Le monde est petit, cousine [PV Emily Baker]

Parce que tu es toujours en train de rêver éveillé, tu ne fis pas attention à l'endroit où tu étais. Et lorsque tu sortis enfin de ta bulle, tu réalisas trop tard que tu n'étais pas chez les E.. mais chez les A et les B, leur territoire. Et tu te sens quelque peu en danger. Tu te demandes ce qui va te tomber dessus dans une minute ou l'autre. Tu espères que ta mort sera de courte durée, même si tu sais que les A aiment faire durer le spectacle. Pourquoi se priveraient-ils d'un amusement ci tôt le matin. 

Le visage encore endormi, tu te demandes bien comment tu es arrivé là. Le café de ce matin n'a servi à rien on dirait. Pire, tu te sens nauséeux. Le café, tu n'aimes pas, trop amer, mais il ne restait plus que ça dans la cuisine. Tu ne fis fine bouche et bus d'une traite ce liquide noir. 

Tu lèves alors la tête, essayant de savoir où tu te trouves exactement. Un escalier, ce serait bien qu'il y ait un escalier tout près pour redescendre au plus vite au premier étage. Tu te sens plus en sécurité là-bas. Même si les E sont des brutes, on ne se frappe pas entre nous. Enfin, ça dépend des jours et des humeurs de chacun. Tu regardes à droite, à gauche, mais tu  ne vois rien, à part des portes de classes closes... et les minutes passent. Tu déglutis difficilement. Mon DIEU mais POURQUOI es-tu aussi maladroit et flegmatique ? Bouge tes fesses Austin ! Cours, fais quelque chose au lieu de rester planter là au milieu d'un couloir à attendre je ne sais quoi. Tu veux qu'ILS te trouvent ? Mais tu ne sais pas vraiment OU aller et puis ton ventre te fait mal. Foutu café ! Le couloir dans lequel tu te trouves semble sans fin. Et tu es tellement bête, que tu ne sais même plus par quel chemin tu es venu, ni quel escalier tu as emprunté pour te retrouver ici. Le sens de l'orientation et toi n'êtes pas très amis. La prochaine fois, tu feras comme le petit poucet, tu sèmeras des bouts de pain pour retourner sur tes pas.

En attendant, te voilà coincé.

Tu passes une main dans tes cheveux poisseux. Tu soupires. Une fois, deux fois. Tu n'y peux rien après tout. Ta stupidité t'a mené ici ou bien est-ce le destin ? Tu le découvriras bien assez tôt. Alors tu t'assoies par terre, en plein milieu du couloir, attendant tu ne sais quoi, peut-être dans l'espoir qu'une âme charitable vienne et t'aide.

Spoiler:

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Tu es là, par terre, te tenant le ventre. Tes instestins se tordent à cause de ce jus de chaussette, appelé café, que tu as bu ce matin. Tu as l'impression de mourir à petit feu, comme la viande que l'on fait macérérer plusieurs jours avant de la cuire puis de la manger ou encore ce ragout qui met des plombes à cuire. Tu penses alors aux bons petits plats que te mijotait ta mère dans ton enfance. C'est drôle, c'est bien la première fois que tu penses à elle, à ta famille depuis que tu es arrivé à Prismver. Jamais eu de coup de blues, et tu es pourtant là, en train de te souvenir de mémorables repas partagés avec ta mère. Sans doute que ça se passe comme ça.. juste avant de mourir. Tu te demandes alors si quelqu'un, dans le monde, est déjà mort à cause du café ? Seras-tu le premier ? Ce serait pitoyable comme mort tout de même.

Tes pensées s'entrechoquent dans ta tête. Tu es bien trop occupé à te poser des questions stupides, que tu n'entends pas que quelqu'un approche. Des pas résonnent dans le couloir, de plus en plus proche. Ce n'est que lorsque tu vois une poussière roulée sur le sol à la vitesse grand V que tu t'aperçois que quelqu'un est là. Tu t'arrêtes de respirer, comme si cela pouvait te rendre invisible. Tu ne joues pas à cache chache pourtant. Tu n'es plus un enfant. Ta réaction est stupide et tu aimerais bien te cogner la tête plusieurs fois contre le mur, espérant que ta stupidité s'envole. Mais non. Ca ne marche pas comme ça. Ce  serait trop facile. Tu resteras donc imbécile, pour aujourd'hui tout du moins.

