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| [TW âmes sensibles, jeune public, disturbing content] EL CEREBRO HUMANO [con : Nina] | |
| InvitéInvité | Sujet: [TW âmes sensibles, jeune public, disturbing content] EL CEREBRO HUMANO [con : Nina] Jeu 27 Juil 2017 - 15:46 | |
tan desproporcionada es mi mortalidad que mi esqueleto puede confundirse con un esqueleto de ballena Je m'appelle Poulkheria Victor. Vous me connaissez, évidemment. Je suis la prodige qui pleure et qui ne fait jamais rien. Évidemment que vous me connaissez. Qui ne me connaît pas ? Je suis la plus exposée des minables que ce campus compte, et Dieu sait qu'ils sont nombreux, ces pénitents pathétiques, ces serpents à sornettes qui se strient le dos de coups dans l'obscurité de leurs chambres closes. Mais moi, je le fais au vu et au su du peuple de Prismver, cette masse qui n'a pas de nom et qui n'en mérite pas, principalement parce que nous sommes tous les mêmes. J'aime cette agitation, j'aime ce malheur qui suinte et je m'en nourris comme de lait, je viens le laper sur les plaies et les fractures ouvertes, et Dieu sait que rien ne peut le remplacer, que rien ne peut prendre sa place, rien, rien ni personne sinon toi, Nina. Tu m'as tout appris, mon amour de soeur, tout appris, des gestes jusqu'aux sensations, et je sais qu'au fond, tout au fond, tu es bien la même que moi, exactement la même, excitée par le fléau que tu représentes, excitée par toi même, par le trou qui s'est ouvert quand tu t'es rendu compte que Papa ne nous aimait pas, ni toi, ni moi, ni personne.
Nina, Nina Victor, toi qui n'aimes que toi, tu fais une exception pour moi. Tu fais une exception pour Poulkheria Victor. Sache que je fais toujours de même. Je ne suis pas une bonne femme, c'est vrai, indéniablement, c'est vrai, mais au moins, tu le vois bien, je sais te rendre la pareille quand il est besoin de le faire, et tu conviendras, je sais que tu en conviendras, que, concernant ceci, je suis toujours pointilleuse.
Aujourd'hui, j'ai chaud, et je pense à toi. Ce n'est pas que je m'ennuie, non, pas aujourd'hui : je ne t'ai pas vue depuis longtemps, tu comprends, alors, tu vois, tu comprends, le temps commence à se faire long. Il n'a pas assez plu ces derniers jours, alors je n'ai pas dansé, je n'ai pas dansé dans l'herbe, et pourtant, tu sais, tu sais comme j'aime chanter et danser dans ma cathédrale de lianes quand la pluie tombe en trombes et me trempe indistinctement. J'y ai pris goût. Ça me change du soleil de San Francisco. Ici, tout le monde préfère se plaindre. Je le comprends, évidemment. J'aime me plaindre, moi aussi. Passionnément. Mais ils ne vont jamais jusqu'au bout. Ils ne profitent pas pleinement de la jouissance d'être triste. Ça me sidère, Nina, vraiment, ça me sidère, je ne suis pas prête à les entendre se justifier, à me sortir toujours les mêmes sornettes, celles qui leur coulent de la bouche, entre les dents qui brillent et les gencives qui saillent.
Bon.
Toujours est-il que je n'ai pas dansé. Alors je voudrais bien te voir, Nina, tu comprends. Alors, ma soeur, mon amour de soeur, explique-moi.
Explique-moi donc pourquoi je tombe sur toi cigarette à la bouche, cachée dans un coin dérobé. Tu sais que je viens souvent m'y ressourcer, tu le sais. Tu me connais, Nina Victor. Comme tout un chacun. Vous me connaissez tous. Ne niez pas. Je ne suis pas idiote. Personne ne vient ici. Personne sauf moi, Poulkheria Victor, la soeur de Nina Victor, la bonne à rien, seule dans la salle abandonnée, qui crie plus fort que les tables et les chaises.
Enfin, tu sais que je ne viens pas pour te souffler dans les bronches. Je porte un amour inconsidéré aux tragédies familiales. Rien ne me fait plus bander, sauf peut-être l'ouverture des charniers ; mais il n'y en a pas à Prismver, alors, faute de mieux, je me contente de la vie des autres, et c'est déjà bien suffisant. C'est que l'île sert de repère à des minables de toutes espèces, j'y ai de quoi me sustenter pour des mois. Dieu sait que les insulaires ont un don pour le dramatique.
Je venais seule avec mon martini et un verre qui m'était réservé, tu comprends, un verre à moi, rien qu'à moi, pour personne d'autre, tu comprends, pour personne d'autre, mais je consens à le partager, je peux comprendre, je peux, tu sais, je peux, seulement si tu m'expliques ce que tu fais là avec cette cigarette au lieu de venir me saluer, au lieu de t'inquiéter pour moi, de t'inquiéter pour ta soeur qui se languit de toi et de ta face inquiète, de la fatigue qui se lit dans tes yeux, si différents des miens, si fiers, pas prêts encore à assumer pleinement la prétention qu'ils dégagent, seulement si tu fais ta visite et que tu pleures avec moi, un peu, beaucoup, et qu'on parle de coups, et alors là, là, si tu m'écoutes, si tu fais ça, je partagerai mon verre avec toi.
Je ferai exception, comme tu sais si bien toi-même faire exception pour moi, et je te servirai un verre, un verre dans le mien, et tu boiras du martini avec moi, et peut-être, je dis bien peut-être, que je t'apprendrai à fumer correctement.
Tu ne sais pas à quoi tu t'exposes, Nina Victor. Je t'aime, tu comprends. Oui, tu comprends, je sais que tu comprends. Tu sais bien aussi ce que cela signifie. Je vais te faire mal, Nina. Je ne goûte pas l'amour heureux, je l'exècre. C'est la pire des corvées. Et toi non plus, tu n'en veux pas, de cet amour-là, Nina. Je le crois. J'espère qu'avec moi, au moins, rien qu'avec moi, déjà, juste ça, tu ne te retiendras pas. Fais-moi au moins cette faveur-là
Minute.
Je bois.
