[SUÈDE] time to change [ONE SHOT]

Il avait prévenu Sydney, Heath et quelques autres personnes de son voyage. Ça ne devait durer que deux ou trois semaines, pas plus. Histoire de voir la famille, de fêter l’anniversaire de l’une de ses mères comme il se doit. C’était aussi une occasion comme une autre de s’éloigner de l’ambiance oppressante qui règne à Prismver. Cette île qui devenait petit à petit un enfer. Passer un peu de temps avec la famille, ça ne pouvait pas faire de mal. Au contraire, ça lui ferait un bien fou. Il aurait voulu emmener Thomas avec lui. Il avait cette désagréable impression que son cousin se sentait seul et s’en voulait de ne pas l’avoir remarqué plus tôt. Tu parles d’un grand-frère. Alors que Thomas l’avait toujours considéré comme tel, Joach n’était même pas capable de tenir ce rôle comme il se doit. Alors il s’était dit qu’en revenant, il s’engageait à passer plus de temps avec l’adolescent de seize ans. De lui consacrer autant de minutes, d’heures, de jours qu’il faudrait. Il était prêt à mettre cette guerre des classes de côté et se consacrer à eux qui lui sont chers.

Mais avant ça, il avait besoin de réfléchir, se poser un peu et prendre du bon temps. Et puis la Suède lui manquait tout de même un peu, ça faisait un bon moment qu’il n’y était pas retourné. Mais il a vingt-et-un ans Joach, il est grand, il a l’âge de partir, avoir son propre appartement. Sauf qu’il ne pense pas vraiment à son avenir, il ne sait pas ce qu’il veut faire plus tard alors que le temps presse. Bientôt il pourra quitter Prismver. Ce lieu où il avait passé la quasi totalité de son adolescence, où il avait rencontré de bonnes comme de moins bonnes personnes. Le E a vécu tant de choses là-bas et rien que le fait de penser que ce serait bientôt terminé le rendait réellement mal à l’aise. Pourtant, au fond, il est aussi bien content de quitter le pensionnat. Parce que rien n’est plus comme avant. Parce que c’est stupide guerre commence réellement à lui taper sur les nerfs.

Sauf qu’aujourd’hui et pour toute la semaine à venir, il s’était promis de ne pas y penser, n’y même d’en parler. Parce que ça avait le dent de le mettre de mauvaise humeur durant toute une journée. Et il s’était levé tôt ce matin-là, histoire d’arriver en Suède de bonne heure. Il avait dormi tant bien que mal tout au long du trajet, souvent dérangé par une voisine particulièrement bruyante et énervante. Tellement que Joach s’était même surpris à vouloir lui arracher sa gorge de manière à ce qu’elle se taise à jamais et lui foute la paix. Instinct animal, sans doute. Il ne s’en inquiétait pas plus que ça de toute manière. Pour l’instant, ce n’était pas réellement problématique.

Tout ça pour un trajet en avion tout à fait banal. De toute manière, même s’il était arrivé quelque chose d’atypique, il n’aurait pas pu le savoir étant donné qu’il dormait profondément. Et maintenant, tirant sa valise derrière lui, il quitta l’aéroport pour trouver un taxi. Quinze longues minutes à attendre dans la froid avant qu’un véhicule ne daigne se garer face à lui. Soulagement. Et le brun grimpe dans la voiture, indique l’adresse avant de soupirer longuement. « Vous venez pour visiter? Remarque, ce n’est pas une très bonne idée, en plein hiver! » Un petit sourire. Parce qu’il s’attendait à cette question. Il l’avait senti venir de loin, très loin. « Non. Je viens d’ici. Je viens rendre visite à la famille. » Et il peut deviner la surprise du conducteur. Il faut dire que ce n’était pas bien commun de voir une personne à la peau basanée en Suède. « Oh oui, je vois. » Après ça, il n’avait plus osé lui adresser la parole. Tant mieux, Joach n’était pas vraiment d’humeur à discuter. Il était plutôt pressé d’arriver à destination, raison pour laquelle il avait demandé au taxi man s’il était possible de mettre le pied sur l’accélérateur. Pas très mâlin, Joach. Non vraiment, sur ce coup-là, t’as vraiment été stupide.

La prudence, tu connais Joach? Tu sais que la route est peu sûre, avec toute cette neige? Elle est même sûrement gelée. Et le conducteur alors? Il est con de t’avoir écouté, tu trouves pas? Parce que vous auriez pu éviter ça. Parce que tu aurais pu éviter ça.

Mais il finit par sentir que quelque ne va pas. Sauf que c’est trop tard, mon pauvre. Les pneus glissent sur la route givrées. Un feu rouge, il tente de freiner, en vain. La voiture continue d’avancer à pleine vitesse. Joach tourne la tête et il voit là, les phares du camion qui fonce droit sur eux. Il est comme paralysé, il voudrait hurler, mais rien ne sort. Il ne se rend pas compte de grand chose. Juste qu’il a l’impression de voler, il voit floue, il sent son coeur battre à cent à l’heure. Il croit entendre la tôle qui se brise, qui s’écrase, qui est broyé. Il a l’impression que tout se brise autour de lui puis…

Plus rien.