Tes yeux suivent la trajectoire de la poussière qui poursuit sa course dans le couloir. Tu la regardes s'éloigner, jusqu'à ce que la micro particule soit hors de ta portée de vue. Tu sens alors une étoffe toucher légèrement ton bras gauche. Tu ne comprends pas tout de suite ce qu'il se passe. Tournant alors la tête vers ta gauche, tu comprends qu'elle vient de s'assoir à côté de toi. Pourquoi, tu te demandes. Pourquoi venir près de toi, alors qu'elle aurait pu passer son chemin. Pourquoi. Tu n'es qu'un être méprisable aux yeux des élèves des autres classes. Ton ruban de couleur rouge indique que tu fais parti de la classe E. Tu es une vermine pour eux. Pourquoi traîner avec toi. Pourquoi laisser les autres étudiants voir que tu es avec lui. Ca ne fera qu'entacher sa réputation.

Tes yeux la scrutent, de haut en bas. Blonde. Petite. Ruban... bleue, une B ! Un casque autour de son cou. De la musique. Cela te fait sourire. On dirait toi mais en plus smart. Ton attention est distraite par le cri d'un professeur, une paire de talons martelant le sol. Tu n'aimerais pas être à la place de l'élève qui vient de se faire rouspéter. Tu n'aimes pas attirer l'attention sur toi. Et en classe encore moins. Passé cet épisode, tu reviens vers le visage de la jeune fille. Elle te rappelle quelqu'un. Elle te semble familière, mais tu n'arrives pas à te souvenir où tu aurais bien pu la rencontrer. C'est bizarre, ce sentiment de "déjà vu" qui t'envahit.

Tu ne devrais pas être en classe ? préfères-tu lui demander d'une voix neutre. Tu lui demanderas son nom plus tard. Mais... tu la dévisages. Ce n'est pas très poli, mais tu veux t'assurer d'une chose. C'est plus fort que toi. Tu ajoutes alors soudainement :

On se connait ? On ne se serait pas déjà vu quelque part ?

Ça t'ennuie de ne pas savoir. Ça t'énerve même.

Spoiler:

- C'est Emily, Austin. La petite fille dans la nuit

En entendant ce nom, tout revient en mémoire. Les souvenirs jaillissent de partout. Tu es assailli de toute part. Et tu es aspiré dans un tourbillon de souvenirs. Tu te revois, passer un ou deux étés chez des oncles et des tantes, mais leurs visages sont flous. Tu ne distingues rien. C'est comme si ton cerveau avait effacé tes souvenirs d'enfance. Ou plutôt, qu'il avait fait une sélection de souvenirs. C'est sans doute la raison pour laquelle tu n'avais pu reconnaître ta cousine, Emily, au premier coup d'oeil. Quel imbécile tu fais ! Tu aurais pu, tu aurais dû la reconnaître. Les étrangers, les élèves de Prismver que tu croises dans les couloirs, ça passe encore, mais oublier les membres de ta propre famille. Honte à toi !

Te voilà songeur. Tu te revois alors... il y a quelques étés de cela. Tu étais tout jeune et tout petit. Encore plus petit qu'aujourd'hui. Ton visage poupin a cependant laissé place à celui d'un adolescent disgracieux. Tu n'as pas d'acnées, heureusement, mais tu ne fais, dirons-nous, pas très propre. Tes cheveux sales. Ta mine blafarde. L'adolescence ne t'a pas épargné en fin de compte. Tout ça pour dire, que tu te souviens. Tu l'avais retrouvé, caché. Il faisait déjà nuit. Il était tard. Les adultes étaient paniqués. Tout le monde la cherchait. Et ce fut toi, Austin, qui la retrouva. Tu posas ta main sur son épaule et lui  demanda de t'accompagner. 
 
Retour à la réalité.

Tu jettes de nouveau un regard vers ta cousine. Emily. Baker. Emily. Oui, tu t'en rappelles désormais. Il faisait chaud cet été là. Tu étais parti rendre visite pour la première fois à une partie des Baker vivant en Australie. Et c'est là que tu l'as rencontré. La petite Emily. Elle était toute choupi, toute mignonette avec ses couettes et ses cheveux si blonds. Ils brillaient au soleil. Tu avais déjà compris, sans que les grands n'aient à te le dire, qu'elle était différente. Toi-même, tu te sentais exclu parfois de tes amis en Mongolie, parce que tu savais que tu étais différent d'eux. Mais cette différence était encore quelque chose d'autre chez Emily. Oui. Car autiste, elle était, car autiste elle est. Un sourire alors illumine ton visage. Tu l'as toujours eu en affection. C'est une des seules de la famille qui ne juge pas. Et pour ça, tu l'aimes bien.

