quand mamie Cassandra découvre les nouvelles technologies ▬ owain

Cassandra, elle n’avait jamais été douée avec les nouvelles technologies.
Et ça, ce n’était un secret pour personne.

Combien de fois ses élèves avaient ris en la voyant essayer de projeter son diaporama ? Beaucoup trop. Et cela commençait à sérieusement l’agacer. Ce n’est pas comme si elle n’avait pas essayé pourtant. Gabriel avait tenté en vain de lui apprendre à se servir de son ordinateur ou de son téléphone. Toutefois il avait fini par perdre patience. Mais ce n’est pas pour autant qu’elle lui en voulût Cassandra, elle savait qu’elle était un cas désespéré.

Puis Owain, un élève du pensionnat lui avait une proposition intéressante. Lui apprendre à se servir des nouvelles technologies, tandis qu’elle lui apprendrait le nom des étoiles. Ce marché était loin de la déranger, c’était après tout son métier. Et l’astrologie, c’était la seconde passion de Cassandra (mais la musique passait avant évidement).

Vous vous étiez donné rendez-vous dans la salle informatique. C’était l’endroit le plus logique pour ça non ? La jouvencelle avait pris le soin d’emporter l’ordinateur et le téléphone que Gabriel lui avait offert. Elle ne s’en était presque pas servi, ils ne s’allumaient plus et la blonde ignorait pourquoi. Le concept de batterie lui échappait et de toute façon elle ne savait même comment faire pour les recharger.

Oui, c’était un cas désespéré à ce point.

Dès que l’élève se présenta, elle lui sourit légèrement tout en le saluant. Au fond, elle s’en voulait un peu de lui gâcher son week-end, il allait perdre son temps avec elle, une cause perdue. Elle allait lui demander de répéter plusieurs fois, tout noter sur un carnet qu’elle finirait par perdre… Parce que, oui, Cassandra, c’était une petite mamie, il ne fallait pas l’oublier.

Dès qu’il fut installé près d’elle, elle appuya plusieurs fois sur le bouton d’alimention de son ordinateur, en vain. Agacé, Cassandra dirigea son regard vers celui d’Owain :

▬ Mais… Mais… Pourquoi ça ne marche pas ? Je l’ai presque jamais utilisé, il ne peut pas être cassé, si ?

Elle en profite aussi pour sortir son téléphone, en panne de batterie tout comme son ordinateur :

▬ Et lui comment on l’allume ? J’ai mon arrière-petit-fils qui a dû m’envoyer des messages, il va s’inquiéter si je ne réponds pas.

Puis elle pousse un petit rire, consciente que ces questions sont un peu stupides :

▬ Désolée, je suis vraiment nulle. En fait, mon petit-fils a essayé mais il a perdu patience. Je dois vraiment te paraître stupide. Je ne sais même pas écrire un mail, un sms ou passer un appel. On peut être commencer par ça ? Mais en tout cas, merci de prendre du temps pour moi. N’hésite pas à me demander ce que tu veux au sujet de l’astronomie d’ailleurs, je serais ravie d’en discuter avec toi. Ou même d’autre chose d’ailleurs. Je suis assez ouverte d’esprit, enfin pour mon époque, je crois.

Elle marque une pause, jouant au passage avec l’une de ses mèches de cheveux :

▬ En retour, je veux bien t’emmener à l’observatoire un soir, je pourrais préparer un piquenique ! Ce serait l’endroit idéal pour t’apprendre des choses.

Cassandra ne peut s’empêcher d’observer le moindre des gestes d’Owain, tentant vainement de comprendre ce qu’il faisait. Elle n’avait jamais vraiment réussi à s’adapter au vingt et unième siècle. Pour l’allemande, toutes ses innovations technologiques n’étaient pas une bonne chose. Elle était persuadée que ces dernières finiraient par remplacer l’être-humain un jour, que tout serait automatisé. Et cela l’effrayait. Parce qu’elle avait lu tant de livres sur l’intelligence artificielle, que Cassandra ne pouvait qu’être inquiète pour l’avenir. Des siècles, elle en verrait encore beaucoup s’écouler.

Plus rien ne lui était familier désormais. Et cela n’était pas près de changer. Le temps finirait par s’écouler encore et encore, inlassablement. Le Monde allait encore évoluer, et elle se retrouverait perdue une nouvelle fois. Avant, tout était plus facile pour Cassandra, parce sa famille était là pour l’aider. Mais elle n’avait plus personne désormais, et elle n’aurait plus jamais personne. L’allemande avait bien trop à perdre à refonder une famille. Elle aurait voulu, mais la seule personne qu’elle s’était à nouveau permise d’aimer était partie.

Mais Cassandra devait y faire face, comme elle l’avait toujours fait.

Alors ces appareils se rechargeaient ? Haha, c’est donc pour ça qu’ils ne marchaient plus. Elle se permet de prendre son téléphone – après qu’Owain l’ai branché, afin de l’allumer, non sans mal. L’allemande sursauta au nombre de notifications qu’il affichait, depuis combien de temps n’y avait-elle pas touché ? Excellente question.

Elle se rapprocha de son élève -pour qu’il puisse mieux voir, lui montrant l’une des notifications de message sur son écran :

▬ Comment je fais pour répondre ? Et pour effacer tous les textes là ? Ils me gênent, je ne vois plus rien.

Une fois que le blond lui ait montré comment retirer toutes les notifications de son écran d’accueil, Cassandra ne peut s’empêcher de sourire à la vue de son fond d’écran. C’est une vieille photo, en noir et blanc, un portrait de famille. Elizabeth, qui n’avait que cinq ans à ce moment-là est perchée sur les épaules de son père, tandis que Cassandra – plus radieuse que jamais, tenait leur fils dans ses bras.

