Aah... Pourquoi le vendredi venait toujours aussi lentement... Baillant d'ennui, le jeune homme aux cheveux de feu se dirigea vers le réfectoire, accompagné d'un pote de B qui blablatait sans cesse à côté de lui, tandis qu'il répondait de temps à autres et se marrait lorsqu'il sortait une vanne pourrie. Ils se dirigèrent vers le réfectoire qui n'était pas encore blindé de gens à cette heure-ci. Isaac tendit le cou pour essayer de voir le menu du jour. Boulettes de viande avec sauce bolognaise, accompagnées de riz, ainsi que différentes sortes de fruits, fromages et gâteaux appétissants. Visiblement, ils avaient droit à un menu à la française aujourd'hui. Pas mal. Mais c'était toujours mieux que la fois où il s'était enfui du réfectoire pour aller manger en ville parce qu'un abruti avait programmé de la morue et légumes de saison. Ceux qui programmaient les repas étaient un peu étranges sur les bords. Isaac se servit tranquillement puis alla se poser sur une table, là où quelques D traînaient et riaient en mangeant. De l'autre côté de cette table, il y avait deux types aux tronches agressives.
Ils commencèrent à manger en discutant, tandis qu'Isaac, pensif, s'amusait à croiser le regard de ces deux types pour lire leurs âmes, capter qui ils étaient, pour passer le temps. Ils avaient de forts tempéraments, et avaient une aura assez agressive. Quoique l'un semblait plus tendre que l'autre. Leurs noms se formulèrent dans l'esprit d'Isaac. Anthony Malone et Anh Minh Lee. L'un venait d'un pays chaud probablement anglophone... l'autre, sûrement un truc du genre vietnamien. L'un se vexait facilement, l'autre suivait, et... Isaac sentit que l'attention de l'asiatique se focalisait sur lui. Il était intriguait, et se demandait pourquoi ce type aux cheveux rouges les fixait depuis tout-à-l'heure. Isaac se contenta de lui lancer un sourire agréable et retourna à sa conversation comme si de rien n'était. Sauf que le pote du type avait prit ça pour un affront. Isaac éclata soudainement de rire. Il y en avait des si stupides, dans le monde, que c'en était vraiment comique. Son pote de classe s'interrompit et lui demanda ce qu'il y avait. Le rouquin répondit en balayant une mouche invisible de la main.
-Oh, rien... Juste de mauvaises ondes dans l'air.
-... Mais de quoi tu parles ?
-Laisse tomber, ça n'a pas d'importance. Tu disais quoi ? Tu t'es perdu dans Londres la dernière fois, et...
Une main se posa sur l'épaule d'Isaac. Pas surpris pour le moins du monde, il ne leva même pas les yeux de son repas et continua à manger. Le type serra son épaule, lui faisant un peu mal.
-Mec... Tes ondes négatives gâchent mon repas.
-Arrête de te foutre de ma gueule, le rouquin. Rien que ton regard est insultant.
-Faut pas être aussi susceptible, je suis jamais méchant quand je me fous de la tronche de quelqu'un, en plus, je fais tous le temps ça, donc bon... Pas vrai, Ben ?
Le rouquin en question avait haussé les épaules et s'adressait à son pote en face qui s'était un peu crispé, mais restait de marbre car il avait l'habitude de ce genre de situations avec lui. Il confirma d'un signe de tête avec un sourire amusé. L'agresseur ne semblait pas satisfait. Isaac dégagea la main du type dont la colère monta d'un cran, en bon alpha qu'il était et se leva, pour s'appuyer dos à la table avec un grand sourire.
-Bon. Y a deux solutions. Soit tu t'en vas avec ton petit copain et tu me laisses bouffer tranquillement...
Son sourire jusque là avenant se métamorphosa en une expression légèrement menaçante.
-Soit j'use de mon pouvoir, et crois-moi, ça peut faire pas mal de dégâts... Anthony.
Le Anthony en question haussa un sourcil surpris. Comment connaissait-il son nom ? Quel pouvoir avait ce type ? ... étaient les questions qu'il se posait et qu'Isaac devinait sans mal. Mais comme il était plus stupide que ce que le rouquin avait deviné, il chassa ces questions et l'attrapa par le col de sa chemise et le souleva un peu avec agressivité, dents serrées. Isaac plongea dans son regard et se mit à lire son âme plus profondément tout en le regardant avec mépris. Une brute épaisse. Un de ces E qui étaient plus enclins à la violence, jaloux d'être au plus bas rang, à cause de ce système élitiste. Par contre, ce qu'il craignait par dessus tout, c'était... un léger sourire se dessina sur le coin des lèvres du rouquin.
-Je vois. Tu n'es pas très intelligent.
Voyant rouge, le type serra davantage sa prise, tandis que son pote observait, les mains dans les poches. Tous le réfectoire les observait, silencieux. La tension montait d'un cran. Isaac ne se démonta pas pour autant et ses mains se baladèrent derrière lui. Il saisit la tarte de son voisin de table et mordit tant bien que mal dedans, comme s'il prenait le thé, là, avec ce type qui le tenait par le col. Puis, avant qu'il ne réagisse, il prit la tarte et l'écrasa sur la tronche de son agresseur qui le lâcha par surprise. Isaac s'assit sur la table et éclata de rire, tandis qu'Anthony devenait écarlate et se débarbouillait la face.
-Tu sais, c'est une peur très commune... se taper la honte suprême devant la foule. Tu me remercieras !
Voyant le vietnamien et l'autre a la face barbouillée de tarte réagir, Isaac se leva et se mit debout sur la table avec un sourire triomphant. Il écarta les bras et dit avec énergie en jouant avec une boulette de viande.
-C'est quoi, cette attitude ? Agresser pour un simple regard... Franchement, les E, vous n'avez rien d'autre à faire ?
Justement, une bande de E venaient de s'approcher et... étaient prêts à défendre leur honneur. Merde. Il était allé trop loin ? Soupirant, Isaac passa une main dans ses cheveux dans l'intention de calmer le jeu, mais c'est à ce moment-là que quelqu'un lui balança une boulette de viande dans la face. Isaac s'essuya la joue, et son sourire s'agrandit, tandis que ses yeux s'assombrirent. Les E s'approchaient dangereusement de lui, tandis que des gens d'autres classes semblaient hésiter quant à la façon d'agir. Certains se rangeaient déjà du côté d'Isaac pour le défendre (principalement des B, du moins ceux qui étaient solidaires, ou des D, qui avaient le sens du spectacle, tout les moyens étaient bons pour festoyer) et la tension fut à son comble.
Que la bataille commence.
Le réfectoire ne fut plus que boulettes de viandes et bolognaise, cris et rires, tandis que tous le monde se battait pour l'honneur et la justice.