd n'était pas tellement joyeuse, selon lui. S'il avait été meilleur en dessin, il se serait sans doute armé de son plus beau stylo – ça se gomme pas – pour dessiner un bonhomme à côté du Ailin solitaire en disant que c'était lui, juste pour rendre les choses meilleures, mais il n'osa pas gâcher ce si beau travail, et rendit le cahier à son propriétaire.

« Quand mon poignet ira mieux, il faudra qu'on se fasse une revanche. Et dis, tu as d'autres dessins ? »

Décidément, ce n'était pas aujourd'hui qu'il allait faire cette dissertation.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockMer 28 Aoû 2013 - 16:37
Ah, mais je vois très bien ce qu’on essaye de faire au pauvre Ailin — et ça ne se passera pas comme cela. Contrairement à ce que certains essayent d’insinuer en effet, l’Irlandais n’avait rien d’un asocial et des amis, qu’on se le tienne pour dit, il en avait beaucoup. Seulement, ce n’était pas les premiers de la classe propres et bien peignés qui formaient l’entourage soporifique de Lukas (et toc) et entre les cercles que fréquentaient respectivement les deux camarades, il n’y avait quasi aucune connexion.

C’est pourquoi Ailin était bien loin de soupçonner que Lukas fût en train de lui faire la charité en daignant commenter ses dessins, sans quoi il lui eût probablement fait manger son cahier de mathématiques si bien organisé et enfoncé la spirale métallique dans la narine droite. Au lieu de cela, le dessinateur, toujours extrêmement sensible à l’approbation d’autrui et surtout à celle de Lukas, s’illumina comme une montagne au lever du soleil et murmura :

— Merci.

Quel discours. Quand le Russe lui proposa de rejouer plus tard, Ailin faillit se pâmer de contentement et, finalement, Lukas n’avait même pas fini de lui demander de lui montrer d’autres dessins qu’Ailin attrapait son sac pour sortir deux grands carnets à dessins de toute évidence beaucoup plus remplis que ses cahiers de cours. Sans ménagement, Ailin repoussa les affaires de Lukas dans un coin, les siennes dans un autre, pour faire de la place, et ouvrit le premier carnet.

— Ça, c’est pour les BDs.

Il y en avait aussi beaucoup qu’il griffonnait sur des petits morceaux de papiers que son lézard Imreoir transportait aux quatre coins de la classe pendant les cours trop ennuyeux — c’est-à-dire un peu tout le temps. Son carnet à bandes-dessinées regroupait des esquisses, des projets finis, des histoires, des personnages vus sous différents côtés. Il y avait de toute évidence des séries entières, présentes seulement par fragments, qui devaient raconter des aventures — dans l’espace, dans le passé, dans des mondes imaginaires.

— J’ai d’autres carnets, pour les histoires suivies, bien sûr.

Mais il y avait aussi des planches indépendantes ou des strips, où Ailin avait fait preuve d’un humour un peu corrosif : en quelques traits, parfois minimalistes, il croquait les tics de tel ou tel professeur, de tel camarade un peu trop imbus de lui-même, ou bien il avait inventé une situation cocasse. Très loin du visage ténébreux et taciturne qu’il présentait à Lukas, ses œuvres dévoilaient un esprit vif, facétieux et imaginatif.

Après avoir tourné quelques pages du premier carnet, il le poussa vers Lukas pour ouvrir le second, en précisant sobrement :

— Ça, c’est pour les projets de peinture.

L’une des raisons pour lesquelles Ailin se trouvait en classe A, malgré ses notes catastrophiques en histoire ou en mathématiques, se révéla soudainement. Dans le carnet, les pages allaient des croquis de détail, des schémas de composition générale aux reproductions colorées en pastel. Certains grands tableaux de l’âge classique se découvraient ainsi de page en page : Ailin était encore loin de pouvoir jouer au faussaire, mais pour un œil non exercé, la copie et l’original étaient terriblement proches. Le gout éclectique d’Ailin le faisait passer, de page en page, des œuvres les plus classiques du dix-septième siècle aux tableaux d’avant-garde. De temps un autre, on trouvait encore des plans pour une sculpture.

— En ce moment, j’voudrais trouver… ayeeeuh !

Le surveillant, venu voir ce qu’Ailin pouvait encore trafiqué au fin fond de la salle, venait de l’attraper par l’oreille.

— Mac an Toisich, arrêtez de distraire les élèves qui, eux, se donnent les moyens de leurs ambitions. Vos gribouillis n’intéressent pas Monsieur Vassily, qui a mieux à faire. Suivez moi.

Tout penaud, Ailin dût remballer ses gribouillis, ouverts sur un schéma compositionnel de la Cène de Léonard de Vinci et emboiter le pas au surveillant, qui le força à s’asseoir juste devant le bureau, envoyant à l’arrière, rejoindre Lukas, une studieuse élève de la classe B, à la neutralité absolue. Sous le regard sévère de son bourreau, loin de Lukas, Ailin fut donc contraint de recommencer à suer sang et eau sur ses exercices de mathématiques. Tout en s’interrompant à chaque minute pour regarder l’aiguille de l’horloge murale tourner len-te-ment.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockSam 14 Sep 2013 - 13:57
Je proteste, Lukas ne faisait qu'extrapoler ce que pouvait être la vie d'Ailin en s'appuyant sur les informations qu'il avait, c'est à dire aucunes. Puisque leurs milieux respectifs étaient presque totalement séparés l'un de l'autre et que môssieur se dessine tout seul dans ses bds pour brouiller les pistes, le pauvre Russe ne pouvait pas deviner. C'est donc bien par charité que Lukas demanda à voir ses dessins il faut bien avouer, mais très vite, son intérêt pour les œuvres de son voisin fut bien réel. Bizarrement, Imreoir n'apportait jamais de petites bds au jeune homme pendant les cours, c'était donc une première pour lui, et il était impressionné. Plusieurs des petites strips le firent pouffer de rire, ce qui ne manqua pas d'attirer l'attention du surveillant. À peine eut-il commencé à feuilleter le premier cahier qu'un autre suivant, encore plus impressionnant.