Malheureusement, tous deux avaient perdu contact. Tout du moins, les voyages en Australie étaient limités. Seuls des coups de téléphone ou des lettres permettaient aux deux familles de rester en contact. Sauf qu'Emily et Austin étaient jeunes à cette époque. C'est pour ça, que tu n'as jamais eu de relation proche avec ta cousine. 

- Emily, oui, je me souviens désormais. Ca fait un bail... ! tu réponds. Tu es gêné, tu te sens bête. Comment cela se fait-il que tu n'aies jamais su auparavant que ta cousine était aussi à Primvers ? Tu aurais dû demander à tes parents. Tu ne te souviens même plus s'ils te l'avaient mentionné. T'es bête, bête, bête.

Tu murmures alors, honteux

- Je... je ne savais pas que tu étais ici

Tes yeux sont rivés sur le sol. Tu n'oses pas la regarder en face. Tu t'y essaies cependant. Il te semble qu'elle est dans son monde. Ça ne te dérange pas. Tu essaies de sourire. Un peu. Comme pour l'encourager à te regarder, à te parler, à s'accrocher au monde réel. 

- Je suis content en tout cas de te voir, dis-tu très sincèrement

Tu aimerais bien savoir ce qu'elle a fait jusqu'à aujourd'hui, comment elle s'est retrouvée à Prismver, mais tu préfères lui laisser prendre son temps. Ne pas précipiter les choses. Tu n'es pas pressé et ta cousine ne le semble pas non plus.

T'es là, tu la regardes. Tu te demandes si elle t'écoute. Tu ne le sais pas. C'est difficile de savoir. Mais elle finit par te répondre. Ça t'encourage à lui parler davantage.

- Moi aussi

Sa voix ne semble pas exprimer d'émotions. On dirait que ça ne lui fait pas grand chose de te revoir. En même temps ils ne s'étaient pas vu depuis des années, ni parlés d'ailleurs, alors ça ne te blesse pas plus que ça. Et puis ce n'est pas comme si elle le faisait exprès. Tu te demandes ce qu'Emily a enduré. Ce qu'elle endure encore aujourd'hui. Le regard des autres. Leur incompréhension. Parfois ils prennent peur.

- Tu veux bien m'aider, j'ai une vilaine tache dans le couloir à nettoyer.

Sa demande te surprend, mais tu es content. Une première activité ensemble. Vous n'avez jamais fait ça. Tu prends alors sa main tendue et tu te lèves, t'appuyant avec ton autre main sur le sol pour te donner un peu d'élan et d'énergie. Hop, te voilà debout. Tu remarques que tu la dépasses d'une ou deux têtes. Tu n'es pas vraiment grand, c'est la honte pour un garçon. Tu ne mesures qu'un mètre soixante dix. La plupart des filles te dépassent et te traitent de nabot, mais ça te passe au-dessus de la tête tous ces préjugés et cette norme sur le fait qu'un garçon doit être grand. Et puis tu n'es pas intéressé de toute manière à nouer des relations plus qu'amicales avec les filles. Au fond, Emily et Austin se ressemblent bien plus qu'on pourrait le croire. Tous les deux, à leur manière, sont un peu coupés du monde et des autres. Tu n'es pas très porté sur les relations sociales. Tu te contentes simplement de les cotoyer. Tu es au milieu, silencieux, mais tu ne participes pas à leur conversation. Tu préfères ta musique à la compagnie d'autres êtres humains. Enfermé dans ta bulle tu attends seulement que quelqu'un t'adresse la parole.

Tu reportes ton attention sur ta cousine. Tu lui souris et lui dis :

- C'est parti alors !

Regardant à droite à gauche, te demandant où peut bien se trouver cette tâche. Tu ne sais pas où te diriger, alors tu attends qu'Emily t'y emmène.

Spoiler:

We build bridges so that we can connect our stories. So let's discuss for a while

- Je suis en en 3ème années chez les B, j'ai 14 ans et mon pouvoir c'est de...