▬ C’était mon mari, murmura-t-elle, du tac au tac, en montrant Ethan du bout de son index. Et mes enfants. Elizabeth, et Aaron. Ils étaient adorables hein …

Elle lui sourit tristement, avant de montrer son ordinateur du doigt :

▬ Tu peux m’apprendre à me servir de ce truc ? Ça serait plus simple pour communiquer avec mes collègues et mes élèves. Je pourrais répondre à leurs questions plus facilement.

Elle sourit lorsqu’il accepte sa proposition. Cassandra aime les étoiles et rien ne peut lui faire plus plaisir de les observer avec quelqu’un partageant sa passion :

▬ Alors il faudrait y aller ce soir ! Il y’a une pluie d’étoiles filantes, j’attends ça depuis pas mal déjà. Il ne faut vraiment pas que tu manques ça. Tu sais te servir d’un télescope ? Parce que je peux t’apprendre sinon ! Tu verras c’est tout simple !

Sourire -sincère cette fois – aux lèvres, la professeure plonge ses yeux dans ceux du blond :

▬ Moi aussi, je ne m’en lasserais jamais. Avec le temps, j’ai vu tant de choses changer… Mais le ciel et la musique, c’est les seules choses avec lesquelles je suis encore familière.

Cassandra écoute donc les conseils de Owain, glissant son index droit sur l’écran de son téléphone afin de retirer les notifications. Son fond d’écran lui apparaît alors, une vieille photo de famille en noir et blanc. Elle se souvient de jour-là d’ailleurs. Elizabeth avait boudé sur la plupart des photos, l’allemande ne souvient plus vraiment pourquoi… Mais cette photo était la seule où la petite fille était souriante. Elizabeth était mignonne, mais au fond, elle avait toujours un sale caractère – celui de son père. Parfois, ces vieux jours lui manquent, elle aurait voulu que les choses restent comme ça, et que ses enfants ne grandissent pas. Cassandra était une mère poule, qui avait très mal vécu l’envol de ses enfants hors du nid.

▬ Si je me trompe pas elle date de 1950, l’été 1950 je crois..

L’allemande passe doucement son index sur la photo, tout en souriant :

▬ Donc approximativement 68 ans. Les photos en couleurs commençaient à arriver à cette époque mais moi j’ai toujours préféré les vieilles choses. .

Oui, d’ailleurs Gabriel s’était moqué d’elle ce jour-là. Parce qu’elle a toujours eu du retard sur son temps Cassandra, l’allemande a toujours eu du mal à s’adapter à toutes les innovations technologiques, surtout celles de ces dernières années. Mais c’était pour ça qu’Owain était là aujourd’hui, pour qu’elle puisse – enfin - s’adapter.

Les souvenirs, ce ne sont pas des choses dont la blonde aime forcément parler. Elle aime beaucoup son élève, donc ça ne la dérangerait pas de lui en parler de quelques-uns. Mais la professeure ne voulait simplement ne pas trop y penser en ce moment. Parce que celle-ci savait qu’elle finirait par déprimer. Depuis qu’Aiden était parti, c’était un peu dur pour l’immortelle. Mais elle faisait de son mieux pour surmonter ça. Alors aujourd’hui, le passé ne devait simplement ne pas être évoqué davantage.

Heureusement pour elle, Owain ne lui pose pas trop de questions, et lui explique comment répondre à ces messages. La plupart viennent de Gabriel. Cassandra ne lui a pas donné de nouvelles depuis son départ du Japon. Elle lui avait fait connaître son désir de retourner enseigner, et lui était resté là-bas, il avait sa vie désormais : un travail et une petite-amie. Il grandissait et elle ne pouvait rien y faire.

Elle tapote donc un message sur son écran, avec son seul index. Mais c’est un peu long, alors son élève lui explique que répondre avec un seul doigt n’est pas très viable. Mais Cassandra est une mamie, alors elle ne voit pas trop comment elle pourrait être plus rapide. Mais l’allemande essaye quand même, comme pour saluer la patience dont fait preuve Owain. Une fois le message prêt à être envoyé, elle plonge ses yeux dans les siens :

▬ Je fais comment après ? Il l’a reçu là ? Il est envoyé ?.

Une fois que mamie a compris comment envoyer un message, elle note rapidement sur une feuille comment faire. Bon, elle va sûrement la perdre dans quelques jours et lui redemander comment faire… Mais Cassandra avait au moins compris l’essentiel.

Puis l’allemande lui parle de toutes ses choses qu’elle aime – la musique et les étoiles, et elle voit des étoiles dans les yeux du blond. Et ça lui fait plaisir, parce que de toute sa vie, la professeure n’avait jamais vu quelqu’un d’aussi passionné par le domaine. Et ce côté enfantin, lorsqu’il semblait passionné, lui plaisait, et lui rappelait ses enfants. Cassandra était très proche de certains de ses élèves, elle se montrait un peu familière, curieuse, et surtout – un peu trop – maternelle. Elle outrepassait un peu son rôle, c’est vrai. Mais elle s’en fichait. Les règles n’étaient pas toujours faites pour être respectées.


▬ Ravie de le savoir !. Elle lui sourit, tout en passant l’une de ses mèches de cheveux derrière son oreille. De tous mes élèves, tu es celui qui est le plus passionné. Donc, je voulais y aller avec toi. .

Elle range rapidement ses affaires, puis tourne à nouveau son regard vers Owain :

▬ Hm, je dois avoir des trucs qui traînent dans mon frigo. De quoi faire une salade, des sandwichs, et j’avais fait un gâteau roulé ce matin. Je vais te préparer de quoi manger ! Tu peux ramener des chips si tu veux, et les boissons. Sans alcool, bien sûr. .

Elle lui sourit toujours. Plus radieuse que jamais.