Tu sais que je te regarde. N'est-ce pas que tu le sais, Nina ? C'est inconfortable. Tu me donnes chaud. Alors vas-y, donne moi chaud, parle-moi de toi, et surtout, surtout, dis-moi.
« Qu'est ce que tu fais là ? »
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| | | InvitéInvité | Sujet: Re: [TW âmes sensibles, jeune public, disturbing content] EL CEREBRO HUMANO [con : Nina] Lun 31 Juil 2017 - 23:54 | |
Quelqu'un qui ne serait pas conscient de ma valeur penserait que j'ai des instincts de voleur. Ce n'est pas vrai, je vous arrête tout de suite, immédiatement : c'est faux. Tout ce que j'ai, je l'ai mérité, je l'ai gagné. Ce n'est pas moi qui ai pris ce paquet de cigarettes dans le sac de cet abruti. C'est lui qui ne l'a pas fermé, c'est le paquet qui est tombé. Et personne n'a remarqué. Moi j'ai tout de suite vu, parce que j'ai reconnu la marque, le paquet blanc et rouge, ce paquet qui était toujours posé à côté de Papa, ce paquet qui n'était jamais vide, même quand il criait sur tous les toits qu'il était ruiné. Moi je le connais ce paquet, et si personne ne l'a vu, alors c'est à moi qu'il revient, parce que je l'ai vu, je le connais, et j'étais juste à côté, alors c'était à moi de le ramasser. Et je l'ai fait, et je l'ai vite mis tout au fond de mon sac, et je suis vite rentrée au bungalow pour le cacher tout au fond de mon armoire. Cette nuit-là je l'ai ressorti, mais juste pour le sentir. Juste pour sentir l'odeur du tabac et du carton qui se mélangeaient. Et dès que l'odeur m'a attaqué les voies nasales, les souvenirs m'ont envahi la tête, et j'ai ressenti une forme de nausée sale. Puis j'ai entendu un bruit dans la pièce à côté, alors je l'ai rangé, et je suis retournée me coucher. Quelqu'un qui assisterait à ce spectacle aurait cru que je voulais fumer. Ce n'est pas vrai.
Les jours passaient et l'odeur restait dans un coin de ma tête, quelque part, entêtante. Parfois, lorsque j'étais seule, je le sentais encore, ce maudit paquet. Il en restait neuf à l'intérieur, comme les neuf vies d'un chat noir qui semblait me harceler et me traquer – sans raison. Comme une petite voix qui me disait « fais-le » et la mienne qui lui répondait « non jamais ». J'étais en cours et je me disais qu'il en restait neuf. Je rentrais de cours et je me disais que c'était tout ce qui rendait heureux Papa. J'allais me coucher et je repensais à l'odeur de fumée incrustée dans les rideaux, dans son fauteuil, dans sa chemise, dans l'atmosphère – dans mes poumons, dans mes cheveux, dans mon cartable. Je n'étais pas obsédée, non, loin de là. Moi, obsédée ? Jamais, enfin, je suis au-dessus de ça. Mais je continuais d'y penser, sans trop savoir pourquoi.
Un autre jour que ceux-là, encore, je décidai de me rendre à la bibliothèque pour travailler après les cours. Le chemin je le connais par cœur, je le fais tous les jours. Je traverse la passerelle, balayée par des brises calmes, mais intensifiées par la hauteur. Je sais exactement où je vais m'asseoir. Alors pourquoi je ne m'assieds pas ? Pourquoi je continue d'avancer ? J'avance vers nulle part, vers là où personne ne va. Enfin, si : je connais bien au moins une personne qui sait se rendre là. Je l'ai déjà vue seule, parfois accompagnée, prendre ces escaliers. J'ai déjà entendu les rumeurs sur ce qui s'y passait, sur la salle et ses objets agités. Je me dis qu'au moins, eux, ils n'ont pas de voix pour parler ni d'yeux pour regarder. Je pousse la porte doucement et je me dirige vers une table où je pose mon sac de cours. La chaise se déplace lentement : elle semble m'inviter à procéder. Je suis flattée de voir que même un simple meuble reconnaît ma valeur. Je lui fais l'honneur de m'asseoir et j'ouvre mon sac, et je sors mon cahier de cours de biologie, et un critérium. Tout est là, je n'ai plus qu'à commencer. Alors pourquoi je ne commence pas ? Je ne sais pas. Est-ce que depuis le début, j'avais prévu autre chose ? J'essaie de me convaincre que non, et en même temps, j'en sors une. Personne ne pourra me voir le faire, ici. Ce genre d'occasion, je n'en aurai pas souvent. Si c'est juste une, je ne peux pas finir comme Papa, pas vrai ? Je me demande ce qu'il dirait s'il me voyait. Si c'est juste une, personne ne peut rien me dire, de toute façon : je l'ai méritée, après tout. Je peux toujours commencer après, non ? Et puis personne ne saura rien, de toute façon, alors je ne sais pas pourquoi j'essaie de me justifier à moi-même comme ça.
Je l'allume, et j'aspire la fumée. Enfin, j'essaie. Enfin, j'y arrive : vous pensez qu'une simple cigarette peut me tenir tête ? Je crois que j'en ai trop aspiré, parce que j'ai envie de tousser. Comment il fait, Papa ? Je n'arrive pas à me retenir, je tousse, et avec chaque éclat de ma gorge, un petit nuage de fumée m'échappe et me nargue. Je réessaie, je vais bien finir par y arriver. Je suis sûre que c'était pareil pour lui, de toute façon. Je suis même sûre que je m'en sors mieux que lui. Cette fois je ne tousse pas. La fois d'après non plus – mais ça commence à me monter à la tête. J'entends un bruit à côté de moi, mais je l'attribue à un de ces objets hantés qui anime régulièrement la pièce.