« [color=slateblue]C'est magnifique, tu es vraiment incroyable. »

Cette fois-ci, le jeune homme n'avait vraiment aucunes arrières-pensées, il connaissait au moins certains des tableaux qu'Ailin avait reproduit, et la ressemblance était frappante. Mais même pour les tableaux qu'il ne connaissait pas, la qualité du dessin était impressionnante, il aurait pu feuilleter les cahiers de son camarade pendant longtemps, il trouvait ces travaux fascinant, mais le surveillant zélé en décida autrement. Lukas eut un sursaut en le voyant surgir derrière eux. Il n'avait vraiment pas fait attention à ça. En entendant que c'était Ailin qui se faisait disputer, alors que c'était lui qui avait demandé à en voir plus, Lukas tenta de réagir.

« Non, monsieur, c'est… »

Trop tard, déjà Ailin remballait ses affaires, et bien vite après il suivait le surveillant jusqu'à une place au premier rang, tandis qu'une camarade le rejoignait. Cependant, si Ailin trouvait le temps long, ce n'était vraiment pas mieux pour Lukas, qui ne cessait de lui jeter des coups d'œil depuis le fond de la classe. Il trouvait terriblement injuste que le surveillant l'ait décrété coupable sans même chercher à comprendre la situation, et terriblement craquante la manière qu'avait l'irlandais de fixer l'horloge au mur avec un air désespéré.

C'était bien la première fois depuis ses dix ans que Lukas s'ennuyait en étude, mais impossible pour lui d'avancer dans son devoir, il se sentait complètement perturbé. La petite séance de rhabillage dans les vestiaires tournait dans sa tête, et il se demandait maintenant ce qu'il se serait passé s'il s'était rapproché encore un peu, que ses lèvres avaient touchés les siennes. Bien sûr, Lukas ne souhaitait pas du tout avoir une aventure avec Ailin, quelle idée, il était juste curieux, et surtout il réalisait qu'il ne savait rien de lui, alors qu'il le côtoyait quotidiennement depuis cinq ans.
En tout cas Ailin ne semblait pas parti pour le repousser, tout à l'heure.

Le stylo de Lukas dansait entre ses doigts, et il se mit lui aussi à regarder l'horloge en soupirant. Pour s'occuper, il essayait de se rappeler des dessins amusants d'Ailin, mais il avait tout juste eu le temps de les voir, après un énième soupir, une solution plus radicale lui vint. Il était au fond de la salle, le plus près qu'il soit possible d'être de la deuxième porte, au fond, que personne n'ouvre jamais, donc du deuxième interrupteur de la salle, donc potentiellement, d'une prise. Il lui suffisait alors de…

Non, mauvaise idée, il serait idiot de se laisser aller, ce n'était pas si long, l'étude dirigée, il avait juste à prendre un de ses livres pour s'occuper, et Ailin n'avait pas l'air si malheureux que ça devant son cahier de maths… Après une bonne minute à fixer son camarade, Lukas fit doucement reculer sa chaise vers la porte, tendu comme un arc. Sa voisine lui jeta un regard un peu étonné, il lui chuchota.

« Si tu pouvais ne rien dire à propos de ça, ce serait vraiment cool, Ana. »

Oui, parce que lui et Anaïs étaient souvent côte à côte, même si elle ne l'avait probablement jamais vu aussi agité. Après un dernier regard au surveillant, qui était très occupé à scruter les élèves plus turbulents, Lukas se pencha pour toucher la prise au pied de la porte. Quelques instants plus tard l'alarme incendie se déclenchait sous l'air toujours consterné de la jeune fille. Le surveillant se mis à hurler les consignes, il fallait laisser ses affaires, sortir, etc, mais dans le boucan de la sonnerie personnes ne l'écoutait vraiment. Les élèves s'étaient tous mis à s'agiter gaiement, et la plus surexcitée de tous était sans aucuns doutes Anaïs qui, son sac sur l'épaule, dévala les escaliers pour rejoindre sa table, et ses amies qui étaient là-bas.

« Hey, vous devinerez jamais qui a fait ça ! »
« Quoi ? C'est pas juste un exercice ? »
« Non, c'est Lukas, il a déclenché l'alarme. »
« Sérieux, Lukas de la classe A ? Tu plaisantes. »
« Il est cool en fait, j'aurais pas cru… »

De son côté, Lukas avait l'impression qu'il allait mourir, il rangea ses affaires laborieusement, le cœur battant, et se dépêcha de chercher un semblant de sécurité dans la foule des élèves. Une fois sortit, il se fraya un chemin vers Ailin, l'air toujours un peu fébrile.

