Heart lost in a sea of ​​blood | Anshu

La journée avait pourtant bien commencée, journée banale de cours pendant laquelle elle avait passé plusieurs heures à tenter de maîtriser un don qui se faisait encore trop sauvage, don qui la taquinait de plus en plus et la narguait sans arrêt. Elle avait réussi ses exercices, tous ses devoirs et les quelques notes déjà obtenues n’étaient pas si catastrophiques que ça, elle était contente, Laura, malgré son air blasé. La tête dans les étoiles elle avançait dans les couloirs, casque sur les oreilles et musique à fond les tympans, elle longeait les murs mains dans les poches et ne saluait personne, pas même ses connaissances qu’elle n’avait pas remarqué. Parce qu’elle restait fidèle à elle-même, Laura, monotone et évasive, mais concentrée sur le monde qui l’entourait.

Plus ou moins.

Elle voyait les décors, mais tous ces gens n’étaient à ses yeux rien de plus que de vulgaires silhouettes qui lui barraient le chemin, des obstacles qui l’empêchaient de s’évader vers la liberté, routine ennuyante de quelques années qui la laissait. Les heures passaient et les cours défilaient, l’ennui lui, se faisait empoisonnant et elle suffoquait, elle ne supportait plus.
Ce fut sans aucun doute ce ras-le-bol général qui lui ouvrit soudain les portes d’une liberté tant désirée.

Sous l’incompréhension générale elle s’était envolée, passant la fenêtre du troisième étage sans un mot et laissant ses affaires en plan sur sa table de cours. Elle-même n’avait pas réellement compris ce qui se passait, mais loin d’aimer ce prendre la tête pour ce genre de chose, Laura préféra ne se soucier que de la brise sur son corps qui. Non, attendez. C’était différent, sensation déjà vaguement ressentie par le passé, plutôt désagréable lorsque l’on y est pas habitué. C’est là qu’elle réalisa que son ennui mortel avait déclenché son pouvoir et l’avait transformée en fumée, douce fumée qui filait à travers les paysages verdoyant de l’île sans trop savoir où aller. Si elle n’avait pas été elle, sans doute aurait-elle paniqué, et le risque que son corps ne reprenne son apparence normale sous la confusion aurait été bien trop grand -alors elle se serait écrasée de plus de dix mètres de haut, belle chute lui garantissant une mort quasi instantanée. Mieux valait garder son calme donc, pour éviter les risques inutiles.

La dernière fois, ça lui avait prit deux jours.
Deux jours c’était long, bien trop long lorsqu’on ne savait quoi faire.

Quelle poisse.

Pas vraiment heureuse à cette idée, la D passa la forêt, espérant trouver refuge quelques parts dans les vieilles ruines qu’elle apercevait au loin. Elle descendait dangereusement en altitude dans l’idée de trouver un sol douillet où s’échouer en cas de besoin, mais elle ne faisait plus attention à rien. Et contre toute attente, à quelques mètres au-dessus de l’herbe verte elle reprit forme humaine, son corps retrouvant ses vêtements transportés grâce à sa fumée pour s’écraser lamentablement.

Lamentable, oui.
C’était aussi l’état dans lequel elle risquait de retourner au pensionnat si elle ne se bougeait pas rapidement.

-  Wow.

Grimace perceptible, elle avait l’esprit ailleurs Laura, encore dans la lune à cause du choc qu’elle venait de subir. Les sensations revinrent doucement, le puzzle se remettait en place et elle comprit après un temps qu’elle était redevenue normale. Bizarre, c’était rapide. Trop rapide, inhabituel. Regard à gauche, regard à droit, rien d’étrange à signaler. Elle était bel et bien arrivée à destination, malgré la chute un peu brutal. C’est en voulant se relever qu’elle sentit quelque une forme peu commune sous elle, pas trop mou ni trop dur en réalité, ça avait la texture du tissu, c’était. C’était… Effrayée, elle se dégagea rapidement de cette chose non identifiée, se calant au creux d’un arbre tout près pouvoir l’observer.

- Bordel mais t’es con ou quoi ? lâcha t-elle le coeur encore palpitant à l’homme qui se trouvait au sol.

Anshu.
Si elle s’attendait à tomber sur lui.
La voilà bien maintenant.
Il ne bougeait pas, est-ce qu’elle l’avait tué ?

Mourir étouffé par son poids, quelle fin indigne pour le grand roi qu’il était.
Laura porta une main à son coeur, tentant de reprendre doucement son souffle, elle observait le regard encore un peu vague l’état dans lequel elle venait de mettre le prince -pour une fois que ça n’allait pas dans l’autre sens, elle ne pouvait pas s’en plaindre. Seulement y avait un détail qu'elle avait oublié, un truc qui clochait.

Il a pas l’air bien, y a un problème ?