Autour d'un petit verre

Il faisait frais et ça faisait du bien.
Habillé comme à son habitude, il avait juste passé une petite veste en plus et une écharpe autour de son cou. Piers trainait un peu des pieds, ayant le nez levé vers le ciel, laissant ses jambes le guider vers… nulle part et partout à la fois.

Le rouquin aimait bien Prismver, même s’il avait déjà fait le tour de l’île une bonne centaine de fois. Ca le rendrait paisible d’être sur un bout de terre entouré de mer et aussi morose. La nostalgie de l’océan, du voyage… cette impression d’avoir perdu beaucoup de temps, ainsi que le manque viscéral de sa présence.

Pier secoua la tête pour éviter de retomber dans les démons du passé. Soudain il se rendit compte qu’il était arrivé au niveau du quartier festif. C’était pas son endroit favori non plus, mais il l’aimait bien. Ca lui cassait les couilles que personne au studio n’est voulu sortir… toujours entrain de corriger des putains de copies.

L’Écossais soupira avant de pousser la porte du bar. Il y avait pas mal de monde, en même temps les vacances approchait et sur cette île, quelque soit la saison, il y avait toujours des touristes. Piers s’essaya au bar et commanda un rhum.
Il ne retira sa veste et son écharpe qu’après la première gorgée. Il n’aimait pas boire seul, ça lui rappelait des souvenirs bien trop sombres.

Soudain une voix lui fit lever la tête. C’était Mathis Barret le professeur de Français à Prism. Piers était un peu surpris de le voir là et c’est sans la moindre gêne qu’il alla le saluer avec son verre à la main.

« Hey Matt ! Tu vas comment ? »

Il était un être plutôt tactile, alors il lui fit une amicale accolade avant de s’accouder au bar et de le regarder de son unique œil et avec son éternel sourire fixer sur le visage.

« Bah qu’est-ce que tu fou ici tout seul ? »

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©Gau

« Yo Mec, ça va et toi ? »
« Ca va, comme un mois de Décembre quoi… »

Énigmatique. C’était une habitude et il ne servait à rien de lui demander ce qu’il voulait dire en disant cela, il n’y répondrait pas, souriant juste mystérieusement. Seul Piers connait vraiment le double sens de ses phrases qu’il aime bien utiliser… surtout en cours, façon de déstabiliser les petits malins.
Le roux était assez contant enfin de compte de ne pas se retrouver seul, c’était assez agréable, puis Mathis était de bonne compagnie.

« Aucune idée ! En ce moment j'ai des envies de sortir un peu, et toi ? »

Il connaissait ça aussi, cette soudaine envie de sortir. Au fond c’était peut-être les fêtes qui donnait cette envie à certain. Ce qui était certain c’est que ce n’était pas la raison qui poussait Piers à s’aventurer en ville et à délaisser ses copies non corrigées depuis déjà deux semaines. Il y avait autre chose, une obscure raison qui le poussait  boire plus qu’à son habitude… sûrement était-ce dû au fait qu’il souhaitait ne pas se souvenir de Noël et de cette fantaisie, voire frénésie qui allait toucher le monde sous peu. Piers inspira un coup avant de porter le verre à ses lèvres. Il prenait son temps, il en avait de toute façon, rien ne le pressait. Il le déposa et se racla la gorge avant de fixer de son unique œil Mathis et d’enfin, répondre à sa question.

« Moi aussi étrangement… mais, boarf ! Les autres aux studios ils sont là à corriger leur copies à la cons, alors qu’on aurait pu passer une bonne soirée tous ensembles. J’aime pas boire seul qui plus est, ça fait trop alcoolique à mon goût. »

Piers s’affala sur le bar légèrement morose. Il resta ainsi un instant, avant de se rendre compte de là porté de ses paroles. Il n’était pas seul, il y avait Mathis, donc en soit, c’était une soirée pas si mal qui s’annonçait… du moins, meilleure que celle qu’il avait commencé à envisager en pénétrant dans ce bar.
L’Écossais se redressa et sourit avant de demander un second verre au barman, oui il a une bonne descente et en plus il la tient plutôt bien, les siècles sa forge l’expérience.

« On va passer une bonne soirée, on va se bourrer la gueule ensembles, demain on sera peu présentable, mais on s’en fou… ouais, l’élève n’est pas roi, mais nous oui. »

Il lui fit un clin d’œil et fini son premier verre alors que l’homme derrière le bar lui amenait le second qu’il venait tout juste de commencer. Piers s’accouda contre la surface lisse sur laquelle trônaient les verres des consommateurs et jouant avec un de ses colliers il s’adressa à son collègue et ami :

« Aller, parle-moi de toi, je suis curieux de nature et je ne sais pas grand-chose de toi. »

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Il était plutôt content que son collègue soit là. Cela ne le rendit que plus satisfait quand Mathis rejoint ses paroles, si bien, qu’il continua de boire, quitte à être un déchet le lendemain.
Piers était un être curieux, toujours à la recherche d’en savoir plus sur les gens et le monde qui l’entourait. Il ne pouvait pas s’en empêcher, il aimait bousculer ses êtres qui croisaient sa route, les sortir de leur train-train quotidien. C’est ce qu’il faisait de mieux. Actuellement il avait bien l’impression d’avoir mis Mathis dans une certaine situation d’inconfort.