« Désolé pour tout à l'heure, c'est à cause de moi que tu t'es fais… »
« Hey, bravo Lukas ! »
« Hein ? »

Un B passa à côté de lui et lui donna une tape sur l'épaule avec un sourire ravi, en fait, beaucoup de gens lui lançait des sourires ravis. C'était la fin du monde, le jeune homme eut l'air désespéré.

« Tout le monde est au courant, génial. »
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockDim 15 Sep 2013 - 11:02
Finalement, parce qu’il fallait tout de même que ces exercices se fissent et qu’il n’avait pas envie de se retrouver, à la fin du trimestre, avec trois livres entiers de mathématiques à rattraper, Ailin quitta l’horloge des yeux et reposa le regard sur ces équations incompréhensibles, qui ne servaient à rien, puisqu’elles ne l’aideraient jamais à devenir chef d’orchestre, ni compositeur de musique, ni dessinateur de bandes-dessinées professionnel. Qu’avait-il alors besoin, je vous le demande un peu, de savoir ce qu’était une équation différentielle ? Qui pouvait bien avoir envie de calculer l’aire au-dessous d’une courbe ? Quel intérêt pouvait-on bien trouver aux systèmes triangulaires supérieurs ?

Toutes ces questions et de nombreuses autres irritaient la patience résignée de l’Irlandais et il sortit bientôt son cahier de cours, tout à fait anarchique, sous le regard régulièrement soupçonneux du surveillant. Contrairement à ses carnets de dessins, les cahiers de cours d’Ailin n’étaient pas très soignés : il ne collait jamais les polycopiés distribués par les professeurs, qui s’échappaient donc joyeusement d’entre les pages à chaque fois qu’il les feuilletait et si, au début d’année, il se décidait toujours à adopter un code couleur pour les titres, deux mois plus tard, il finissait par tout écrire au stylo bille noir, sans grande distinction.

Bref, il avait un peu de mal à retrouver la leçon appropriée et il bataillait comme un beau diable depuis de longues et douloureuses minutes quand l’alarme à incendie le fit sursauter. La surprise passée en une demi-seconde, il fut bien entendu le premier à se précipiter vers la sortie, notamment parce que lui ne se prenait pas les pieds dans les chaises quand il se relevait et parce qu’il avait toujours un don pour se faufiler entre ses camarades, même quand la foule était trop compacte, distancé en cela seulement par la fille de la classe D qui passait à travers les murs.

Ils se retrouvèrent en un rien de temps dans la cour, et, machinalement, Ailin cherchait Lukas du regard quand Lukas, justement, se rua vers lui — ou, plutôt, il tituba jusqu’à lui, pâle comme un linge. L’Irlandais haussa un sourcil, exercice de souplesse faciale peu commun, en le voyant dans un pareil état.

— T’as peur du feu ?

Mais visiblement, non, Lukas n’avait pas peur du feu. Ailin ouvrit des yeux ronds quand il comprit que c’était l’intègre, le respectable, le saint, en un mot, le soporifique Lukas qui avait court-circuité on-ne-savait-trop-quoi pour déclencher l’alarme à incendie. Puis un sourire ravi passa sur son visage et il allait féliciter le Russe de s’engager ainsi sur la voie de la santé mentale, quand il comprit que, pour son camarade, cette petite réputation subversive qui était en train de se former autour de lui était à peu près aussi désagréable que, pour lui, son aura de cancre.

Il posa une main sur l’avant-bras de Lukas et chuchota :

— T’inquiètes, on va arranger ça. Viens, on va chercher une commère…

La main d’Ailin se referma sur celle de Lukas et, sans lui demander son avis, il se mit à le tracter entre les groupes d’élèves qui s’agglutinaient à droite à gauche dans la cour de récréation, en attendant que le tour de l’établissement fût fait par les lézards du personnel et que l’alerte fût déclarée infondée. L’Irlandais s’arrêta à trois mètres d’un pâté de donzelles qui babillaient à en perdre haleine. Il lâcha la main de Lukas et se faufila un peu plus près des jeunes filles.

— Oui, Vassily, tu sais, l’Ukrainien…
— Je crois qu’il est Russe.
— Ténébreux.
— Trop !


Gloussements.

— En tout cas, c’est lui qu’a déclenché l’alarme.

Sur quoi Ailin éclata d’un rire bruyant. Les filles se retournèrent vers lui, pour lui faire d’abord les yeux doux, parce qu’en tant que mauvais garçon, Ailin avait bien sûr beaucoup de succès, puis pour l’interroger avec toute la troublante polyphonie d’un chœur tragique.

— Oh, Ailin…
— …salut, comment…
— …ça va ? et pourquoi…
— …tu ris ?

— Lukas ? Déclencher l’alarme ?
— Ben oui.
— C’est Anaïs.
— Qui nous l’a dit.


L’Irlandais esquissa un sourire faussement énigmatique.

— Quoi ?
— Dis.
— Aller dis, enfin.
— Oui, raconte.

— Ce type-là traversait pas au feu rouge, même si y avait pas de voitures dans la rue. Franchement.
— Hmm…
— C’est vrai.
— En tout cas, c’est pas faux.
— On le voit mal, c’est sûr…
— …déclencher comme ça, sans raison…
— …l’alarme à incendie.
— Mais alors…
— …c’est juste un exercice ?

— Ou alors quelqu’un a jeté une allumette vers le plafond et elle s’est craquée à côté du détecteur de fumée.
— Oui, enfin, il faudrait quand même…
— …être vraiment très doué…
— …pour réussir…
— Un coup comme ça.


