<Reel> I hate that I love you

Haine. Haine. Haine.

Ses talons claquent sur le sol et résonnent dans tout l'édifice. Elle a la démarche pleine de fierté, torturée par la haine et la colère. Ses yeux luisent d'une lueur macabre mais son visage est inexpressif. Ulysse est en retard, elle l'a fait exprès. Il ne mérite pas qu'elle soit ponctuelle. En plus elle a mit du temps pour se préparer. Juste pour lui.

Ulysse a toujours été une jeune femme distinguée aux tenues plus que vieillotte et à la coupe sage des jeunes filles de bonne famille. Elle l'a toujours été certes mais, pas ce soir. Ce soir Ulysse a la crinière sauvage et des talons hauts. Jupe en cuir – courte moulante et haut bustier noir. Ulysse rayonne sous l'ombre de la nuit. Même son maquillage est différent, adieu le rouge à lèvre rouge vermeille bonjour le noir discret sur les yeux. Jamais personne ne l'avait vu habillé comme ça... aussi sexy. Jamais. Même en soirée elle ne s'habille pas de la sorte. Elle n'a jamais eu besoin de se mettre en avant de cette manière mais ce soir elle avait envie de plaire, envie de plaire au point qu'il en crève la gueule ouverte comme le petit con qu'il est.

Haine. Haine. Haine.

Ulysse s'avance. Le toise. Ses yeux suintent le mépris. Rose à la main, elle s'arrête devant lui. Pas un sourire, pas une expression de travers juste des yeux rouges crachant du feu en direction de ses mirettes émeraudes. Désolée du retard. Pause. Où allons nous Ackland ? Elle accentue bien son prénom, allant presque jusqu'à marquer chaque syllabe histoire qu'il comprenne bien le message. Tant de sentiments à son égards...

Haine. Haine. Amour. Haine.

Ulysse se retient de sourire. La satisfaction lui prend les tripes. Fière, séduisante, sexy. Ulysse fait mine d'ignorer son visage dégoulinant d'envie à son égard. Elle le savait, elle en était sûre. Heath est comme tout les autres il marche au pantalon. Ulysse plisse les yeux et le toise de haut en bas. Pas un effort de son côté. Déception. Elle aurait au moins aimé un petit effort mais un baggy.. ? Elle hausse un sourcil. Finalement c'est mieux d'aller s'enfoncer dans la noirceur des passages secrets. Au moins personne ne serait en mesure de la voir avec .. Lui. Soupire. Déjà que les rumeurs vont bon train. Qu'est ce que ce sera quand les autres découvriront l'état de leur salle de classe demain. Pincement au cœur. Ulysse ne le quitte pas des yeux. Tout ça à cause de lui.

Heeeee. On va marcher. D’vrait y avoir une salle sympa par là-bas. 
Je te suis.

Et elle lui emboite le pas. Se plonge dans ses pensées. Ulysse se sent mal, elle se sent moche. Même dans cette tenue elle se sent détestable pour le carnage qu'Entropy a provoqué dans sa salle de classe. Et si ses parents sont au courant ? Mon dieu ça marque la fin de sa vie ici. Raison de plus pour lui faire payer pendant qu'il en est encore temps. J’suis étonné que t’ai accepté. Elle aussi.

Soupire, son regard glisse dans son cou, remonte le long de son menton et se fixe sur sa bouche. Une seconde, puis deux, puis trois. Mordillant sa lèvre inférieure elle s'arrange pour marcher proche de lui, peut-être trop, leur épaule se frôlants. Je suis étonnée que tu me l'ais proposé. Elle se racle la gorge et détourne – difficilement – le regard. Que tu ais eu .. le culot monstre de me le proposer après.. Et merde. Ulysse sert les poings. Son regard se glisse par terre à l'opposé d'Heath. Sourcils froncés. La colère remonte, la déception aussi. Tant pis pour le romantisme. Tant pis pour son plan bien ficelé. Ulysse s'arrête. Ulysse le regarde, crispée.