J'entends une respiration à côté de moi. Je reconnaîtrais son souffle même dans la plus étendue des foules. Je reconnaîtrais ses pas, son moindre geste. Je la connais par cœur : que voulez-vous, c'est ma sœur après tout. Je tourne lentement la tête vers elle. Évidemment. Évidemment qu'il fallait qu'elle arrive maintenant. Je la dévisage et c'est réciproque. Que dire ? Je n'ai pas de mots. Je reste interdite, mais je ne dévoile pas ma surprise. Quelle surprise, de toute façon ? Je vous l'ai dit, je savais déjà qu'elle venait parfois ici. Je ne peux rien dire, car tout parle pour moi : la fumée piégée par les rayons de lumière et la poussière, le paquet posé devant moi, et évidemment, la cigarette pincée entre mes doigts. C'est compliqué. Ca a toujours été comme ça, toi et moi. Normalement, ça devrait être toi qui est assise là, et moi qui te surprend la mort aux doigts – non ? Normalement, ça devrait être moi qui est debout là-bas, et toi qui me regarde comme ça. Que répondre à tes yeux de feu, Ria ? Peut-être que tu t'en rends compte, peut-être pas, mais tu as toujours eu son regard à elle, même quand tu ne le veux pas. Et moi j'ai toujours eu le sien à lui. Et peut-être que c'est pour ça que je suis assise ici, comme ça. Peut-être que c'est aussi simple que ça. Je ne laisse rien et tout paraître en même temps. Je semble imperturbable, c'est vrai – mais elle connaît mon pouls, elle connaît mes jambes qui se tendent. Je semble immobile mais elle connaît mes battements de cils qui vacillent. Et je le sais, parce que je la connais autant qu'elle me connaît.
Et je sais qu'elle le sait, qu'au fond je l'attendais, et elle sait que je sais, qu'au fond elle me cherchait. Elle n'a qu'un verre avec elle et elle doit s'en mordre les doigts. Elle fait bien. Je les lui ferai peut-être même avaler, si elle ne s'excuse pas. Elle me parle et je veux lui répondre, mais je me rends compte que ce que j'ai dans les mains se consume plus vite que je ne le voudrais. Je connais la rapidité de propagation des flammes, pourtant – je ne m'attendais pas à ça. Plutôt que de lui répondre de suite, j'essaie de fumer encore. Ca me brûle les lèvre et ça ne rentre pas. Comment fait donc Papa ? Ca m'énerve, je pensais que ce serait cent fois plus facile que ça. Ca m'énerve de rater devant Poulkheria. Ca m'énerve qu'elle me voie comme ça. Non, pas comme ça. Il faut que je vous explique parce que vous confondez tout. Parce que vous n'êtes pas Nous. Ce n'est pas de votre faute, si vous êtes nés du mauvais sang, si vous avez poussé de la mauvaise graine. Il faut bien des moutons pour occuper les bergers. Ca m'énerve qu'elle me voie comme ça, d'une telle manière que je ne peux rien lui répondre d'autre que quelque chose de cinglant, à quoi elle répondra par autre chose de cinglant, et j'enchaînerai, elle enchaînera – puis je l'enchaînerai, et elle me brûlera le bout des doigts. Ca m'énerve alors j'écrase violemment ma cigarette sur la table devant moi. Je l'écrase, je l'enfonce, ça s'effrite, ça se décompose entre mes doigts. Ca pue la mort. Contrariée, je feule un semblant de réponse.
- Il paraît que ça détend. Alors je me détends.
De mes lèvres, c'est une insulte. Et tu le sais, et je sais que tu le sais, et tu sais que je le sais, et tout ça on le sait bien mieux que vous, et je n'aurais pas à le répéter encore et encore si vous vous mêliez de vos propres affaires plutôt que de nous interrompre. Mon ton est sec et mes mots, de glace. C'est ma sœur et je peux bien me permettre de lui dire ce que je veux. Elle est à moi toute seule, alors j'en fais ce que je veux. Je pianote la surface de la table, clavier invisible soudainement sollicité par une fugue en ré mineur inaudible.
- Assieds-toi.
Rejoins-moi Ria.
- Et toi qu'est-ce que tu fous là ?
Viens à moi Ria.
Parle-moi Ria. hrp : hophophop petit matching en négatif qui rend les dialogues bien chiants à lire ♥
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| | | InvitéInvité | Sujet: Re: [TW âmes sensibles, jeune public, disturbing content] EL CEREBRO HUMANO [con : Nina] Mar 1 Aoû 2017 - 1:25 | |
me hice puta para no dormir sola Tu sais que je ne suis pas une idiote, Nina. Tu le sais, et je sais que tu le sais, et c'est pour cela, d'ailleurs, que nous nous connaissons toujours comme si nous vivions toutes les deux. Le temps passe, oui, mais les soeurs Victor ne se quittent jamais. Je sais que tu me regardes, aussi, depuis le début, depuis toujours, depuis le soleil de San Francisco, et que tu te nourris de moi comme je le fais de toi, peut-être plus, certainement, peut-être plus encore, tout ça parce que tu t'ennuies, Nina, tu t'ennuies, et que tu sais que je te laisse des pistes pour te libérer de ta prison de verre. Vas-y, frappe, et frappe-moi, si tu l'oses, tu verras, tu verras ce que je voulais dire, tu verras, quand je disais que j'avais chaud, que j'en étais humide jusqu'au crépuscule des cuisses.
Je sais que tu as honte, Nina, et tu sais, de ton côté, tu sais très bien que si je ne dis rien, c'est parce que je me moque de toi, de tes gestes, de la maladresse avec laquelle tu tiens ta cigarette, de la gêne qui se lit sur ton visage et qui déforme ton calme d'impératrice byzantine quand tu te décides à l'écraser, par lâcheté, par faiblesse, parce que les yeux de Maman qu'on a greffés sous mon front ont fait plier tes désirs et ta détermination.
Tu sais que je gagnerai toujours, Nina. Ton égo, si tu savais comme je le vois se tordre pour m'impressionner, si tu savais, Nina, si tu savais comme c'est facile d'y planter les dents, si tu savais qu'il me suffit d'être là, avec toi, et de te regarder, pour que la mitrailleuse s'enraye. Je parle, je parle, mais ça aussi, Nina, je sais que tu le sais. Ce n'est pas la peine d'ergoter. Mais j'aime les discours inutiles, surtout quand on les dit pour se faire du mal. De toute manière, que je parle de toi ou que tu parles de moi, ce n'est rien d'autre que du métadiscours.
