« Retire ce putain de sourire niais de ta tronche. »
L’auto-persuasion, ça ne marche que très rarement. Surtout avec Zelda, incapable d’obéir à qui que ce soit - même elle-même. Elle pousse un soupir agacé, qui perd toute crédibilité à cause du rictus - beaucoup trop joyeux à son goût - qui étire ses lèvres. Ce n’est pas foncièrement sa faute ; elle a recommencé à espérer, malgré ses efforts pour s’en empêcher. Quinze Février, lendemain de son anniversaire. Non seulement elle a dix-huit ans, mais en plus de ça, elle a l’intime conviction que sa vie va reprendre un cours plus doux. Et elle aura beau dire ce qu’elle voudra, elle en est plus qu’heureuse.
Depuis son changement de pouvoir, elle voit des formes plus ou moins floues un peu partout. Et quand elle s’aperçoit de la présence glaciale d’un autre esprit, son sourire s’évanouit. L’impression d’abandonner ceux qu’elle s’était jurée de garder comme amis lui étreint les entrailles, sa culpabilité accentuée par la vague expression colérique de la vision. « Désolée. »
Manifestement, elle aurait dû mourir. Une fois, deux fois. Peut-être même trois. Mais même ça, elle n’a pas été capable de l’accomplir. Est-ce une bonne chose ? Elle n’en sait rien. Elle ne veut pas se poser la question. Il a enfin réveillé le cadavre de ses sentiments, il lui a offert sa raison de vivre initiale. Mais c’est probablement ça, qui lui fait si peur. Retomber dans cette dépendance, revivre le même scénario, encore et encore. Ressentir la trahison qui s’infiltre par tous les pores de la peau, le haïr avec une telle force qu’elle-même est persuadée qu’elle aurait pu le tuer par la simple force de sa pensée - bon, forcément pas à ce point.
Sauf qu’aujourd’hui, elle doit sortir. Elle n’a aucune idée de lieu, mais l’envie soudaine d’explorer ce pensionnat qu’elle déteste tant lui caresse l’esprit. Et c’est en grignotant distraitement les chocolats de Nevada qu’elle décide du lieu. LMS rapidement griffonné, elle sort sans plus de cérémonie, après avoir prévenu Hadès qu’elle s’absentait un peu. Simple réflexe - et peut-être un prétexte pour raviver la conversation, ne serait-ce qu’un peu. Et elle ferme la porte brutalement, oubliant totalement la présence de ses colocataires.
Elle ne devrait pas être aussi enjouée. Elle qui s’était pourtant promis de ne plus jamais couler ; la voilà qui plongeait sans hésitation. C’est comme signer sa propre fin, mais elle n’en a que faire. Une petite voix dans sa tête lui susurre qu’en faisant ça, elle court à sa propre perte. Qu’en s’attachant de nouveau, non seulement elle rompt ses convictions, mais en plus elle finira par en souffrir.
Trop aveugle pour voir qu’elle se blesse toute seule.
En grimpant les marches, elle pense. Elle pense à ses erreurs, à sa rancune. Elle pense à son besoin presque primaire de soigner un orgueil charcuté, de se venger. De le venger. Si lui a oublié, si lui a gagné sa propre partie, il n’en est pas de même pour elle. Mais elle sait, elle sait qu’elle n’a aucune chance. Il lui faudrait un nouveau pouvoir.
Et une fois arrivée devant la porte de l’antichambre, elle respire, elle arrête de réfléchir. Ce n’est ni le moment, ni l’endroit pour s’effondrer de nouveau, pour se laisser dévorer par la peur. Zelda n’est pas une faible, au fond ; elle a su supporter toutes les déceptions, les trahisons et autres joyeusetés, alors elle saura en endurer le double sans broncher. Finalement, l’auto-conviction, ça marche parfois.
Appuyée contre le mur, elle attend. Elle attend Andrew, impatiente de voir s’il va tenir ses précédentes promesses. Elle a une porte de sortie, un moyen de cesser de se prendre la tête en solitaire. Alors elle n’hésite pas, elle se contente de foncer tête baissée. Et si lui aussi se joue d’elle, elle n’en sera ni surprise ni touchée. Enfin ça, c’est ce qu’elle espère faire croire au petit serrement enfoui dans sa poitrine.