Les filles restèrent un instant songeuses, puis fixèrent Ailin.

— Ooooh.
— Aaaah.
— Bien sûr.
— Tu fais quoi, ce soir ?


Ailin tourna les yeux vers Lukas, à quelques mètres de là, et lui adressa un sourire de connivence.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockDim 15 Sep 2013 - 11:05
C'était fini, sa vie était finie, tout le monde racontait déjà son immonde crime partout aux alentours, il ne faudrait sans doute pas longtemps pour que cette fâcheuse histoire tombe dans l'oreille d'un surveillant ou d'un enseignant, et là, il savait très bien quelle terrible sanction l'attendait, et il savait qu'il ne s'en remettrait pas, pas plus que son dossier scolaire irréprochable. Il allait très certainement avoir...
Un Avertissement.

Sa vie était fichue, et qu'allaient dire ses parents ? Et tous les professeurs ? Beaucoup de gens lui faisaient confiance, ils allaient tous être terriblement déçus par son attitude égoïste et irresponsable. C'était déjà une chose d'utiliser son pouvoir à l'intérieur du bâtiment sans que cela n'entre dans le cadre d'un cours, une chose interdite par le règlement, mais s'en était une autre d'interrompre les leçons dans l'école toute entière. Du fond de ses angoisses de tête de classe, Lukas se demandait ce qui lui avait pris.

La main, il lui prenait la main. Le pauvre et fragile Lukas redescendit sur terre et regarda Ailin avec des yeux ronds, le type qui ne pouvait pas le voir en peinture était en train de lui prendre la main pour l'emmener... pour l'aider ? Même s'il resta en retrait quand son camarade entama une petite discussion avec des greluches un peu trop bavardes, le jeune homme entendit tout. Ce n'était décidément pas un jour ordinaire, et Lukas se demanda si leur rapprochement dans les vestiaires avait un quelconque rapport avec le fait qu'Ailin essayait maintenant de le protéger. L'idée elle-même lui paraissait un peu étrange, pourtant c'était bien ça.

Mais le plus inquiétant était sans aucuns doutes son comportement à lui, Lukas venait tout de même d'enfreindre une certain nombre de règles, tout ça pour... pour quoi, d'ailleurs ? Contempler un peu plus les dessins d'Ailin ? Discuter avec lui ? Se faire prendre la main encore quelques secondes ? Certains diront qu'il aurait suffit pour cela qu'il attende la fin de l'étude, c'était mal connaître l'irlandais. Dans la majorité des cours, et particulièrement en étude, celui-ci bondissait hors de la salle pour filer il ne savait où, son sac déjà fermé alors que la sonnerie retentissait à peine, tandis que lui, Lukas, faisait toujours partis des derniers à sortir. Il n'avait pas la moindre chance. Et puis ils avaient été interrompus un peu trop brutalement à son goût tout à l'heure, non mais.

Quand Ailin en eut finalement terminé avec les filles – qui le draguaient ouvertement, ces idiotes – Lukas vint près de lui, les yeux brillants de reconnaissance.

« Merci, mais... tu risques pas d'avoir des problèmes ? J'voudrais pas que tu te retrouves encore accusé à cause de moi. En tout cas, je te revaudrais ça. »

Si on pouvait visiblement reprocher à Lukas de causer beaucoup de problèmes à des élèves ayant déjà mauvaise réputation, on ne pouvait pas lui enlever son sens du devoir irréprochable. Ailin l'avait aidé, il le lui rendrait d'une façon ou d'une autre, et d'ailleurs, il n'eut pas à réfléchir très longtemps.

« Je pourrais peut-être t'aider pour tes maths, t'avais l'air un peu en galère, et comme ça je finirais de regard tes dessins. On peut faire ça après les cours, enfin, peut-être pas ce soir, t'avais l'air d'avoir quelque chose de prévu. »

Lukas désigna d'un geste dédaigneux de la tête le groupe de filles qui lui avait demandé ce qu'il allait faire de sa soirée, il se doutait bien qu'Ailin n'allait pas leur répondre « Désolé, les filles, ce soir, je vais faire mes devoirs avec Lukas, ça va être d'enfer. ». Mais il n'avait pas grand-chose de mieux à lui proposer, lui ne faisait pas vraiment de trucs de jeunes, il ne veillait pas jusque tard dans la nuit – pour être opérationnel le lendemain – il ne buvait pas, ne fumait pas, ne s'y connaissait pas en musique, encore moins en danse, certainement pas en dessin, et puis avec son doigt en l'air, il ne pouvait même pas défier Ailin dans un sport. Tout ce qu'il lui restait, c'était donc des exercices de maths.

« Et si tu te débrouilles bien, je te laisserais peut-être essayer mes jeux vidéos. »

Et une monstrueuse collection de jeux vidéos. À ce niveau-là, il était imbattable, personne n'avait de chambre assez grande pour stocker toutes les roms qu'il avait enregistré sur plusieurs disques durs externes, et qu'il pouvait lancer à tout moment grâce à divers émulateurs, il y en avait pour tous les goûts, toutes les époques, toutes les console, et il y avait aussi des films par centaines. De quoi capturer Ailin pendant pas mal d'heures, si cela l’intéressait un peu.