Je sais que tu veux que je vienne. Alors je viens. J'obéis, docilement, comme la petite soeur bien élevée que je ne suis certainement pas, comme la bonne femme que je ne serai jamais. Plutôt crever. C'est évident. Tout le monde le sait. Surtout toi. Et puis, tu comprends, rien ne me fait plus plaisir que de m'asseoir à côté de toi, de te sentir qui tressaille, de nous voir assises toutes les deux comme une fois, comme perchées sur le toit du monde, à s'exposer sur le trône de la reine de Saba. Je ne veux que toi, Nina, rien que toi, et quand tu n'es pas là, tu comprends, tu le sais, j'ai tendance à m'ennuyer, à m'ennuyer très vite, et à faire des ravages pour me consoler.
Allez, plus vite que ça. Fais moi mal, Nina, je te dis, et plus vite que ça. Les autres ne font pas ça comme toi, pas comme je le voudrais, pas aussi fort, pas aussi bien, pas aussi parfaitement que toi. Parfaitement, je dis bien parfaitement, peut-être pour te flatter, peut-être surtout pour te rappeler Papa, parce qu'alors, parce que peut-être alors tu finiras par te décider à me blesser pour de bon.
Minute.
Je bois.
« Tu le sais, non ? Tout le monde le sait. Je bois, et je bois seule. La compagnie des minables me tétanise, tu comprends ? Bien sûr que tu comprends. Evidemment. Evidemment que tu comprends. »
Je te regarde, Nina, pianoter, et trembler. Tu sais comme j'aime danser aux pieds du volcan. Tu n'es pas moins possessive que moi. Je sais que tu me veux. Moi aussi, je te veux, Nina. Rien que toi, juste toi, personne d'autre.
Arrête de me regarder comme ça. Arrête de me regarder comme ça.
Nina, puisque je te dis d'arrêter de me regarder comme ça.
« Arrête de me regarder comme ça. Tu veux que je te serve un verre ? Attends que je termine le mien. J'en ai besoin, merci bien. »
Voilà.
« Voilà. Tu vois ? Tu vois que je ne t'oublie pas ? »
Je vais te servir, Nina. Je vais remplir ton verre. Mais ta présence me rend capricieuse, et tu sais Nina, tu sais, que quand je suis d'humeur capricieuse, eh bien, je me permets quelques fantaisies. Alors en servant ton martini, Nina, je mets le feu à ton verre, comme cela se fait, tu le sais, par endroits, pour contenter la curiosité des têtes brûlées en recherche d'adrénaline. Et tu vas le boire, Nina. N'est-ce pas ? Bien sûr que tu vas le boire.
« Si tu le finis cul-sec et sans prendre feu, je t'apprendrai à fumer. Ça te dit, n'est-ce pas ? Forcément. Sinon quoi ? Si tu refuses, Nina, je pleure. Tu ne veux pas que je pleure, Nina, n'est-ce pas ? Non, tu ne veux pas que je pleure. »
Tout ça n'est rien d'autre qu'un cercle. Tu as les mêmes yeux que lui, et moi j'ai les mêmes yeux qu'elle. Si tu savais comme je les aime, et comme tu me rappelles les jours où je prenais des coups sous le soleil de San Francisco, les jours où je hurlais à la poussière en savourant chaque minute, chaque seconde, chaque portion de ces instants douloureux qui me donnaient chaud comme aucun n'en était capable, aucun autre, pas un seul, pas un seul qui puisse dépasser ceux-là, dont je suis encore nostalgique, parfois, quand je sens mon bas-ventre qui me brûle et qui prend feu.
Peut-être que si tu prends feu, je me mettrai à pleurer.
Je t'aime, Nina. Je te dirais "comprends-le", si tu ne le savais pas déjà. Je prends plaisir à ce que l'on ne comprenne pas, à ce que l'on ne me comprenne pas, mais je ne peux en profiter pleinement que si je sais que tu es là, Nina, que tu existes avec moi, que tu es là, ma soeur, à vivre dans le même monde que moi, pour partager ma malédiction, et surtout pour que je puisse dire que sur cette maudite planète, dans cet univers de lâches et de minables infatués, il n'y a que Nina Victor pour me comprendre, moi. Alors viens, Nina, viens avec moi crever les boursouflures, viens avec moi chasser sur nos terres seigneuriales, viens avec moi, Nina, si tu veux bien, après ton verre de martini, que tu dois finir si tu veux me rejoindre et chasser avec moi.
Nina, je ne peux chasser qu'avec toi.
« J'ai ramené toute la bouteille avec moi. »
Elle est pleine.
Tu veux que je t'appelle Papa ?
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| | | InvitéInvité | Sujet: Re: [TW âmes sensibles, jeune public, disturbing content] EL CEREBRO HUMANO [con : Nina] Mer 2 Aoû 2017 - 23:22 | |
- Tu le sais, non ? Tout le monde le sait. Je bois, et je bois seule. La compagnie des minables me tétanise, tu comprends ? Bien sûr que tu comprends. Evidemment. Evidemment que tu comprends.
Bien sûr que je le sais. Bien sûr que je la comprends. Il n'y a que moi, ici, dans cette pièce, dans ce dialogue, dans ce cadavre exquis de textes, qui soit bien capable de la comprendre : c'est ma sœur, je vous dis, mon unique sœur. Nous sommes nées de la même chair et de la même âme. Comment ne pas comprendre ce dégoût catégorique pour les rats qui grouillent à nos pieds ? Comment ne pas le partager, ce sentiment de ne pas être à sa place parmi les ratés, de devoir supporter la compagnie de leurs voix de crécelle, le témoignage de leurs exploits de faïence. Dans le restaurant où nous dînerons toutes les deux en riant, ils se tapiront dans l'ombre pour faire notre vaisselle. Je sais bien qu'il n'y a que Moi pour toi Ria. Je sais bien que tu es en train de me dire que c'est pour ça que tu es là.
Je continue de jouer avec mes doigts, rythmant le fil de mes pensées. Dieu, qu'elle se dépêche de boire et de finir de tergiverser. Vous croyez que j'ai peur de boire ? Vous ne me connaissez donc vraiment pas. Vous croyez que je n'ai jamais bu ? Vous n'avez donc jamais entendu parler de Nina. Pensiez-vous vraiment que, pendant toutes ces années, je ne faisais qu'observer ma sœur se détruire l'intérieur, sans savoir de quoi ni comment ? C'est mon intérieur, c'est ma chair je vous dis. Vous êtes ma foi bien aveugles si vous pensez que mon amour pour elle puisse s'arrêter là. Sa main est ma main, son foie est mon foie. Et bientôt son verre sera mien. Allez, merde, j'ai pas que ça à faire de la regarder boire. J'ai déjà goûté au sang de dieu, mais ce n'est rien, rien que du jus de raisin par rapport au sien. C'est le sien que je veux de sa (ma) main. C'est la fille de ma mère et de mon père, alors elle me doit son (mon) verre. Parfait, elle s'active enfin.