Comment t'as pu laisser faire ça Heath... Et le dire à haute voix ça n'arrange rien. C'est pire même. Souffle, émotion. Mince elle a l'air si fragile. Et elle se déteste encore plus pour ça. .. C'était une mauvaise idée de venir... On devrait s'en tenir à ce que t'as dis ce soir là. On s'parle pas, on s'regarde pas. Parce que quand je te regarde j'ai juste envie de t'embrasser. Et ça me fout les boules parce que je devrais pas être amoureuse de mon bourreau. Rougit Ulysse.

J'te déteste Heath.

Dernier regard et elle fait demi tour. Femme de petite volonté. C'est pas digne d'elle mais elle peut juste pas faire autrement. Ya des limites à la malhonnêteté. Et elle marche vite, ses talons claquent par terre. Et elle tourne à gauche à droite, elle sait pas. Elle a aucune idée de l'endroit où elle va. Paumée. Aussi bien dans son cœur que en dehors. Mince pourquoi ça pue ? Coup d'oeil autour d'elle. C'est quoi cet endroit immonde ? Il manquait plus que ça... Les égouts. Là où vont les ordures. Les ordures comme Ulysse.

C'est le gouffre. Il fait froid, ça pue et en plus il a réussi à la suivre. Elle aurait préférée être seule. Mourir avec sa honte de s'être déclarée à lui. Quelle idiote. Quelle gamine. Elle se reconnaît plus. C'est pour ça qu'elle refuse de s'impliquer parce que dès qu'elle commence à le faire elle devient faible et la faiblesse c'est son pire cauchemar. Fanì... Arrête, j’connais plus par là...

Ses poings se serrent elle déteste quand il l'appelle par son prénom. Personne l'appelle comme ça habituellement. Personne. On l'appelle Ulysse, Bitch, Kopulos, Kopulons mais jamais Faní. Faní c'est bien trop personnel.. Elle détourne le regard parce qu'elle a pas la force de le soutenir et se maudit intérieurement. Son regard glisse sur sa tenue. Et dire qu'elle s'était faite belle juste pour lui, juste pour lui en faire baver. Elle est où la forte et fière Ulysse ?

Viens... Fallait tourner à droite un moment, pas à gauche... Viens on va r’trouver où c’est... 

Et il dit ça avec tendresse, gentillesse et Ulysse ça la bouffe encore plus parce qu'elle aurait voulu qu'il l'engueule. Elle aurait voulu qu'il la laisse se débrouiller toute seule parce que c'est à elle de se sortir de sa merde. Mais non. Il est là. Malgré tout il est toujours là.

L'un à côté de l'autre ils marchent sans but précis. Ils tournent en rond. Et au fur et à mesure qu'ils avancent et qu'ils se perdent Ulysse se sent de plus en plus coupable et conne. Oh oui vraiment très conne. Elle lui adresse pas un regard, elle se contente de marcher la tête légèrement baissée. Et son cœur bat la chamade. Ça cogne très fort. Ça cogne trop fort. C'est atroce de dépendre autant d'un simple battement de cœur. Un de trop et c'est l'amour, un en moins et c'est la mort. Fais moi l'amour j'te fais la mort. Oui Ulysse on le voit. On le voit très bien...

Situation plus que gênante et dérangeante. Son seul soutient réside en la rose qu'elle a gardé entre ses mains comme impossible de s'en défaire malgré tout ça. Alors elle la porte à son nez hume le parfum et la fait tourner entre ses doigts. Elle touche une à une les épines parfois plus violemment que d'autres mais après tout – tout les moyens sont bons pour oublier Heath. Pour oublier qu'elle s'est déclarée à un mec qu'elle supporte pas et oublier le fait qu'il n'ait donné aucune réponse aussi. Oublier la honte d'exposer encore une fois ses sentiments et de se faire remballer encore une fois. Alors quoi il pensait pas un seul des mots qu'il avait prononcé ? J'te veux Ulysse. Conneries. Soupire long coupant court à un silence gênant.

Ulysse se demande pourquoi elle s'inquiète du sort de ce mec après tout. Elle se demande pourquoi elle devrait se mettre dans cet état là quand visiblement lui, il n'en a rien à faire. Et ça lui rappelle l'époque de son premier amour et la promesse qu'elle s'était faite de ne plus jamais être honnête pour ne plus jamais tomber dans le panneau. Et visiblement elle l'avait oublié.