Avec un peu de chance, il préférerait ça aux filles.
En plus, elles étaient beaucoup trop maquillées.
Et Lukas était certain qu'elles n'avaient aucune conversation.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockDim 15 Sep 2013 - 11:07
Comme une grosse ruche dans laquelle on aurait donné un violent coup de pied, les filles s’éparpillèrent après avoir fait les yeux doux à Ailin et avoir tenté, mais sans succès, de lui faire promettre de venir, ce soir-là, les visiter dans leurs cabanes. Ailin, il avait répondu quelque chose comme « hmoui, peut-être », avec cette absence d’enthousiasme un tant soit peu défini qu’il avait toujours quand une fille, n’importe laquelle, l’invitait à faire quelque chose sans lui dire exactement quoi. Les filles, elles, ne se décourageaient pas, bien au contraire : au fil des années et de leurs adolescences respectives, Ailin avait fini par représenter un prix inaccessible, une sorte de proie de choix, qui cumulait les mérites bien tangibles d’être très sportif, à peu près mignon, rebelle et pas facile à attraper.

Déjà, les filles babillaient à droite à gauche et racontaient le bel exploit d’Ailin, que personne n’avait du mal à croire, tant c’était tout de même beaucoup plus probable de sa part que de celle de Lukas. L’Irlandais, lui, revint les mains dans les poches, d’une démarche nonchalante, vers celui qui avait admiré ses dessins, qui lui avait proposé de rejouer au basket et qui, surtout, avait déclenché l’alarme à incendie. Les motivations de Lukas, il n’en savait trop rien, mais en tout cas, le Russe n’était plus pour lui le petit intello condescendant qu’il s’était souvent représenté.

Ailin haussa les épaules quand Lukas l’interrogea sur les conséquences néfastes que son entreprise de désinformation pouvait avoir.

— Bah, y a pas d’allumette, y a pas de preuve, je risque rien.

Il s’approcha un peu plus de Lukas et le sonda de son regard brun, avant d’esquisser un sourire assez amusé et de souligner, à voix très basse :

— Et puis, après tout, j’ai rien fait. C’est pas moi qu’ai déclenché cette alarme. P’tit délinquant, va.

Avec ça, c’était sûr, Lukas allait se ronger de culpabilité toute la nuit, mais Ailin, lui, il avait l’air de trouver toute cette histoire franchement réjouissante. Il n’y avait de toute façon qu’à regarder la cour, où les élèves improvisaient déjà des jeux, discutaient bruyamment, couraient dans tous les sens, faisaient une démonstration de leurs pouvoirs, pour comprendre ce qui l’attirait là-dedans : le chaos était temporairement tombé sur Prismver et avait troublé la belle régularité des emplois du temps trop stricts qui lui convenaient mal.

Avec un sourire enthousiaste, il se mit à observer une toute jeune fille qui faisait grimper des insectes sous les jambes de pantalons de ses victimes, après les avoir fait naître au creux de ses mains. Mais sa bonne humeur fut brutalement abattue en plein vol par la proposition de Lukas. Le rouge lui monta aux yeux. Ce qu’il avait entendu, lui, dans l’offre généreuse d’une aide dont il avait bien besoin, c’était qu’il avait dû avoir l’air particulièrement idiot, devant son cahier, quelques minutes plus tôt.

Il ne répondit rien d’abord, mais, parce qu’il n’était pas particulièrement habitué à dissimuler ses émotions, il était aisé de voir qu’il était affecté par sa propre médiocrité dans le domaine. Quand Lukas tenta de l’appâter avec des jeux vidéos, Ailin murmura d’une voix éteinte :

— J’joue pas trop aux jeux vidéos. ‘Fin, j’ai jamais vraiment essayé, quoi.

Déjà, le surveillant battait le rappel des troupes. Les élèves, en maugréant, firent volte-face et recommencèrent à s’engouffrer dans le bâtiment principal, vers la salle d’études. L’ingénieux Ailin trouva le moyen de se laisser séparer par la marée humaine de Lukas, mais, quelques secondes à peine avant de rentrer dans la salle d’études, il reparut brusquement à côté du jeune homme, après s’être faufilé avec adresse entre ses camarades, et il lui reprit la main, pour attirer son attention, sans doute.

— OK. Pour ce soir, OK.

Puis il lâcha la main de Lukas et rentra dans la salle. Bientôt assis à sa table, il rangea son cahier de mathématiques, puisque Lukas allait l’aider, et sortit celui d’anglais, pour s’atteler à l’écrit d’invention. Au moins, dans le domaine, il était plutôt très bon. Il avait un peu mal à se concentrer toutefois, parce que sa main se souvenait bien malgré lui de la manière dont la main de Lukas, dans la sienne, avait un peu tressailli quand il l’avait saisie, et puis la manière dont les yeux de Lukas, aussi, l’avaient cherché dans la foule, dehors.

Mais surtout, ce qui le perturbait, c’était qu’il avait accepté de passer sa soirée à faire des mathématiques. Il n’en avait aucune envie, pourtant : les mathématiques, il n’aimait plus cela depuis très longtemps. Il avait honte qu’on le trouvât un peu idiot en la matière, c’était vrai, mais pas assez honte pour avoir vraiment envie de s’améliorer, et ce n’était pas la perspective d’une bonne note à son prochain contrôle qui l’avait poussé à accepter la proposition de Lukas. Non, c’était…

Le compliment du Russe sur ses dessins ? Sans doute. Voilà, il était vaniteux : ça lui allait comme interprétation. Ce n’était pas très glorieux, mais c’était plausible, et il préférait éviter de creuser. Quand la sonnerie de fin d’études retentit, Ailin fourra en vrac ses affaires dans son sac et partit en trombe vers le fond de la salle, pour atterrir devant le bureau de Lukas, qui rangeait soigneusement ses stylos dans sa trousse. L’Irlandais cachait tant bien que mal son énergie survoltée, comme d’habitude.