J'observe attentivement ses gestes pendant qu'elle s'exécute. Je la dévore du regard, je l'engloutis, je l'avale et je la déglutis. Elle dit qu'elle ne m'oublie pas. Elle a intérêt, parce qu'elle sait très bien que je ne pardonne pas. Elle sait très bien que je n'accepterais pas un tel affront. Je n'ai pas besoin de commenter - elle connaît bien cette chanson. Dépêche-toi, verse donc, ma gorge me gratte. Et voilà qu'elle s'amuse à un autre de ses jeux puérils, ou plutôt une autre de ses fantaisies futiles. Je lui arrache le verre des mains avec tendresse. Que la boisson soit en feu, ça m'est égal. Mais je n'oublierai pas le fait qu'elle se permette de me poser un ultimatum, ni de se moquer si explicitement de moi. Oh ça ma sœur, tu vas me le payer, tu vas le payer en monnaie, en liquide, en nature. Je l'inscris dans mon livre de comptes et je garde le reçu. Tu vas la payer celle-là, tu vas t'en mordre les doigts, et tu vas m'avaler ça, sans discuter : c'est décidé. Je ne te laisserai pas faire de manières, je ne te laisserai pas fuir ma lumière. Qui d'autre que moi sera là pour te remettre à ta place ? Qui d'autre que moi sera là pour seulement la connaître, ta place.
Je tiens le verre que je convoitais tant mais c'est elle que je regarde comme si je me préparais à la boire. Vous croyez que j'ai peur du feu ? J'en ai une source infinie, là, juste devant moi, juste ici. Vous croyez que j'ai peur de ma sœur ? Abrutis – je l'aimerai toute ma vie. Je le porte à mes lèvres et je m'interromps. Elle m'a fait attendre, non ? Elle s'est jouée de moi, non ? Je ne lui rends que la monnaie de sa pièce. Je fais mine de le reposer.
- Tu as intérêt à ne pas pleurer. Tu sais très bien à quel point ton vacarme peut m'agacer.
Je lui dévoile un sourire satisfait. Elle sait très bien que je la laisse toujours pleurer. Elle sait très bien que son vacarme fait émerger les pires œdèmes de mon âme, et les polypes qui décorent mon cœur noir et pourri, et les kystes dégoulinants de pus qui ornent mon esprit. Il y en a-t-il vraiment une de nous deux plus sale que l'autre ? Quand l'une aime la douleur à en mourir, et quand l'autre ne vit que pour faire souffrir ? Quelle belle paire de cœurs sales. Quelle belle harmonie entre le feu et l'essence qui le répand.
Ca doit bien faire cinq minutes qu'elle attend. Je vous vois, je vous lis derrière l'écran : vous pensez que j'ai peur du feu. Vous pensez que j'ai peur de le boire, de brûler de l'intérieur, que mon honneur se consume et s'échoue en un tas de cendres grises et laides. Ou peut-être que c'est à vous que ça fait peur, esprits malingres, décharnés de tout goût pour la beauté. Peut-être que vous êtes ceux qui êtes incapables de vous démarquer et de prouver votre valeur. Moi, ma valeur, je la prouve tous les jours. Mon honneur, je l'entretiens toutes les heures. C'est à la minute que je danse avec ma dignité, c'est en trois temps que je valse avec ma fierté. Vous croyez que j'attends parce que j'ai peur, mais je contrôle tout, tout ce qui se passe ici, rien ne m'échappe, tout m'obéit. J'attendais Poulkheria et elle m'est venue, je voulais un verre de son martini et je l'ai eu. Alors je le bois, son feu de malheur. Je vous l'ai dit : je n'ai pas peur. C'est un défi, et j'ai mon honneur. Je le bois et ça me pique la langue, ça me gratte la gorge, mais je le bois. Je m'en engorge, de son feu. Pour toutes les fois où il m'a brûlée, n'est-ce pas magnifique qu'aujourd'hui j'en sois hydratée ? Je sens mon intérieur qui se réchauffe et ma vigilance qui commence à fondre lentement, exposée au soleil du bonheur de ma sœur, et à la chaleur de l'alcool qui prend place en moi. J'ai chaud comme à San Francisco. Je vous ai dit que j'avais déjà bu, mais je n'ai jamais dit que c'était un passe-temps régulier. Vous comprenez : je dois être au-dessus de Papa. C'est une de mes seules joies. Alors la liqueur qui attaque lentement mon œsophage, je la sens. Ma gorge en flammes comme feu mon martini, je la sens. Et étrangement, ma sœur qui a chaud aussi : je la sens.
Je pose le verre bruyamment et ça claque la table d'un tintement violent.
- Et maintenant ?
Et maintenant quoi ? Maintenant j'ai ton haleine sucrée, maintenant je suis penchée vers toi et je te souffle sur le visage, maintenant ma voix est enrouée par nos incartades au règlement. Maintenant, tout de suite, à ce moment-là Ria, que diraient Maman et Papa ? Tu te rappelles ? Tu te rappelles des leçons de morale, avant que je parte, sur les personnes à fréquenter, les conduites à éviter ? Tu as eu les mêmes, ma sœur, et je le sais, et tu le sais, et tu sais que je le sais. Et tu sais comment je sais. Parce que tu sais que je sais qu'ils t'ont dit la même chose, et que c'est pour ça que tu le fais. A toi et seulement à toi je l'avouerai : tu m'as surprise, et je ne savais plus où me mettre. Mais maintenant, maintenant je sais, je sais exactement où aller et que faire, parce que je l'ai décidé et je l'ai dit. Je vais me détendre un peu, Ria. Je vais me laisser aller un peu. Pour une fois, et parce que je suis avec toi, je vais faire tout ce que je veux.
