Prétendre & S'enfermer. X Shery
C'est comme les pierres qui roulent, roulent, sans s'arrêter, jamais. Le bruit n'existe plus. Ou à peine. La seule chose qu'on pourrait entendre ce serait le grattement d'une mine de crayon sur une feuille un peu rêche. C'est comme ça que l'information s'inscrit dans mon esprit. L'Information. Tour à tour, bénédiction et malediction. Comme si un dieu malsain décidait subitement de torturer mon âme à peine formée.
Je suis lucide. Parce que du haut de ma carcasse frèle et palichonne, le monde je le comprends. Je comprends toutes les saletés qui se cachent derrière vos fac similés de sourire. Derrière vos faciès infects qui se déguisent. Immonde hypocrisie. Qui serpente et s'enroule comme le fil de mon casque autour de mon cou. Encore un mouvement, et vous me pendrez. Mais je le vois venir, vous savez, je bouge alors. Je m'agite. Je reste en mouvement. Car un seul mouvement d’inattention, et ça y est.
Vous m'avez baisé.
J'aime la douleur aussi. Celle qui s'insinue insidieusement, à la fois orgasme et torture. Celle dissimulée derrière vos regards rieurs alors que moi, la, je suis juste en train de marcher vers mon destin. Ou le parc. A vous de choisir l'emphase.
La neige mouille mes bottines en cuir, et pour une fois, le léger talon s'enfonce dans la substance molle. Ce bruit de succion mouillée me dégoûte. Je hais la neige. Cette petite saloperie blanche qui recouvre tout. Qui masque les informations. Qui camoufle les pas de Caro la pute alors qu'elle se faufile hors du bâtiment des garçons.
Je sais toujours pas ce que j'vais foutre dans le parc. Non. Juste une envie de me balader, pour pas que ça dégouline dans ma tête. Parce que ça me gratte bordel. Ca me démange. Foutu pouvoir de merde. J'en peux plus. J'envie les décérébrés de la classe E. Leurs vies si simples, si inutiles. Avec leurs pouvoirs de merde.
Salope de mauvaise humeur.
Je m'appelle Damian. Avec un D, pour Deité et un A pour Avaler. Parce que j'avale les dieux. Ou plutôt j'aimerais. J'aimerais laisser glisser mon obsession le long de son corps pâle et de ses cheveux blonds. La laisser s’étendre sur sa nuque au duvet clair et contourner son visage pour s'attarder sur ses lèvres rougies par le froid. Parce qu'il est la encore. Avec son bonnet aux couleurs bleutées et son regard rieur en direction d'un être qui ne le mérite pas. Ses mains qui agrippent négligemment la doublure de son blouson, ses ongles transparents qui palissent à lumière du soleil.
C'est bien trop. J'ai envie de vomir. Mon regard a du mal à se detacher. Je reste là, planté comme le con je suis alors que je n'ai qu'une envie c'est de m'enfuir en courant. Les secondes semblent devenir des heures. Le temps s'écoule en me narguant. Peu à peu, je reprends le contrôle de mon corps. Un mouvement de la tête et j'aperçois un groupe que je côtoie de temps en temps. Deux mecs de ma classe, une fille rouquine que je n'ai jamais vu et une autre nana que je croise de temps en temps à la la cafet'.
Alors, ni une , ni deux, je me dirige vers eux. Je high five mes potes et je lance avec un sourire en coin :
- What's up ?