— J’ai jamais compris pourquoi tu ranges toujours tout comme ça, alors que tu vas ressortir tes affaires du sac, quand tu seras rentré.

C’était à peu près la même absence de logique, aux yeux d’Ailin, que de faire son lit le matin alors qu’on allait le défaire le soir. Trop pressé de sortir enfin de la salle d’études, il n’était pas rendu compte qu’il venait d’avouer, l’air de rien, qu’il prêtait une attention soutenue, depuis des années, à la manière dont Lukas pouvait vivre sa petite vie et, par exemple, ranger ses affaires dans son sac à dos.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockDim 15 Sep 2013 - 11:08
La proposition de Lukas partait d'un bon sentiment, en tant que bon et gentil élève, il avait régulièrement aidé ses amis quand il les voyait en difficultés dans une matière, et aucuns d'entre eux ne s'étaient jusque-là mis en colère à l'idée d'être aidé. Visiblement, ses amis n'étaient pas de la même espèce qu'Ailin, le jeune homme eut un air d'incompréhension en voyant la moue énervée de l'Irlandais. Détestait-il les maths au point de bondir à chaque fois qu'il en entendait parler ? Là encore, quelque chose lui échappait complètement, et très vite après, ce fut son camarade tout entier qui lui échappa. Profitant du moment où Lukas s'étonna d'entendre que quelqu'un d'aussi doué que lui n'avait jamais touché à une console, Ailin disparut dans la foule.

C'est en jetant des coups d'œil partout autour que Lukas rejoignit la salle, mais rien à faire, Ailin s'était bel et bien enfuis. Il devait l'avoir encore plus lourdement vexé qu'il ne l'avait cru, et sans doute, son collègue ne lui adresserait plus la parole avant noël prochain, dans le meilleur des cas. Lukas avait décidément un don pour faire des bourdes, mais alors qu'il avait cessé ses recherches pour se contenter de regarder par terre avec une moue contrariée, on lui attrapa la main. Le jeune homme eut un léger sursaut, autant à cause de la surprise que parce qu'il n'y avait guère qu'une personne qui ait fait ça récemment, et qu'il comprit tout de suite que son camarade était de retour. Tournant un regard étonné vers lui en refermant doucement sa main sur la sienne sans vraiment y penser, Lukas eu un sourire en entendant sa réponse.

« Super, on se voit après alors. »

La fin de l'étude fut une torture, le pauvre Lukas regardait ses cahiers et triturait ses stylos en laissant sa voisine tenter toute seule de démêler le vrai du faux de cette histoire d'alarme, car pour elle, Ailin tentait de s'accaparer tout le mérite sans avoir rien fais. Puis quand la sonnerie retentit, il rangea ses affaires le plus rapidement possible, c'est-à-dire qu'il avait fermé ses livrers et en était déjà à la trousse quand son camarade arriva, avec une réplique qui lui fit secouer la tête d'un air faussement navré.

« C'est pour m'y retrouver facilement, et pourquoi toi tu ne le fais pas alors que ça te prendrait à peine un instant de plus ? »

Lukas se leva finalement, avec son sac sur le dos et un sourire amusé aux lèvres, dans un amphi déjà pratiquement vide. Par habitude, il sortit son téléphone qui s'alluma aussitôt et gagna la sortie avec les derniers retardataires. C'est en marchant vers sa chambre qu'il se dit que tout de même, pour quelqu'un qui l'ignorait ouvertement, Ailin était sacrément attentif. Son écran glissa de l'écran de son téléphone à la main de son camarade, et finalement, il mit l'appareil dans sa poche et glissa sa main libérée dans celle d'Ailin, pour mieux le guider vers sa chambre, cela va de soi. Pendant un moment, il ne dit rien, ce qui rendait l'atmosphère un peu étrange, parce qu'autant attraper la main d'un garçon pour le mener d'un point A à un point B, ou attirer son attention, ça passait, autant se promener comme ça dans un couloir presque vide, parce que la majeure partie des élèves préfèrent s'aérer un peu après les cours que filer dans leurs chambres pour travailler encore, c'était un peu plus étrange.

« Heu… et si t'aime pas les maths, on peut faire autre chose, tu sais. T'avais pas l'air très content, tout à l'heure. Je disais pas ça pour t'embêter, hein. »

Voilà, mieux valait sans doute prévenir, histoire qu'Ailin ne s'échappe pas de nouveau. En attendant, ils étaient arrivés, Lukas ouvrit la porte et partit poser son sac sur l'un lit des quatre lits, et là, fait notable, son coin n'était pas le mieux rangé du lot. Cruelle désillusion. Oh, bien sûr, son lit était bien fait, ses vêtements bien pliés, ses livres parfaitement ordonnés et ses affaires de cours irréprochables. Mais il y avait le reste, le côté sombre de Lukas dont le premier indice était l'ordinateur, qui n'avait de portable que le nom tant il était large et épais, posé sur le lit. Puis venait le dessous du lit, d'où l'on voyait dépasser d'autres ordinateurs et tout un tas de matériel électrique ou électronique, sans doute en bonne partie hors d'usage, mais qu'il devait conserver pour en utiliser les pièces. Et puis il y avait des câbles, des câbles et des câbles, des câbles de souris, des câbles de chargeurs, des câbles de manettes, des câbles de disques durs externes, des câbles non identifiés, des micro-usb, des multi usb, des lightning, des prises jack, des péritels, des adaptateurs, des multiprises en cascades, il y en avait pour tous les goûts.