D'un geste délicat, j'attrape une mèche de tes longs cheveux, longs comme les miens, noirs comme les miens, coupés comme les miens, doux et épais, et je joue, je l'entortille autour de mes doigts qui sentent le tabac. Je sais bien que ça ne te fait rien, je sais bien que ça ne tire pas, je sais bien que c'est d'une manière bien pire que tu aimes qu'on te fasse ça. Je sais bien que ce genre de préliminaires est une torture pour toi. Je ne souris plus depuis longtemps, mais j'ai le regard taquin et je sais qu'elle aime bien. Je sais ce que tu veux, mais j'ai décidé que ça attendrait un peu. Ca doit bien faire une minute que j'attends. De mon autre main j'avance le paquet vers elle, ce paquet maudit, ce paquet qu'elle connaît par cœur elle aussi. C'est un ordre et je ne lui laisse pas le choix. Qu'elle ne discute pas, cette fois.
- Dépêche-toi.
Je tire sèchement sur la mèche enroulée entre mes doigts. Elle pense avoir des choses à m'apprendre ? Alors qu'elle le fasse vite, avant que je m'énerve, et que je perde le contrôle de moi, et d'elle, et de tout. Elle pense avoir le droit de me faire attendre ? Je n'ai pas de temps à perdre : je dois me détendre.
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| | | InvitéInvité | Sujet: Re: [TW âmes sensibles, jeune public, disturbing content] EL CEREBRO HUMANO [con : Nina] Sam 5 Aoû 2017 - 2:25 | |
los ángeles comulgan con la especie humana pero no existe la felicidad terrestre N'abandonne pas, Nina, n'abandonne pas, ou je ne m'abandonnerai pas, moi, et je ne chercherai plus à comprendre, même si je sais, et que je sais que tu sais, à quel point le jeu peut aller loin, Nina, et ce n'est pas la première fois, ça ne serait pas la première fois qu'on irait si loin que ça.
Le bon côté du masochisme, et tu le sais aussi bien que moi, le bon côté du masochisme, c'est que le masochiste ne perd jamais. Quoi qu'il fasse et quoiqu'il arrive, il lui pousse une échappatoire, où que ce soit, et, si ce n'est pas dans le nid qu'il porte entre les reins, tu vois bien, il s'en fait un autre part. Le mien sera le tien, si tu veux bien, alors ne crois pas me faire attendre, quand la seule chose que tu fais, la seule, c'est me mettre en appétit.
Je vais sortir la cigarette. Je vais même en sortir deux : une pour toi, et une pour moi. Tu verras que je sais partager. Tu verras. Enfin, tu verras, tu verras, tu pourras confirmer ce que tu sais déjà, Nina, ce que tu sais déjà de moi : tout et surtout rien, le plus que l'on puisse savoir de son propre soi. Le tabac froid et le martini. L'odeur de notre chez moi, et je dis bien chez moi, puisque sans toi, il n'y a personne, personne, rien, simplement deux chaises vides en attente de n'en former qu'une seule, de se réunir et de prendre feu. Un accident domestique. Toi et moi, Nina, nous sommes un accident domestique.
Je ne crois pas au paradis perdu. Il y a les soeurs Victor, l'odeur de tabac qui se dégage de Papa, la transpiration qui coule sous les aisselles de Maman, les perles de pluie sur son front, et le soleil de San Francisco. Le reste n'est que fioritures. C'est du bruit, tu comprends, du bruit, et si j'aime me percer les tympans, c'est avant tout pour oublier que le silence m'assourdit.
Et puis, je sais que tu n'aimes pas vivre sans bruit.
Un martini pour toi et moi, que tu as bu en croyant me pendre à tes lèvres, tes lèvres qui n'ont pas pris feu, c'est beaucoup de bruit pour rien. Il en faut bien davantage pour te contenter. Il en faut bien davantage pour contenter Nina Victor, vous comprenez ? Il en faut bien davantage.
Habituellement, tu le sais, c'est évident, tout le monde le sait, je ne m'encombre pas des basses-œuvres. Mais ces deux cigarettes-là, je peux bien les allumer pour toi, du bout des doigts, et j'en ai chaud, tu comprends, j'en ai chaud comme si j'appuyais autre part qu'au bout d'un couple croisé de Marlboro Gold, toujours sans S, inévitablement, comme les fumait Papa sur le canapé, à attendre que le ciel s'effondre au milieu du salon, sur le toit de l'appartement. Je ne vais pas te faire attendre, oh, non, je ne vais pas te faire attendre : je ne suis pas une bonne femme. Je connais ton jeu par coeur, Nina, et ma main est encore pleine. Quand je vois, c'est souvent avec tes yeux, Nina, mais quand il s'agit de jouer, je retrouve le regard de Maman, celui de la mère de famille fatiguée, toujours fatiguée, et j'attends de revoir dans l'éclat du tien les étincelles attentistes de celui de Papa, toujours dans l'expectative, servi, toujours servi, ou bien sur le point de l'être, servi. Je ne suis pas de cette race médiocre, de cette plèbe abâtardie qui voudrait reprendre la main, et qui pense que te regarder droit dans les yeux et simplement refuser, tout refuser, d'un seul bloc, leur ouvrira les portes de ta frustration, de la colère de Nina, parce que je sais, moi, je sais, qu'en ce monde, il n'y a que les Victor pour savoir jouer. Et je sais que tu le sais, je sais que tu sais que pour toi il n'existe que moi, et que pour moi, malgré tout, malgré les coups, malgré les flammes, et la salle abandonnée, il n'y aura jamais que toi pour me consoler.
Prends-la, ta cigarette, prends-la, elle est pour toi, rien que pour toi, la seule qui dispose du droit de la fumer avec moi.
« Je te préviens, Nina, je ne le dirai pas deux fois. Je tire, j'inspire, j'expire. »
Je tire, j'inspire, j'expire.
Regarde-moi, Nina. regarde-moi. Je m'appelle Poulkheria Victor. Je suis la plus jeune des deux soeurs Victor, celle qui montre à son aînée comment on tire sur une cigarette.
