L'histoire fait-elle le présent ou le présent fait-il l'histoire ? [PV Maija]

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L’après-midi était déjà bien entamé lorsqu’Ethan se décida à sortir. Il rassemblait ses affaires sans se presser, récupérant ses différents cahiers et stylos qu’il calait habilement sous son bras avant de quitter la salle commune des A pour tout déposer dans son bungalow. Il n’y avait personne à l’intérieur. Même si cela ne le choquait pas outre mesure, il ne pouvait s’empêcher de râler intérieurement. Ceux qui n’étudiaient pas correctement le samedi allaient laisser leur lumière allumée jusqu’à pas d’heure le dimanche soir et cela l’empêcherait de dormir à coup sûr. L’inconvénient d’être habitué à vivre seul dans une grande « maison » et de passer à un lieu de vie partagé était de devoir supporter les autres au quotidien et ce, pendant plusieurs années. Ethan ressortit de sa chambre en soupirant. Le pire était surtout d’être dans un bungalow mélangé avec des élèves de classes inférieures du genre D et E, surtout E ! Il n’aimait pas penser cela mais c’était malheureusement la triste vérité. Pourquoi ne les plaçait-on pas par classe ?! Le jeune homme quitta le bungalow en refermant derrière lui et ses pensées négatives.

L’air de la ville n’était pas ce qui allait lui faire du bien mais il avait une vague idée du lieu qu’il souhaitait visiter. Et il ne lui fallut pas bien longtemps pour le trouver. Ethan traversait la grande place d’un pas nonchalant, prenant tout de même le temps de regarder autour de lui. Il ne sortait pas des masses et personne ne le poussait vraiment à le faire. Aussi, en trois ans d’ancienneté, il n’avait pas dû quitter l’école plus de dix fois. Bien triste constatation… Il passa à côté du grand arbre et leva les yeux sur la devanture de la librairie, s’amusant du style d’écriture choisit pour l’illustrer. Il poussa ensuite la porte et s’engouffra tandis qu’une clochette indiquait son arrivée à la libraire d’un âge bien avancé. Elle avait la peau pâle, les traits tirés et visiblement ridés. Ses longs cheveux que l’on devinait autrefois bruns étaient rassemblés en un chignon strict mais l’on pouvait lire la gentillesse et la douceur dans ses yeux aussi verts que la mousse qui poussait sur les racines de l’arbre. En rehaussant ses lunettes d’un geste vif, on pouvait néanmoins deviner que derrière cet être candide, se cachait une personne terriblement intelligente, bien loin de la bonne poire dont on pouvait se moquer. Ethan appréciait décrypter les mimiques et les caractères des gens. Il se sentait plus à l’aise en mettant le doigt sur certains détails, un peu comme s’il était le prédateur et non la proie. Il s’était assez souvent réfugié derrière son observation pour pouvoir le dire. Il se demandait vaguement quel était le don de cette dame tout en avançant un peu plus dans son antre.

« Bonjour, jeune homme, le salua-t-elle gentiment.
- Bonjour, madame. » Répondit-il d’un ton égal.

Et ce fut tout. Elle n’avait pas l’air d’être le genre de personne commercial, à sauter sur les gens et leur demander ce dont ils avaient besoin. Non, elle semblait plutôt attendre que l’on vienne à elle pour un quelconque renseignement et cela, Ethan l’appréciait à sa juste valeur. Le lieu atypique lui plaisait également, les plantes participaient grandement à l’ambiance calme qui régnait en ces lieux. Une petite voix lui susurrait que bientôt, ce serait son havre de paix et que s’il y avait un endroit où l’on pourrait le trouver, ce serait bien ici. Un sourire satisfait naquit au coin de ses lèvres tandis qu’il flânait de rayons en rayons. Au départ, il n’avait pas eu d’idées précises sur ce qu’il voulait lire ou ce qui lui permettrait de mieux réussir en cours. Après tout, la bibliothèque était largement fournie pour cela. Mais en faisant courir son doigt le long des reliures, il s’arrêta sur une couverture ancienne qui accapara toute son attention. Lentement, il retira le livre de l’étagère pour y découvrir sa couverture « Monomageia 1912 ». Eberlué, il passa sa main sur la vieille couverture de cuir pour retirer le film de poussière qui le recouvrait. Ce livre avait plus d’une centaine d’années, que faisait-il dans une petite boutique de l’île ?! Ethan le posa avec extrême précaution sur une racine faisant office de table avant de l’ouvrir. Ce qu’il contenait avait l’air passionnant. Tout y était écrit à la plume d’encre noire, parfois illustré de dessins ou d’ébauches ici et là… Cet ouvrage évoquait la découverte des premiers sorciers à pouvoirs uniques jusqu’à l’année 1912. Il était nécessaire à Ethan d’étudier ce livre, de le parcourir de long en large jusqu’à pas d’heures. Peut-être même que cette fois-ci, ce serait lui qui laisserait la lumière allumée le lendemain soir. Il saisit son trésor, toujours avec beaucoup de prudence et s’avança jusqu’au comptoir de la libraire pour l’y déposer. Les yeux de la vieille dame se posèrent dessus et Ethan fut presque sûr d’y voir une étincelle avant qu’ils ne se posent sur lui à nouveau :

« Bien rares sont les personnes qui s’attardent sur les livres d’histoire.
- Sans vouloir vous manquer de respect, comment se fait-il qu’un livre de cette valeur soit proposé à la vente dans cette boutique ? »

Un léger silence se fit avant que la libraire n’esquisse un sourire.