Le tout dépassait donc de sous le lit, mais aussi d'un sac de sport et d'une boîte en carton posés par terre, le jeune homme manquait visiblement de place pour tout stocker correctement. Mais il ne sembla pas y prêter attention, une fois son sac réouvert, il ressortit ses affaires et vint bientôt s'asseoir à la table prévue à cet effet, avec sa trousse, son cahier, sa calculatrice et son air motivé.

« Alors, sur quoi est-ce que tu bloques ? »

Sur les mathématiques, m'sieur.
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockDim 15 Sep 2013 - 11:09
Ailin regarda Lukas comme s’il avait dit quelque chose de scientifiquement inexact et, même, de parfaitement stupide. Il baissa les yeux vers les stylos que le jeune homme ordonnait dans sa trousse pour que toutes les mines et les pointes fussent tournées du même côté, releva les yeux et déclara, sur le ton de la plus des évidences, aussi vrai que la Terre était ronde :

— C’est pour sortir plus vite, voyons.

Eh bien oui, ce qu’il pouvait être gourde, tout de même, ce Lukas, quand il s’y mettait ! Ailin trouvait les amphithéâtres suffisamment déprimants, et particulièrement celui des études dirigées avec son silence de plomb, pour ne pas vouloir s’y attarder plus d’une seconde que nécessaire, et si sa motivation lui paraissait couler de source, tout bien considéré, elle avait quelque chose de vaguement pathologique, comme son obsession de s’occuper, en permanence — et de s’entourer, surtout.

Les deux jeunes gens finirent néanmoins par quitter les lieux, presque en derniers — un petit drame pour Ailin, qui regarda ses camarades s’enfuir dans toutes les directions, pour quitter leurs uniformes et joueur au football dans l’herbe fraîchement coupée, un plaisir dont la perspective faillit le pousser à planter Lukas et ses mathématiques là et à courir lui aussi, sans demander son reste, pour retrouver à son tour ses chers ballons. Il l’aurait peut-être fait, d’ailleurs, si Lukas n’avait pas fourré vicieusement sa main dans la sienne.

Assez peu discrètement, l’Irlandais se transforma en tomate et, vite, très vite, il regarda droit devant lui, puis par-dessus son épaule, puis par les fenêtres du mur droit, dans le couloir, histoire d’être bien sûr que personne ne pouvait les voir. Ces prudentes précautions étant prises, il choisit de faire comme si tout cela était décidément très naturel et que oui, tous les jours, les amis un peu machistes dont il s’entourait pour explorer l’île se promenaient main dans la main avec lui.

Sa main s’était donc refermée sur celle de Lukas et son cœur, lui, préparait secrètement une attaque cardiaque. Très occupé à ne surtout pas penser, pour ne pas réfléchir à ce qu’il était en train de faire avec ce Russe que, souvenons-nous en, il détestait cordialement, enfin, plutôt, qui l’indifférent, Ailin marcha d’un pas automatique jusqu’à la chambre de Lukas. Une fois entré, il retrouva l’usage et la pleine propriété de ses deux mains, avec un sentiment mêlé de déception et de soulagement.

Son regard parcourut l’espace, détailla le lit et les étagères Lukas et, même après avoir un temps considéré les câbles qui s’échappaient tentaculairement de leurs cartons, Ailin fit remarquer :

— On dirait que tu fais l’armée, tellement c’est bien rangé.

Ce qui n’était sans doute pas un compliment. À n’en pas douteur, Ailin eût fait une crise de nerfs s’il n’y avait pas eu, justement, tous ces appareils électroniques qui trainaient pour mettre un peu de désordre dans le monde trop régulier de Lukas. D’ailleurs, le jeune homme, après avoir abandonné son sac à dos par terre, se laissa tomber sur le lit, pour froisser les draps.

Il réprima plus ou moins un bâillement et croisa les mains sous sa nuque. Tout à l’heure, dans le couloir, il n’avait pas répondu à la proposition de Lukas d’éviter les mathématiques, mais voilà que son nouveau tuteur revenait à la charge. L’Irlandais laissa échapper un soupir en fixant les plafonds.

— Avant, j’étais bon, en mathématiques, tu sais. J’ai pas toujours été…

Il ne finit pas sa phrase, parce que le mot qui lui était venu, c’était « idiot ». À la place, il retira ses chaussures du bout du pied, pour pouvoir replier les jambes et poser les pieds sur le lit de Lukas. Désordonné mais pas dégueulasse quand même.

— C’était relativement intuitif, en fait. Tu vois, c’est un peu comme ça que je vois le monde, je suppose, au fond. Mathématiques. Géométriques. L’adresse, c’est pas seulement dans le corps, c’est aussi dans la tête. Je sais, je suppose que je prévois mieux, je calcule mieux, la manière dont les mouvements vont se coordonner. Mais…

Ailin finit par se redresser pour s’asseoir en tailleur, dans une transition d’une parfaite souplesse, et il vint poser ses deux yeux bruns sur Lukas. Il n’avait pas l’air ravi de son aveu et ce n’était pas du défi qu’il y avait dans sa voix, quand il soulignait sa nouvelle incompétence, comme lorsqu’il parlait à ses professeurs, en classe, mais bien plutôt de la honte.

