if brokenness is a form of art surely this must be my masterpiece ft. colombe

(elle) a le coeur serré (prête à le vomir) avec tout ce qu'elle a pu ingérer. ses pas sont séisme et elle rentre dans son refuge, claquant la porte telle une bourrasque trop puissante. ses affaires finissent éclatées contre le mur alors qu'elle saisit délicatement dans le creux de ses mains son lézard, une boule au creux de la gorge.

— benny, reste caché s'il-te-plaît.

aussitôt dit aussitôt fait, la forme fine se faufile dans ses affaires alors que son souffle se saccade (elle entend son rire) secoue la tête en portant les mains à ses oreilles ce ne sont (que des bruits, que des sons) rien de réel, rien de vrai ni de cruel (il n'est pas là, n'existe pas) ce n'est pas (comme s'il la regardait, assis et l'air si satisfait) de la voir à nouveau s'écrouler et



il suffit
de son nom
prononcé

pour qu'elle lui crie dessus de se taire (tu n'existes pas, tu n'es pas réel) il tape sa propre cuisse alors qu'elle lui jette son réveil qui s'éclate contre le mur (tu n'existes pas, tu n'es pas réel) elle veut tant y croire (s'en persuade déjà) c'est le refus si froid si dur de son existence (le déni) d'une présence qu'elle maudit (il n'en est rien il n'en est rien) et le jour où elle en viendra à l'admettre sera sûrement sa   f  i  n.



(désirée)
tais toi
(désirée ma bien-aimée)
arrête
(désirée ma tendre ma douce)
ferme la
(si tu savais)
je ne veux pas savoir
(comme je t'aime)
et moi je te crois plutôt épris de mon
d é s e s p o i r

(elle) a les doigts en feu pourrait jurer par tous les noms de dieu (griffe de ses ongles si joliment manucurés) ses oreilles à en saigner tais-toi tais-toi tais-toi tais-toi tu n'es pas là et je n'entends pas mais ton rire lui semble pourtant si doux si gracieux qu'elle t'en croirait presque réellement amoureux (mais ça te rendrait sûrement trop humain) quand tu n'es qu'un moins que rien.

(et) elle ne peut se contenir (il faut tout détruire) pour mieux tout rebâtir ; dégager de ses mains frêles dans un mouvement de rage (une plainte de souffrance s'étouffant dans ses poumons) toutes les affaires sur son bureau qui s'envolent s'étalent s'écrasent (saisir le tissu de son oreiller pour mieux le déchirer) renverser la commode pourtant si bien rangée



et j'ai mal
si mal
si mal
si mal
que je n'arrive plus
à le sentir
je crois bien
qu'à force de tout briser
j'ai commencé à
m  o  u   r   i   r

(ça) lui fait peur si tu savais icare comme ça l'effraie de devenir vide (et elle ne fait que s'en rapprocher à chaque ouragan qui se déclenche) qui laisse derrière une plaie toujours plus creuse et béante (qu'elle en vient à taper dans le miroir sur le mur) les éclats de verre qui s'effritent par terre enjolivés par les perles carmines qui y glissent.



elle n'est que
p e r s é p h o n e
coincée dans les enfers
de ses démons qui
l ' e m p r i s o n n e n t