L’être humain est une créature pitoyable. Mais pas Zelda. Zelda elle, elle est assez forte pour jeter un regard hautain aux personnes qui passent devant elle, pour ignorer leurs chuchotements venimeux. Regarde, c’est la gosse qui a tenté de se suicider ! Paraît qu’elle a essayé deux fois… Un sourire glisse furtivement sur son visage. Dire qu’elle n’en est pas touchée serait un pur mensonge.
Alors mens, Zelda. Mens.
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Sujet: Re: run away Δ andrew Lun 2 Mar 2015 - 9:25
• 15 février • Andrew a rencontré Zelda dans la salle abandonnée et a décidé de l'aider à surmonter sa dépression. Le 15, elle le lms pour l'inviter dans l'antichambre où il la rejoint. Il la conduit ensuite dehors pour marcher un peu, prend une cigarette et lui en propose une tout en entamant la discussion.
Il n’avait aucune idée de comment s’y prendre. Relisant une dernière fois le message de Zelda, il avait décidé de répondre à son appel et aux attentes qu’il avait placé. Il avait décidé de lui venir en aide, tenant l’engagement qu’il avait plus formulé pour lui-même que pour aider quiconque. Il se poussait lui-même dans le vrai monde, loin de ses illusions, sa nonchalance interminable et sa capacité à ignorer les problèmes autour de lui. Lâche au possible, prétextant le manque d’envie alors que cette dernière n’y manquait pas. Il voulait être quelqu’un - quelqu’un d’apte à aider les autres. Pas comme ses parents et leur solidarité aveugle, pas comme son frère et sa gentillesse inégalée. Il possédait la même, mais il avait apprit à la dissimuler et vivre sa vie autrement que pour les autres. Il voulait son propre bonheur, mais il ne s’était pas rendu compte d’une chose : aider les autres ne pourrait qu’y aider.
Elle l’aiderait, Zelda, autant que lui le ferait avec elle. Il ne s’était dit qu’une chose : pas une pensée pour la journée d’hier, car il se refusait à laisser ses propres sentiments interférer avec ça. Il avait promis quelque chose et rien ne devait le laisser se détourner de ses propres convictions. Aujourd’hui, il était là pour elle, tenue simple et cheveux en bataille - c’était pourtant avec toute la volonté du monde qu’il allait la rejoindre. Quand bien même, quand on parle d’Andrew, mieux vaut éviter de juger ses pensées sur son apparence, on est souvent déçu. Ironie mis-à-part.
Il ne lui fallut pas plus de cinq minutes, parce qu’il connaissait le chemin par coeur. Quelques marches à monter, un endroit qu’il avait visité plus d’une fois et dont il ne se lassait pas. L’antichambre d’Hansel et Gretel L’endroit magique, merveilleux où trainaient tous les gosses de 12, 13 ou 14 ans… et Andrew. Si vous pensez qu’il a honte de ça, détrompez-vous, c’est même avec fierté qu’il traversa l’endroit pour aller chercher sa friandise préférée dans un coin un peu à l’écart. Il observa longuement Zelda, croquant doucement dans le bonbon - et il avait beau n’être pas très observateur, il voyait bien que quelque chose était différent. Son regard était différent - elle avait retrouvé quelque chose, bien qu’il soit incapable de définir quoi.
« Salut. Belle journée ? Oui, bien sûr, puisque je suis là. »
Juste l’ombre d’un sourire, le regard qu’il posa sur son corps, un signe de tête pour l’inviter à sortir. Il n’a pas envie de passer son temps ici, au contraire, il veut sortir. Il a beau adorer cet endroit, il compte appliquer ce qu’il a prévu de faire - sortir, voir du monde, la sociabiliser. Et peu importe si elle lui refusait ça, il n’arrêterait pas pour autant. Il en fallait beaucoup pour le décourager une fois qu'il était lancé. « Cigarette ? » Il s’en coinca une entre les lèvres, lui tendit le paquet. Il savait, malgré ce qu’elle en avait dit, qu’elle avait apprécié. C’est peut-être parce qu’elles consument vos poumons que les cigarettes semblent vous redonner goût à la vie - comme quoi, le mal nécessaire est omniprésent.
« Quoi de neuf ? »
Comme ce mal que sa propre famille lui avait causé.