L’Écossais n’avait pas besoin de beaucoup pour remarquer ce genre de choses. Par chance Mathis lui répondit, mais pas comme l’avait espéré et souhaité Piers. C’était bien trop superficiel à son goût.

« Nous sommes deux alors ~ Baah... Que dire sur moi ? J'suis Geek, No-Life si j'aurais pus. J'aime la bière et le Rock. Je suis aussi série télè tel que Sherlock et Dr. Who ainsi que de bon vieux Star Trek ~ Et film de SF. Oh ! J'aime aussi voyager ! Et twoii ? »

Il faut aussi avouer que notre vieux et très cher Piers avait un peu du mal avec les termes employés par son collègue. Il en saisissait l’essentiel, mais sans plus. En réalité il était encore septique sur le fait de passer une bonne soirée. Au fond il se sentait pressé de savoir alors qu’il n’avait aucunes raisons de l’être. Il fallait qu’il se trouve une raison, lui et ses questions.

Piers inspira un coup avant de boire un petite gorgée et de se lancer, sur un air qui dégageait de la nonchalance à en étouffer.

« Tout ça je le sais Matt, je te croise en salle des profs tout de même… enfin, où as-tu voyagé ? Non parce que moi-même j’ai pas mal bougé. On pourrait comparer nos expériences sur ce qu’on a vu. »

Il adoptait la technique subtile, il le sera sûrement moins avec quelque verres de plus dans le bec. Piers porta justement à nouveau le liquide ambré à ses lèvres avant de fixer Mathis pour la énième fois.

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Par chance il n’eu pas beaucoup de temps à attendre avant que Mathis ne commence à lui répondre.

« Eh bien j'ai pus aller à New-York, Venise, Maroc aussi et dans ses alentours. Je voudrais aller au Japon et sur une île déserte tiens ! »

Le visage de Piers s’assombrit tout d’un coup et il fut happé par de vieux souvenirs… Les cerisiers en fleurs, la neige, Yume et Ema. C’était  comme si on l’avait poignardé et il savait que cette douleur n’était pas spécialement agréable. Normalement cela ne lui fait pas si mal, cela ne l’affecte plus autant… était-ce dû à la période ?
Lui, le professeur toujours souriant s’était soudainement mué en cette personne inconnue et triste.

Piers il est particulier, même les bons moments il voudrait les oubliés, car de son point de vue se sont toujours les plus dur à supporter. La guerre et l’horreur qu’il a pu voir et même commettre, le tourmente, hante ses cauchemars depuis des années, mais rien n’est plus violent que ces souvenirs brutes, rempli de nostalgie. Oui il voudrait pouvoir oublier sa fille et sa candeur, sa femme qu’il a aimé à la folie, toutes ses personnes avec qui il a tellement partagés… ses amis, ses camarades de batailles et ses parents à qui il n’a pu dire au revoir et qui doivent très certainement être profondément déçus.

Il est reconnecté à la réalité par la voix de Mathis. Au début il est un peu perdu, puis il fini par comprendre et se souviens surtout de quoi il lui parle. Piers le regarde, il essaye de se motiver… de lui répondre avec le sourire, mais non, aujourd’hui le cœur n’y est pas. L’Écossais soupire.

« J’ai fais le tour du monde et… »

Il ne fini pas sa phrase, mais plutôt son verre avant de se lever de la chaise tout en enfilant sa veste. Le roux pose sa main sur l’épaule de son collègue.

« Excuse-moi, mais je ne me sens pas très bien. Ce n’est pas contre toi hein, tu sais que je t’aime bien Matt… on se voit plus tard ? Et va au Japon, maintenant ! Téléporte-toi et va boire un coup là bas… va voir le soleil s’élever au dessus du Mont Fuji. Bon voyage. »

Il avait lancé cette dernière phrase par-dessus son épaule tout en levant la main en s’éloignant. L’air glacial de l’extérieur lui fit du bien. Lentement il se dirigea vers la plage, endroit qu’il affectionnait tout particulièrement. Cela lui rappelle une île déserte justement… c’est ce dont il avait besoin : être seul.
Piers il a toujours repoussé la solitude, préférant l’attachement aux personnes qu’au matériels, mais parfois le destin le pousse à être seul… pour pleurer et évacuer tous ses remords, toute cette souffrance qu’il garde en lui. L’Écossais n’aime pas pleurer, cela n’énerve, pourtant il en a besoin.
Il reste là sur la plage à chialer toute sa rage et… pour la seconde fois depuis son retour à Prismver, cela recommence.

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©Gau