Alors elle relève la tête parce qu'oublier ne veut pas dire perdre et qu'elle n'a certainement pas perdue qui elle était vraiment et ses convictions – aussi mauvaises soient-elles ; A savoir celle d'une bitch.

Et une Joyeuse Saint Valentin. La voix est faible, le ton est cynique. Ulysse s'humecte les lèvres et se permet de le regarder dans les yeux. Du moins elle essaye.

Boom. La seule fille qui me fait de l'effet. Ulysse sert la rose encore plus entre ses doigts et se concentre pour regarder droit devant elle. Elle ignore ce battement de cœur trop présent, elle ignore le fait qu'il résonne peut-être dans tout l'égout tellement il bat fort. Et surtout elle l'ignore lui. Mon dieu mais comment peut-il la faire changer d'avis quand a ses décisions en à peine un quart de seconde ? Soupire.

Et il s'arrête, sort une bouteille de bière la décapsule et le lui tend. Une seconde de battement. Ulysse l'attrape et ignore son petit sourire en coin. Elle la fixe quelque seconde ça lui rappelle leur première soirée et à quel point la bière avait été dégueulasse. Ulysse a toujours été une fille à cocktail. Les bières c'est vraiment bas de gamme pour une fille comme elle. Alors elle soupire et garde sa bière en main tandis que ses yeux se glissent sur son tapis de fortune. Et elle s'approche sans un mot pour s’asseoir proprement. Mains sur les cuisses bière posée à côté d'elle. Ulysse regarde devant elle et se tient droite.

Tu sais.. T'auras beau être méprisante avec moi.. J'suis assez persuadé que j'suis l'un des rares à savoir qu'au fond, t'es pas si mauvaise que ce que tu veux montrer. Ulysse fronce les sourcils. Pour qui se prend t'il ? Elle l'aurait bien démolie sur place si au fond elle ne savait pas qu'il avait raison. … Et moi j'suis loin d'être le connard que je suis avec toi.

Tique. Intéressant. Ulysse ressent une pointe de malaise. Alors tout ce qu'elle obtient en étant comme ça c'est d'attirer les connards comme des mouches. Comme c'est plaisant de se rendre compte que malgré tout ce qu'elle a traversé, malgré toute son entropie pour devenir une fille sans cœur elle en a encore un et qu'en plus il est attiré par les connards. Soupire.

... On pourrait peut-être essayer d’être nous même. Pour commencer.
Compte la dessus et bois de l'eau fraiche Heath...

Directe. Ulysse fronce encore plus les sourcils et se mordille l'intérieur de la lèvre en un cul de poule bien distinctif. Et voilà qu'elle vient encore une fois de gâcher ses chances et voilà qu'elle redevient la bitch qu'elle a toujours été. Toujours ? Peut-être pas.

Mmh désolée... Et elle soupire avant de ramener ses jambes à son cou. Ça remonte un peu sa jupe mais elle s'en fou. Personne n'est là pour la voir de toute façon. Sa tête se pose sur ses genoux et elle glisse son regard rubis sur Heath. Inspiration.

J'aimerais bien mais c'est juste que je ne sais pas qui je suis. Je veux dire j'ai tellement de masques, tellement de couches pour me protéger que je sais pas où s'arrête et commence la vraie moi. Murmure parce qu'elle a encore du mal à être honnête à voix haute. D'habitude les seules moments où elle a une attitude qui se rapproche de l'honnêteté c'est quand elle transmet. Donc c'est bien dur de tout dire à haute voix. Ça la perturbe et elle se sent vulnérable. Alors elle resserre ses jambes contre sa poitrine. Son regard le quitte pour se perdre dans l'ombre des égouts.

Avant je savais. Quand j'étais petite, j'étais pas comme ça.. si sérieuse et pète sec. J'étais même un vrai garçon manqué. C'est juste qu'après mon … Déglutit.

Et ça lui fait bizarre de le dire à haute voix, parce qu'elle en a jamais parlé à personne. Parce que même Crystal n'est pas au courant. Et pourtant elle a le cœur au bord des lèvres, elle a une folle envie de le dire. Parce que ça pèse sur son âme et ce encore plus après l'avoir à peine évoqué à l'instant. Traumatisme.