« A combien l’estimez-vous, jeune homme ?
- Je l’ignore.
- Vous ne vous mouillez pas beaucoup. Elle rit. A vrai dire, il ne s’agit que d’une pâle copie. Vous vous doutez bien que le véritable ouvrage est exposé dans un musée. »

Devant l’air dubitatif du garçon, elle précisa :

« Ce livre a été réécrit par quelqu’un d’autre tout en s’inspirant de l’original. Les ébauches que vous avez pu y voir sont celles du copieur. Ma foi, il n’est pas mensonger, il explique un autre point de vue sinon je ne me permettrais pas de le vendre.
- Un autre point de vue ? Mais ce livre date de…
- …1912, oui. Du moins, je dirais plutôt 1920, certains clins d’œil n’auraient pu être ajoutés avant cette date-là.
- Mais personne n’aurait pu vivre aussi longtemps, sauf si cette personne était immortelle. »

La libraire sourit d’un air mystérieux.

« Si l’histoire de nos ancêtres vous intéresse, pourquoi ne pas faire un tour dans le quartier artistique ? Bon nombre de musées satisferaient votre curiosité.
- J’y songerais. Pouvez-vous me mettre ce livre de côté, s’il vous plaît ?
- Naturellement. »

Ethan la remercia tandis qu’il retournait dans le rayon qui l’intéressait. Il se saisit d’un nouvel ouvrage, bien plus récent mais qui lui avait tout l’air passionnant. Il entama sa lecture.

Maija soupira d'aise. Décidément, il n'y avait que lorsqu'elle était entourée de livres qu'elle se sentait à sa place. Ou alors, il fallait qu'elle soit devant sa télévision à regarder la rediffusion des Reines du Shopping. Au choix.

C'est pourquoi, à la fin de son éprouvante matinée du samedi, elle avait décidé de venir ici. Cette librairie était un peu son lieu de repos; pas besoin de travailler, ici, elle était libre. Et cet endroit regorgeait de livres tous plus intéressants les uns que les autres. Parfait pour se changer les idées après avoir dû supporter un gamin râleur puni parce qu'il pensait se rendre intéressant en faisant une connerie. Ah, ces jeunes.

Voilà deux heures qu'elle se trouvait ici et ne comptait pas bouger d'un pouce. Elle avait arpenté les rayons une heure entière pour trouver des bouquins qui pourrait l'intéresser, et souhaitant rester un peu plus, en avait entamé un. Elle connaissait la libraire pour être une cliente régulière de la boutique, en plus de discuter souvent livres avec elle (enfin Maija parlait surtout et la vendeuse écoutait) ; elle ne lui fit donc aucune remarque.

Elle releva le nez soudainement, écoutant d'un air qui se voulait discret l'échange qui se déroulait à quelques pas d'elle. Elle n'avait jamais vu ce livre. Et il avait l'air franchement passionnant. Elle devra s'arranger avec l'élève pour y jeter un oeil...

Elle le suivit du coin de l'oeil. Elle le connaissait, il était déjà venu à la bibliothèque. Ethan Bradford, un A. Mais n'avait jamais discuté avec lui. La bibliothécaire était surprise; il semblait vraiment intéressé. Pourtant, les livres d'histoire - même de ce genre d'histoires - n'étaient pas les plus appréciés des élèves.

Finalement, l'albinos décida d'engager la conversation. Les élèves de ce genre n'étaient pas courants, et elle aimait bien discuter avec eux, histoire de se faire une autre idée des pensionnaires de Prismver - qui lui semblaient des fois bien puérils. Mais elle généralisait évidemment, elle savait pertinemment que ce n'était pas le cas pour tous.

« Excuse-moi... »

Elle n'aimait pas l'idée de déranger quelqu'un pendant une lecture, aussi l'aborda-t-elle lorsqu'il leva les yeux de son livre un instant.

« Tu es un élève du pensionnat, pas vrai ? J'ai vu que l'histoire semblait beaucoup t'intéresser. »

Elle n'avait évidemment pas oublié le livre qu'il avait découvert quelques instants plus tôt.

« A vrai dire, le livre que tu as pris tout à l'heure m'intrigue beaucoup. Si tu comptes rester un peu ici, est-ce que je peux y jeter un coup d'oeil ? »

Ce ne serait pas suffisamment long pour lui permettre de tout lire, bien sûr, mais elle avait quelques scrupules à lui demander s'il serait possible de lui emprunter juste après qu'il l'ait lu. Ils ne se connaissaient absolument pas après tout.

» On s'fait un rp ?
» Qu'est ce qu'on fait maintenant ?
» Sous l'eau, on fait des rencontres...
» CA FAIT MAL. D'ABORD.
» On fait la paix ?

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