Quartoze ans, huh. Au premier abord, tu avais cru qu'elle était plus jeune, sans doute douze ou treize ans. Ce doit être ces grands yeux bleus qui t'ont eu. Grands, comme des billes. Et puis cette petite taille. Tu n'avais jamais vraiment prêté attention aux filles, tu te les étais imaginé plus grande à cette âge là. Peut-être est-ce le cas, ou pas. Et puis ce visage poupin. Enfin bref, quatorze ans quoi. Trois ans de différence avec toi. 

- J'ai crée un monde dans le qu'elle je peux faire ce que je veux, par exemple j'ai pu sortir tout ça juste en me les représentant dans mon monde et je suis aller les cherchera, c'est la même chose pour mes émotions elle sorte de mon monde sous divers forme, mais uniquement lorsque je n'arrive plus à me contrôler.

Elle est stylée. Ouais, c'est décidé, tu la trouves stylée ta cousine. Tu es impressionnée par son don. Réussir à... à rendre des objets venant de son imaginaire réels, chapeu bas. Vraiment. A côté, ton pouvoir fait de la peine. Allez, va te rhabiller le plouc ! Tu pues la loositude. Car oui, il faut bien le dire, cette lettre qui désigne ton niveau, ta classe, représente bien plus que tu ne le pensais. Certains d'entre vous n'arriveront jamais à contrôler leur don. Ceux de la D et de la E par exemple. D'autres sont tellement bêtes comme leurs pieds qu'ils n'accompliront jamais grand chose dans leur vie. Qu'ils sachent s'habiller correctement et lasser leurs chaussures relève du miracle. Tu te demandes si tu appartiens à cette catégorie. Ca te fait de la peine rien que d'y penser. Au final, tu réalises que vous êtes inégaux. Les gens naissent inégaux dans la vie. Tu t'étais berçé dans l'illusion qu'une simple lettre de l'alphabet ne représentait pas ton être, ton caractère, toi en somme, ce que tu vaux vraiment; tu avais toujours gardé espoir que ça ne signifiait pas grand chose. Mais lorsque l'on regarde la réalité, c'est foutaise. La vie est une grande blague et tu commences à t'en rendre compte aujourd'hui.

Tu essaies tout de même de garder la face. Tu fais mine d'aller bien, même si au fond de toi, c'est la déprime. Looser, looser, voilà ce que tu te répètes en boucle dans ta tête. Tu essaies cependant d'y faire abstraction, de te concentrer sur cette foutue tâche qui semble de toutes ses forces bien s'accrocher au sol. FHEKBNQOERUI ! Tu en as marre, dépité. Tu lâches l'éponge. Ta main, trempée, tu te l'essuies contre la cuisse, puis tu t'adosses contre le mur du couloir. Tu te passes un instant la main sur le visage, frottant tes yeux avec plus ou moins d'insistance. Ils commencent à te faire mal. Les revers de ce don. Tu bailles un court instant, ayant très peu dormi cette nuit. Repoussant alors quelques mèches derrière tes oreilles, tu lui poses une question

- Et sinon, ça se passe bien ici, à Prismver ? Les professeurs, les cours... les élèves, tu détaches ce mot des autres.Tu t’inquiètes tout de même de savoir si des élèves l'embêtent. Si c'était le cas, tu irais leur parler. Enfin, si le dialogue était possible, bien sûr. Ton plan serait sans doute celui de les stalker pour connaître leurs habitudes, leur pouvoir, avant de te lancer. Si tu tombais sur un casse-cou, emmerdeur de première et qui plus est costaud, tu réglerais l'histoire.. par LMS. Ce bon vieux service de message par lézard. Dans le cas contraire, eh bien, tu irais directement voir la personne en question.

Tu portes un regard attendri sur ta cousine. Tu lui souris. Cela te semble si lointain le temps où tu courais pour l'attraper, où tu mangeais une bonne tarte aux prunes faite par ta tante. Ça t'intrigue de connaître son histoire.

- Au fait, comment vont tes parents ? Je ne les ai pas revu depuis... ,tu essaies de te souvenir, depuis cette nuit-là. Tu parles de la nuit où tu l'as retrouvée, seule, recroquevillée sur elle-même alors toute la famille la cherchait. Tu continues : les miens habitent toujours en Mongolie, ils mènent une vie tranquille à vrai dire, éloignés des grandes agglomérations...