… Mon enlèvement, mes parents ont décidés de me couper du monde extérieur et je crois que c'est là que je me suis un peu perdue. Sourire en coin. Voilà qui je suis Heath... une paumée. Une pause. Satisfait ?
Et perdue pour perdue autant l'être jusqu'au bout. Ulysse se penche un peu et tend la main pour attraper la bière. Elle porte le goulot à ses lèvres et avale une bonne gorgée. Son visage se crispe c'est vraiment pas son truc mais puisqu'elle a que ça sous la main autant faire comme tout le monde : boire pour oublier.

omg mes feeeelz ptin jtm trow.

Elle ferme les yeux et ignore complètement sa pitié. C'est pour ça qu'elle en parle parce que dès qu'elle ne se place plus comme une reine Ulysse a l'impression d'être une victime et c'est trop dur. Trop compliqué d'être une faible. Soupire. Elle ferme les yeux et porte de nouveau la bière à ses lèvres, la deuxième fois c'est bien meilleur, étonnant. Ulysse préfère se concentrer sur sa bière que sur ses mots. Parce que ça lui fait peur de s'exposer et la gentillesse ça la met mal à l'aise. Surtout venant de la part d'un connard comme Heath. Un si séduisant connard...

T'as le droit d'en parler, Fani. Personne ne peut être un colosse insensible. Même Drew confie ses démons et pleure.

Elle elle peut. Du moins elle pouvait, elle pensait naïvement pouvoir l'être et elle l'aurait été si Heath n'était pas rentré dans sa vie ce soir là. Le soir où tout a commencé. Quand elle y réfléchit bien elle est presque sûre qu'elle avait déjà commencé à l'apprécier à l'époque.. qu'elle était prisonnière de ses yeux verts sans le savoir. Frustrée jusqu'au bout des ongles, elle avait commencé à le taquiner puis à le détester mais c'était pas comme avec Jim. Il y avait toujours une envie de revenir, de recommencer, de lui reparler. Et parfois leur discussion étaient polies, courtoises et agréables. Et elle chérissait ces moments là. Elle les chéri toujours d'ailleurs. Des moments simples comme maintenant où les masques tombent ou il ne reste plus qu'elle et lui, deux âmes magnétiques.

Je ne vais pas changer d'attitude avec toi à cause de ça. Je ne vais pas te prendre en pitié, et je ne vais pas te considérer comme une faible. Parce que t'es loin de l'être.

Sourire. Ulysse s'autorise un regard dans sa direction parce que c'est absolument ce qu'elle recherche. Elle ne veut pas de traitement de faveur – rien de tout ça. Elle ne veut pas se sentir plus faible qu'elle ne l'est déjà et si Heath est capable de comprendre ça c'est qu'au fond il n'est pas si mauvais. Mais ça elle le sait déjà, Ulysse. Une nouvelle gorgée son sourire discret ne s'efface pas, il s'agrandit même au fur et à mesure qu'il continue sa tirade.

Et je m’excuse de me comporter en connard avec toi. Parce-que moi j’ai pas de raison valable. Je cherche pas à me protéger ou quoi que ce soit.

Et Ulysse décroise les jambes et se glisse à côté de lui, lentement sournoisement. Sourire en coin elle pose naïvement sa tête sur son épaule. Oui Ulysse peut-être tendre aussi. Elle a le cœur d'une jeune fille après tout. Aussi noir soit il.
Arrêtes de t'excuser Heath, ça m'agace. J'ai toujours eu un faible pour les connards de toute façon.

Et elle se mordille la lèvre, baisse les yeux et efface le sourire de ses lèvres. Réminiscence de sa petite déclaration de tout à l'heure. Il avait pas répondu. Il était si contradictoire avec elle qu'elle en était totalement perdue. D'un côté il la veut de l'autre quand il l'a il la veut plus.. alors quoi. Il se moque d'elle, il se joue de sa vulnérabilité ? Est-ce qu'il se sent puissant de la mettre dans des états pareils ? Ulysse se crispe.

... J'te comprend pas tu sais. D'un côté tu me dis que tu me veux, que je suis la seule fille qui te fait de l'effet, mais quand je t'embrasse tu me repousses, tu me demandes de ne plus t'approcher... et le pire c'est quand je le fais tu m'envois un lms pour t'en plaindre...