« Tu vas y arriver, cette fois, tu vas y arriver ? Bien sûr que tu vas y arriver. Sinon, Nina, je te préviens, je pleure, et tu ne vas pas apprécier. Tu sais que pleurer me rend capricieuse. »
Et cette fois, Nina, tâche de tirer plus fort sur ma mèche. Je sais que tu veux te délasser, Nina, alors détends-toi, détends-toi, et détends-moi, prends-moi les cheveux poing fermé et fais claquer mes os sur les chaises, comme il n'y a que toi pour savoir le faire. Je ne suis pas venue pour rien, et toi non plus, Nina, tu n'es pas venue pour rien. Tu ne peux rien me cacher. Nina Victor ne se déplace jamais pour rien, vous comprenez ? Elle ne se déplace jamais pour rien.
Ton haleine a le goût des larmes. Je te sens ruisseler sur ma peau, la même que la tienne, presque exactement, qui ne brille toujours pas malgré la chaleur de la pièce. Parce qu'il fait chaud, Nina, il fait chaud. Tu me donnes chaud, affreusement chaud, chaud dans les mollets, chaud dans le bas-ventre à l'orée d'éclater, de s'ouvrir et de déferler sur le tien qui se ferme, toujours froid, toujours inaccessible, dont j'entraperçois les grilles, moi et moi seulement, parce que je suis Poulkheria Victor, la seule qui puisse entrer dans la forteresse par les portes dérobées, les trous dans les murs et les meurtrières, ouverts à mon unique discrétion, à moi qui les connais comme si je les avais faits, et certains, je l'admets, je les ai creusés moi-même, à même la peau presque exactement la même que la mienne.
Et je souffle ma fumée juste là, entre ton cou et ton occiput, en plein dans la nuque que je regardais, la tienne, évidemment, jusqu'à ce que tu me rejoignes chasser, et que nous fumions toutes les deux, ta main dans mes cheveux et la mienne sur ta cuisse, prête à décocher la flèche entre les deux yeux du premier minable venu, celui qui pourrait oser, on ne sait jamais, gâcher ce moment d'intimité qui ne se partage pas, certainement pas, avec ce type de rampants.
Je ne partage vraiment qu'avec toi, Nina, le feu qui me vient du bout des doigts.
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| | | InvitéInvité | Sujet: Re: [TW âmes sensibles, jeune public, disturbing content] EL CEREBRO HUMANO [con : Nina] Mer 16 Aoû 2017 - 0:14 | | Car le sang bout dans nos veines Car il faut briser les chaînes Elle se hâte, à ma convenance, et à la sienne également. Mes désirs sont certes des ordres, mais mes ordres sont ses désirs, alors tout se rejoint, tout se confond. C'est bien à ça que je sais qu'on est faites pour porter le même nom. Parce que sans rien dire, nous nous disons tout. Les mots que nous échangeons ne sont jamais qu'une suite de notes en clef de fa, une ligne de basse qui rythme discrètement nos pas, nos passions, nos passe-temps, et nos passagères humeurs, frémissantes et bondissantes, qui jamais ne cessent de se confronter les unes aux autres, et de se complémenter les unes les autres. Brûle, brûle, Babylone brûle du bout de tes doigts. Ce que tu fais n'est rien pour toi, et pourtant, tous les sens que ça a ! Inconduite et avilissement jouent au creux de tes phalanges pyromanes, Ria. Et face à cette déchéance de tout ce que je suis, de tout ce que tu as appris, que dirait Papa, mais que dirait-il donc, que penserait-il donc, en voyant maintenant ses deux filles, prunelles de ses yeux assombris par l'amertume, trésors empoisonnés de sa vie miséreuse ? Cette interrogation me hante et me harcèle, alors que j'en connais la réponse depuis bien longtemps : il se mettrait dans tous ses états. Mais ce n'est peut-être pas la réponse en soi qui me travaille, c'est peut-être plutôt la question qu'elle soulève. Ça te ferait encore ressentir quelque chose, toi ? Parce que moi, je ne sais pas. Je ne sais plus vraiment si ça me ferait quoique ce soit.
Quelque chose en moi jubile et frissonne lorsque l'odeur des bris de tabac, prenant feu, attaque mes sens. C'est une odeur délectable et détestable, habituelle et pourtant nouvelle. C'est une poésie qui rend mon esprit bavard, engoncé sous une avalanche de rimes faciles et qui pourtant bercent mes pensées. C'est une source d'apaisement et de tumultes qu'elle me tend, et que je lui prend violemment, sans soin ni déférence. Ce sont des mots que je n'ai plus besoin de prononcer avec elle, les « donne-moi ça » qu'autre fois je lui susurrais à table, sans jamais ménager son tibia. J'ai toujours su prendre soin de ma Poulkheria. Je fais face à ses provocations et je ne lui répond pas, parce qu'elle a déjà la chance que je l'autorise à m'apprendre quoique ce soit. Tu souhaites donc tant pleurer, ma sœur ? Je pourrai peut-être faire quelque chose pour ça, si j'en ai l'envie. Enfin : si tu m'en donnes l'envie, déjà. Laisse-moi d'abord profiter de toi.
Je n'en oublie pas pour autant l'ordre qu'elle m'a donné. C'est en trois temps que je dois la manipuler. C'est bien le seul ordre que de sa part je pourrais accepter, bien que je n'aime pas, je n'apprécie pas, oh non, je déteste ça, la manière dont elle l'a formulé. Je ne l'oublierai pas – c'est noté. Une rigueur sévère contracte mes os et mes muscles alors que sa fumée caresse ma peau et l'embrasse, tandis que le bout de sa cigarette s'embrase. La facilité avec laquelle elle me dépasse m'agace. Et en même temps, je ne m'en sens que plus moi, que plus à ma place. Parce qu'elle est Moi et que je suis Elle, parce que ce qu'elle sait je le sais, et ce que je sais elle le sait, parce que nous nous confondons en un seul être merveilleux, duel et uni, miséricordieux et impitoyable. Je répète ses gestes, mon exécution est identique à ce qu'elle m'a ordonné. Non, vous ne rêvez pas, ou alors je rêve autant que vous : c'est bien ma cadette qui me dirige, là, maintenant. Oui, vraiment. Mais je pense que vous savez déjà ce que j'en pense.