•• green - Code par Lix ••
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Sujet: Re: run away Δ andrew Dim 8 Mar 2015 - 15:50
i wanna run away anywhere out this place † andrew
Elle n'a plus envie de mourir. Elle a envie de partir, de s'enfuir de ce pensionnat et de ne plus y mettre un pied. D'éviter ses habitants comme la peste, et de poursuivre son existence ailleurs – peu importe où, peu importe comment. Tant qu'elle est ailleurs, loin de cet endroit.
Enfin ça, c'est ce qu'elle aimerait penser. Elle voudrait ignorer la détente de toute sa carcasse lorsqu'elle aperçoit finalement Andrew. Faible, faible, faible. N'importe qui se serait certainement dit « accepte tes faiblesses, transforme-les en avantage », mais pas Zelda. Elle, elle écrase ses faiblesses, les remplace en accentuant ses forces. Et cette fois, c'est son souhait d'indépendance qu'elle compte accentuer suffisamment pour contrer cette joie éphémère d'être en bonne compagnie.
Et elle s'assoit à côté de la fontaine de chocolat, y trempant furtivement un index. Un minuscule morceau de mur arraché, enduit de cacao liquide – et elle glisse le tout sur sa langue, savourant la douceur du sucre. Zelda a toujours adoré le sucre, sous toutes les formes. Alors elle continue, elle recommence la même manœuvre plusieurs fois ; sans prendre le risque de goûter autre chose. Elle le sent, le regard d'Andrew sur elle. Mais ça ne la dérange pas, elle est fière de pouvoir se tenir droite sans problème. Fière d'avoir chassé le poids de la rancune de ses épaules.
« Salut. Belle journée ? Oui, bien sûr, puisque je suis là. »
Elle hoche simplement la tête, incapable d'ouvrir la bouche – et se mettre à baver ne serait pas des plus élégant. Elle la sent toujours vaguement, cette vieille peur de mourir de faim, de ne pas avoir assez de nourriture pour le repas suivant. Cette peur de pauvres, de la pauvre qu'elle a été suffisamment longtemps pour savoir économiser et gérer sa propre faim.
Elle fourre un nouveau fragment de sucre dans la poche de sa veste et se relève pour suivre le brun, très légèrement inquiète. Son but à elle avait été de passer du temps dans cette antichambre pour manger, pas de sortir. Elle avait tout simplement oublié son objectif, à lui. La sociabilisation – ou l'une des choses qui la dégoûte le plus au monde. « Cigarette ? » Elle acquiesce de nouveau sans un mot, honteuse – honteuse parce qu'en plus de lui donner raison, elle aggrave encore sa santé. La première bouffée l'étouffe à peine, et la seconde devient plus fluide, plus sûre. Elle en profite pleinement, trottinant presque calmement. Détends-toi Zelda, reste calme. Pas besoin de s'exciter juste parce que tes plans tombent à l'eau.
« Quoi de neuf? - J'lui ai parlé. Enfin.. On a parlé. Longtemps. Je crois que ça va mieux, que c'est.. Peut-être réglé. L'incertitude persiste dans sa voix, comme si sa paranoïa et son manque affectif omniprésent l'empêchaient d'en être sûre. On a passé mon anniversaire ensembles, et je me suis rendue compte d'un truc. » Légère pause, le temps de rassembler ses idées, de passer un coup de langue nerveux sur ses lèvres abîmées. Elle souffle une nouvelle fois sa fumée et jette un petit coup d'oeil au brun – elle est pas altruiste Zleda, elle serait même pas capable de deviner son état à lui. « Je crois que je lui ai fais beaucoup plus de mal que ce qu'il méritait. Que ce qu'il m'a fait. Enfin.. Il voulait me protéger, et il pensait probablement que le seul fait de me mettre au courant de cette histoire ruinerait ses efforts. Et il a raison, je l'aurais jamais laissé se battre tout seul. Soupir amer, son ton se teinte d'une culpabilité naissante. J'ai l'impression de l'avoir abandonné au moment où il avait le plus besoin de moi. Et c'est ça, ma grosse erreur. C'est peut-être ça, qui change tout, qui m'empêche d'agir comme avant. »
Son sourire se défait, laissant place à une mine moins expressive. Et elle secoue légèrement la tête, comme pour effacer le flot de pensées négatives qui germe dans son esprit. « Et de ton côté ? Oh et euh. On va où, au juste ? »
Cette fois, ses paroles suintent d'inquiétude. Rencontrer des gens et s'amuser avec des inconnus, c'est pas son truc. Pas son truc du tout.