Tu parles trop Ulysse, ferme là. Et elle détourne le visage regarde ailleurs à l'opposé parce qu'elle se sent rouge. Les discussions à cœur ouvert c'est vraiment pas son truc.

bem bem love.

Son cœur va exploser. Et c'est à la fois très agréable mais très effrayant. Alors elle souffle pour évacuer le trop de sentiments et essaye vainement de se concentrer sur autre chose. Mais Heath tourne la tête vers elle et elle ne peut s'empêcher de faire de même comme happé par ses yeux. Elle déglutit, se sent rouge. Franchement c'est d'un ridicule. Ils sont ridicules.

Et il ouvre la bouche pendu à ses yeux. Il parle, il s'explique et Ulysse écoute sans broncher. Tu veux pas réellement être avec moi... Soupire. Ulysse est une paumée elle lui a déjà dit, ce genre de question c'est pas un truc auquel elle réfléchit. Elle évite même d'y penser pour se concentrer sur autres choses. Les cours, la boxe, les fringues. Matérielle superficielle. Complètement paumée dans un océan de sentiments, Ulysse se noie. … Maintenant.. Si tu me dis que je me trompe.. J'arrêterai de te repousser.

Figée, crispée. La balle est entre ses mains et ça c'est la pire chose qu'il pouvait lui arriver. Parce qu'elle sait pas. Elle réfléchit en un quart de seconde, se perd dans ses yeux, affolée, perdue. Et elle fait le passe passe d'une iris à une autre. Son cœur bat trop fort. La bouche entre ouverte un son approximatif s'en échappe. Mordillement, torture. Les joues rosies par la gène Ulysse inspire pendant longtemps. Arrête de réfléchir et lance toi Ulysse.

Je sais pas si je veux être avec toi Heath.

Murmure, vérité tranchante. Elle soutient son regard lâche pas prise parce que si elle arrête une seconde de le regarder elle va se refermer sur elle-même elle le sait.

Tout ce que je sais c'est que qu'importe qui j'embrasse, qu'importe avec qui je fais l'amour, c'est toujours à toi que je pense au final.

Sauf quand elle fait l'amour à Raoul, parce que quand elle le fait, elle ne pense plus à rien. Et c'est aussi principalement pour ça qu'elle le fait, qu'elle s'accroche à Raoul. Parce qu'il lui offre des moments de répit. Des moments où elle ne pense plus à Lui – même pas un tout petit peu, puisqu'elle est amnésique. La phrase reste en suspend une seconde, voir deux, voir trois. C'est une vérité inavouable mais qu'elle a avoué quand même parce qu'elle est lancé et que rien ne peut plus l'arrêter.

Mais... Et oui il y'a toujours un mais quelque part. Une petite tâche sur le tableau du bonheur idyllique. Une tâche réconfortante pour une personne comme Ulysse qui ne supporte pas les tableaux trop blanc qui ne supporte pas la perfection – quand elle même cherche par tout les moyens à s'en rapprocher. Ça m'ennuie de mettre une étiquette sur notre relation.

Ulysse plisse les yeux. Sert ses poings et s'apprête à s'élancer dans le vide.

Parce que j'ai pas besoin d'avoir le mot petit ami affiché au dessus de ta tête pour te dire que je t'aime Heath.

Et voilà. Ulysse est tombée. Ulysse est en chute libre et elle attend les mots qui la feront se crasher au sol. Et elle se prépare mentalement. Son regard ne cille pas, elle n'a pas honte, elle n'a pas peur parce qu'elle l'assume. Ses yeux luisent intensément et sa mine est diablement assurée. Oui c'est la vérité : elle l'aime, il était peut-être temps d'arrêter de se voiler la face même si elle sait pertinemment que ce n'est pas réciproque.

POW OVARIIIES.

Ulysse ne détourne pas les yeux, elle est bloqué comme un arrêt sur image. Elle a l'impression que si elle bouge elle va tomber. En équilibre au dessus d'un précipice. Oh bien sûr elle est déjà tombé, tombé amoureuse de Heath mais entre le ressentir et le dire il y a une très grande différence.
Et il l'observe avec ses yeux bouteilles. Ulysse est soûle. Soûle de ses yeux. Bourrée d'amour. Et elle l'observe aussi cherche une lueur dans son regard mais tout ce qu'elle voit c'est le vide. Et ça l'inquiète, ça la stresse. Le suspens est insoutenable et Ulysse attend qu'il ouvre enfin la bouche. Ulysse se retient presque de respirer. Mais son cœur tambourine et il a besoin d'oxygène. Ses mains se crispent. Elle se mordille la lèvre nerveusement.