Profite, profite de me dominer pour ces quelques minutes, profite, profite de ma patience, petite pute. Profite du calme avant la tempête, profite que la situation soit à ton avantage. Profite que je t'autorise à empuantir mes cheveux, comme Papa le faisait lorsqu'il m'engueulait, comme j'ai toujours rêvé de lui faire, et peu importe s'il commence à ne presque plus en avoir, de cheveux. Comme peut-être toi à son âge, si on continue comme ça. Est-ce que tu les sens, mes ongles qui trouvent lentement leur place au creux de ton cuir chevelu, est-ce que tu la sens, la pulpe de mes doigts qui s'enfonce dans ton crâne, est-ce que tu les sens, mes mains d'habitude si propres et maintenant si sales, voyageant dans tes racines parfumées, prenant doucement place au plus près de toi ? Moi je les sens, ses doigts fins qui m'explorent, qui attisent ma jalousie et qui creusent ma faim. Combien de dégénérés a-t-elle flatté avec ces mains ? Combien en touchera-t-elle demain ? Et moi, et moi alors ? Et moi, comment est-ce qu'elle me contentera, quand encore on se séparera ? Je m'aggripe, je m'accroche, je l'empoigne, et ce n'est pas dans sa nuque que je disperse ma fumée, c'est dans ses yeux qui ne demandent qu'à mouiller, c'est au bord de ses lèvres entrouvertes, c'est sur ses joues et dans son nez. Sa technique fonctionne, et cette fois je le sens bien, ce brouillard empoisonné, qui me pénètre et m'imprègne, avant que je ne le lui vomisse à la gueule, comme elle le mérite. Et moi, je n'ai le droit qu'au bout de tes doigts ? Je n'ai le droit qu'à deux menaces, un ordre, et on s'arrête là ? Et moi, alors, qui ne sait fumer qu'avec Ria, tu penses que je ne savais vraiment pas ? Tu penses que je ne me servais pas de ça, pour avoir un peu de ses attentions, pour avoir le droit de faire des caprices, moi aussi, pour avoir le droit de réclamer, moi aussi ? Tu ne penses pas ? Et tu penses bien, lecteur, tu penses bien, parce que si tu penses que je m'abaisserais à ça, c'est que tu mérites une bonne leçon.
Je n'ai jamais eu besoin d'elle pour ça, tout ce qu'elle m'a dit je le savais déjà. Ce n'est qu'une fantaisie passagère, pour occuper le temps : voilà, c'est un passe-temps. Je n'ai pas que ça à faire, d'avoir besoin de qui que ce soit, que ce soit Poulkheria ou n'importe qui d'autre. Enfin, les autres, déjà, je ne les regarde même pas, je n'y pense même pas. Qu'ils souffrent, qu'ils brûlent, qu'ils crèvent, qu'ils continuent de se tapir dans leur peur de moi, et dans leur peur de nous. Qu'ils continuent de subir ces stimulations de leur imagination auxquelles ils n'avaient jamais été prêts, qu'ils continuent de subir leur petit quotidien minable et sans intérêt. Qu'ils fassent ce qu'ils ont à faire, mais je t'en prie, Ria, je t'en prie, ne t'en mêle pas. Cesse donc de te mêler de tout ça. C'est à moi que tu reviens, toujours, encore et toujours, et pour toujours. C'est à moi de tout t'apprendre, pas l'inverse, certainement pas, tu rêves si tu y crois, parce que c'est moi la plus vieille, c'est moi qui ai tout fait en premier, c'est moi qui t'ai toujours précédé.
- Sers-moi.
Sois à mon service, sers-moi un verre, serre-moi contre toi. Qu'est-ce que je veux dire ? Il n'y a que toi qui le sait, parce qu'il n'y a qu'à toi que je parle comme ça, parce qu'il n'y a que nous pour nous comprendre. Parce que tu me suis et que je te devance, parce que tu es ma petite sœur, parce que mon cœur est ton cœur, et ta main est ma main, et ma voix est ta voie, la seule que tu aies le droit d'emprunter devant moi, ma sœur, la seule, ou sinon gare à toi. Gare à tes prouesses pyrotechniques, qui t'ont toujours échappé lorsque tu te tordais de douleur, ma sœur. Gare à cette vieille salle et ses objets vivants, gare à son bois sec et ses rideaux flétris. Gare à ma rancune. De mon unique main libre je disperse les cendres sur le côté – sur mon cahier. Je m'en fous. Je ne regarde même pas. Ce sont ses doigts que je regarde, ce sont ses lèvres, c'est son souffle contrôlé et habitué. Ca ne lui gratte même pas, elle ne tousse même pas. Alors pourquoi j'ai toussé, tout à l'heure, moi ? J'ai envie de la frapper au ventre, pour voir si elle ne toussera toujours pas. J'ai envie qu'elle s'étrangle, j'ai envie qu'elle se crache dessus, j'ai envie qu'elle n'y arrive pas. Un sourire agacé m'échappe, et elle le connaît bien celui-là, elle sait bien qu'il annonce nos habituelles bacchanales. Elle sait bien que je m'impatiente, mais que je ferai tout pour l'impatienter encore plus, elle sait bien que c'est le début de notre danse, que les premières mesures se lancent.
Elle sait bien que j'ai planté mes ongles dans ses cheveux, elle sait bien que je tire sa tête plus loin pour mieux la regarder dans les yeux. Elle sait bien que je suis vexée, elle sait bien que je l'attendais, que j'attendais la moindre raison pour libérer mes exaltations et les lui faire subir et chérir.
- Sers-moi comme tu servirais Papa.
Elle sait bien qu'au moment où ce mot maudit sort de ma bouche, un glas résonne. Elle sait bien que je parle toujours de lui sans jamais vraiment parler de lui, elle sait bien que depuis que je suis arrivée je me contente d'un sobre « mon père », elle sait bien que ce mot-là, venant de moi, n'a rien d'anodin, ni de mes habituelles expressions austères. Elle sait exactement ce que je veux dire, elle sait exactement quelle conversation je veux lancer, quelles actions je souhaite entamer. On va jouer au Papa et à la Maman, ma sœur, ma très chère sœur, ma tendre sœur. Et on va bien s'amuser, et j'y veillerai bien, et même très bien, parce que j'ai beaucoup d'insolences à te faire payer. Mais d'abord.
Minute.
Je fume.
Brûle, Brûle, Babylone brûle J'veux t'entendre crier, faut que tu hurles Que la chaleur fasse fondre les barreaux des cellules |
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