[MINI-RP] Réunion Pro-A.

Gabriel déposa ses valises dans sa cabane. Il se leva de sa chaise roulante et la rangea dans un placard, pour s’appuyer sur sa canne au manche d’argent. Il enfila promptement une chemise en soie violette, dotée d’un petit col lavallière, et appuyée par une veste de barman noire. Il installa sur sa poitrine une broche en argent représentant la couronne britannique, passa un coup dans ses cheveux blancs, et les ordonna correctement pour ne plus ressembler au démon tentaculaire qui venait de passer la journée dans le train. Il s’appelait désormais Gabriel A. Oswald-Richardson, depuis un mariage, quoiqu’expéditif, avec son nouveau compagnon. Et cette nouvelle identité lui donnait une force insoupçonnée. Ouvrant sa boîte à maquillage, il tapota ses pinceaux sur sa joue. Un fond de teint moins pâle que d’habitude lui donna un air plus vivant, plus dynamique. Depuis maintenant plus d’un mois, le garçon redevenait pour la première fois rayonnant. Cela faisait longtemps qu’il n’avait pas pris soin de lui, et son cœur se serra en découvrant son reflet dans le miroir.

Il tenait dans sa main cet étrange LMS reçu de la part d’un certain Johnny. Il n’avait jamais entendu parler de lui jusqu’ici, mais cela lui importait bien peu, parce que pour la première fois depuis qu’il était parti, il avait la preuve qu’on continuait à penser à lui. Que son combat n’avait pas été vain, et que tout l’héritage du RTP continuait de vivre quelque part dans l’âme de certains. Des principes, des valeurs, un combat permanent, qui s’était terminé tragiquement, mais qui perdurait sous l’égide de certains. Alors comme ça, Léocade Remington avait décidé de prendre la place de chef ?  
Et puis le nom de Hadès attira son attention. Un sourire amusa se dessina sur son visage. Il était en retard, il le savait. Mais il venait de rentrer de Londres, il était fatigué. Il hésita.

Il ne voulait pas que sa présence signifie sa soumission aux deux élèves susmentionnés, mais s’absenter en ce soir d’octobre aurait signé la fin définitive de sa présence dans la Guerre des Classes. Il réfléchit. Cette information ne devait pas filtrer aux oreilles de Nathan, beaucoup trop inquiet à l’idée qu’il aille se remettre dès son retour dans les affaires politiques de Prismver, et la fermeture aux élèves de la classe E paraissait beaucoup trop évidente pour prendre ce risque. Plongé dans l’abysse de ses pensées, il trancha finalement : il irait. Et pas question de faire marche-arrière.

S. Orest Koslowski avait tenté de le tuer. La vengeance serait un plat qui se mangerait froid. Attrapant son imposant manteau indigo, il referma la porte de sa cabane vide. Regardant sa montre Rolex, feignant une claudication impertinente au niveau de la jambe, il traversa les allées. Sa chambre se trouvait juste à côté de la cabane 9, il n’eut pas longtemps à chercher. L’adolescent avait rendez-vous avec son destin.

« Bonsoir. » Fit-il très aimablement, avec un sourire sincère au moment où il pénétra dans la pièce. « Je vous prie de pardonner mon retard. » Il lança un regard plus que poli à Hadès et Léocade. « Je viens de rentrer de Londres. Mon train a eu du retard. » Le jeune homme marcha jusqu’à se trouver une place excentrée, mais tout de même assez proche pour pouvoir assister à la réunion, pour pouvoir y participer, et pour bien montrer son relatif éloignement quant à tout ça. Il lança une honnête moue envers tous les autres élèves de sa classe. Plus question de les manipuler, plus question d’être hypocrite.

Gabriel écouta attentivement ce que venait de dire Zack. Le petit renégat, celui qui l’avait laissé tomber parce que c’était « trop dangereux ». Il vit en lui un lâche, mais ce dernier ne pourrait voir qu’une bienveillance masquée. Il décida d’intervenir immédiatement, quitte à ne pas s’attarder sur les retrouvailles, s’arrêtant sur Epona, Alessandra, puis les autres.

« Tous des sans cervelles ? Non. Mais ce sont, pour la plupart, de dangereux sentimentaux. Ils sont transportés par leurs émotions, ils dictent leur conduite sur ce qu’ils ressentent. Mademoiselle Scarlet, Monsieur Everfield. D’autres, au contraire, sont des gamins puérils incapables de prendre la moindre décision. Artus Myers, ou encore, Warren Andersen, même si je sais que ce nom peut provoquer certains excès d’empathie. » Le britannique ancra son regard dans celui de Hadès, avant de se retourner vers les autres, utilisant son énergie, sa passion dévorante parler à sa place. « La Classe A ne doit pas se contenter de regarder faire. Elle doit agir. Je crois que nous sommes tous là pour la même raison. La violence n’est pas une réponse ; elle n’en sera jamais une. »

Il détourna la tête à quatre-vingt dix degrés pour observer Léocade. « Je connais certains d’entre-vous. » Il se posa cette fois-ci sur Pandora. « Je suis persuadé de notre potentiel, je suis persuadé de notre talent. Et je m’adresse cette fois-ci à ceux qui veulent faire bouger les choses. Avons-nous un projet concret ? Je viens d’arriver, je ne sais pas, mais achevons les préliminaires. »

Un défi se mua sur ses lèvres. « La plus grande faiblesse de l’Homme sont les sentiments. C’est assurément là qu’il faut frapper. » Et il en savait quelque chose.