Sors avec moi.

Explosion. Elle des frissons qui lui parcoure l'échine sans s'arrêter et c'est le rouge qui lui monte aux joues encore et encore. Elle écarquille les yeux, ouvre la bouche mais aucun son de sort. Et il enchaine sa tirade tandis qu'Ulysse reste pendu à ses lèvres. Et plus il parle plus elle se rend compte qu'il a la même vision qu'elle, qu'il pense comme elle. Et au fond ça la rassure. Et c'est le bonheur qui se lit dans ses yeux tandis qu'elle desserre lentement ses mains. Ulysse ressent en cet instant. Elle ressent beaucoup de choses et ça ne lui arrive pas souvent. D'habitude pour ressentir comme ça elle se met en danger ou elle enfreint les règles. Et le simple fait de fumer ça la rend heureuse et vivante. Mais ce n'est rien comparé à ça. Comparé aux mots d'Heath.

Et Ulysse sent l'émotion lui prendre les tripes et elle sent ses yeux devenir humides. Aussitôt elle détourne le regard parce que pleurer pour de simples mots c'est dégoulinant de conneries et de niaiseries et qu'elle supporte pas ça Ulysse. Alors elle observe le sol et souffle, souffle, souffle longuement.

J'me met très rarement en couple, et quand je le fais, c'est que c'est ce que je veux.

Inspiration, expiration. Et Ulysse pense. Elle se plonge dans ses pensées parce qu'encore une fois la balle est entre ses mains et ce qu'il lui demande c'est pas n'importe quoi. Il lui demande d'être un couple. Même si ils ne répondront pas forcément aux normes du couple lambda et qu'ils passeront sûrement plus de temps à se cracher dessus qu'à s'aimer ça ne change rien au fait que si elle dit oui, à partir de maintenant ils sont deux. Et Ulysse se pose pleins de questions. C'est quoi être à deux, ça va donner quoi sur le long terme ? Et si il la trompe comme son dernier copain ? Et si finalement il se rend compte qu'elle est trop pourrie ? Et si la haine prend le dessus ?

Et il y'a Entropy aussi qui rentre en ligne de mire. Le fait qu'il soit le chef de cette organisation fait de lui l'ennemi numéro un des A. Et si on apprenait qu'elle sortait avec un E sa réputation en prendrait un coup et qu'est ce qu'elle est Ulysse sans sa réputation hein? Il y a encore quelques heures elle aurait dit : rien du tout. Mais maintenant tout est différent et qu'importe comment elle voit l'avenir y'a toujours Heath à ses côtés. Soupire. N'a t'elle pas toujours dit qu'elle préférait les marginaux aux gens ordinaires ? Qu'y a t'il de plus marginal que le chef d'Entropy ? Sourire.

Ses yeux se posent de nouveau sur Heath. Elle se tient droite et hausse la tête. Ses yeux luisent, ses joues sont roses, ses lèvres sont souriantes. Rayonnante d'amour. Elle passe sa langue derrière ses dents et inspire.

Je sais pas si tu t'en rends compte que tu es entrain de me proposer de sortir avec toi dans un égout Heath. Une pause, elle émet un léger rire. Mais pas un rire méprisant, juste un rire. Franchement je me demande quelle genre de relation on va avoir si celle ci débute dans le lieu le plus pourri de l'ile...

Et elle se penche un peu. Son visage se rapproche du sien lentement. Ses yeux détaille son visage, de ses yeux à son nez jusqu'à sa bouche sur laquelle elle s'attarde un peu avant de s'humecter les lèvres. Elle a envie de l'embrasser là tout de suite mais se retient. Et son regard retombe dans le sien. Mais bon je suppose qu'une fois qu'on a touché le fond on ne peut que remonter.. et moi, personnellement, j'aimerais bien remonter avec toi.