— …maintenant, c’est devenu beaucoup trop abstrait. Et puis, j’sais pas, c’est un cercle vicieux. Tout le monde me dit qu’je suis idiot, alors ça motive pas des masses.

Son obsession de ce que tout le monde disait revenait à la charge. Naturellement, en dehors d’une poignée de A vraiment peu conciliants, personne ne disait d’Ailin qu’il était idiot. Pas très doué dans certaines manières, c’était certain, mais l’Irlandais transformait cette évaluation objective en condamnation universelle. En tout cas, il fixait Lukas d’un air perplexe.

— Pourquoi tu veux m’aider, toi ? J’ai jamais été sympa avec toi. T’as vu la Vierge, c’est une vocation religieuse, t’occuper des cas désespérés ?

Il avait dit cela avec un sourire amusé et, déjà, dans son esprit, une petite bande-dessinée prenait forme, avec Lukas, la Vierge Marie et lui-même devant un livre mathématique. Bien sûr, il ne la dessinerait jamais. C’eût été un blasphème indigne d’un Irlandais. 
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MessageSujet: Re: À un doigt de la victoire [Ailin]   À un doigt de la victoire [Ailin] 1400359500-clockDim 15 Sep 2013 - 11:09
Lukas ne manqua pas de remarquer l'état dans lequel se mit Ailin quand il lui prit la main, ce qui avait l'avantage de l'empêcher de s'interroger sur la façon dont il se sentait lui-même, malgré son cœur qui s'était mit à battre un peu trop fort. Il suivit le regard d'Ailin quand il se mit à surveiller leurs annières, visiblement inquiet à l'idée que quelqu'un les surprenne, mais sans pour autant se décider à lui lâcher la main – ce qui lui fit plaisir au point d'avoir un sourire un peu débile et le poussa à détourner les yeux.

Le jeune homme haussa un sourcil quand Ailin lui fit remarquer que son coin était bien rangé, il détailla un moment le bordel sous son lit en se demandant dans quel état son camarade avait pu mettre sa chambre pour trouver de l'ordre là-dedans. Son lit avait beau être fait, Lukas voyait surtout que son matériel traînait n'importe comment. Bien sûr, ce genre de considérations fut rapidement balayé quand Ailin se vautra sur son lit, et qu'en calant ses mains sous sa tête, il fit incidemment remonter le bas de son t-shirt, mais il n'était pas convaincu pour autant de son sens de l'ordre.

Depuis la chaise où il s'était installé pour travailler sérieusement, Lukas tripotait son crayon en regardant son camarade se mettre en l'aise et parler de ses déboires avec les mathématiques. Il ne comprenait pas exactement les difficultés qu'il pouvait rencontrer dans cette matière, mais ne doutait pas du fait qu'Ailin puisse s'en tirer avec un peu d'aide, parce qu'il n'était pas idiot, loin de là, il en était certain. De son point de vue, ce qu'il lui manquait surtout, c'était de la motivation et de la rigueur, qu'il avait apparemment perdu à force de se faire dévaloriser – Lukas n'avait jamais remarqué que tout le monde s'en prenait à lui, mais bon. Puis, quand finalement l'Irlandais lui fit remarquer qu'il n'avait jamais été aimable avec lui, Lukas eu un petit rire.

« Tu le reconnais, en plus. »

Comme visiblement, Ailin était bien installé, Lukas prit ses affaires et vint décaler son ordinateur pour le rejoindre sur le lit.

« Le truc, c'est que t'es sympa, on discute et tout, puis en sport aussi, c'est cool de jouer avec toi. Alors que d'autres fois, je veux venir te parler et tu te barres avant que j'arrive, ce genre de truc. Après, je suis pas doué avec les gens, j'ai peut-être fais des trucs qui te plaisaient pas, mais faudrait que tu m'expliques un jour, parce que j'comprend pas trop, là. Désolé, hein. »

Puis, parce qu'il n'était pas si désolé que cela vu qu'il ne savait pas du tout ce qu'il avait pu faire de mal, Lukas ouvrir son cahier de mathématiques. Est-il vraiment utile de préciser que le sien était impeccable, avec des titres en rouge soulignés, des photocopies bien collées et du fluo sur les choses importantes ? Le cahier était impeccable. Il le feuilleta un peu d'un air pensif avant de marmonner.

« C'est sûr que c'est abstrait, mais ça reste logique. Pas de raisons que t'y arrives pas. C'pas comme, genre, tes dessins, si je voulais faire ce que tu fais, me faudrait dix ans. Qu'est-ce que tu veux qu'on travaille, du coup ? »

Apparemment, Lukas aurait bien aimé savoir dessiner, mais il ne creusa pas plus ce point. Le cahier ouvert, il posa un regard interrogatif sur Ailin tout en s'appuyant contre le mur, c'était quand même plutôt drôle de l'avoir avec lui en dehors des cours ou autres activités scolaires. Son compagnon lui paraissait avoir un peu moins la bougeotte que quand il se trouvait coincé entre sa chaise et son cahier de cours – mais c'était peut-être sa présence qui le figeait sur place – et puis ils pouvaient enfin discuter tranquillement.
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