HRP > J'ai donc été invité à rejoindre ce RP par un LMS, comme en témoigne celui laissé par John. J'ai changé mes plans, Gabriel revient ce soir pour la réunion, et non plus la semaine suivante. <:

Gabriel pouffa d’un rire mauvais aux accusations grotesques de Zelda. Cette jeune femme, qui se disait plus intelligente que les autres, laissait entendre qu’Oswald ne servait à rien, et cet excès de naïveté lui rappela celui de Heath Ackland au moment où il fonda le RTP. Il décida de ne pas ouvrir d’hostilités publiques, mais ne put s’empêcher une remarque, franche, sans emballage, froide et sans appel.
« Je n’ai pas l’intention de partir, Zelda. » Les délires de cette fillette ne l’intéressaient pas. Il ne réagirait même pas à ses idiotes provocations.

Immédiatement après, Hadès O. Stone prit la parole. Cette personne parlait comme un chef, et cette relation presque incestueuse qu’il entretenait avec la fille qu’il considérait comme sa sœur le dégoûta. Gabriel répugnait à ces excès maladifs de niaiserie, surtout dans un contexte qu’il trouvait bel et bien malsain. Sans quitter le regard des yeux de son rival, il comprit qu’une connivence naissait entre Léocade et Hadès. Si Léocade était le chef, Hadès ne devait pas miroiter loin des sphères du pouvoir. Ce ne pouvait être qu’une déduction logique, à la lumière de ces propos. Mais peut-être que Richardson établissait une conjecture prématurée. Après tout, il ne venait que d’arriver.

« Ah tiens dont, mais tu soulèves une question intéressante, Hadès. Pourquoi n’ai-je pas été convié à votre réunion ? Pourquoi écarter celui qui a fait tomber Heath Ackland, ainsi que les seuls élèves qui se sont élevés contre RED pendant la saison estivale ? » Il ne le considérait pas comme un chef. Après tout, lui-même ne semblait pas y tenir particulièrement, et il doutait que quelconque leader soit efficace dans cette classe. C’était, au contraire, à cette réunion que les personnalités s’imposeraient d’elle-même.

Si M. Stone était intelligent, il savait qu’il valait mieux avoir Gabriel en ami qu’en ennemi. Parce que, même s’il ne bénéficiait plus du même réseau d’influence qu’au sommet du RTP, le britannique possédait l’art et la manière de mettre des bâtons dans les roues, et de gêner, de faire de l’obstruction. Et si quiconque osait l’exclure de cette réunion, c’était bel et bien ce qu’il ferait, quitte à jouer contre son camp dans l’anonymat.

« Je n’ai rien à te prouver, Hadès. J’ai fondé le RTP, je me suis battu contre la classe E avant que ce mouvement dépasse le stade de l’embryon. Si tu considères cela insuffisant, c’est que le problème ne vient pas de mes compétences et de mes faits d’arme. » Il avait dit ça sans hypocrisie. Il ne tenait pas à démarrer un esclandre. Il parlait simplement en toute franchise, sans se laisser marcher sur les pieds. Zelda lui avait affirmé qu’il voulait la place de leader, mais pas du tout. Au contraire, Gabriel voulait jouir de sa liberté d’action. Ce n’était pas une mutinerie, mais une simple question de bon sens.

Au sein de sa propre classe, des mégalomanes l’avaient fait tomber. Les raisons pour lesquelles on ne l’invitait pas ne reposait pas sur du rationnel, mais uniquement sur de l’affect. Exclure Gabriel Oswald, c’est s’assurer le pouvoir. Un pouvoir qu’il n’aurait pas lâché si le RTP n’avait pas été laminé. Le jeune homme ne doutait pas de ses capacités, au contraire, mais il savait qu’elles gênaient, que sa personnalité gênait, et pour des élèves qui se réclamaient plus intelligent que les autres, l’exclure pour ça serait se tirer une balle dans le pied.

Il écouta attentivement ce que prononça Léocade, avec un petit hochement de tête en signe de son approbation. Oui, le garçon n’allait certainement pas tout remettre en cause. Il reprit une ultime fois la parole, avant de se retirer pour quelques temps, jugeant qu’il avait fini de transmettre son message de retour.

« Non, tu as été parfaitement clair Léocade, je suis parfaitement d’accord avec toi. » Sans ironie. « Personnellement, je suis marié à Nathan Richardson. Je prends l’entière responsabilité de cette relation, je suis un grand garçon. »

Puis, il rajouta : « Et du coup, Léocade, quand tu dis “qu’on s’en occupera“, qu’allons-nous faire ? Pour en revenir à ma question de tout à l’heure, nous devons garder une longueur d’avance sur les E. »

Hadès s’était précipité dans la brèche ouverte par Gabriel. Alors que lui gardait un calme religieux, le vocabulaire de son interlocuteur devenait agressif, vulgaire, rageur, là où le britannique préférait posséder un flegme légendaire. Il ne cilla pas, ne bougea pas, ne fit pas le moindre commentaire. Il se contenta de le regarder “s’énerver“, il se contenta de le regarder partir en grand comédien. Il était presque aussi doué que lui au théâtre.
« Au revoir. » Il jugea qu’il n’avait rien à rajouter. Sentant que le vent tournait au départ général, le jeune homme remit ses gants en cuir. Il allait sans doute repartir, oui. Mais il attendrait, jusqu’au bout, jusqu’à la fin.

Puisque personne ne semblait vouloir répondre à sa question, puisque personne ne semblait vouloir travailler sérieusement les plans du mouvement pro-A, Richardson n’allait pas s’attarder. S’ils ne savaient pas scinder leurs velléités délétères et leur esprit rationnel, ce n’était pas son problème.
Dans sa tête, il espérait toutefois que d’autres personnes aient l’impression que le petit joueur détale quand on pointe ses incohérences, comme un enfant capricieux. Mais peut-être était-ce mégalomane, bien qu'au fond, Gabriel n'avait posé que des questions légitimes.