Et elle s'approche encore. Son souffle se mêle au sien. Joueuse, tentatrice, Ulysse. Elle murmure au creux de ses lèvres. Donc oui, mon cher je vais sortir avec toi.

Son nez frôle le sien, ils se caressent dans un geste tendre et Ulysse s'empare de ses lèvres. La sensation lui avait manqué. Tellement manqué. Est ce que c'était pareil de son côté ? Sa main se pose sur sa joue, qu'elle caresse avec son pouce affectueusement. Ulysse n'est jamais tendre, Ulysse est brutale, sûre d'elle. Mais là c'est différent. Parce que ce sont les lèvres de son copain qu'elle goutte. Alors elle s'abandonne. Laisse tomber les masques et se met à nue. C'est difficile d'exprimer ça dans un baiser mais elle a tellement de papillon dans le ventre quand elle l'embrasse qu'elle sait qu'elle a bien fait de lui dire oui. Parce qu'Ulysse pense à elle avant tout. Alors elle ne va certainement pas s’interdire d'être heureuse. Ulysse mordille sa lèvre inférieure avant de couper court à ce baiser enflammé qui marque le commencement de leur histoire à deux.

.

Fantôme d'un baiser. Sensation sur les lèvres Ulysse se mordille. Ça lui manque déjà. Et c'est fou. C'est fou de ressentir ça, c'est fou d'être si dépendante de ses baisers alors que c'est seulement le troisième échangés en 2 ans. Ulysse sourit, elle n'arrive pas à s'arrêter et c'est pareil pour lui. Il sourit et Ulysse ça lui fait plaisir de voir ça. Parce qu’égoïstement elle s'en attribue un peu le mérite. Et oui Ulysse reste fidèle à elle même même en période d'amour.

Et elle quitte son regard pour aller aussi s'appuyer contre le mur. Ses jambes s'étirent et elle pose ses mains sur sa jupe en cuir. Sourire. Et elle inspire, ça pue. Franchement les égouts c'est dégueulasse mais d'un autre côté ça a le mérite d'être tranquille et originale. Et ce sont deux choses qu'Ulysse apprécie particulièrement.

… Alors, officiel ou pas ?

Et là est la question. Toute la question. Elle soupire. Réfléchit, pèse le pour et le contre. Mais elle se torture pas l'esprit, elle se stresse pas parce qu'à l'heure actuelle la maintenant tout de suite, elle est tellement contente que rien ne peut l'attendre. Ulysse est sur son nuage. Et elle est pas prête de redescendre.

Pour être honnête je préférais qu'on le cri pas sur tout les toits. Une pause le temps de mettre ses idées en place. Je veux pas me cacher, je veux pas jouer les amoureux transits qui cachent leur relation comme deux idiots parce que de toute façon ça finit toujours pas ce savoir et c'est une dose de stresse en plus. Si on nous demande c'est pas la peine de mentir mais j'pense pas qu'on ait besoin de rendre ça officiel aux yeux du pensionnat parce qu'au fond ça regarde personne. Elle s'humecte les lèvres. Ça nous regarde nous, et franchement je nous trouve plus beau dans l'intimité.

Et elle se racle la gorge. Son regard s'étend au loin. Sourire. Encore et toujours. Sourire parce qu'elle sort avec le chef d'entropy et que si ça se sait, si ses parents sont au courant il est probable qu'ils ne puissent plus se voir. Sourire parce que vivre une histoire d'amour avec Heath pourrait bien être l'aventure la plus excitante de sa vie. Et sourire de fierté parce que pour une fois elle n'a pas peur d'être honnête avec elle-même. En espérant que ça ne lui retombe pas dessus. Encore.

Elle baisse la tête et retombe sur ses vêtements. Elle avait complètement oublié cette tenue dès plus torride. Ulysse sourit en coin et renifle discrètement. Ses yeux se glissent sur Heath, son sourire ne ment pas. Ses yeux luisants non plus. Puisqu'ils sont seuls ici autant en profiter.

Dis moi Heath ? Et elle se penche un peu, passe pseudo naïvement sa main dans sa crinière. Tu ne m'as pas fais de remarque sur ma tenue... Et elle se mordille la lèvre. Ça te plait ? Séductrice Ulysse.